Billet invité.
Religieuse, philosophique, politique, juridique, économique, s’il y a un domaine qui a su mobiliser différentes sphères sociales pendant plusieurs millénaires, c’est bien le prêt à intérêt.
Sans même remonter jusqu’à l’Empire romain, il suffit par exemple de savoir qu’une, sinon la première intervention juridique, en dehors du droit canon qui avait déjà statué bien auparavant au sujet du prêt à intérêt, date de 789, avec l’interdiction par Charlemagne du prêt à intérêt pour les clercs (capitulaire Admonitio generalis). Cette interdiction sera ensuite étendue par Lothaire et par les Mérovingiens aux laïcs.
Depuis cette interdiction, du premier empire carolingien, jusqu’à la Révolution et à l’Empire napoléonien, puis jusqu’à la IIIème République Française pour aboutir à aujourd’hui, l’histoire du prêt à intérêts en France a été, par-delà ses aspects philosophiques, éthiques et religieux, aussi une histoire juridique qui a essentiellement tourné autour de la licéité ou non des intérêts que pouvaient réclamer les prêteurs à leurs débiteurs. Une histoire où l’on peut identifier le principe de réalité et la réalité des principes, énoncés et transcrits dans le droit, mais une histoire de rapports de force entre les classes sociales qui possédaient ou pouvaient accéder au capital et celles qui devaient par la force de la nécessité y accéder, du paysan jusqu’au Roi lui-même, en en payant le prix : les intérêts.