Billet invité.
La mise au point finale de Bâle III, ce nouvel ensemble réglementaire définissant les normes de fonds propres des banques édicté par le Comité du même nom, s’achemine lentement mais sans gloire. Les discussions finales traînent en longueur, marquées par une opposition entre Américains et Européens. Un compromis est recherché, avec le risque de ne pas aboutir au renforcement du montant plancher des fonds propres qui était recherché.
Dans cette affaire, les banques américaines agissent par délégation et appuient où cela fait mal à leurs consœurs européennes, moins capitalisées et gorgées de produits dérivés. Cela a été le moyen utilisé par ces dernières afin de gonfler la taille de leur bilan dans la compétition qui les oppose à leurs rivales outre-Atlantique, afin de se hisser au classement des mégabanques : plus leur bilan est important, plus grand est leur volume d’affaires et meilleur est censé être leur rendement.
Deux paramètres continuaient de faire l’objet de tractations au sein du Comité de Bâle : le plancher des fonds propres lui-même et la très épineuse question des modèles internes de calcul du risque, que défendent mordicus les banques européennes, sur la base duquel ce plancher est déterminé. On n’ignore plus combien celles-ci sont suspectées de valoriser avantageusement le risque de leurs actifs afin de diminuer leurs fonds propres réglementaires correspondants, dont la hausse affecte leur rentabilité.
Le compromis recherché n’étonnera personne. Les modèles internes ne sont pas mis en cause, mais le plancher de fonds propres est calculé en fonction du risque mesuré par le modèle standard des régulateurs. On parle de 75%. Ce coefficient fait l’objet de discussions acharnées, car l’enjeu est qu’il n’aboutisse pas à une augmentation substantielle des fonds propres réglementaires qui punirait les banques européennes, selon l’expression consacrée. Son impact est donc la clé mais renvoie au calcul du risque que représentent les produits dérivés, cette jungle impénétrable.
Eric Litvack, le dirigeant du l’ISDA (International Swaps and Derivatives Association), n’a pas manqué de mettre son grain de sel en faisant savoir que « un pourcentage de 75% serait probablement une contrainte trop élevée pour de nombreuses banques, pas seulement en Europe ». Puis il a fait remarquer que « si vous faites du plancher une trop forte contrainte, vous agirez sur l’allocation du capital et comment nous finançons l’économie », ce vieux chantage éprouvé qui prétend contre toute vraisemblance que telle est la mission des produits dérivés.
Les mégabanques ayant acquis un grand savoir-faire en matière de manipulation des régulateurs, il leur restera une dernière ligne de défense, une fois bouclée la négociation en cours. D’importants délais pourront être accordés pour se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation, comme c’est l’usage, ce qui permet toujours d’espérer leur discret assouplissement ultérieur…
Les banques avaient agité le spectre de Bâle IV pour signifier qu’elles en avaient assez, elles devraient être rassurées.
Si je devais avoir l’outrecuidance de traduire pour mon compte ce que dit M Hilton, je l’expliciterais ainsi: un Einstein,…