Ce texte est un « article presslib’ » (*)
Il y a parfois deux noms pour la même chose. Ainsi, dimanche de la semaine dernière, le long du bassin à flot à Lorient, une dame courait derrière son basset évadé : « Ulysse ! Ulysse ! » Un peu plus tard, toute essoufflée, l’animal repris sous le bras, elle revient vers son mari et lui dit : « J’ai rattrapé la saucisse ! » De la même manière, ma mère disait à mon père : « ta casquette », et à nous, les enfants : « sa casquette de prolétaire ! » Mon père, lui, faisait l’imbécile : « Elle n’est pas bien ma casquette ? »
En fait, il l’aimait bien sa casquette, elle permettait que s’adressent à lui, sans ambages, les gens dans la foule dont il se sentait le plus proche. Pour ma mère au contraire, la casquette, c’était « Petmans » : en hollandais, l’homme-à-la-casquette. Petmans, ce n’est pas un compliment : c’est le beauf’ de Cabu, le redneck américain, l’homme borné et sans éducation, le même prolétaire mais dans un mauvais jour.
Je repensais à tout ça hier, marchant sous la pluie dans les rues de Bruxelles, avec ma casquette de prolétaire.
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
39 réponses à “La casquette”