LES RÉFUGIÉS SYRIENS MONNAIE D’ÉCHANGE DES RUSSES, par François Leclerc

Billet invité.

Alors que la Commission enjoint à la Grèce de rentrer dans le cadre de la réglementation de Dublin après qu’elle a volé en éclats, au prétexte de sauver Schengen, la Russie alimente avec ses tapis de bombes le flux des réfugiés syriens qui échoue à la frontière avec la Turquie. Laissant à penser que leur exode, destiné à faire pression sur les Occidentaux, est partie intégrante de leur stratégie.

Ils seraient désormais 60.000, surtout des femmes et des enfants, blottis contre la frontière, la zone où ils peuvent encore trouver un refuge se rétrécissant à la faveur des combats. En dépit des demandes pressantes qui leurs sont adressées d’ouvrir leur frontière, le secrétaire général de l’ONU succédant aux autorités européennes, les autorités turques ne bougent pas et se contentent de bâtir un nouveau camp de toile en Syrie. Mais ses capacités d’accueil sont déjà insuffisantes, laissant de très nombreux réfugiés sans abri sur les routes et dans les champs.

Afin d’éviter l’encerclement de la ville d’Alep, où 300.000 Syriens se trouveraient encore, la réunion de demain jeudi du Groupe international de soutien à la Syrie – qui comprend aussi bien les Nations unies que l’Union européenne, la Russie et les États-Unis – devrait statuer sur une demande de création d’accès humanitaires dont bénéficieraient également d’autres villes assiégées par les forces du régime syrien appuyées par la Russie. Que pourra-t-il sortir des marchandages ?

« Dublin n’est pas mort. Nous le maintenons en vie aussi longtemps que nous avons besoin pour commencer sa révision », a déclaré Dimitris Avramopoulos, le commissaire européen en charge de la Migration, et la Grèce va faire les frais de cet habillage. Vendredi, les ministres européens vont adopter la proposition de la Commission qui lui donne trois mois pour se mettre en ordre de marche, faute de quoi elle sera de facto suspendue de Schengen et les pays membres pourront poursuivre les contrôles à leurs frontières respectives pendant deux ans.

Il est exigé de la Grèce qu’elle réunisse dans ce délai les conditions permettant de lui réexpédier les réfugiés recalés au droit d’asile ou qu’elle n’a pas enregistrés – ce qui représente potentiellement des centaines de milliers de réfugiés au total – et qu’elle mette en place dans les îles les cinq centres d’enregistrement des nouveaux arrivants (dénommés « hot spots »). Afin que les certificats d’enregistrement délivrés par ceux-ci ne soient plus aussi facilement falsifiables qu’actuellement, ils devront comporter les empreintes digitales. Si les réfugiés s’y refusent, ainsi que c’est souvent le cas, des mesures de coercition « proportionnées » sont préconisées.

Il est également intimé à la Grèce de renforcer le contrôle de ses frontières, sans en décrire les moyens pour celles avec la Turquie, et d’accepter sur son sol des gardes de l’Union européenne chargés de surveiller sa frontière avec la Macédoine, plusieurs pays européens ayant déjà envoyé des gardes côté macédoniens pour effectuer des patrouilles conjointes avec la police du pays.

Doit s’ajouter la demande d’intervention de l’Otan d’Angela Merkel, qui a surpris y compris la délégation allemande auprès de l’Otan. Jens Stoltenberg, son secrétaire général, a déclaré à son propos « je pense que nous étudierons très sérieusement » cette demande, cachant mal son embarras et sa perplexité, son organisation n’ayant pas les actions humanitaires dans ses missions.

La Turquie était maîtresse du jeu, la Russie a pris sa part.

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