Trump : Les libertariens se rebiffent, le 1 er août 2018 – Retranscription

Retranscription de Trump : Les libertariens se rebiffent. Merci à Éric Cornaz !

Bonjour, nous sommes le mercredi premier août 2018 et aujourd’hui le thème de ma petite intervention ce sera, Trump : les libertariens se rebiffent.

Je vais commencer par vous lire quelque chose que j’ai écrit moi-même. Vous savez, j’ai fait des prédictions sur la crise des subprimes, sur le Brexit, et j’en fais encore de temps en temps sur d’autres choses.

J’écrivais le 8 septembre 2017, ici sur le blog, « Souvenez-vous aussi d’une autre chose que j’ai pu dire à une époque (cette époque-là, c’était le mois de septembre 2015, c’était l’époque où on apprenait que M. Trump allait se présenter aux primaires du Parti républicain pour la présidentielle), le jour où M. Trump serait abattu ce ne serait pas par les Démocrates, ce ne serait pas par les gens de gauche, il serait abattu par les gens du Parti républicain. Pourquoi ? Parce qu’il est apparu de l’intérieur comme un œuf de coucou et il a surtout insulté dans le processus d’accession au pouvoir les gens du Parti républicain qui se reconnaissent de moins en moins en lui. Du moins du côté de l’appareil parce qu’il y a effectivement dans la base du Parti républicain des populistes de droite, voire même d’extrême-droite, qui continuent de soutenir M. Trump et qui se reconnaissent en lui. »

Voilà c’était écrit il y a un peu moins d’un an, c’est toujours valable, bien entendu.

Je vais vous parler des frères Koch. Si vous regardez sur le blog, faites une recherche, vous verrez que je les ai mentionnés au fil des années comme étant de grands financiers du Parti républicain. Ils mettent des sommes considérables dans les élections, il est question qu’ils mettent [400] millions de dollars dans les élections de mi-mandat (Midterm elections) au Congrès, au Parlement et au Sénat qui auront lieu en novembre. Ils sont à la tête d’une fondation [Americans for Prosperity] qui réunit un certain nombre de personnes qui pensent comme eux, qui a plus de 700 membres et dont la cotisation est d’au moins de 100.000 dollars, c’est-à-dire qu’il y a des sommes considérables qui sont mobilisées de ce côté-là.

Le libertarianisme, qu’est-ce que c’est ? C’est une variante de l’ultra-libéralisme qui met l’accent de manière très, très forte sur l’individualisme, sur la possibilité pour chacun de faire exactement les choses comme il l’entend sans grand souci pour l’intérêt général. Dans cette caricature que nous avons parfois de la manière dont les Américains pensent, c’est véritablement la pensée des frères Koch, qui s’appellent donc David et Charles.

David vient de se retirer le mois dernier : il est très malade ; il a 78 ans, et c’est son frère Charles qui va continuer à mener les affaires, qui n’est plus très jeune non plus puisqu’il a 82 ans.

Pourquoi je vous en parle, c’est parce que ces personnes qui se sont réunies récemment, l’association des gens qui cotisent plus de 100.000 dollars, se sont réunies à propos des élections qui vont avoir lieu en novembre, et ils ont retiré leur soutien aux idées de M. Trump. Ils sont pour le libre-échange de manière absolue et ils sont très, très irrités par le protectionnisme de M. Trump. Ils sont aussi en faveur d’une circulation libre des personnes. Ils ont manifesté leur – j’allais dire leur « ulcération » (ce n’est pas tout-à-fait du français), le fait qu’ils ont été ulcérés par cette politique qui vient d’avoir lieu, où M. Trump a séparé des familles d’immigrants illégaux en mettant les enfants d’un côté dans des centres de concentration, où la preuve est faite, parce que quelqu’un de l’administration vient de s’élever contre ça, qu’on les soumet à la sédation. On drogue ces enfants, sans doute pour essayer de gérer leur terreur. Un de ces enfants, libéré récemment, va très mal sur le plan mental. Un autre enfant qui a été réuni avec sa famille n’est pas le bon, et ainsi de suite. Il y aurait à peu près 600 enfants encore séparés de leur famille. Si certains ont retrouvé leur famille c’est parce qu’il y a eu un tel tollé dans le public de manière générale, y compris du côté républicain. Cette affaire a été pour les frères Koch la dernière goutte à faire déborder le vase.

Puisque je reçois souvent des courriers qui disent : « Vous prenez parti pour les uns, contre les autres : vous prenez votre parti contre Trump parce que vous aimez Mme Hillary Clinton », j’ai répondu à ça dans la dernière [vidéo], je précise tout de suite que je n’ai aucune sympathie particulière pour les frères Koch, je les ai critiqués abondamment au cours de mes vidéos précédentes, dans des papiers. Ils sont les fondateurs du Cato Institute, le grand think tank de la pensée libertarienne, c’est eux qui ont fourni par ce truchement la philosophie qui a conduit à la crise des subprimes [ P.J. : La crise du capitalisme américain ? 2007 : 83-85]. Pas les opérations, pas les transactions financières, mais la philosophie en arrière-plan, cette philosophie de donner une maison à tous quelles qu’en soient les circonstances économiques, essentiellement dans un but idéologique de rendre les gens conservateurs par ce moyen. Si je parle aujourd’hui des frères Koch, ce n’est pas par une sympathie particulière vis-à-vis d’eux mais parce qu’ils illustrent ce mouvement que j’avais prédit : le fait que certains piliers du Parti républicain allaient se rebiffer contre M. Trump un jour ou l’autre.

Comment M. Trump a-t-il pris la chose ? Vous l’imaginez, il ne l’a pas très bien pris : il a lancé 2 tweets hier que je vais vous traduire. C’est donc daté du 31 juillet 2018, 06h14 heure locale, c’est M. Trump qui parle, et je vais enchaîner les 2 tweets parce qu’il a découpé son… – comment dire ? – sa vitupération (sourire) en deux tweets.

« Les frères globalistes [surnom pour « juifs »] Koch qui sont devenus une véritable rigolade, un objet de dérision, dans les cercles républicains, sont contre mes frontières solides et mon commerce puissant [« Strong Borders and Powerful Trade »]. Je n’ai jamais recherché leur soutien, parce que je n’ai pas besoin de leur argent et de leurs mauvaises idées. Ils adorent mes lois récentes sur l’imposition (qu’il a essentiellement faite disparaître) et ma manière de réduire la réglementation. Ils aiment aussi les choix que j’ai faits de juges (M. Trump met des juges en place qui appartiennent à son obédience politique à la vitesse de l’éclair en ce moment). Je les ai rendus plus riches. Leur réseau (le fameux réseau de 700 personnes et un peu plus qui mettent 100.000 dollars chacun dans la cagnotte) est très, très surévalué. Je les ai battus à chaque tournant. Ce qu’ils veulent c’est permettre à leurs compagnies à l’étranger, en dehors des États-Unis, de ne pas payer d’impôts. Moi je suis pour l’Amérique d’abord et pour le travailleur américain [« America First & the American Worker »]. Je ne suis la… (vous allez apprécier l’ironie de ce qu’il dit là) marionnette de personne. Deux types gentils mais avec de très mauvaises idées. Make America Great Again ! (faites de l’Amérique à nouveau quelque chose de grand). »

Il n’est pas content. Je l’ai déjà dit : il n’a jamais été le chéri de l’appareil Républicain, mais maintenant quand il y a des donateurs parmi les principaux qui vont se retirer, qui vont faire un choix parmi les candidats Républicains qui vont se présenter aux élections, entre ceux qu’ils aiment et ceux qu’ils n’aiment pas – je ne vais pas vous donner la liste parce que ça ne vous dira pas grand chose, mais ils ont déjà publié une liste de gens qu’ils allaient soutenir et d’autres qu’ils n’allaient pas soutenir – c’est un coin enfoncé dans le Parti républicain.

De la même manière que Trump essaie de pousser les candidats qui sont comme lui, comment dire, proto-fascistes, on a ici un combat qui va se livrer entre des proto-fascistes d’un côté et des ultralibéraux radicaux de l’autre sous la forme des libertariens. Je vous le dis, c’est un petit peu comme si en France il y avait un combat au sommet en ce moment entre M. Macron et Mme Lepen : je regarderais ça d’une certaine distance. Quand il y a des enjeux, je dirais, vraiment de société, il faut bien choisir son camp, mais dans des cas comme ceux-là j’essaie de m’abstenir : je ne vois pas grand-chose de bon, ni d’un côté ni de l’autre. Si je vous en parle c’est parce que c’est un événement décisif dans le soutien que M. Trump peut avoir ou non. Quand la question est posée à Charles Koch s’il envisage éventuellement de soutenir des candidats démocrates, ce qu’il n’a jamais fait jusqu’ici, il ne dit pas non, il dit on verra selon les circonstances. C’est-à-dire qu’on comprend que s’il y a d’un côté un républicain violemment contre la migration, violemment xénophobe, violemment contre le libre-échange, et que de l’autre côté un démocrate qui se trouverait dans le camp opposé, il n’hésiterait pour la première fois peut-être pas, il n’y aurait pas de soutien systématique au républicain [C’est le cas en ce moment dans le Dakota du Nord où les Koch ont financé une publicité en faveur de la Démocrate Heidi Heitkamp, au détriment du Républicain Kevin Cramer].

On entend dire que les frères Koch ne seraient pas contre l’idée d’un congrès à dominance Démocrate à partir de novembre comme un moyen de diminuer le pouvoir, d’affaiblir Trump sur ces questions d’immigration, de mur qu’il veut bâtir [à la frontière mexicaine] et d’entrave au libre-échange par la guerre commerciale qu’il a lancée contre l’ensemble des pays.

Comme je vous dis, ce sont, pour moi, là où je me situe sur l’échiquier politique, des gens [du camp] d’en face qui commencent à s’entre-déchirer. Les frères Koch ne doivent pas ignorer non plus que s’ils aident directement ou indirectement l’apparition d’un Congrès à dominance Démocrate en automne, c’est aussi la porte ouverte, bien entendu, à l’impeachment : la procédure de révocation de M. Trump. Si l’on met entre parenthèses d’autres événements qui peuvent avoir lieu du côté de la commission Mueller, et là je termine là-dessus juste par une petite note, je ne vais pas m’étendre là-dessus : changement de stratégie du côté de M. Trump par la bouche de son avocat M. Giuliani, il n’est plus question de dire « Il n’y a jamais eu de collusion avec les Russes » (tous les commentateurs ne parlent que de ça mais moi je vais vous le signaler juste en une phrase), le discours de M. Giuliani désormais c’est « la collusion n’est pas un crime ». Vous apprécierez sans doute la progression dans la stratégie de défense.

Voilà, j’arrête là pour aujourd’hui, à bientôt.

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