[Extrait de l’Encyclopaedia Galactica – Précis d’Histoire uchronique, le XXIe siècle (1)]
Edward J. Snowden mourut centenaire, entouré des siens, dans la reconnaissance et le respect de l’Humanité toute entière. Ses funérailles nationales et mondiales eurent lieu sur la colline du Capitole, le 21 juin 2083, à Washington, capitale des États-Unis d’Amérique. Une foule d’un demi-million de personnes était réunie sur le National Mall, devant son catafalque au pied de la statue de Lincoln, pour honorer son héros. La Présidente des États-Unis, Madame Rigoberta V. Hernandez-Smith fit un émouvant discours devant le Congrès américain en présence du Secrétaire général de l’ONU et des principaux dirigeants de la planète […].
Après avoir évoqué la mémoire de Martin Luther King Jr, là même où il prononça son fameux discours, elle rappela naturellement le précédent de la cérémonie officielle d’hommage à Nelson Mandela, dans le stade de Soweto, le 10 décembre 2013 : le monde entier uni pour célébrer le courage d’un autre combattant de la liberté (2). Comme lui, jeune homme, il avait tout sacrifié, famille, vie normale, carrière, pour une cause qu’il pensait être supérieure à sa propre liberté ou même à sa propre vie (3). Comme Nelson Mandela, au début il fut un paria aux yeux des puissants de ce monde. Lors de sa tentative pour rejoindre un autre pays d’asile, la CIA le kidnappa contre toute règle du droit international – mais ils avaient l’habitude de procéder ainsi, au-dessus des lois avec des complices un peu partout (4) – et, comme lui encore, il passa de longues années en prison dans de dures conditions d’isolement. Mais rien ne le fit renoncer. La Deuxième Révolution américaine permit enfin non seulement de le faire libérer mais ensuite de lui donner un rôle à sa hauteur : il devint le 50ème Président des États-Unis d’Amérique […].
Ainsi un seul homme avait-il déclenché un changement majeur dans le cours de l’Histoire comme cela peut arriver de façon très rare mais récurrente, jouant comme un rôle de catalyseur, souvent pour le meilleur, parfois pour le pire. La lutte fut certes longue, indécise et au début sembla par trop inégale. Mais le grain de sable était là : les yeux s’ouvrirent enfin devant un déluge de révélations, les unes les plus incroyables que les autres (des pays entiers mis sous écoute par exemple). L’entreprise de surveillance la plus totalitaire jamais vue – menée par la National Security Agency, NSA (5) – fut finalement démantelée grâce à son action exceptionnelle (une œuvre de salut public), tout comme le Héros sud-africain contribua à mettre fin à l’apartheid. Les conditions d’émergence de ce type de pathologies sociales (NSA, apartheid etc.), conséquences monstrueuses d’une civilisation fondée sur les inégalités extrêmes, le capitalisme comme stade ultime du néolithique, furent rendues impossibles par l’avènement d’une nouvelle étape dans l’Histoire des Hommes, après le Grand Tournant.
La leçon historique est connue : il est plus facile de célébrer un héros après sa mort que de son vivant ; le courage des héros vivants est trop dangereux pour les castes dominantes en raison de risques de contagion sérieux et avérés .
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