IL NE RESTE QUE LE MÉPRIS, par François Leclerc

Billet invité.

Faisant foi de la persévérance, Jean-Claude Juncker signe une tribune dans le quotidien Le Monde où il déplore que soit « enclenché une spirale négative dans laquelle les gouvernements nationaux restreignent leur régime d’asile pour le rendre moins attrayant que celui du pays voisin, tandis que les responsables politiques alimentent un populisme qui n’apporte que de la colère, et non des solutions ». La Commission ayant déclaré hier qu’elle était « prête à toutes les éventualités », on jugera sur pièce de la suite apportée à ses propos.

Elle est déjà partiellement écrite. Un rapport interne de la Commission a conclu sur la base d’une mission datant de novembre dernier, avant qu’elle ne réagisse, que «la Grèce a sérieusement négligé ses obligations et qu’il y a de graves déficiences aux frontières extérieures qui doivent être surmontées ». Son adoption par un comité d’évaluation des États membres permettra de déclencher un « plan d’action » laissant à la Grèce trois mois pour réagir. Cela permettra, si ses mesures ne sont pas considérées adéquates, à autoriser les États européens à prolonger jusqu’à deux ans leurs contrôles aux frontières. La Grèce doit être coupable pour gagner du temps, le jugement n’est-il pas déjà rendu ?

La coupe est pleine, Human Rights Watch (HRW) a jugé « méprisable » la réforme du droit d’asile au Danemark qui autorise la confiscation des effets de valeurs détenus par des réfugiés qui ont tout abandonné. En Allemagne, le Bade-Wurtemberg et la Bavière ont également pris le pas, ainsi que la Suisse. À Copenhague, le peintre, sculpteur et plasticien chinois Ai Weiwei, emprisonné par les autorités de son pays en 2011 pour les avoir férocement critiqué, a fermé son exposition en guise de protestation. Solidaire des réfugiés, il projette l’édification d’un mémorial sur l’île de Lesbos en souvenir de ceux qui n’ont pas survécu à la traversée de la mer Égée.

La République Tchèque, qui assure la présidence tournante du groupe de Visegrad (dont sont également membres la Hongrie, la Pologne et la Slovaquie), tiendra un sommet sur la crise migratoire le 15 février à Prague. Tous sont farouchement opposés au système de répartition des réfugiés de la Commission, qui pourrait être relancé une fois la frontière grecque fermée par la Macédoine. La Slovaquie et la Hongrie ont déjà déposé des plaintes devant la Cour de Justice de l’Union européenne pour s’opposer à son application.

Le plan qui est en train de murir prévoirait en effet que les réfugiés attendent en Grèce que des places se débloquent en application de ce système, alimentant les craintes du ministre grec de l’immigration, le médecin Ioannis Mouzalas, qui a déclaré qu’il n’était pas dans l’intention de son pays de devenir « un cimetière des âmes ».

En Turquie, pays avec lequel les autorités européennes recherchent un accord destiné à contenir les réfugiés, le parquet a requis la prison à vie à l’encontre de deux journalistes du quotidien d’opposition Cumhuriyet, accusés de divulgation de secrets d’État pour avoir diffusé une vidéo montrant des camions des services secrets turcs transportant à la frontière syrienne en janvier 2014 des armes destinées à des rebelles islamistes syriens.

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