Le « scandale » des banques qui créent de l’argent ?

J’avais promis d’y revenir.

Résumé des épisodes précédents.

Dans un premier temps, j’écris dans Le scandale des banques qui « créent » de l’argent : « … cette proposition est fausse : les banques commerciales ne créent pas d’argent ». De nombreuses réactions. Je suis désarçonné, par l’argumentation d’Armand en particulier :

« Si, Mr Jorion, les banques créent de la monnaie. C’est la monnaie scripturale (« ce qui est écrit ») qui n’existe que sous forme électronique, celle qui figure sur les relevés de compte de ses clients ».

Je lis tout ce que mes commentateurs écrivent sur le sujet et c’est beaucoup plus précis, beaucoup plus documenté, beaucoup mieux argumenté que ce que j’avais lu jusque–là. Je me dis : « Paulot mon vieux, apparemment tu t’es planté. Sois honnête, dis–le ! ».

Donc, deuxième temps : je poste Le scandale des banques qui créent – effectivement – de l’argent qui est essentiellement une citation d’Armand. J’ajoute : « Ce que je vous propose de faire, c’est de mettre en exergue le commentaire d’Armand puisqu’il est très complet, et qu’on redémarre à partir de là : s’il se trompe, dites-le nous, c’est de cette manière que progresse le savoir ».

Or, dans les jours qui suivent, seul JLM contredit, partiellement, Armand et de nombreuses contributions continuent d’arriver. Mais plus je les lis, plus je pense : « Ils ne disent rien d’autre que ce que je disais au départ : oui, les banques ne doivent pas conserver en réserve tout l’argent que les consommateurs déposent sur leur compte – sinon elles ne seraient pas des banques mais simplement des coffre–forts – oui ça permet que l’argent circule très vite. Non, ça ne veut pas dire que de l’argent soit créé ex nihilo ».

J’en étais arrivé là dans mes réflexions et j’écrivais le 9 février :

« … je ne regrette rien : la qualité du débat me récompense du risque pris ! Autre chose, mon opinion n’est toujours pas faite s’il s’agit ou non d’un « scandale ». Mon troisième papier – il y en aura un troisième, c’est certain – s’appellera peut–être « Le ‘scandale’ des banques qui créent de l’argent » ».

Il y a deux jours, le 14 février, Armand (qui n’avait pas arrêté entre–temps de contribuer brillamment au débat) poste un nouveau commentaire :

« On peut tout aussi bien effectivement considérer que le système bancaire ne crée pas d’argent – P. Jorion va ainsi pouvoir ouvrir une nouvelle file 🙂 : il promet seulement de le faire via les relevés bancaires portant « monnaie scripturale », c’est-à-dire en s’engageant à remettre, à vue, cette quantité de monnaie fiduciaire centrale « ayant cours légal ». Et il s’agit d’une promesse mensongère et intenable du fait du système des réserves fractionnaires, comme expliqué plus haut. On remarquera que même avec un ratio de réserves à 100% les banques seraient toujours en état permanent de faillite potentielle. En effet, « empruntant court pour prêter long », elles se trouveraient toujours en risque de devoir faire face à court terme à des obligations qu’elles ne peuvent assurer qu’à plus long terme ».

« On peut tout aussi bien effectivement considérer que le système bancaire ne crée pas d’argent ». J’interprète cela comme voulant dire que – réflexion faite – Paulot avait raison dès le départ. La conséquence en est que s’il y a toujours « scandale », le scandale n’est plus dans le fait que les banques créeraient de l’argent – ce qu’elles ne font pas : le scandale est dans le fait que tout le monde ne peut pas se présenter le même jour aux guichets pour retirer ses sous. Pourquoi les banques ne peuvent–elles pas rembourser tout le monde le même jour ? Parce que l’argent qu’on dépose sur son compte, elles le prêtent – à l’exception des « réserves fractionnaires » : les 8 %, etc., que les autorités de tutelle les forcent de garder en caisse pour répondre à la demande des consommateurs qui viendraient effectivement réclamer leurs sous dans la journée. De plus, comme Armand le rappelle, même si les réserves des banques étaient de 98 %, du fait qu’elles prêtent les 2 % qui restent à long terme et empruntant elles–mêmes à court terme, elles ne pourraient de toute manière pas rembourser tout le monde si tout le monde réclamait ses sous dans la même journée.

Le « scandale », si scandale il y a, n’est donc pas même dans le fait que l’argent circule vite, donnant l’illusion que les banques en créent à partir du vide : il est tout simplement dans le fait que, comme je le disais, les banques ne se contentent pas d’être des coffres–fort. Ce qui veut dire, à mon sens, qu’il n’y a pas de scandale du tout : les banques jouent le rôle précis pour lequel elles ont été créées et qui est de servir d’intermédiaires entre ceux qui n’ont pas un besoin immédiat de liquidités et qui peuvent donc déposer celles dont ils disposent sur un compte à vue ou épargner sur le plus long terme et ceux qui savent très bien ce qu’ils pourraient faire de cet argent et vont l’emprunter à la banque.

J’en reviens alors à la première phrase du scandale des banques qui « créent » de l’argent : « Comme on le sait lorsque l’on lit ici mes billets, je ne me prive pas de critiquer la finance quand cela me semble justifié. Cela ne signifie pas pour autant que je souscrive à toute critique exprimée vis–à–vis du système financier ».

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10 réponses à “Le « scandale » des banques qui créent de l’argent ?”

  1. Avatar de Emir Abel
    Emir Abel

    Et j’en reviens donc à mon premier commentaire : il me semble que vous jouez sur les mots.
    Il est établi que les banques commerciales ne créent pas d’argent (monnaie fiduciaire), cette création restant le privilège des banques centrales mais elles créent de la monnaie scripturale. Il y a donc bien création ex-nihilo ce qui représente un énorme pouvoir que certains contestent notamment parce que, si je ne me trompe pas, la monnaie scripturale ainsi créée représente de l’ordre de 85 % du montant total de la masse monétaire.

    J’espère que les spécialistes confirmeront dans le principe ce qui précède sous peine de ruiner tous mes laborieux efforts de compréhension des « sciences  » économiques

  2. Avatar de JLM

    (Je rappelle que je ne connais pas grand-chose aux domaines abordés et que je ne communique sur ce blog que d’un point de vue « littéraire » et amusé)

    Ne serait-il pas utile d’avancer l’hypothèse que la crise systémique se double d’une crise épistémologique ?

    §

    Lors d’une période de « crise épistémologique », il devient possible de démontrer une chose et son contraire, comme ici à propos de la création de monnaie par les banques, (cf. lors de la « crise des irrationnels », 470 Av. J.-C., les Athéniens démontraient que la diagonale du carré était un nombre pair, mais il pouvaient démontrer également qu’elle était un nombre impair, scandale !). Dans ces périodes transitoires, un petit nombre de personnes remettent en question les bases d’un raisonnement qu’une grande majorité s’obstine à tenir au travers de catégories dépassées « par les faits ».

    L’intérêt qu’il y aurait, peut-être, à analyser la crise systémique comme étant également l’expression d’une crise épistémologique vient de ce que nous voyons, à peu près, comment nous pouvons nous en tirer sur le plan épistémologique. Comme disait Jean Toussaint Desanti à propos des crises en mathématique, « quand ça coince, faut s’arranger pour continuer à faire tourner » – (la vérité, c’est qu’il aurait écrit « l’exigence opératoire l’emporte » ). Bref, nous pouvons au moins savoir qu’il n’y a pas de « solution générale pour une sortie de crise », sauf qu’apparemment chaque crise réclame l’invention de moyens propres à rétablir l’équilibre perdu, et qu’il n’y a pas de marche arrière !

    Si nous devions partir à la recherche d’un nouvel équilibre, il faudrait alors tenir compte de la remarque de Chris sur ce blog, « l’économie dite virtuelle est une réalité », (en Tera $); ce qui va me donner des maux d’estomac ; et de plus, je ne sais pas bien ce qu’Attali mijote avec son « virtuel gratuit » ?

    §

    L’idée que je viens de lancer est-elle gratuite ? Plusieurs éléments permettent de penser que nous abordons une crise épistémologique relative à notre conception de la valeur de monnaie. Selon les propos échangés sur ce blog, il semble en effet possible de soutenir logiquement que les banques créent de la monnaie et aussi qu’elles n’en créent pas. Selon mon opinion, pour sortir de la contradiction, il me semble nous devrions abandonner la séparation entre valeurs fiduciaires et scripturales et revenir à la notion de monnaie comme dette, mais au sens anthropologique. Dans cette optique, la valeur est entièrement découplée de la chose et entièrement réglée par l’échange social : une banque permet la création de dettes, une quantité de monnaie est une « dette de l’état » qui doit pouvoir vous offrir la garantie de recevoir en échange de sa monnaie n’importe quelle marchandise à n’importe quel moment (sauf que justement l’état ne contrôle plus les banques, lesquelles se soucient plus de leur dernier Bouton que de ce que pense Nicolas). Le scandale s’il y a, c’est de créer des réseaux de dettes instables et que cette instabilité provient justement de ce qu’elles entretiennent dans le public l’idée illusoire d’une valeur référentielle dont l’actuelle ruée sur l’or est le symptôme du désir mimétique. A qui profite l’arret des flux? Après un basculement épistémologique, le désir mimértique pourrait se porter du la continuïté des flux.

    Un second élément à verser au dossier est que les experts du FMI et de BRI déclarent froidement ne plus rien comprendre (voir l’opinion de Christian Chavagneux directeur d’alternatives économiques – cf you tube, commentaire de La finance n’est pas seule dans la tourmente) Ces déclarations surprenantes peuvent s’interpréter sans en appeler à une crise épistémologique, car la complexité des montages pourrait être seule responsable de l’incompréhension et/ou par le fait que ces experts ne seraient tout simplement pas très futés…

    Par contre, il est intéressant de remarquer que la galaxie de sites contestataires dans la lignée d’Allais et d’un autre prix Nobel (Fisher) ont justement pour but de dénoncer par avance la catastrophe à laquelle les experts du FMI et de la BRI disent ne rien comprendre.

    http://assoc.pagespro-orange.fr/aded/
    http://www.monetaryreform.org/2007/index.htm
    http://tiki.societal.org/tiki-index.php?page=Cr%C3%A9ation+mon%C3%A9taire

    etc.

    Il semble y en avoir des tas de sites du genre…

    En outre, deux économistes marginaux développent également une théorie alternative de la monnaie entièrement débarrassée de toute « valeur référentielle » et entièrement tournée vers la continuité du flux. Je reprends ci dessous la même citation d’Aglietta que dans mes commentaires à : La métastase VIII – Les cartes de crédit ;

    “Cela ne fait que révéler l’essence d’une économie monétaire. C’est une économie dans laquelle la valeur est un pur processus social, sans aucun fondement naturel exogène, pas d’utilité prédéterminée, pas de ressources données. Le monde des biens virtuels et des actifs intangibles ne saurait être régulé par un indice conventionnel de prix. Tous les biens virtuels doivent être traités comme des actifs, c’est-à-dire des promesses incertaines de paiements futurs. La politique monétaire doit poursuivre un aggiornamento pour se détacher complètement de la croyance dans une économie « réelle » sous-jacente. Il n’y a d’autre ancrage que la confiance dans l’unité de compte que seule la politique monétaire peut conférer. Pour ce faire, elle devra surveiller les prix d’une très vaste gamme d’actifs. Elle devra avoir une conduite agressive en auscultant en permanence les foyers de tension disséminés dans les systèmes de paiements. En bref, elle devra affirmer que seule la continuité du flux de la monnaie est valeur et désamorcer les pertes de confiance qui déstabilisent ces flux. »

    LES DEFIS DE LA MONNAIE ELECTRONIQUE POUR LES BANQUES CENTRALES« , Michel Aglietta et Laurence Scialom

    La radicalité des prises de position d’Aglietta, c’est à dire LE RENONCEMENT A UNE ECONOMIE REELLE, et le retour en force d’une approche MAUSSIENNE ne peut pas être écarté d’un débat sur une constitution économique; mais vu de ce blog, les chauves-souris, me donnent l’impression de dormir la tête en bas.

    Pardon d’avoir été long, et dispersé.

    A+

  3. Avatar de guillaume
    guillaume

    Bon, puisque tout le monde semble d’accord… Du coup ça la fout super mal pour M. Allais, pour un Nobel d’économie il est passé complètement à coté !!!

    « Par essence, la création monétaire ex nihilo que pratiquent les banques est semblable, je n’hésite pas à le dire pour que les gens comprennent bien ce qui est en jeu ici, à la fabrication de monnaie par des faux-monnayeurs ».

    C’est donc faux et ça manque du coup singulièrement de nuance. Ici le débat se pose, lui n’a même pas vu le débat…

    Il explique dans son article publié dans Le Figaro des 12, 19 et 26 octobre 1998 :

    « Fondamentalement, le mécanisme du crédit aboutit à une création de moyens de paiement ex nihilo, car le détenteur d’un dépôt auprès d’une banque le considère comme une encaisse disponible, alors que, dans le même temps, la banque a prêté la plus grande partie de ce dépôt qui, redéposée ou non dans une banque, est considérée comme une encaisse disponible par son récipiendaire. À chaque opération de crédit il y a ainsi duplication monétaire. Au total, le mécanisme du crédit aboutit à une création de monnaie ex nihilo par de simples jeux d’écriture. »

    Et il précise en note:

    « Ce n’est qu’à partir de la publication en 1911 de l’ouvrage fondamental d’Irving Fisher, The purshasing power of money, qu’il a été pleinement reconnu que le mécanisme du crédit aboutit à une création de monnaie. »

    Vu que cet aspect de la création monétaire est centrale dans son analyse… on peut se demander ce que vaut son travail…

    On va lui permettre une sortie honorable en se disant que les crédits (généralement scripturaux), n’étant faisables que par les banques commerciales, sont un bon business ! Vu que c’est indispensable pour la vie contemporaine, qu’elles ont le monopôle et que les interêts touchés font qu’en fait, effectivement, elles ne créent pas d’argent, elles le louent.

    Il pensait peut être à ça d’ailleurs en évoquant l’aspect malhonnête. Le quasi monopole de la location de l’argent aux mains de quelques banques internationales. Une forme de droit de cuissage en somme…

    Pour ceux qui le souhaitent, une page Web pour en savoir plus sur la position erronée -donc- de M. Allais:

    Sacré Maurice, il aura fait couler de l’encre avec ses bêtises…

    Non, sérieusement, vos analyses ne me font pas passer l’idée que les banques ont un pouvoir qui est trop unilatéral, qu’elles se sont approprié un rôle (technique et décisionnel) qui n’a pas à être sous leur contrôle.

  4. Avatar de Paul Jorion

    A JLM :

    Petite précision, à propos de l’« exigence opératoire » chez Desanti et parce que j’aime bien Meyerson : je suis presque sûr que c’est lui qui a introduit la notion. J’écris dans mon Le prix comme proportion chez Aristote (La Revue du MAUSS, n.s., 15-16, 1992 : 100-110) :

    « Emile Meyerson voyait d’ailleurs dans cette ignorance délibérée de l’irrationnel, l’un des principes selon lesquels la science assure son progrès. Il écrivait dans De l’explication dans les sciences que « … chaque fois qu’il y a un irrationnel, on le reconnaît sans doute, si l’on veut s’en donner la peine, en étudiant le chapitre correspondant de la science ; on le reconnaît notamment aux efforts passionnés que l’on a faits ou que l’on fait encore pour le réduire, à la multiplicité des théories qui ont surgi autour de lui, à l’embarras qu’éprouvent les manuels quand il s’agit des phénomènes qui y ont trait (…) Mais cela n’empêche que, dans le chapitre suivant de la science, cet obstacle, l’obstacle du chapitre précédent, sera considéré en quelque sorte comme non-existant, la science de ce chapitre sera traitée, par implication, comme entièrement rationnelle, puisqu’elle sert à la rationalisation du chapitre suivant » (Emile Meyerson, De l’explication dans les sciences, Paris : Payot 1927, pp. 368-369).

  5. Avatar de guillaume
    guillaume

    Dani dit :
    9 février 2008 à 21:23 pm
    « – Au fond, la somme totale à rembourser (principal + intérêts) est supérieure à la somme émise, à un moment donné. La monnaie (fiduciaire et scripturale) permettant de rembourser l’ensemble des dettes n’existe donc pas (ou alors, quelque chose m’échappe encore). La somme correspondant aux intérêts n’est pas créée au moment de la création des dettes corollaires de l’émission monétaire scripturale.
    – Si je poursuis le raisonnement, seule la croissance économique, permettant un enrichissement permettant lui-même la
    souscription de nouvelles dettes, et donc la création de monnaie supplémentaire permet au fur et à mesure de rembourser les dettes en cours. J’ai l’impression de voir un système qui tient sur un mouvement infini : il faut de nouvelles dettes pour rembourser les anciennes(…) »

    commentaire:
    Dans ce jeu de dupes qui est gagnant ?
    Celui qui fait les prêts et qui perçoit les intérêts !
    La finance prend ainsi le pas sur l’économie, ce qui s’accompagne d’une captation de la « valeur du travail » par la « valeur du capital ».
    Faut pas être étonné que 1% de la population mondiale se partage 40% des richesses de la planète pendant que 50% de la population se partage 1% des richesses…(selon El Baradai)

    commentaire:
    Si on ajoute à cela :

    Armand dit :
    9 février 2008 à 09:06 am
    « Concernant la FED, une chose remarquable pour des juristes : elle a été créée par la loi, possède des actionnaires privés, émet une monnaie (centrale) qui, au début, portait l’inscription “convertible contre une once d’or”. Ayant émis plus de billets que n’ayant d’or en stock, elle a évité toute défaillance en retirant cette mention. Les Américains, et le monde, se retrouvent dans la situation juridique suivante : une monnaie ayant cours légal, mais non convertible en or, l’actuel US dollar, mais … inconstitutionnelle ! En effet la constitution US dispose que seuls ont cours légal le gold-dollar et le silver-dollar (convertibles à vue contre une once de métal fin). La Cour Suprême n’a jamais eu à se prononcer sur ce problème (ou elle a évité d’avoir à se prononcer). »

    commentaire:
    Le dollar US est inconstitutionnel et il faut ajouter à cela le fait que la constitution indique que le congrès à le pouvoir d’émission or la Fed n’est pas réellement un organisme d’état.
    Donc on a une monnaie de référence mondiale qui viole en deux points la constitution américaine dans le dos du public (même averti) et un système qui n’a d’issue que par le crédit (aux particuliers, aux entreprises et même aux états) que seuls les banques commerciales peuvent délivrer en touchant des intérêts. Certaines de ces banques étant actionnaires de la réserve fédérale, les connivences d’intérêts sont frappantes !!!

    Alors je repense à Allais et je me dis que l’on peut légitimement parler d’une arnaque… La majorité des Hommes est esclave d’une fuite en avant par le crédit qui enrichit une minorité de ses semblables et cette action est consacré par nos sociétés… Quelqu’un perçoit-il ce qui me trouble ?

    Amicalement

  6. […] « Le « scandale » des banques qui créent de l’argent ? 17 02 2008 […]

  7. Avatar de Armand

    Merci pour le « brillamment » Paulot ! mais ta conclusion me semble toujours erronée !

    Quand j’écrivais « On peut tout aussi bien effectivement considérer que le système bancaire ne crée pas d’argent … », ce n’était pas « réflexion faite » par moi mais par d’autres 🙂 : je pensais que les explications précédentes sur le distingo fondamental entre monnaie fiduciaire (les billets dits « de banque » alors qu’on devrait dire « les billets imprimés par la banque centrale », qui, SEULS, ont cours légal) et monnaie scripturale était acquis, comme l’indique le smiley et le reste de mon commentaire.

    La lecture était supposée être : « On peut tout aussi bien effectivement considérer que le système bancaire ne crée pas d’argent SOUS FORME FIDUCIAIRE mais promet seulement de le faire via ses relevés de MONNAIE SCRIPTURALE (les promesses mensongères et intenables) »

    Lorsque tu écris « Parce que l’argent qu’on dépose sur son compte, elles le prêtent – à l’exception des « réserves fractionnaires » : les 8 %, etc., que les autorités de tutelle les forcent de garder en caisse pour répondre à la demande des consommateurs qui viendraient effectivement réclamer leurs sous dans la journée » tu confonds ces deux types de monnaie qui n’ont vraiment pas le même pouvoir légal. Les dépôts des clients sont DEJA pour l’essentiel constitués de monnaie bancaire scripturale (créée puis détruite via les prêts et d’autres mécanismes comme les changes de monnaies étrangères) qui s’échange quotidiennement notamment lors des remises de chèques, transactions par cartes, prélèvements et virements, mais SAUF remises en « espèces sonnantes et trébuchantes ».

    Ainsi, les banques ne prêtent pas 92% de la monnaie centrale –les billets déposés chez elles par leurs clients– en n’en conservant que 8% non prêtée pour faire face « statistiquement » aux retraits en espèces aux guichets.

    Elles prêtent en utilisant 100% de leur monnaie centrale (dépôts des clients + réserves à la BC) comme réserves obligatoires ; c’est-à-dire que ces 100% de « vraie » monnaie ayant cours légal ne représentent que 8% de la « fausse » monnaie bancaire scripturale qu’elles peuvent créer, via ce facteur multiplicatif, en accordant des prêts.

    Ta vision, celle que je signalais, est celle du banquier (et de presque tous ses clients) qui lisent une inscription 100 € sur un relevé bancaire. De ce côté de la lorgnette on ne crée et détruit apparamment de monnaie qu’à la marge (les nouveaux prêts remplaçant ou non ceux à échéance), mais on a un facteur réductif : il n’existe que 8% de billets dans les coffres alors qu’on a (les banques) l’obligation légale d’en fournir ces 100%.

    Les banques promettent ainsi, mensongèrement, via les relevés bancaires, de fournir de la monnaie centrale « par retrait à vue au guichet » alors qu’elles n’en ont (et qu’il n’en existe) que 8%. Si suffisamment de clients se présentaient pour retirer leur fonds, elles ne pourraient pas tenir leur promesse et seraient en faillite.

    Elles créent pas et ne peuvent pas créer de la « vraie » monnaie centrale, les billets ayant cours légal (c’est le privilège de la banque centrale) … juste promettre de le faire.

    C’est la différence avec les véritables faux-monnayeurs : eux impriment réellement de la monnaie centrale (les billets contrefaits).

    Rappelons que ces 8% sont ici pour l’exemple, ce taux de réserves dépend de la nature des dépôts.

    Pour illuster cela, un petit tour à la BCE, d’abord ici, où l’on lira en 2.3-2 qu’il y avait en 12/07 pour 627 Md€ de billets ayant cours légal et toujours en 12/07, en 2.3-1, que M1 (billets + livrets et dépôts à vue) se montait à 3 826 Md€, soit un coefficient multiplicateur de (3 826 – 627) / 627 = 5. Si tous les clients vident leur livrets (A, LEP, PEL, …) cela ne fera pas baisser leur cours (à la différence de ce qui se produirait avec des actions p.ex.) : il faudrait vraiment avoir autant de billets en circulation.

    Vous pouvez élargir à M2 (Comptes et dépôts à moins de deux ans et autres dépôts plus longs mais exigibles sous forme fiduciaire avec un préavis de moins de trois mois).

    La lecture de ceci est aussi très instructive concernant les taux de réserve obligatoire selon la nature du dépôt.

    En résumé, il faut avoir à l’esprit que « monnaie » ne signifie rien sans l’attribut « centrale, fiduciaire, espèces, … » ou « bancaire, relevés, … ». Le système a intérêt à entretenir la confusion.

    Je n’ai jamais écrit c’était un scandale, juste répondu dans un fil qui portait ce titre. Les banques respectent évidemment la loi. Du coté de la banque centrale le raisonnement est également qu’à un instant donné la masse monétaire la plus puissante (immédiatement utilisable) de type M1 doit être répartie sous les formes désirées par les agents (billets et comptes électronique). Passer de l’une à l’autre demande du temps et engendre des coûts (et des arbres !). Elle raisonne en instruments de paiement et en comportements statistiques.

    Le problème fondamental est la loi qui ne donne cours légal qu’à la monnaie centrale tout en permettant aux banques de la multiplier avec une limite imposée en contradiction avec leur autre obligation de faire face aux retraits en espèces sur la totalité.

    Et pour rejoindre ton autre fil sur une constitution économique, j’avais répondu qu’il faut, à mon sens, d’abord établir une monnaie saine et honnête (le sol stable), ensuite bâtir un système bancaire solide (les fondations en béton) puis un système économique (la maison), dont la finance, très amaigrie ne serait qu’une composante (la charpente). Pour le moment le système monétaire / bancaire / financier n’est, pour moi, qu’une escroquerie pyramidale, comme je l’ai écrit. D’ailleurs le poids de la finance est passé de 5% à 25% dans l’économie US (DowJones). Des « money makers », dont la traduction littérale de « faiseurs d’argent » s’impose, ne créent pas de richesse, juste une illusion … une promesse mensongère et intenable.

    Une anecdote personnelle : je me trouvais en Argentine au plus fort de la crise du peso en 2001. Après le traditionnel « tout va très bien madame la marquise » (sur un air de tango, évidemment), les comptes furent bloqués (ainsi que les distributeurs de monnaie centrale) et le contrôle des changes imposé après que les plus inquiets (vision gouvernementale) et/ou les plus prudents (vision lucide) aient retiré leurs pesos, provoquant l’effondrement des banques, et commencé a les changer en US$, provoquant l’effondrement du peso.

    A ce moment le peuple s’est rendu compte, trop tard, combien ce distingo avait toute son importance.

    Un commerçant dont le compte était bloqué (retraits limités aux besoins quotidiens) avait tendance à refuser chèques ou carte bancaire et tout instrument d’échange de monnaie bancaire puisqu’il savait qu’il ne pourrait pas profiter de son argent qui se dévaluait à grande vitesse (refus potentiel par les autres commerçants) ni le protéger (contrôle des changes) ; celui qui avait du peso en billets avait le pouvoir juridique de payer, le commerçant ne pouvant pas refuser cet instrument ayant cours légal et sachant qu’il pourrait l’utiliser à son tour pour acheter un bien durable avant que ce peso ne se dévalue.

    Ainsi une monnaie qui fondait à vue d’oeil (de mémoire le cours était descendu de 3 à l’aéroport à 3.5 une heure plus tard à mon arrivée à Buenos Aires) conservait une puissance alors que la monnaie bancaire ne valait plus que la promesse du banquier, c’est-à-dire plus grand’chose.

    J’ajoute que la plupart des gens préférait faire la queue toute une matinée pour retirer au guichet les pesos quotidiens ayant cours légal, et perdre ainsi le salaire correspondant à leur absence plutôt que de prendre le risque de se voir refuser un paiement par instrument bancaire. On imagine le coût économique.

    Pour conclure cette anecdote, ce peso qui ne valait pas beaucoup hors l’Argentine était thésaurisé par les Argentins du fait de son pouvoir légal. Les commerçants essayant de rendre la monnaie en … monnaie bancaire, ce que refusait le client. Cela bloquait davantage encore le système. Les provinces en vinrent à imprimer elles-mêmes des « patacones », leur propre monnaie illégale pour servir à rendre la monnaie. Pour qu’elle soit acceptée, cette monnaie provinciale ayant cours « presque » légal dans la province portait intérêt.

  8. Avatar de Fabien
    Fabien

    Cette confusion entre monnaie fiduciaire et monnaie scripturale est dommageable.

    Il est bon pour les forêt équatoriale que l’on ne se mette pas à imprimer sous forme de billet de banque tout l’argent en circulation. En effet en 2006 par exemple, il y avait 7 387 milliards d’euro en circulation (agrégat M3 – bulletin N°153 de la Banque de France, septembre 2006) dont seulement 552 milliards d’euro de pièces et de billets (soit 7,47%).

    Du coup, c’est tout à fait logique que tout le monde ne puisse pas retirer ses économies au même moment sous forme de monnaie fiduciaire : la banque n’a jamais eu cet argent. D’ailleurs même ses clients ne l’ont jamais eu. Ils ont effectué le gros de leurs dépôts sous forme de monnaie scripturale.

    Le côté excessif de certains c’est de vouloir faire croire que les banques créent de la monnaie scripturale à volonté sans aucune limite, non. Disons que chaque banque peut créer, sous forme de crédit, jusqu’à 98% de la monnaie déposée sur les comptes de ses clients. C’est quand même presque un dédoublement de l’argent.

    Le capital prêté a bien été créé à partir de rien, puisqu’aucune monnaie n’a circulé. Il ne s’agit pas de l’argent de Pierre, Paul et Jacques qu’on a prêté à Robert puisque les trois compères peuvent toujours vider leur compte à l’aide de leur carte de crédit, de leur chéquier ou d’une évasion de capitaux (ça s’appelle virement quand la destination est connue).

    Le capital emprunté par Robert devra être remboursé, le plus souvent il faut le rappeler, par son travail (l’économie réelle qui crée les vrais richesses, palpables), et bien que cet argent ait surgi de la sphère financière. Le-dit capital une fois remboursé, sera annihilé. Il disparaîtra de l’économie. Cela renforce le problème soulevé par Guillaume, à savoir qu’il n’y a jamais eu, et qu’il n’y aura jamais assez de monnaie (sous quelque forme que ce soit) pour rembourser toutes les dettes contractées.

    Le scandale selon moi c’est que la seule monnaie véritablement créé, les intérêts, va toujours dans la poche du banquier (qui en reverse quand même une partie à ses épargnants). Il me semble inadmissible que le pouvoir de création monétaire soit détenu par des privés, je trouve cela incroyable dans une société qui se dit démocratique.

    Accessoirement, si c’était un établissement public qui créait la monnaie, l’Etat ne pourrait jamais être endetté (il ne se verserait pas à lui-même des intérêts). De braves économistes ont soutenu que l’Etat ne savait pas user sagement du pouvoir de créer la monnaie et qu’il était responsable de la crise de 74. Tout le monde trouva cette réflexion lumineuse et s’empressa de confier le pouvoir monétaire aux privés, nonobstant les avertissements de l’histoire. Je trouve ça complètement fou.

    Enfin, tout ça pour dire qu’il y a belle et bien arnaque pour moi et que j’préfère allais cacher mes billets sous le matelas de mon lit.

  9. Avatar de Dani
    Dani

    Et hop…on est presque reparti avec le débat initial….. non ?

    Manifestement, il s’agit d’être tout d’abord bien d’accord sur le vocabulaire utilisé. Ici, je relève que ce sont les mots « création » et « monnaie » sur lesquels nous achoppons…

    Création : Ici, je vais me référer tout simplement au Petit Robert. La création est « l’action de donner l’existence, de tirer du néant » ou « l’action de faire, d’organiser une chose qui n’existait pas encore ». Donc, si on parle de création monétaire par les banques commerciales, il faudra que la masse monétaire soit après leur action plus importante qu’avant, pour qu’il y ait à proprement parler « création »-

    Monnaie : Je me réfère ici à un point qui fait l’unanimité des manuels d’économie. La monnaie est un moyen de paiement qui possède trois fonctions : intermédiaire facilitant les échanges, étalon de mesure de la valeur, réserve de valeur. L’euro, le franc suisse ou le dollar sont considérées comme monnaies, car elles réunissent ces trois fonctions.

    Maintenant, je peux aussi noter que la monnaie fiduciaire (créée par la banque centrale) ET la monnaie scripturale (créée par les banques commerciales – cf. la définition retenue de création ci-dessus) ont toutes deux les vertus énoncées dans la définition retenue de la monnaie. La monnaie scripturale qui se trouve sur mon compte en banque me permet d’effectuer des achats, me permet de mesurer la valeur des objets de ma convoitise et peut encore être conservée sur ce compte comme réserve de richesse. La monnaie scripturale EST donc de la monnaie, si je reconnais la définition habituelle de la monnaie.

    Du coup, la distinction entre monnaie fiduciaire et monnaie scripturale n’a de sens que pour comprendre et maîtriser le processus de création monétaire. Au niveau de la vie économique, il n’y a pas de différence, la valeur d’un dollar scriptural est la même que la valeur d’un dollar fiduciaire.

    On peut bien sûr décréter que la monnaie scripturale n’est pas de la monnaie, mais il s’agit alors à mon sens de « rebaptisation ». Un peut comme si, pour maintenir l’idée que tous les cygnes sont blancs, on décidait que les cygnes noirs sont des pygnes, et non des cygnes.

    La définition usuelle de la monnaie ne dit pas si la monnaie doit être basée sur un bien tangible comme l’or ou si elle peut être considérée comme une pure institution, et qu’alors la masse en circulation devient une décision liée au dynamisme de l’économie ou à un autre élément de référence. La monnaie peut prendre toutes sortes de formes, elle n’en reste pas moins de la monnaie là aussi.

    Je remarque d’ailleurs au passage que les banques centrales, dans l’évaluation et la préparation de leurs décisions de politique monétaire, s’intéressent au lien entre croissance du PIB et croissance de la masse monétaire M3, reconnaissant donc clairement que la monnaie scripturale est bien de la monnaie au sens propre du terme. Je fais remarquer au passage à « Fabien » que le multiplicateur monétaire, entre la masse initiale de monnaie fiduciaire et la masse monétaire totale est de 10 fois si le coefficient de réserve est de 10 % et de 20 fois s’il est de 5 %. On est donc très largement au-dessus du dédoublement…

    On peut donc gloser longtemps sur le fait de savoir si les banques émettent des promesses, de la monnaie, une illusion de monnaie ou que sais-je encore. Dans la réalité, les banques commerciales émettent des « moyens de paiement » tout à fait réels qui réunissent tous les éléments d’une définition classique de la monnaie. Les banques commerciales CREENT effectivement de la monnaie !!!

  10. Avatar de Emir Abel
    Emir Abel

    Merci à Dani pour ses explications claires et sa conclusion sans ambigüité.

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