Penser tout haut l’économie avec Keynes, de Paul Jorion, éd. Odile Jacob, 2015. Une note de lecture, par Roberto Boulant

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Billet invité.

Ce livre nous parle du plus gigantesque tour de passe-passe de tous les temps. Celui qui a vu une économie politique, véritable science au service du bien commun, être remplacée par la pseudo-science économique, véritable escroquerie au service d’une infime, mais désormais toute puissante, kleptocratie.

Et comment mieux décrire notre époque de nouvelles ténèbres, qui voit les inégalités et les injustices grandir et qui amène l’humanité au bord du gouffre, qu’en parlant de la lumière ? Non pas de la froide lumière idéelle et calculatrice distillée par nos écrans, mais de la fragile et vacillante lumière de l’esprit humain. Celle de l’intelligence d’un homme pétri d’humanisme et formé aux meilleures écoles de son temps, celle du plus célèbre des inconnus : John Maynard Keynes. 

Et il fallait bien l’érudition d’un Paul Jorion, qui a pris la peine de lire et d’étudier dans le texte la pensée de Keynes, pour réaliser ce tour de force : remettre au jour la vieille science oubliée pour nous libérer de nos modernes chaînes de la prétendue « science » économique, et de sa gargouille-croquemitaine, TINA.

C’est en cela que ce livre est passionnant, parce que sans jargon et dans un langage clair, il nous parle d’histoire, d’économie, des hommes et de leurs sociétés. Il nous oblige à nous rendre compte combien les idées que nous prenons pour évidentes sont le fruit d’une construction idéologique maintenant au service d’une caste.

Au travers de plus d’un demi-siècle d’histoire faite de bruit et de fureur, traversé par deux guerres mondiales, Paul Jorion nous fait suivre le chemin de l’homme Keynes, à la personnalité si attachante et si so british pour un lecteur francophone. Il nous donne à voir le cheminement de sa pensée, de ses fulgurances, de ses doutes, mais également de ses erreurs. Il nous donne à voir un monde disparu, un autre qui aurait pu advenir à la chute du nazisme, mais qui ne fut jamais de par la volonté américaine. Il nous donne à comprendre pour pouvoir mieux agir. Un cadeau inestimable à l’heure où le statu quo ante n’est plus possible.

Penser tout haut l’économie avec Keynes, mais aussi avec Paul Jorion et tous les humains de bonne volonté, qui veulent un avenir et un monde vivable pour leurs enfants.

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