LE CULBUTO NE SE REDRESSE PAS ! par François Leclerc

Billet invité.

Rien n’y fait, en dépit de toutes les mesures prises par la direction chinoise pour tenter de stabiliser les cours boursiers, la dernière en date étant d’autoriser les fonds de pension à y investir. La correction boursière que l’on a cru discerner est devenue une véritable déroute et les bourses s’en ressentent dans le monde entier. Mise en perspective avec les épisodes précédents, celle-ci reflète une profonde crise économique de la seconde puissance mondiale, aux conséquences planétaires. La formation d’une gigantesque bulle d’endettement accompagnée d’une bulle immobilière non moins imposante l’ont précédé.

Destinée à accompagner la nouvelle donne internationale crée par la crise financière, la reconversion de l’économie chinoise ne se fait pas au rythme souhaité. L’expédient classique utilisé – l’injection massive de liquidités par la Banque centrale – crée plus de problèmes qu’il n’en résout, ce qui n’est d’ailleurs pas propre à la Chine. Passer d’un modèle de développement fondé sur l’investissement et tourné vers l’exportation à un modèle alternatif reposant sur la consommation intérieure implique une profonde refondation économique et un bouleversement politique au sein du Parti-Etat. Et cela demande du temps. Faire appel pour faire levier à un rythme accéléré à des solutions de marché ainsi qu’au shadow banking ne produit pas de miracle. Un atterrissage brutal est donc survenu, si l’on en croit la consommation de l’électricité, cet indicateur qui ne trompe pas : celle-ci stagnerait, ce qui n’est pas compatible avec la croissance du PIB de 7% affichée par les autorités chinoises.

Le Parti-État en a vu d’autres et ne va pas vaciller pour autant sur ses bases. C’est à son rythme que vont s’opérer les mutations. Rarement connues hors des frontières, les luttes revendicatives et les tensions sociales sont permanentes en Chine et vont seulement s’accentuer. Mais la dégradation des conditions de vie de populations urbaines désormais qualifiées de classes moyennes, qui se comptent en centaines de millions et dont la croissance a résulté d’un essor économique qui s’est brisé net, pose de nouveaux problèmes à la direction chinoise. Elle va alimenter une contestation qui ne pourra pas être contenue dans de lointaines provinces et soumise hors de tout regard à la répression.

Les conséquences de la crise dans laquelle la Chine est entrée à son tour, après avoir tenté d’y échapper, touchent le monde entier. Au lieu de continuer à tirer la croissance mondiale, elle va désormais exporter son ralentissement. Celui-ci a déjà clairement produit ses effets au sein des pays émergents, qui subissent la diminution de la demande chinoise, notamment pour les matières premières. Car nous assistons à un effet inédit de la mondialisation : le commerce international en berne, elle propage désormais des effets récessionistes et déflationnistes, notamment en Europe où la sensibilité à ceux-ci est forte. Ces effets y prennent à contrepied la politique de déflation salariale destinée à favoriser les exportations et la croissance.

Comment le monde pourrait-il redevenir comme avant, si l’on en croit cette vision particulièrement naïve, si aucune de ses composantes n’en prenait le chemin ? Les portes se ferment les unes après les autres…

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