La boite à outil, deuxième semaine, par Jean-Claude Balbot

Billet invité

Dans un billet précédent j’affirmais à Paul que l’on pouvait se servir de ses livres comme d’une boîte à outils et j’affirmais que nous le faisions avec profit. Ce blog fournit des armes à qui s’engage sur le terrain, déterminé à changer les rapports sociaux tels que nous les vivons.
Comment dire mieux que ce qu’un ami disait il y a peu : « A un moment donné, il faut mettre son corps physique en mouvement et en jeu si on veut faire bouger les choses. Il faut faire obstacle de son corps pour exprimer le refus des politiques que nous rejetons. Nous sommes et restons de grands singes, mammifères sociaux avant d’être des esprits éthérés connectés par la technologie. »

En ce dimanche de retour « à la ferme », faisant le bilan d’une énième semaine parisienne, je ne peux résister au plaisir de partager avec vous ce dernier vendredi écoulé. J’étais invité le matin à une table ronde par la Plateforme Française du Commerce Équitable [http://www.commercequitable.org/ ] Il s’agissait de disserter autour de ce qu’est un prix « équitable » Il y a des programmes moins réjouissants en ce moment. Je me suis donc trouvé en compagnie de quelques illustres (Dufumier, Viveret) et moins illustres à exposer à mon tour ma vision de producteur devant une salle d’une centaine de personnes bien sous tous rapports et, ironie de l’histoire, dans les bâtiments construits pour l’exposition coloniale de 1907, du côté du bois de Vincennes.
Je fais ce que je peux, à la façon d’un vieux combattant de première ligne, qui sait à peu près toujours où trouver à boire et à manger et quand il faut baisser la tête, laisser passer l’obus et ne jamais reculer. Après les échanges avec la salle – le tout prend presque trois heures – comme souvent, quelques uns qui vous connaissent ou pas, viennent vous remercier, vous demander quelques précisions, vous chambrer souvent (mes amis sont plutôt du genre sarcastique) Un homme vient directement me trouver et me dis « vous devez-être un ami d’Aristote » et d’ajouter dans le silence que provoque sa question : « avez-vous lu Paul Jorion ? » Je n’ai pas pu m’empêcher de sourire, marquant mon contentement. Cet homme est économiste dans une école nationale « vétérinaire, agroalimentaire et de l’alimentation » et va à l’encontre de la doxa enseignée dans ces lieux, courageusement sans doute au vu des difficultés faites à Paul à Bruxelles. Il m’a alors proposé d’intervenir dans son cours, prétendant que je serais plus efficace auprès de ses élèves en 30mn que lui en 10 heures. (Je vous jure que n’ai pas laissé tomber le bout de fromage que je portais alors à la bouche)

Je file à l’autre bout de Paris, avenue de Breteuil. Un ami responsable du MRJC m’avait demandé de venir à la conférence des évêques de France expliquer ce que l’on pouvait faire pour rendre l’agriculture moins destructrice des équilibres climatiques. Je spéculais déjà dans le métro sur la possibilité de faire des « selfies » avec ces messieurs pour faire rigoler les sarcastiques. Je découvre sortant du métro qu’en fait d’évêques de France il s’agit d’un lieu-dit « Conférence des Evêques de France » et que mes interlocuteurs sont avant tout des chrétiens de tout poil, y compris des ruraux, rassemblés là à l’occasion de la Cop 21.
Il y avait, intervenant avant moi, un représentant d’une fondation pour le progrès de l’homme d’imprégnation protestante. Brillant exposé d’un ingénieur agro et homme de terrain, montrant l’immensité du problème et la faiblesse des moyens dont nous disposons, dressant un tableau sombre de notre avenir et, comme il y a peu Pablo Servigne, s’évertuant à conclure qu’il y avait encore beaucoup d’espoir et notamment parce que les anglo-saxons depuis la crise bancaire de 2007/2008 ont changé d’opinion concernant le capitalisme (à l’en croire tous forment une colonne en marche derrière le Sarkozy de Toulon). Il m’a alors suffi de peu de phrases pour rappeler ce que je sais de ce blog sur l’impossibilité à réduire les too big to fail. Et lui faire remarquer que s’il fallait garder l’espoir -l’espérance en ce lieu aurait été plus juste- ce n’était pas là qu’il gisait.

Les heures de train ne formant pas que la jeunesse, j’apprends dans le Monde que le Turner Prize a été attribué à un collectif d’architectes qui se sont trempés de façon « aristotélicienne » dans la rénovation d’un quartier populaire de Liverpool.

Alors que Vive la holding Aristote ! Jorion stagire.

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