Un « mouvement citoyen » a vu le jour, contre l’austérité, pour l’alternative. Lancé officiellement ce jeudi 11 décembre, il a fait irruption dans l’arène politico-sociale, proclamant dans un « appel » (lire ici) pour dire « stop ! » à « nos gouvernants » qui « accélèrent la destruction de cette cohésion qui fait notre richesse, pour nous imposer la politique du fort qui écrase les faibles. Cette politique est injuste, ne fonctionne pas et nous entraîne dans une société de la violence. »

Le résumé du chat avec Delphine Noels, réalisatrice, et Arnaud Zacharie, secrétaire général du CNCD-11.11.11, signataires de l’appel « Tout autre chose ».

Avez-vous déjà réfléchi à une transition possible pour faire de notre « particratie » oligarchique une réelle démocratie ? (…) (M4CH14V3l)

Delphine Noels : «  Transformer notre pays en une véritable démocratie ? C’est un travail qui ne se fera pas sans nous. Prenons nos responsabilités de citoyens. Chacun en fonction de nos disponibilités et de nos moyens, sortons de notre passivité, emparons-nous de ce vaste projet et travaillons à la construction de cette démocratie !  »

Peut-on encore éviter la confrontation directe (…) ? (Bruno)

Delphine Noels : «  L’avenir nous le dira. Pour l’instant, nous pensons que l’essentiel consiste dans le fait que les citoyens se rassemblent et unissent leurs forces et leur pouvoir imaginatif pour réfléchir à des alternatives sur l’austérité. L’idée de Tout autre chose, c’est de fédérer chaque mouvement, chaque combat, de créer une transversalité dans la contestation.  »

Comptez-vous vous présenter aux prochaines élections fédérales ? (Sophie)

Arnaud Zacharie : «  Nous n’avons aucunement l’intention de nous présenter aux élections, nous sommes un mouvement citoyen indépendant des partis. Le but est de populariser les alternatives qui existent et de faire pression sur les décideurs politiques pour qu’ils changent de politiques. »

Ne faudrait-il pas commencer par une réécriture de la Constitution par une assemblée citoyenne tirée au sort parmi des volontaires tirés au sort ? (…) (M4CH14V3l)

Delphine Noels : «  Ne faudrait-il pas mieux réécrire la Constitution, déprofessionnaliser le politique et politiser le citoyen ? Tout Autre Chose est conçu comme un mouvement Work in progress. Nous n’avons pas de réponses à tout, mais la volonté de débattre de toutes les questions qui seront posées par les citoyens. Réfléchissons ensemble aux chemins que nous prendrons pour (re)donner à notre pays un visage humain. Vous êtes le bienvenu aux assemblées de Tout autre Chose pour venir débattre avec nous des questions qui y seront posées.  »

Ne pensez-vous pas qu’un tel mouvement doit viser l’échelle européenne pour apporter un véritable changement ? (…) (John)

Arnaud Zacharie : «  Il est évident que la dimension européenne est fondamentale. Mais un mouvement citoyen européen ne peut être efficace sans avoir un véritable ancrage national et local, pour garantir la proximité avec les citoyens. Chaque chose en son temps donc, mais des mouvements citoyens similaires existent déjà dans d’autres pays et des contacts vont évidemment être pris dans ce sens.  »

Arnaud Zacharie : « Il y a une alternative à l’austérité : la justice fiscale. »

Nous sommes dans une société de plus en plus inégalitaires, où seul l’argent compte. C’est malheureusement le modèle américain qui s’installe chez nous et il faut lutter contre ça (…). (Maurisse)

Arnaud Zacharie : «  Vous touchez au cœur du problème. Évidemment tout État doit avoir un budget équilibré. Mais il y a différentes façons d’y arriver. En Belgique, il faut trouver 14 milliards d’euros d’ici 2019. On décide pour cela de couper dans la culture, la recherche scientifique, la protection sociale, les salaires, l’aide au développement, etc. Par contre, du côté de la justice fiscale et des nouvelles recettes, c’est ‘peanut’ : une taxe Caïman qui devrait rapporter 350 millions d’euros. Or, selon le Conseil supérieur des Finances, une taxe sur les plus-values boursières rapporterait 2 milliards d’euros par an, or la Belgique est un des seuls pays à ne pas l’instaurer en Europe ; le coût des intérêts notionnels est de 6 milliards d’euros par an, or ils sont maintenus malgré qu’ils soient critiqués par leur concepteur même (Bruno Colmant) ; la fraude fiscale est estimée à minimum 8 milliards d’euros par an, or il n’y a qu’un petit chapitre sur le sujet dans la déclaration du gouvernement… Faites le calcul, on peut rétablir les comptes via d’autres chemins que l’austérité. On pourrait même dégager des marges pour réduire la pression fiscale sur les salariés, trop élevées en Belgique. Surtout que cette dernière est responsable de la chute de la demande (-4,5 % en moyenne dans la zone euro entre 2008 et 2013) qui a déjà provoqué une double récession. Une troisième récession pointe son nez et, encore plus grave, la déflation est à nos portes. Bref, l’austérité n’est pas seulement socialement douloureuse, mais économiquement inefficace. Contrairement à ceux qui répètent qu’il n’y a pas d’alternative à l’austérité, il y en a une : la justice fiscale.  »

J’ai signé hier votre pétition. Je souhaiterais aller plus loin et m’impliquer davantage. Comment faire ? (Jal)

Arnaud Zacharie : «  Nous allons inviter tous ceux qui ont signé l’appel sur le site web à une Assemblée générale qui décidera de l’organisation du mouvement, vous êtes donc le bienvenu comme tous ceux qui, comme vous, n’ont pas envie de se résigner. »

Delphine Noels : «  Vous trouverez toutes les infos des futures réunions et actions seront accessibles sur le site www.toutautrechose.be. Rejoignez-nous ! Par ailleurs, ce qui serait génial, c’est d’arriver à créer des « antennes » de Tout Autre Chose en francophonie dans les villes, dans vos campagnes : Partout ! Ceci est un appel à tous. À chacun d’y trouver ça place. La première chose à faire est bien sûr de parler autour de vous le plus possible du mouvement ! La mobilisation commence par ces dialogues-là, par des partages dans les réseaux sociaux, etc. !  »