LE TEMPS QU’IL FAIT LE 17 JUILLET 2015 – (retranscription)

Retranscription de Le temps qu’il fait le 17 juillet 2015. Merci à Olivier Brouwer !

Bonjour, on est vendredi 17 juillet 2015. Et vous vous souvenez, c’est la semaine dernière, on m’avait demandé de parler de la fin du capitalisme et j’avais dit : « Vous allez voir, dans les jours qui viennent on va assister à ça. »

Et on y assiste, mais le problème, de mon point de vue, c’est qu’on n’analyse pas le problème en termes de fin du capitalisme. Et quand je parle de « fin du capitalisme », je fais la distinction que je fais souvent, que je fais depuis ce livre qui s’appelle : « Le capitalisme à l’agonie », je fais une distinction entre système libéral (c’est-à-dire essayer de minimiser l’impact de l’Etat de manière optimale, ou de manière totale, ça dépend des points de vue), économie de marché (économie de marché, c’est-à-dire que la distribution des produits, la rencontre des emprunteurs et des prêteurs se fait sur un marché) et le capitalisme.

Le capitalisme, c’est autre chose. Il se fait que nous avons un système où les trois sont combinés, mais le capitalisme, c’est fondé sur le capital. Le capital, c’est l’argent qui manque quelque part, qu’on prête et qui demande un paiement d’intérêts en contrepartie. Voilà. Et pourquoi ? Pourquoi est-ce qu’on ne comprend pas que le problème est là, que le problème, c’est le fait qu’on paie des intérêts et que les taux d’intérêts vont être déterminés, non pas par des facteurs objectifs qui sont par exemple la croissance qui se trouve derrière, mais simplement par le rapport de force entre le prêteur et l’emprunteur ? Et donc, ça va se situer à un niveau quelconque qui aura un rapport avec la richesse qui aura été créée en arrière-plan, oui ou non. Et ce système marche de temps en temps, il ne marche pas la plupart du temps. Dès que les choses sont un petit peu compliquées, ça ne marche pas. Ou, dans les termes qu’utilise Piketty, mais d’une manière qui ne me convient pas du tout, en disant que les revenus du capital sont plus élevés que la croissance. Mais dans ce qu’il appelle, lui, « revenus du capital », il mélange à mon sens deux choses : le paiement des intérêts et simplement le profit, qui est la différence entre la somme qui a été obtenue par la vente et les coûts. C’est [ça] le profit. Additionner des profits et des versements d’intérêts, à mon sens, c’est rendre la question absolument confuse. Mais enfin, bon.

Et donc, ce qu’on voit, c’est l’effondrement de ce système. Il est arrivé à bout de course. Il a pu se soutenir pendant pas mal d’années par le pillage du tiers-monde, par le phénomène du colonialisme, mais on arrive à bout de course. Les ressources renouvelables ne sont pas encore, je dirais, la manière dont nous utilisons notre système économique : nous continuons de puiser sur des ressources qui s’épuisent, et voilà, ce système arrive en bout de course, c’est ce qu’on appelle l’effondrement d’un système sous ses contradictions.

Mais au lieu de faire ça, qu’est-ce qu’on nous dit ? On nous dit : « Les Grecs ne sont pas assez comme ceci », « Les Allemands sont un peu trop comme cela », et ainsi de suite. C’est-à-dire qu’on ne voit pas le problème tel qu’il est véritablement posé. Alors, je crois que je vais continuer à marteler en disant [que] le problème, c’est le système. C’est ce système, non pas d’économie de marché, non pas nécessairement de libéralisme (parce qu’il y a un fond, je dirais, de vérité à l’intérieur de ça : il ne faut pas que le pouvoir de l’Etat écrase un individu, il ne faut pas non plus que des idéologies nous disent qu’il faut enlever absolument toute forme d’Etat, parce que l’Etat doit jouer un rôle de redistribution, surtout dans des systèmes comme les nôtres où la redistribution est très très mal faite, où la concentration de la richesse est un fléau qui grippe le système de manière régulière). Non, c’est ce système avec versement d’intérêts, c’est un système qui a une logique exponentielle, ça ne peut pas marcher.

J’ai une petite anecdote à raconter à propos d’hier. Il y a une radio qui m’appelle en me disant : « Est-ce que vous voulez parler de la Grèce ? » Et je leur dis en gros un peu ce que je vous dis ce matin, et au moment où j’écoute l’émission de radio où on doit m’entendre parler, eh bien, je ne suis pas là, on a supprimé purement et simplement mon intervention : je n’ai pas interprété les choses dans les termes qu’on voulait, c’est-à-dire, justement, comme j’ai dit tout à l’heure : « Les Grecs ne sont pas assez ceci et les Allemands sont un peu trop cela ».

Non, je vais continuer à analyser les choses en termes de structures : c’est la manière dont il faut le faire. Malheureusement, comme on le sait, ce système, ce système capitaliste fondé sur le versement d’intérêts, personne ne le remet en question, et ce n’est pas demain la veille qu’on le fera, et ça précipite, bien entendu, l’écroulement, l’effondrement qu’on constate autour de nous.

Voilà. C’est ce que j’avais envie de vous dire pour aujourd’hui.

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