Quatre mois pour fonder la démocratie de l’euro avec la Grèce, par Pierre Sarton du Jonchay

Billet invité. P.J. : un point Godwin, Pierre, mais vous ne faites que marcher dans les pas de Tsipras et de Varoufakis 😉

Après la prolongation de la Grèce dans l’euro, le choix de la démocratie s’offre à tous les Européens. L’organisation monétaire de l’Europe est l’armature de son régime du vivre ensemble multinational. La zone euro est actuellement construite comme un empire sur le modèle du Saint Empire Romain Germanique : des peuples, des princes, des clergés, des aristocrates, des bourgeois, des marchands juxtaposés qui s’affrontent froidement par leurs dirigeants. Les politiques et les financiers forment une caste supra-nationale exclusivement occupée à une compétition de pouvoir hors de tout projet de transformation de la réalité universelle des sociétés rassemblées. L’euro est une unité de compte de la richesse formelle ; du capital monétisé cumulable sur des comptes bancaires statistiques abstraits de la réalité humaine. Les individus qui contrôlent directement ou indirectement le plus de capital comptable formellement liquide sont réputés maître du jeu jusqu’à recomposition des nouvelles coalitions féodales qui viendront les détrôner.

L’euro n’est pas indexé sur la réalité économique des gens mais sur le discours des techniciens de la politique, de la finance et de la communication juridico-mercato-scientiste. Pour que l’euro soit une unité de compte des échanges réels entre Européens solidaires d’une loi commune, il faut et il suffit qu’il soit financièrement adossé aux nations d’Europe. Lesquelles soient monétairement stratifiables du local au confédéral en passant par toute la pluralité des objectifs matériels du vivre ensemble ensemble, ensemble d’ensembles, sous une nationalité vraiment commune. Pour que l’euro soit immunisé contre la spéculation des marchands prévaricateurs et concussionnaires, ils faut toutes les figures de l’État de droit démocratique entre la réalité et la comptabilité par les prix ; toutes les figures du local régional aux Etats-nations par la Confédération des démocraties de l’euro.

Évidemment, il est difficile de demander aux Allemands de penser hors du modèle Saint Empire Romain Germanique qui contrôle la Grèce par empires emboités. La confrontation des modèles se joue en France entre les héritiers libéraux et universalistes de la Révolution Française. La Révolution a été l’expression de l’échec dans l’ordre de l’économie du bien commun jusqu’à ce que Napoléon stabilise le crédit du franc par les institutions de … l’empire. Dès que l’Empereur est tombé, la bourgeoisie d’affaire libérale a repris le pouvoir par… la restauration de la royauté. Et la libre exploitation du peuple par la bourgeoisie aristocratique d’affaire a été instaurée par le Congrès des empires européens à Vienne. La République Française n’a pu s’imposer que dans la défaite de Napoléon III par les armées de l’Empire germano-prussien. La même République Française n’a vaincu la barbarie germano-nazie qu’avec l’empire britannique financé par l’empire du dollar.

Parce que la monnaie unique européenne a été fondée pour contenir la réémergence de l’empire allemand après la chute de l’empire russo-communiste, parce que l’espace monétaire international est occupé par l’empire mondial du dollar et de la finance anglo-saxonne, l’euro a été conçu comme monnaie d’empire hors des institutions de la démocratie. Les libéraux français de droite et de gauche en ont profité pour s’installer à Bruxelles afin de contourner les institutions nationales de la démocratie française par la direction des banques et du système monétaire européen hors sol. L’empire de la finance libérale tient le monde… en apparence. En fait l’empire du discours libertarien sur la réalité s’est auto-subverti dans l’explosion des subprimes qui a suivi la chute du communisme. Par la production illimitée de liquidité centrale fictionnelle, la finance et la monnaie sont depuis 2008 déconnectées de la réalité politique sensible des gens.

Comme Hitler dans son bunker, les gouvernements des empires déplacent des armées virtuelles sur leurs cartes stratégiques pendant que les militaires réels occupent le terrain. Le gouvernement Syriza est entré dans le bunker financier de l’Eurogroupe en signalant que le peuple grec et les nations de l’euro attendent la reddition des stratèges financiers. Dans la réalité, les empires nationalistes de la finance libérale ont perdu la guerre depuis 2008. La guerre continue juste pour l’honneur des aristocrates bourgeois libéraux déchus qui ne savent pas penser de l’économie du pouvoir des peuples nationaux dans la réalité des gens. En fait, il n’y a pas de monnaie réelle hors des prix offerts et demandés dans la réalité des personnes qui pensent avec et pour leurs concitoyens dans les limites représentables de la solidarité financière.

Un cerveau d’impérialiste libéral ne conçoit pas que sa volonté propre n’existe dans la réalité formée, c’est à dire financée, qu’à la condition de la solidarité interpersonnelle dans l’économie des biens. Un bien n’est économiquement un bien que dans une réalité universalisable pour soi autant que pour les autres. Un prix ne peut être crédité à personne en réalité, si l’objet qui le porte n’est pas reconnaissable par tous les citoyens d’une même nation. L’euro actuel de la BCE n’est pas liquide en réalité échangeable commune s’il n’existe aucun Etat fédératif pour délibérer et interpréter des droits communs dans la réalité des citoyens d’Europe. La liberté équitable des prix, l’équilibre économique, n’est pas réelle dans la confrontation brutale des quantités abstraites d’intermédiation financière ; mais dans la mise en équivalence politique des réalités sous la proclamation formelle des solidarités effectives de droits.

Avoir une monnaie commune et unique, c’est nécessairement partager un même État de droit contenant des institutions de gouvernement des réalités mises en commun dans un corps fédératif de lois délibérables. Pour que chaque citoyen conserve sa personnalité propre à tous les étages de la souveraineté individuelle et collective, il faut une monnaie flexible en elle-même. A chaque étage de solidarité par les sociétés intermédiaires entre l’individu et la nationalité confédérale, il faut une prime de convertibilité des prix entre les gouvernements effectivement responsables de la réalisation du prix en bien réellement servis à des acheteurs identifiés. Pour que le même droit s’applique à se nourrir, se soigner et se loger à Berlin, Paris, Rome et Athènes, il ne peut pas ne pas se calculer un différentiel de prix qui rende compte des conditions réelles particulières des personnes et des lieux. Ce différentiel de prix s’appelle fiscalité partageable entre tous les Etats qui soient solidaires d’une même démocratie du vivre ensemble au-dessus de la finance.

Pour percevoir le prix fiscal de la convertibilité des prix dans une même monnaie de réalisation des droits personnels, il faut internaliser le marché des changes dans un État commun multinational. L’euro en Allemagne, en France, en Italie et en Grèce est le même mais les fiscalités sont différenciées selon les réalités sous-jacentes objectives aux droits européens communs. Chaque souveraineté subsidiaire à la confédération financière a ses modes propres de description de la réalité. La réalité est fiscalisable et effectivement taxée selon les formulations nationalisées du Droit. Chaque souveraineté reste libre de ses taux de TVA, de son barème d’imposition des revenus et de ses taxes sur les différentes natures de capital. Chaque souveraineté emploie et redistribue ses ressources propres comme elle l’entend. Mais comme tout est comptabilisé dans le même euro public et commun à tous les citoyens de la zone euro, la fonction de l’État confédéral est d’assurer par sa fiscalité propre le crédit de tout État subsidiaire de la démocratie commune.

L’État confédéral tient l’État civil et le cadastre financier centraux. Toutes les personnes physiques et leurs regroupements moraux y sont identifiés unitairement comme propriétaires des titres financiers de leurs droits spécifiques en euro. L’État confédéral de l’euro est, dans le cadastre central de l’euro, l’assureur public en dernier ressort de tous les portefeuilles personnels de titres juridiques libellés en démocratie européenne. Cela implique que le gouvernement confédéral fixe la parité nominale de l’euro relatif à chaque personne morale en fonction de l’euro étalonné dans la Confédération. La parité de l’euro confédéral est de un pour un alors que les parités locales pivotent sur l’unité centrale.

Ainsi l’euro nominal de l’État français pourrait être fixé à 0,95 euro confédéral, de l’Allemagne à 1,1 euro confédéral et de la Grèce à 0,7 euro confédéral. Dans le Système Européen des Banques Centrales, tout transfert de la Bundesbank vers la BCE entrainerait le versement de 0,1 euro confédéral au budget allemand. De 0,05 euro confédéral au budget confédéral lors d’un transfert de la Banque de France à la BCE ; de 0,3 euro confédéral au budget confédéral lors d’un transfert de la Banque Centrale de Grèce à la BCE. Le marché des changes intra-européen opère ainsi une péréquation budgétaire à travers les parités nominales votées par le Parlement de la Confédération.

L’excédent de liquidité du budget confédéral résultant des parités nominales inter-étatiques a deux emplois possibles :

  1. annulation des dettes publiques, bancaires et entrepreneuriales jugées usuraires par rapport aux droits de la citoyenneté européenne ;
  2. financement des investissements communs dans l’éducation, l’innovation, l’environnement et la coopération internationale planétaire.

La liquidité en euro est la prime de crédit de tous les étages de la démocratie dans la Fédération des Démocraties Européennes.

Dans ce système d’adossement du marché des changes intra-euro à la fiscalité financière, chaque personne morale étatique ou entrepreneuriale est totalement souveraine. Prix et primes fiscales sont totalement libres à condition que leur objet soit déposés dans le cadastre de l’euro confédéral sous la propriété d’une personne étatique. Toute personne physique, dont les dirigeants politiques et entrepreneuriaux, sont représentés dans le bilan confédéral consolidé de l’euro par leur titre de crédit personnel. La prime de crédit du gérant d’actifs réels est la cotation de la prime d’assurance du crédit nominal de titrisation de tous les objets de décision. La prime de crédit d’un dirigeant quelconque est alors cotée sur le marché monétaire confédéral comme prime de capital de garantie du prix des actifs confiés à la responsabilité publique du dirigeant. L’actuelle législation nationale sur les faillites est confédéralisée par la démission automatique de tout dirigeant dont la prime de crédit devient négative sur le marché de l’euro confédéral.

La cotation en temps réel du crédit politique de tout dirigeant en euro confédéral induit la substantiation du capital dans la garantie de tout crédit nominal représenté en prix public. Un prix n’existe pas sans le titre de consolidation financière des actifs confiés à la responsabilité personnelle. La responsabilité physique oblige à la comptabilité morale de la démocratie. L’euro compensable en fiscalité confédérale des changes représente la réalité économique par la démocratie efficiente. Dans le système de l’euro confédéré, la liberté est réelle parce qu’identifiable dans une langue financière commune à la réalité des personnes physiques vivantes par leurs biens formellement et matériellement partageables. La Grèce a tué le Saint Empire Romain Germanique… et la république des ploutocrates. Les citoyens d’Europe vont pouvoir voter pour la Grèce dans la Fédération des démocraties de l’euro.

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