Un candidat écologiste aux élections présidentielles américaines

Ralph Nader a posé ce matin sa candidature à la présidence des États–Unis. Le public qui s’inquiétait déjà des 71 ans de McCain ne saura certainement pas trop quoi dire d’un candidat qui fêtera ses 74 ans dans trois jours. La question n’est cependant pas là : une candidature Nader n’est pas une grande nouveauté puisqu’il s’est présenté sans succès à la présidence en 1992, 1996, 2000 et 2004 : il n’avait alors suscité ni lame de fond, ni même grand enthousiasme, obtenant 2,7 % du vote en 2000 en tant que représentant des verts, et seulement 0,4 % en 2004, lorsqu’il se présenta en candidat indépendant.

Nader a justifié sa candidature en affirmant que les deux candidats démocrates – il n’a pas jugé nécessaire de mentionner les candidats républicains pour qui la chose va de soi – sont trop proches du milieu des affaires : « Il s’agit de reprendre le pouvoir à quelques–uns pour le rendre à la multitude », a–t–il déclaré. Il avait autrefois caractérisé l’Amérique comme « territoire occupé par les entreprises ». Il n’acceptera, dit–il, comme contributions à sa campagne que celles d’individus.

Nader est l’inventeur du droit des consommateurs : sa campagne en faveur de la sécurité automobile, Unsafe at any speed, « Peu sûre, quelle que soit sa vitesse », fut la première du genre en 1965. General Motor avait alors mis des détectives à ses trousses et payé des prostituées pour lui faire des avances. Avec le dédommagement qu’il obtint devant les tribunaux pour « invasion de la vie privée », il lança son mouvement. Il fut également écologiste de la première heure, s’en prenant d’abord à la question de la qualité de l’eau pour lancer ensuite une offensive contre le tout–nucléaire. Il attira aussi l’attention sur le peu de protection dont bénéficiaient les « whistleblowers » : les salariés qui dénonçaient les agressions de leur entreprise contre l’environnement.

Sur le plan politique, Nader s’est toujours déclaré partisan de la démocratie directe et avait lancé en 2005 un appel en faveur de l’« impeachment », la destitution, du président Bush pour avoir délibérément utilisé des informations falsifiées afin de justifier l’invasion de l’Irak.

A l’annonce de sa candidature, Mike Huckabee, l’adversaire de John McCain pour la nomination au sein du parti républicain, s’est réjoui, affirmant que Nader « vole » toujours davantage de voix aux démocrates qu’aux républicains. Nader est en effet honni de ceux–ci pour avoir récolté 97.000 votes en Floride en 2000, privant Al Gore dans cet état des voix dont dépendait l’issue de l’élection présidentielle. Ses partisans s’en tiennent à l’argument que lui seul constituait une authentique alternative. Il a publié de son côté les chiffres suivants : « En 2000, 25 % de mes électeurs en Floride auraient voté Bush, 38 % auraient voté Gore. Quant aux autres, ils se seraient abstenus ». Ce que Nader ne dit pas, c’est que, né d’une famille d’origine libanaise, il a toujours bénéficié également du vote « ethnique » des Américains d’origine arabe et persane.

Partager :

3 réponses à “Un candidat écologiste aux élections présidentielles américaines”

  1. Avatar de guillaume
    guillaume

    Un candidat indépendant ?

    Il semble que cette élection de 2008 puisse être favorable à un candidat indépendant, dans cette optique avez-vous un avis particulier sur la possible candidature de Bloomberg ?

    – il se présente comme au dessus du bipartisme us (démocrate puis républicain pour les élections de NY)
    – il est en mesure de financer sa campagne par ses propres fonds (1 milliard)
    – le contexte économique est en sa faveur, il serait le candidat le plus crédible en la matière de par ses activités
    – les médias pourraient le suivre (il me semble qu’il est proche de Murdoch)
    – il est en plein dans la tendance « Al Gore »
    … une liste indépendante avec Arnold « gouvernator » avec qui il travaille et qui lui apporterait le soutien d’une partie du clan Kennedy ?

    Et quoi qu’il en dise, il y pense…

  2. Avatar de Paul Jorion

    J’ai évoqué en décembre la candidature éventuelle de Bloomberg dans Mike Bloomberg fourbit ses armes. Il aurait eu davantage de chances – et de raison de se présenter – si les candidats qui avaient émergé du côté démocrate et républicain avaient été peu expérimentés, par exemple lors d’un duel Edwards – Huckabee.

    Quant à Arnold Schwarzenegger, il aurait besoin d’une réforme constitutionnelle pour pouvoir se présenter à l’élection présidentielle : dans l’état actuel des choses, un « Américain de première génération », comme on dit ici pour un immigrant naturalisé, n’a pas le droit de poser sa candidature. De toute manière, mariage ou pas, le clan Kennedy ne soutiendrait jamais un candidat républicain. Le gouverneur de la Californie a apporté son soutien à McCain mais son épouse, Maria Shriver, nièce de John Kennedy, a appelé le 4 février à voter pour Obama.

  3. Avatar de guillaume
    guillaume

    Je pensais plus à une liste d’union des deux, avec Arnold Schwarzenegger en position de vice président, ouvrant le débat sur la constitutionnalité de la chose (autant de pub gratuite pour le duo).

    Il semble que Obama soit en bonne position pour gagner les primaires démocrate et parmi ses soutiens certains pourraient le lâcher au profit du duo évoqué (M. Shriver, R. Murdoch et les médias qui vont avec).

    Il est vrai que les candidats qui semblent ressortir des primaires sont assez expérimentés (surtout MCCain) mais il reste deux questions :
    – McCain = 71 ans, belliciste (plus que Bush), candidature « morale » mais déja entachée par une histoire de moeurs
    – Obama = trés jeune et moins d’expérience (à une période où ça peut manquer) des liens indirects avec la mafia (Rezko et Nadhami Auchi)

    – le facteur économique : si la crise s’amplifie que proposeront ces deux là aux américains ? Je pense que Bloomberg peut non seulement encore se présenter, mais qu’il peut faire une entrée par la grande porte et apparaitre comme le joker du moment.

Contact

Contactez Paul Jorion

Commentaires récents

Articles récents

Catégories

Archives

Tags

Allemagne Aristote bancor BCE Bourse Brexit capitalisme centrale nucléaire de Fukushima ChatGPT Chine Confinement Coronavirus Covid-19 dette dette publique Donald Trump Emmanuel Macron Espagne Etats-Unis Europe extinction du genre humain FMI France Grèce intelligence artificielle interdiction des paris sur les fluctuations de prix Italie Japon John Maynard Keynes Karl Marx pandémie Portugal psychanalyse robotisation Royaume-Uni Russie réchauffement climatique Réfugiés spéculation Thomas Piketty Ukraine ultralibéralisme Vladimir Poutine zone euro « Le dernier qui s'en va éteint la lumière »

Meta