LE TEMPS QU’IL FAIT LE 18 NOVEMBRE 2016 – Retranscription

Retranscription de Le temps qu’il fait le 18 novembre 2016. Merci à Marianne Oppitz !

Bonjour, nous sommes le vendredi 18 novembre 2016. Je voudrais vous proposer pour commencer une image. C’est une image que j’ai déjà utilisée, je crois, dans une vidéo au cours de – c’est quoi ? – les 8 années que j’en fais ici. C’est une expérience : j’ai 15 ans, je suis dans un camp de Jeunesses scientifiques, c’est aux confins de la Flandre française et de la Flandre belge, sur le Blankaart, un très grand marécage et un copain me dit : « J’ai trouvé une grosse chrysalide ! ». Ça doit être du papillon qu’on appelle le sphinx tête de mort : un papillon de nuit splendide. Et il me dit : « Tu sais ce qu’il y a à l’intérieur d’une chrysalide ? » Et puis, je dis : « Ben, non, pas du tout », il me dit : « On va regarder ». Alors on prend un scalpel et on regarde et tout ce que je vois c’est un jus noirâtre qui s’écoule. Voilà.

Et j’ai repensé à ça ce matin en lisant les journaux, en voyant par exemple que l’Australie qui a appris par Monsieur Trump qu’il n’y aura pas d’accord commercial entre les États-Unis et le reste des nations du Pacifique, que l’Australie va se joindre à l’organisation parallèle que la Chine avait mise en place, ne pouvant accéder à ce que les États-Unis essayaient de faire.

Je vois aussi que Monsieur Trump a nommé… bon, il avait déjà nommé Monsieur Stephen Bannon, un fou furieux … il a nommé comme conseiller spécial pour les affaires militaires, le général Michael Flynn. Le général Michael Flynn, c’est une personne qui dit, parmi d’autres choses, que l’Islam n’est pas une religion, que c’est une idéologie politique dont un des buts est de renverser les États-Unis et que c’est comme cela qu’il faut le comprendre, sans sentiments. Ça rejoint les choses que j’ai lues – je ne sais plus qui a écrit ça – mais qui expliquaient, selon l’auteur, que l’Islam est une secte, au sens où nous le définissons. Alors, ce sont des choses dont on peut discuter, si on veut. Il n’y a pas de raison de ne pas parler de tous les sujets possibles. Mais enfin, ça crée une ambiance, ça situe un climat.

Vous le savez aussi – je le vois aussi – ce matin, dans un article du Wall Street Journal, tout le monde avait dit pendant la campagne électorale : aucun candidat ne pourra gagner s’il n’a pas, au moins, quelques mots aimables pour la communauté immigrée hispanophone. Et le candidat qui est passé, c’est quelqu’un qui n’a pas eu le moindre mot aimable pour la communauté immigrée hispanophone – c’est le moins qu’on puisse dire – puisqu’il a promis à 10 millions d’entre eux de les rapatrier de force dans leur pays d’origine. J’espère qu’on n’incluait pas des gens qui ont la nationalité américaine – « états-unienne » – sans quoi, cela nous rappellerait de très très mauvais souvenirs.

Il n’y a pas qu’aux États-Unis qu’on a le jus noirâtre qui se trouve à l’intérieur de la chrysalide.

Alors, la chrysalide, c’est une promesse, bien sûr. On connaît la chenille qui a précédé, on a une vague idée du papillon qui va en sortir, quoiqu’il aurait d’abord fallu l’avoir vu pour savoir à quoi ça ressemble. Et voilà, il n’y a pas qu’aux États-Unis : je regarde ce qui s’est dit au débat de la primaire de la droite, en France. Au moins, il s’y est dit des choses. À la primaire de la gauche, en France, c’est encore moins rassurant.

Il faut un projet. Alors, moi, j’essaye de faire ça, tout seul. Il y a un certain nombre de gens, vous, qui regardez ça sur le blog. Il y a un certain nombre de magazines, de périodiques, de quotidiens, qui publient de temps en temps des choses que je dis aussi. Ça n’a pas un très très grand écho, soyons lucides ! Il y a un livre qui a été publié en mars [Le dernier qui s’en va éteint la lumière], que les gens lisent, ils m’écrivent à ce propos là, mais enfin, gentiment, ce n’est pas dans les 10 premiers, ni dans les 100 premiers.

Il y a quelque chose qui m’a fait très plaisir – vous l’avez lu – c’est un événement qui se passe la semaine prochaine, c’est le prix Bristol des Lumières. Il s’appelait autrefois le Prix Procope des Lumières quand il se décernait au café Procope, bien connu à Paris. Le café Procope qui nous évoque des événements importants dans l’histoire. Et ce qui m’a fait plaisir, ce n’est pas l’idée d’un prix : en général, je ne suis pas pour, mais c’est l’idée d’évoquer  – comment dire ? – de rendre hommage à un certain nombre de personnes, très honorables, pour dire ce qu’il faut dire. « Très honorables » (rire) pour ne pas en dire plus, voilà. Messieurs Rousseau, Voltaire, d’Alembert, Diderot, d’Holbach, Helvetius, Walpole, Pope. Adam Smith, il faudra un jour aller le délivrer du kidnapping que les financiers de Wall Street ont organisé autour de lui. Adam Smith : homme de gauche, partisan de la Révolution française, homme de gauche militant. Voilà, Monsieur Adam Smith mérite mieux que les petites cérémonies organisées par des ultralibéraux, des libertariens.

Qu’est ce qu’il y a encore ? Eh bien, il y a un certain nombre de gens en Allemagne. Un peu partout. Je ne peux pas dire tous les noms. Mais, je suis finaliste, je suis dans les 3 derniers. Ce qui est sympa, c’est que les délibérations se passent en direct sur France Culture. Ça donne une certaine clarté à ce qui se passe. Il y a une vidéo aussi, vous pourrez voir je crois en direct également, la délibération de ce jury. Et quoi qu’il arrive, quoi qu’il arrive, cela fait déjà plaisir de voir son nom associé, même de manière extrêmement ténue à ces noms que je viens de prononcer.

Alors de notre côté, de notre côté – là je vais fâcher des gens parce que je ne les nommerai pas – mais, voilà, on essaye quand même, un certain nombre d’entre nous, de faire la même chose, en ce moment. Les Bernard Stiegler, les Frédéric Lordon, les Alain Supiot, mon ami Todd, Jean-Claude Michéa, voilà. Eh bien on essaye quand même de faire la même chose et c’est déjà pas mal quoi qu’il arrive mercredi (sourire), que d’une certaine manière, un lien soit établi entre ces gens là et nous.

Alors, je sais, je sais, dans tous les noms que j’ai dits, il n’y a pas de nom de femmes. Je vais vous raconter alors une histoire qu’on m’a dite à Cambridge, à l’époque où j’étais là. Voilà, ça se passe à la High Table d’un des collèges prestigieux de cette université. Et la conversation, c’est à propos de la musique. Il y a quelqu’un qui égrène les noms des très grands musiciens et quand il arrive au bout de sa liste, il y a quelqu’un qui lui dit : « Mais vous avez noté qu’il n’y a pas de noms de femmes dans les noms que vous avez prononcés. » Et la personne lui répond : « Non, il n’y a pas de nom, non plus, de gentlemen britanniques ». Alors, ça c’est ma réponse à toutes les tentatives de condescendance déguisées sous d’autres formes. Vous m’avez compris : les hommes, les femmes, les enfants, nous sommes tous là, dans l’histoire. Nous faisons tous des choses : personne ne s’est abstenu, nulle part. On est « Spaceship Earth », « Vaisseau spatial La Terre » : on est là, tous ensemble ! Il n’y a pas des tire-au-flanc et des gens qu’il faudrait mettre en avant : c’est une entreprise commune !

Bon, quelle époque ! Quelle époque ! Faisons ce que nous pouvons pour que la [chrysalide] devienne [papillon] et qu’on oublie le jus noirâtre dans lequel nous sommes qui est celui de la chrysalide nécessaire. Voilà, à bientôt.

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