TOUTES LES LIGNES DE FRACTURE POSSIBLES SONT À VIF !

Dans Misère de la pensée économique (2012) je propose ce qui me semble être l’explication du Grand Tournant dans lequel nous sommes engagés en tant qu’espèce.

J’y évoque le comportement colonisateur et opportuniste de notre espèce, la complexité qu’a introduite la machine, et tout particulièrement l’ordinateur, et la disparition du travail qui accompagne la substitution de l’ordinateur à nous dans nos tâches, enfin, la machine à concentrer la richesse qui caractérise nos systèmes économiques aussi longtemps qu’on s’en souvienne.

Pour être acceptée, une explication comme la mienne exige – il ne faut pas s’en cacher – une familiarité avec les modèles causaux complexes, ce qui nécessite pour pouvoir y souscrire, un niveau d’éducation élevé.

Une explication plausible de la crise actuelle, dont l’enjeu est ni plus ni moins la survie de l’espèce, apparaîtra « abstraite » à la plupart de nos contemporains. Elle est en concurrence « sur le terrain » avec les explications « concrètes » du type : « C’est sûrement la faute des X parce qu’ils n’ont pas la bonne couleur de peau (la couleur « normale » étant la mienne), parce qu’ils n’ont pas la bonne religion (la religion « normale » étant la mienne), etc.

Un tel raisonnement (le mot est trop fort, je le sais) peut se décliner à l’infini : musulmans vs. chrétiens, juifs vs. musulmans, chrétiens les uns contre les autres (question [provisoirement ?] résolue par la victoire de l’écœurement en la matière), musulmans les uns contre les autres : sunnites vs. chiites, slaves vs. latins, variétés de slaves entre eux, etc.

Une approche des problèmes en vue de les résoudre exige qu’on s’y attaque en tenant compte des mécanismes causaux véritablement à l’œuvre. Nos dirigeants pourraient faire en sorte que ce soit le cas. Ils ne le font pas parce que toute leur attention et tous leurs efforts sont concentrés sur la défense à court terme de quelques misérables privilèges.

En attendant – et la situation s’aggrave de jour en jour – toutes les lignes de fracture possibles, dessinées par des siècles, voire des millénaires, de rancœurs fondées le plus souvent sur des malentendus dérisoires, sont à vif.

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