LE TEMPS QU’IL FAIT LE 17 MARS 2016 – Retranscription

Dernier_JorionRetranscription de Le temps qu’il fait le 17 mars 2016. Merci à Marianne Oppitz !

Bonjour, nous sommes le jeudi 17 mars 2016 et quand je fais cette vidéo le jeudi, c’est parce que je ne peux pas le vendredi. Demain j’enregistrerai une émission sur rfiI. J’y serai avec plusieurs autres personnes et on discutera de l’actualité économique. Cela passera sur rfi, samedi à 12h10. Et comme vous le savez, sur RFI, cela repasse plusieurs fois parce que c’est destiné à différents endroits du monde. Vous pourrez donc le réentendre de toute manière.

Pour le livre, ‘Le dernier qui s’en va éteint la lumière’, il est déjà disponible chez certains libraires. Certaines personnes m’ont dit qu’elles l’ont déjà acheté chez leur libraire. En principe, il sort le 21, c’est-à-dire lundi prochain. Mais vous l’avez peut-être vu, avec l’annonce de l’émission de Patrick Cohen, c’est le 25, sur le 7/9 de France Inter, eh bien, cela démarre bien. Ne vous étonnez pas si vous ne voyez pas d’autres annonces, cette même semaine, parce que ce genre d’émission demande une exclusivité [En fait je passerai la veille au soir sur Europe 1]. Chacun essaye d’avoir la primeur et une certaine exclusivité sur une certaine période. Evidemment, pas éternellement. Après j’ai le droit d’être invité ailleurs. Mais cela gèle un peu mes interventions autour de cette date là.

Alors, c’est une très bonne émission, c’est très bien de passer là pour un livre. Je ne suis jamais passé là, pour aucun de mes bouquins, mais d’après ce qu’on m’a dit, il y a 1,8 million de personnes qui [l’écoutent]. Alors, même si une fraction vraiment minime de ces 1,8 million achète le livre, c’est déjà pas mal. Et puis, c’est 40 minutes et 40 minutes, c’est formidable : on a le temps d’expliquer quelque chose. On ne doit pas hacher ses phrases, on ne doit pas essayer de faire des résumés et des synthèses sur 30 secondes. Voilà, ça c’est bien. Sinon, il y a d’autres choses qui se préparent. Il y a éffectivement des gens qui me demandent, mais je verrai ça plus tard. Il y a des gens qui écrivent des papiers, ils me l’ont déjà dit.

Donc, cela c’est bien ; il y a quelque chose qui se passe autour de ce livre. Je vous l’ai dit, il y a un journaliste qui m’a très gentiment dit que ce livre lui évoquait Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, alors ça, c’est un immense compliment. Voilà, ça fait plaisir. C’est de la littérature dystopique, comme on dit, par opposition à utopique. Dystopique, ce sont des mondes dans lesquels on n’a pas envie de vivre. Alors, des livres comme ‘1984’ de Orwell, ‘Brave New World’ : ‘Le meilleur des mondes’ de Huxley, ‘Fahrenheit 451’, ce sont des projections dans l’avenir. La différence, c’est que mon livre dystopique c’est sûr ce qui se passe maintenant. Je vais essayer de mettre tous les éléments en place pour montrer à quel point c’est calé, à quel point tout est verrouillé. On sait ce qu’il faudrait faire, mais ce n’est pas trop possible. Ceci dit, comme vous le voyez, le livre tombe à point nommé : il y a une atmosphère soixante-huitarde. Moi, j’étais là. Quand j’avais 22 ans en 68, c’était le meilleur âge, vraiment, pour s’occuper de ce genre de choses, pour comprendre ce qui se passait. Il y avait un ras le bol. Ce ras le bol on le voit réapparaître. La Loi Travail a un petit peu, je dirais, mobilisé les énergies. Il y a des prises de conscience qu’on va dans une très, très mauvaise direction, et on n’arrête pas de nous asséner des choses qui vont encore dans cette mauvaise direction. On n’arrête pas de nous en ajouter. Donc il est très difficile de ne pas voir surgir, tout à coup, en surface, le système tel qu’il nous entoure.

Alors, je suis content. Honnêtement, c’est probablement le livre qui m’a demandé le moins d’effort. Pourquoi ? Parce que je n’ai fait aucune recherche. J’ai pris des choses que j’avais déjà quelque part dans mon crâne et je les ai mises sur le papier. Cela a pris très peu de temps mais je crois que cela fait un tout. Et surtout, j’ai mis ensemble, je dirais une vision de l’homme et de la femme, ou plutôt du genre humain, une vision, à mon point de vue, synthétique. C’est-à-dire que j’ai mobilisé toute ma boîte à outils. Je me suis intéressé à la psychanalyse, eh bien voilà, cela intervient. J’ai été sociologue, j’ai été anthropologue, j’ai été financier. Je mets tout ça ensemble. C’est un cri d’alarme, c’est un appel à une résistance. Je crois que c’est compris. La 4è de couverture le dit déjà très clairement. Et la personne qui a eu l’amabilité de comparer ce livre à ‘Fahrenheit 451’ m’a dit qu’il voyait ça comme un point de ralliement. Ce serait effectivement bien d’avoir un point de ralliement. Je ne suis pas le seul à parler de choses de cet ordre là. Je fais souvent référence à ce que dit Stiegler, à ce que dit Lordon, à ce que disent Supiot ou mon ami Todd – je ne prends pas tout dans ce qu’il dit mais il y a beaucoup de choses que j’aime beaucoup aussi. Je pourrais continuer avec quelques noms comme cela. Et ce n’est pas par hasard que j’ai cité ces noms là, vous verrez pourquoi plus tard.

Hier, j’ai regardé quelque chose : la conférence que j’ai faite pour la première fois… – c’était à l’Institut des Etudes Avancées à Nantes, il y a une dizaine de jours – j’ai fait, pour la première fois, un exposé sur ce bouquin. Et, là, j’étais curieux. Pourquoi ? Mais, parce que comme vous le savez – ça se trouve dans ce livre – j’ai une vision particulière de l’être humain. Une fois que je l’ai expliqué à quelqu’un, personne n’a de difficulté à voir cela comme ça : nous sommes en retard d’une longueur ! Nous nous observons nous-même, nous apprenons nous-même ce que nous avons à dire en nous écoutant nous-même : nous ne sommes pas mieux informé que les autres sur ce que nous disons et sur ce que nous faisons. Nous nous observons en train d’agir. Voilà : ce que je dis là est en concordance avec ce que l’on sait du système nerveux. C’est une autre grille de lecture que ce que l’on fait d’habitude. C’est encore un petit pas au-delà de ce que disait Freud et de ce que disait Lacan. On m’a dit beaucoup de mal de Lacan l’autre jour, mais pour moi, Lacan, c’est un très grand penseur. Il a eu un peu tendance, parce qu’on l’écoutait beaucoup, à se laisser emporter par ce qu’il disait. Il a été, sans doute, au-delà parfois de ce qu’il voulait dire précisément, parce que les mots s’appellent les uns les autres.

Mais dans ce bouquin, ‘Le dernier qui s’en va éteint la lumière’, je suis revenu, pour la première fois depuis mon premier livre qui s’appelait ‘Principe des systèmes intelligents’, à une espèce de représentation du fonctionnement du psychisme humain. J’y ai consacré quelques articles autour des années 1998 – 2000. Mais voilà, maintenant je mets tout ça ensemble. J’ai fait quelques allusions à ça, par exemple dans ‘Le capitalisme à l’agonie’, quand j’ai parlé de la propriété privée : de la manière dont nous avons un pouvoir sur les objets, mais où les objets, en retour, on un pouvoir sur nous. Là, j’ai une représentation du fonctionnement de l’être humain. Voilà, en concordance avec ça, je tire les conclusions de ma propre théorie. C’est pour ça que j’ai regardé avec curiosité cette intervention que j’ai faite, d’un peu plus d’une heure, à l’Institut des Etudes Avancées de Nantes. Pour la première fois, je parlais du sujet de ce livre.

Et il y a d’autres personnes ont regardé cette vidéo, et une personne m’a dit en particulier : ‘Cela se tient’. Voilà : il y a un discours là ! Ce qui confirme sans doute cette idée de point de ralliement possible, pour une résistance, pour une autre façon de voir les choses. Ce serait bien. C’est déjà bien que des journalistes qui font des émissions grand public, écrivent un petit message en disant qu’ils sont enthousiastes parce qu’ils vous ont vu là. C’est déjà une très bonne chose ! Espérons que le public suive ! Je crois que ce [dont] l’on a besoin maintenant, c’est surtout d’une grille de lecture de ce qui est en train de se passer. Et c’est un peu ce que j’ai essayé de faire depuis 2008, c’est d’apporter les éléments d’une grille de lecture. J’espère que le message va passer, non pas pour ma gloire personnelle, mais parce qu’on a besoin d’outils de lecture, d’une grille d’interprétation de ce qui est en train de se passer. J’ai déjà repris plusieurs fois cette expression de Hegel qui est excellente : ‘Etre de son temps, c’est comprendre l’époque à laquelle on vit’. On est équipé pour comprendre l’époque à laquelle on vit, mais on peut être en complet décalage. Il faut comprendre comment ‘ça marche’ l’époque où on est. Je fais souvent la remarque autour de moi : il y des gens qui disent : ‘oui, mais si on fait une campagne électorale, il faut faire comme ça…’ – c’est ce que j’appelle la perspective « colleurs d’affiche ». On n’est plus dans un monde où on a besoin de colleurs d’affiche, même métaphoriques. On est dans le monde de l’internet, on est dans le monde de la communication qui se passe à un autre niveau. On n’a pas besoin de partis, on n’a pas besoin de tous ces appareils, on n’a pas besoin d’apparatchiks non plus. On peut faire de la politique de manière absolument différente. Et c’est cela qu’il faut faire. J’espère que le blog joue ce rôle.

Alors, je vous ai parlé, il y a pas mal de temps d’une publication écrite, sur papier. Cela prend un peu plus de temps que je l’avais dit parce qu’on teste un nouveau type d’approche. C’est une formule qui n’existe pas encore. On va faire une revue ‘à la demande’, ça ne se trouvera pas en kiosque mais on pourra l’acheter, justement avec tous les moyens de l’internet. C’est imprimé, donc cela vous arrivera quand même par la poste, mais on fait cela de façon extrêmement légère, avec des choses qui sont possibles aujourd’hui, des abonnements en ligne avec paiement en ligne. C’est comme cela qu’on va faire les choses. Alors, bien sûr, on pourra aussi nous faire dérailler de ce côté-là, nous faire des procès, des machins comme ça, cela arrivera peut-être un jour, mais, tant qu’on peut dire les choses on va continuer de le faire et surtout pour souligner à quel point ce système-ci est en bout de course. Un petit conseil avant de vous quitter, si on vous fait une analyse qui vous parait du 19è siècle ou même du 20è, dites-vous bien que cela ne marche plus. Ce n’est plus comme ça que les choses se passent. Il faut que les œillères nous tombent, les écailles nous tombent des yeux. On est dans un autre monde, et il faut comprendre comment celui-ci fonctionne. A mon sens, on peut faire de grandes choses. Alors, voilà, c’est cela qu’on va faire maintenant. On va faire des grandes choses.

Allez, à bientôt : à la semaine prochaine.

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