Retranscription de Le coronavirus sur le Blog de Paul Jorion, le 7 mars 2020.
Bonjour, nous sommes le samedi 7 mars 2020 et il est 10h25 du matin. En ce moment, vous êtes 250 sur mon blog à consulter essentiellement les pages qui sont consacrées au coronavirus.
Je peux vous dire qu’en temps ordinaire, le samedi matin, c’est le moment le plus bas de la semaine : c’est là qu’il y a le moins de personnes à consulter mon blog. Il arrive sans doute qu’on soit dans la région de, je ne sais pas, entre 5 et 10 personnes un samedi matin pour regarder ce qui se passe sur mon blog. Et là, en ce moment, vous êtes 250 et vous vous intéressez tout particulièrement aux billets et aux discussions qui ont lieu sur le blog à propos du coronavirus, le COVID-19. Bon, ça me fait plaisir.
Cela me fait plaisir que vous ayez considéré une fois de plus que, sur un sujet particulier, l’endroit pour se renseigner soit sur mon blog. C’est ce que j’ai essayé de faire depuis le début. On a fêté récemment le 13ème anniversaire. Le blog est toujours là. Je parle d’actualité. Il s’est fait qu’au départ c’était une actualité de type financier et je travaillais dans une banque à ce moment-là. Il y a d’autres sujets qui se sont présentés au fil des années : l’intelligence artificielle, la disparition du travail.
Il y a en ce moment une double crise qui est financière du fait de l’inquiétude que ce virus crée par rapport aux perspectives économiques. Par exemple, hier, il y a eu un excellent chiffre de la création d’emplois aux Etats-Unis : 273 000 boulots créés, ce qui est bien. C’est au-dessus de la moyenne et c’est passé inaperçu parce que tout le monde sait que ces chiffres portaient sur une période où il n’y avait pas d’atteinte véritablement à l’économie au moment même. C’est une nouveauté en ce moment que les chiffres puissent être ignorés à partir de l’idée qu’on ne sait pas du tout ce que ces chiffres seront le mois prochain et qu’en particulier, ils seront certainement catastrophiques.
La situation est meilleure en Chine, si on veut, parce que l’accélération de l’épidémie a baissé considérablement. Si vous regardez un peu les courbes, en particulier la courbe que tout le monde regarde ce matin qui est une courbe qui ressemble à une exponentielle, c’est-à-dire qu’on a le sentiment qu’un mouvement se maintient avec des chiffres de l’ordre de 30 à 40 % de plus de cas en France par jour mais comme ces chiffres de 30 à 40 % portent sur des chiffres de plus en plus élevés, c’est une augmentation en nombre de cas absolus de jour en jour. Chaque jour, à quelques exceptions près, chaque jour, les nouveaux cas sont plus nombreux que le jour précédent. Et on est encore un peu tôt dans nos pays pour pouvoir parler de guérisons. C’est une maladie sérieuse. Les gens sont affectés pendant un certain temps et avant qu’on ne les remette dans la circulation, il faut faire attention, d’autant qu’on a déjà mentionné des cas de récidive.
Qu’est-ce qu’on essaye de faire sur le blog ? On essaye de faire de l’information, comme je l’ai toujours fait, sur des cas de crise et de manière tout à fait générale. Je vous ai donné des explications extrêmement nombreuses, extrêmement détaillées, en particulier récemment sur le Président Trump aux Etats-Unis mais ça vous paraissait extrêmement lointain et il suffit de voir… La dernière vidéo que j’ai faite est consacrée aux primaires aux Etats-Unis, au Parti démocrate, et vous la regardez beaucoup moins que celles où je parle de l’épidémie en ce moment. C’est normal. Ça nous touche de très près. Ça restreint nos mouvements.
J’ai donné une leçon hier par Skype. Ça se passait très très bien. Ça s’est passé, je dirais, dans les mêmes conditions que si j’avais été vraiment devant les étudiants et étudiantes qui étaient devant moi. Ça s’est passé de la même manière. C’est l’Université de Stanford en Californie qui vient de décider de faire exactement la même chose et, sans doute, lance une mode. Ce n’est pas une mode mais c’est une façon de faire, pour la plupart des cours. On peut penser à la chose suivante : on va peut-être prendre des habitudes de donner cours à distance. Ça s’est déjà fait. Ça existe. Il y a des formules pour ça mais on va se rendre compte qu’il y a moyen de donner la plupart des cours de cette manière-là.
Alors, qu’est-ce qu’on fait sur le blog ? Je donne des chiffres. J’essaye de les tenir à jour. J’essaye d’attirer l’attention sur des choses qui changent et puis nous maintenons une très bonne discussion par le biais des commentaires. Et éventuellement, parfois, il m’est arrivé ces jours-ci de prendre des commentaires qui étaient particulièrement didactiques et de les mettre en première page.
Alors, mon auditoire, ce sont des personnes, j’allais dire… Ce qui me vient, ce qui me fait sourire, c’est que je pense à Mme Elizabeth Warren. Ce sont des électeurs de Mme Elizabeth Warren, c’est-à-dire des intellectuels, des professeurs, des enseignants, des médecins, des ingénieurs, beaucoup d’ingénieurs, beaucoup de physiciens, beaucoup de scientifiques durs. Voilà le genre de gens qui regardent le blog de Paul Jorion et les discussions sont d’un excellent niveau. De temps en temps, et ça, ça m’a rappelé le débat sur la création monétaire, il y a quelqu’un qui arrive et dont la maîtrise des mathématiques et des raisonnements un petit peu complexes est relativement limitée.
Quand quelqu’un vient sur le blog faire un commentaire où il compare les chiffres annuels de la grippe, dont le taux de mortalité est de 0,4 %, aux chiffres absolus de gens qui sont morts du coronavirus sur une période de 3 semaines, maladie dont le taux de mortalité doit être autour de 5 % et dont, vous le savez, il est très différentiel, il est très différent selon les classes d’âge et que, quand vous attirez l’attention de la personne sur la difficulté à comparer des chiffres annuels avec des chiffres sur 3 semaines pour des maladies à la létalité, comme on dit, extrêmement différents et que cette personne vous répond à ce moment-là, avec indignation : « Oui, mais les morts de la route… », là, on atteint, je dirais, la limite du débat sur la création monétaire [rires].
Quelqu’un m’avait dit à un moment donné… La discussion battait déjà son plein depuis pas mal de temps et quelqu’un qui ne participait pas à la discussion mais qui observait ça d’une certaine distance et qui avait tout lu a fini par m’envoyer un message en disant : « Laissez tomber, maintenant, c’est une question de quotient intellectuel ! ».
C’est un aspect de la question qu’on préfère d’habitude ne pas soulever parce que, là, on est fort lié à, je dirais, ce qui nous est donné au départ par la nature mais dans des discussions où on essaye d’élucider une question et qu’une personne intervient alors que cette personne, manifestement, ne maîtrise pas la règle de trois ou n’a pas la moindre idée de quoi on parle quand on dit : « Oui, mais et les facteurs d’échelle ? » et où 10 morts et 100 000 morts, c’est la même chose parce que c’est déjà… « beaucoup ». C’est-à-dire que, voilà… on essaye de discuter avec des personnes dont les catégorisations, dont les outils sont extrêmement limités.
Je ne censure pas dans la modération, je ne mets pas ces messages-là à la poubelle. Ils sont représentatifs de la population. Quand un message est raciste, grossier, est une suite d’attaques ad hominem, j’ai quelques règles pour la modération. Quand quelqu’un se trompe, même si cette personne se trompe à répétition, je n’interdis pas à cette personne de continuer de s’exprimer, d’autant que le niveau général est d’une telle bonne qualité qu’il n’y a pas de raison de s’inquiéter.
Voilà, vous êtes très très nombreux à venir voir, à participer à cette discussion. Ceux qui participent à la discussion, c’est en général des gens qui participent aux débats depuis un certain temps. Il y a peut-être, je ne sais pas, 20 %, 30 % de gens qui sont nouveaux et qui interviennent maintenant et que j’encourage à continuer à venir. Il y a, je vois, une espèce d’autocensure dans la presse. Je félicite d’ailleurs au passage – il faut toujours être extrêmement ouvert et honnête, objectif – je félicite le travail que fait Le Figaro qui nous donne l’information sous des formes multiples qui sont tout à fait interprétables.
Sur le plan politique, en général, le Figaro, ce n’est pas ma tasse de thé mais il faut reconnaître le mérite aux gens qui font un bon boulot. On essaye de faire pareil sur le blog. Aidez-moi. Si vous avez des textes que vous considérez comme de véritables papiers, à ne pas mettre en commentaire, n’hésitez pas à me les envoyer directement. Je vous dirai peut-être : « Ecoutez, ça se situe mieux en commentaire qu’en billet séparé » mais n’hésitez pas sur les sujets, tous les sujets qui sont liés à cette crise extrêmement sérieuse, il faut le répéter, et dont les manifestations sont multiples, pas simplement en question de lits d’hôpitaux mais aussi de l’impact sur l’économie, de l’impact sur la bourse parce que, malheureusement, tant que la finance est dans l’état où elle est, c’est-à-dire de ne pas être véritablement le système sanguin de l’économie mais à être un outil de spéculation, elle a quand même, dans cette capacité, une capacité de nuisance tout à fait considérable.
Voilà, allez, on va continuer. Si je devais être atteint moi-même, j’essayerai de vous le signaler avant de mettre – j’espère provisoirement – la clé sous la porte. On continue. « Lucidité et élucidation ! », ce sont les slogans du blog de Paul Jorion !
Allez, à bientôt !
Que penseriez-vous à ma place ? 1) Que Claude Roux me fait un clin d’œil en douce Va à l’encontre…