UN SAUT QUANTIQUE POUR L’INTERDICTION DES PARIS SUR LES FLUCTUATIONS DE PRIX

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Lundi, par 34 voix contre 7 les députés européens ont voté une proposition qui interdit l’achat et la vente de positions nues sur les Credit-Default Swaps (CDS). Une position de couverture sur un CDS équivaut à une assurance, une position nue est elle un pari sur des fluctuations de prix. Une position de couverture signifie que l’on s’assure contre un risque que l’on court réellement, une position nue signifie que l’on s’assure contre un risque que l’on ne court pas, ce qui n’est pas aussi innocent qu’il pourrait paraître puisque cela veut dire que l’on crée du risque là où il n’y en avait pas.

Un telle interdiction fait partie du type de mesures que je recommande depuis 2007 – et je me sentais bien seul à l’époque, pour ne pas dire tout seul. Si je n’ai pas manifesté jusqu’ici mon enthousiasme, c’est premièrement, qu’un certain nombre d’amendements étaient proposés qui auraient vidé de sa substance la mesure proposée en la dénaturant complètement et qu’à l’heure qu’il est j’ignore toujours si ces amendements ont été votés ou non, et deuxièmement parce qu’il faut encore pour que la proposition soit adoptée qu’elle obtienne une majorité qualifiée au Conseil des ministres, ce qui n’est, paraît-il, pas joué. On n’en est encore donc qu’aux premières passes d’armes.

Ceci dit, certains prennent ces mesures à ce stade préliminaire de la discussion beaucoup plus au sérieux que moi-même, dont un certain Mr. Conrad Voldstad, P-DG de l’International Swaps and Derivatives Association, qui a semble-t-il mobilisé déjà toute la mauvaise foi dont il se sent capable pour rédiger un petit texte publié dans le Financial Times d’aujourd’hui, intitulé : L’interdiction des positions de couverture risque d’augmenter le prix de la dette. Un titre curieux me direz-vous puisqu’il s’agit précisément de légitimer et d’encourager les positions de couverture et d’interdire les positions spéculatives. Ce qui justifie le titre de M. Voldstad ce sont un certain nombre de scénarios qu’il imagine. Celui qui veut par exemple se protéger aujourd’hui contre un risque auquel il sera peut-être exposé un jour. Quand on veut expliquer simplement ce qu’est une position nue sur un CDS, on dit très justement que cela équivaut à assurer la voiture du voisin. Peut-être, observe M. Voldstad en substance, mais n’est-ce pas légitime si j’envisage de proposer à mon voisin de lui racheter éventuellement son véhicule ? Ou, dans un autre exemple qu’il propose : je vends des produits à un hôpital, « n’est-il pas légitime que je parie sur la perte… », pardon ce n’est pas comme cela qu’il le présente, « n’est-il pas légitime que je m’assure contre le défaut éventuel de la dette de l’État sur le territoire duquel se situe cet hôpital, puisque c’est lui qui est garant en dernière instance que l’hôpital me versera bien les sommes qu’il me doit ? ». Tout le reste est à l’avenant dans son argumentation.

Ce sont des lobbyistes comme M. Conrad Voldstad qui rédigent les amendements aux propositions de la Commission Européenne. Certains membres du Parlement européen sont de grands admirateurs de gens comme M. Voldstad, ainsi par exemple le Britannique Syed Kamall (groupe des Conservateurs et Réformistes européens) et le Suédois M. Olle Schmidt (Alliance des Démocrates et des Libéraux pour l’Europe) qui ont chacun recopié consciencieusement les quatorze amendements qu’ils proposent à la mesure proposée relative à l’interdiction des positions nues sur les CDS à partir de documents rédigés par des lobbyistes. Je rappelle qu’ils ont été élus pour représenter les intérêts des électeurs qui ont voté pour eux, et qu’ils sont payés très convenablement pour éloigner le risque qu’ils ne succombent aux tentations de la corruption.

Un « saut quantique », je vous le rappelle, avant que votre perplexité ne vous pousse à me poser des questions, c’est le PLUS PETIT déplacement que l’on puisse imaginer, mais c’est déjà très bien qu’il aille dans la bonne direction.

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction sur un support numérique en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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140 réponses à “UN SAUT QUANTIQUE POUR L’INTERDICTION DES PARIS SUR LES FLUCTUATIONS DE PRIX

  1. Avatar de rené
    rené

    @marcel tout à fait c’ est d ailleurs ce que j’ ai mentionné hier dans un post.

  2. Avatar de marcel
    marcel

    @vigneron relisez vous ce que vous dites sur les cds est très confus.je vaid essayer de vous apporter une precision. Être vendeur de cds c est etre long donc acheteur de credit ca revient a acheter une obligation et donc à toucher des coupons la difference par rapport au marche au comptant est que sur le mar’che cds être long credit et donc short cds n à pas besoin d etre finance . J ai absolument pas compris votre argumentaire sur ke coup de grisou je vous rappelle juste que le marché des dérives est un jeu à somme nulle ce qui n est pas.le cas du marché au comptant précision qui me semble utile de rappeler. Quant à votre argumentaire sur AIG AIG à t il.perdu de l argent sur des.activités d assurance où financières ? Le.seul secteur où les assurances peuvent perdre de l argent est sur le.risque de correlation typiquement c est le.risque de catastrophes naturelles c est pour cette raison et celle la.seule que ce risque.n à.pas. été pris.en charge pendant très longtemps.par les assureurs et qu aujourd’ Shiu encore le remboursement des catastrophes naturelles est très mal.assure .dernière chose sur soros il en.à.dit des conneries dans sa vie …..

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