Notre culpabilité environnementale depuis le protocole de Kyoto de 1997, par Arnaud Castex

Lors de mon intervention samedi dernier sur TV5Monde, j’ai déclaré : « depuis les accords de Kyoto, notre consommation de carburant fossile – qui augmente nos difficultés – a encore augmenté de 60 % ». Arnaud Castex m’envoie les remarques suivantes. Ouvert aux commentaires.

Dans votre entretien sur France 24 vous déplorez la trajectoire très alarmante des émissions de gaz à effet de serre (GES). Ceci est malheureusement très juste. Mais vous citez une augmentation des émissions de GES de +60% depuis la signature du protocole de Kyoto (en 1997) [P.J. ce n’est pas exactement cela que je dis, mais bon]. Or ce chiffre est erroné même si le sens du message est juste.

En effet si on compte l’ensemble des GES, leur augmentation est de 32% entre 1997 et 2015 en gros, de 40 GTeq CO2 à 53 GTeqCO2. Voir ce graphe tiré d’une étude de l’agence de l’environnement des Pays-Bas en 2017.

Donc il n’y a pas eu 60% d’augmentation des gaz à effet de serre depuis le protocole de Kyoto mais +32%.

Mais surtout cette augmentation des GES concerne l’ensemble du monde alors que Kyoto ne concernait qu’une partie des pays (ceux industrialisés + quelques autres).

Le protocole de Kyoto instaurait une première période de 2008 jusqu’à 2012 dans laquelle seuls les pays développés devaient s‘engager à réduire (globalement) leurs émissions d’au moins 5% par rapport au niveau de 1990.

Dans une deuxième période, apres 2012, les pays développés de la première période et quelques autres devaient réduire leurs émissions de 18% par rapport à 1990.

Le protocole a rapidement été ébranlé avec l’absence de ratification du Sénat américain dès le début. Et il n’est entré en vigueur qu’en 2005.

Le retrait du Canada en 2011 et du Japon avant le début de la deuxième période le fragilisent encore.

Vous pouvez voir ci-dessous (tirée de Wikipédia) une cartographie par type de pays par rapport à l’accord.

On voit bien qu’il y avait beaucoup de pays, notamment pays en développement et moins avancés, qui n’en étaient pas (Asie, Amérique du Sud, Afrique)…

Et cela explique pourquoi les émissions ont beaucoup augmenté aussi. Avec le coup d’accélérateur de la mondialisation après 2000, notamment l’augmentation des émissions de la Chine et de l’Inde. Ne pas oublier que la négociation de Kyoto, c’est en 1997 (industrie de l’ex-bloc soviétique effondrée).

Avec les dernières COPs, on change d’approche puisque tout le monde est concerné/partie prenante et doit faire des propositions (on est passé d’une approche descendante à une approche ascendante, bottom-up au lieu de top-down) ce sont les NDCS.

La Chine joue désormais un rôle moteur dans la lutte contre le changement climatique, même si elle consomme encore beaucoup trop de charbon (pour produire ce que nous lui achetons). L’État fédéral américain, n’en parlons pas (mais brûlons des cierges pour l’impeachment) même si la société civile a un positionnement différent.

Globalement il vaut mieux « oublier » Kyoto et parler de l’écart entre les objectifs des COPs récentes, dont bien sur la COP 21 en 2015, et la forte augmentation des émissions en 2017 (+2% pour le CO2 après +0,5% en 2016). Ou de l’écart entre la trajectoire actuelle et ce qu’il faudrait faire pour rester dans les clous du +2°C max.

(Cf. pour le bilan 2017 un article sur le blog de Sylvestre Huet).

On est largement loin du compte et l’horloge tourne et c’est cela le message que vous vouliez à juste titre faire passer.

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