ONT-ILS VRAIMENT LES YEUX EN FACE DES TROUS ? par François Leclerc

Billet invité.

L’exode des réfugiés n’a pas seulement rendu obsolètes les règles de fonctionnement de l’espace de Schengen, elle a aussi fait apparaître de gros besoins financiers. La liste des questions en comporte encore une autre sans réponse : que faire de la multitude de réfugiés qui ne pourront pas bénéficier du droit à l’asile en raison de leur nationalité ? Les Syriens, Éthiopiens et Irakiens figurent sur la liste des admissibles d’emblée, ce n’est pas le cas des Afghans, et quant aux autres…

Des promesses financières ont été faites à tout-va, qu’il faut maintenant honorer. En direction des pays à qui il est demandé de mieux « sécuriser » les frontières de l’espace Schengen : la Bulgarie, l’Espagne, la Grèce et l’Italie. En faveur de ceux qui accueillent des réfugiés à l’extérieur des frontières de l’Union européenne – qualifiés de « sûrs » pour la circonstance – le cas particulier de la Turquie sur lequel repose l’essentiel du dispositif de zone-tampon n’étant pas tranché. Ainsi que pour les pays de la Route des Balkans sur le chemin de l’Autriche et l’Allemagne. Cette dernière est de facto devenue le centre de tri des réfugiés pour toute l’Europe, en attendant la mise en place des « hot spots » chargés de l’effectuer en Grèce et en Italie. Ou encore en Turquie, si un accord à ce sujet voit le jour.

Deux pistes ont déjà été évoquées sans succès à Bruxelles pour trouver l’argent. Il a été envisagé la possibilité de considérer la crise des réfugiés comme un « événement exceptionnel », afin de ne pas tenir compte de ses coûts dans le calcul des déficits budgétaires. Mais le gouvernement allemand s’y est opposé, car il s’apprête au contraire à revenir à la charge sur ce dossier, en visant notamment les gouvernements espagnol, français et italien coupables de ne pas y mettre l’ardeur souhaitée.

Une autre solution étudiée consistait à adopter une surtaxe exceptionnelle sur les carburants, ou sur la TVA, dont le produit abonderait le budget européen. Mais, même si cette mesure était présentée comme destinée à freiner l’afflux des réfugiés, elle contribuerait à la montée xénophobe qui inquiète les plus hautes autorités dans de nombreux pays européens.

Combien parmi les réfugiés parvenus en Grèce et ayant depuis emprunté « la Route des Balkans » pourront bénéficier du droit d’asile ? Les accords européens actuels plafonnent le chiffre à 160.000 – mais sans clé de répartition – Angela Merkel ne cessant d’expliquer sans plus d’écho que cette limite n’a pas de sens. De fait, la Grèce à déjà accueilli plus de 400.000 réfugiés depuis janvier dernier, et il est estimé qu’environ la moitié d’entre eux étaient Syriens, ce qui représente déjà plus que le quota entériné !

Que faire des autres réfugiés, ainsi que de tous ceux qui arrivent, tant que les « hot spots » chargés de les bloquer quand ils ne sont pas éligibles au droit d’asile ne seront pas pleinement opérationnels ? Selon la réglementation Schengen, ils devraient être refoulés vers leur pays d’entrée – majoritairement la Grèce – et placés dans des « centres de rétention » avant d’être renvoyés vers leur pays d’origine. Problème : un tel dispositif ferait de la Grèce un « camp de concentration géant », selon l’expression de Iannis Mouzalas, le ministre à la politique migratoire de la Grèce.

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