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Mon séjour dans l’Île de Houat VI. Aujourd’hui
J’imaginais en revenant à Houat en 2010, à mon retour des États-Unis l’année d’avant, retrouver la petite communauté que j’avais connue, chacun de ses membres étant banalement plus âgé de trente-six ans. Mais dans l’île que j’ai retrouvée, le Houat d’autrefois avait entièrement disparu : il y avait bien en 1973 une ou deux maisons au village métamorphosées en résidences secondaires, mais en 2010 plus de la moitié étaient devenues telles. Les sommes offertes par les « touristes » pour les habitations, et même les écuries, représentaient un pactole pour les îliens qui acceptèrent la manne tombée du ciel, inconscients du fait qu’ils mettaient ainsi à terme tout logement à Houat hors de portée de leur propre progéniture.… Lire la suite…
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Mon séjour dans l’Île de Houat V. Les prix
J’ai signalé, quand j’ai évoqué la mort de Claude Le Roux qui était intervenue alors que je venais de m’installer dans l’île, que les Houatais s’étaient organisés peu de temps auparavant en une coopérative : le « Groupement des Pêcheurs-Artisans Houatais ». La comptabilité du bateau était jusque-là de la responsabilité de son patron qui, soit était embarqué seul, soit avait à ses côtés un équipage de trois ou quatre matelots ou mousses, constitué, pour ce qui touche à Houat, essentiellement de membres masculins de sa famille : fils, jeunes frères ou beaux-frères (j’ai expliqué de manière détaillée la dynamique de ces équipages dans mes livres : Les pêcheurs de Houat [1983], La transmission des savoirs [1984 ; avec G.… Lire la suite…
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Mon séjour dans l’Île de Houat IV. La terre et le ciel (Noël)
Je participais à la vie de tous les jours : quand eut lieu le pèlerinage annuel à Sainte-Anne-d’Auray, je faisais aussi partie du contingent. Durant la traversée qui emmenait les pèlerins à Quiberon, la même séparation existait sur le courrier qu’à l’église : les hommes étaient à l’arrière, où ils bavardaient et fumaient, tandis que les femmes et les enfants étaient sur le pont avant. Les femmes chantèrent des cantiques, de l’appareillage à Houat, jusqu’au débarquement à Quiberon.
Le soir, au retour, ce fut bien différent parce que la mer était mauvaise. La traversée qui durait une heure par beau temps s’allongeait par gros temps parce que le bateau culait à chaque fois dans la vague.… Lire la suite…
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Mon séjour dans l’Île de Houat III. La fierté
Les hommes de Houat étaient à la pêche – même quand il n’y avait rien à pêcher, et que les bateaux s’étant mis en cercle au large jetaient l’ancre, et qu’on jouait alors à la belote entre équipages réunis sur le pont de l’un d’entre eux, parce qu’« on peut pas rentrer, sinon on serait dans les pieds de nos femmes », lesquelles veillaient aux poules, à la vache et au cochon, à la récolte des foins et l’entretien du jardin potager, lavaient à longueur de journées les vêtements de travail de leur mari, raidis par le sel et massacrés par de très rudes activités.… Lire la suite…
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Mon séjour dans l’Île de Houat II. Le métier
Houat, était-il exotique ? D’abord, c’était un village de 450 personnes, donc une très petite communauté avec sa surveillance réciproque, de chacun vis-à-vis de tous, et de chacun par l’ensemble des autres. Mais cela, ç’aurait été vrai partout : la conséquence inévitable d’un faible nombre d’habitants. Ensuite, on n’y était pas bien riche. Quand j’y suis retourné pour la première fois en 2010, le contraste était vif entre le Houat que j’avais connu et celui que j’avais maintenant sous les yeux : j’avais quitté une petite île en équilibre instable sur la ligne de crête entre la pauvreté et l’aisance, mais toute fonctionnelle, axée entièrement sur la pêche, avec ses maisonnettes sans pelouse tirée au cordeau, sans haies bien taillées, sans mignonnes barrières peintes en blanc : à la place, à l’avant des maisons, un chantier permanent, un atelier improvisé, une zone de terre battue où le pêcheur fabriquait ses casiers à crabes, à homards et à crevettes, « à temps perdu » : quand il n’était pas en mer.… Lire la suite…
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Mon séjour dans l’Île de Houat I. L’arrivée
Début février 1973, j’arrive dans l’Île de Houat. Dans l’année qui suivra, je me mettrai à réfléchir à comment m’y installer à demeure. Je commençais à poser des questions sur la manière d’acheter son premier bateau ; je me demandais à quel type de pêche j’aimerais me consacrer, sans doute le bar à la traîne et à la mitraillette, la crevette, le homard au casier un par un : essentiellement les métiers que Jean-Michel et Raphaël m’avaient appris. Mes deux principaux maîtres nous ont quitté, et ce qu’ils m’ont enseigné est en jachère. Je me suis réveillé un beau matin de mai 1974 en me disant : « Ce n’est pas ça ta vie ! … Lire la suite…
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Ile de Houat, le 27 mai 1977, Discours de Joseph Le Hyaric lors de la venue du Président Valéry Giscard d’Estaing
Joseph Le Hyaric, Maire de Houat en 1977, discours lors de la venue du Président Valéry Giscard d’Estaing.
Jo et moi en 2009, lors de nos retrouvailles.
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De l’anthropologie à la guerre civile numérique (II), Anthropologie de l’Île de Houat, entretien réalisé le 21 mars 2016
Franck CORMERAIS
Votre étude sur les pêcheurs d’Houat vous a amené à interroger les techniques, en particulier par le biais des techniques du corps. Vous reliez la technologie avec la topographie imaginaire, posant ainsi le paradigme de la mesure.… Lire la suite…
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Dans le sillage des pêcheurs d’Houat, par Jérôme Lamy
Billet invité. Cet article paraît aujourd’hui 20 septembre dans L’Humanité.
Initialement parue en 1983, la thèse de l’anthropologue Paul Jorion sur les pêcheurs d’Houat dans les années 1970 reparaît aujourd’hui augmentée d’une préface. La description minutieuse des codes langagiers, des modes d’existence et des manières de faire de cette petite communauté insulaire de Bretagne fait ressurgir un monde englouti. La parole rare des pêcheurs s’est vidée de tout sujet, laissant aux éléments naturels l’initiative de la réussite ou de l’échec commercial. Le discours des femmes sur l’île est, lui, plus directement politique puisqu’il se situe en permanence dans les rapports entre individus.… Lire la suite…
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RELIRE « LES PÊCHEURS d’HOUAT », TRENTE ANS PLUS TARD (I)
Il m’arrive plus souvent aujourd’hui qu’autrefois de relire les textes que j’ai écrits précédemment. La raison en est le blog. Les commentaires sont nombreux qui demandent : « Pourquoi ne parlez-vous jamais de ceci ? » et je réponds alors : « Parce que j’y ai déjà consacré tant de chapitres dans mon livre paru telle année ». Pour que je puisse répondre cela, il aura fallu alors que je me relise pour être sûr de l’avoir bien écrit et, si nécessaire, je complète de telle ou telle manière.
Mais pour un livre comme Les pêcheurs d’Houat, paru en 1983 et réédité aujourd’hui, la dernière fois que je l’ai lu a dû être au moment de la correction des épreuves, soit environ six mois avant sa parution.… Lire la suite…
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LES PÊCHEURS D’HOUAT – Réédition 2012
Après avoir été longtemps épuisé, Les pêcheurs d’Houat (Hermann 1983), reparaît lundi 25 juin aux Éditions du Croquant.
Comme leur nom le suggère, les Éditions du Croquant ne sont pas un empire de presse mais une coopérative, si vous avez l’intention de vous procurer le livre en-ligne, vous les aiderez en l’achetant directement ici.
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LES PÊCHEURS D’HOUAT (1983)
Les Éditions du Croquant vont rééditer mon premier livre, publié originellement par Hermann mais depuis longtemps épuisé. Voici ce qui sera la « Préface 2012 ».
J’ai habité dans l’Île de Houat de février 1973 à mai 1974. J’y suis retourné plusieurs fois dans les années qui ont suivi, la dernière fois en 1978. La fois qui serait la suivante, ce fut en 2010. De l’eau avait coulé sous les ponts. Beaucoup d’eau de mer avait coulé, au rythme des marées, entre Valuec et le Grand Coin.
Je pensais souvent à Houat. Je me disais : « La prochaine fois que je vois Jean-Michel, il faudra que je lui dise ceci » ou « Tiens !… Lire la suite…
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L’Île de Houat, il y a une quinzaine d’années
Jean-Claude Moschetti est venu me voir tout à l’heure : ses photos illustreront mon entretien à paraître dans Le Point. Nous nous sommes découverts des endroits de la planète où nous aurions pu nous croiser : le Bénin et l’Île de Houat.
Voici quelques photos prises par lui à Houat il y a une quinzaine d’années.
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Notre contribution à la pensée économique, le 1er décembre 2022 – Retranscription
Retranscription de Notre contribution à la pensée économique, le 1er décembre 2022
Rassemblons-nous autour d’un nouveau paradigme en économie et en science financière. Écrivez-moi ici !
Bonjour, nous sommes le 1er décembre 2022 et aujourd’hui, cet exposé s’intitulera « Notre contribution à la pensée économique ».
Or, ce n’est pas une manière de dire « Ma contribution à la pensée économique » avec un nous de majesté. Non, c’est « notre »… Le nous en question, c’est vous et moi. Mais je vais expliquer de quoi il s’agit.
Je suis victime, comme n’importe qui qui publie quelque chose sur la toile ou d’une manière ou d’une autre dans un réseau social ou autrement, je suis victime depuis que je suis là sur la toile, c’est-à-dire depuis 2007, de trolls.… Lire la suite…