Quand Alphaville sort en 1965, chacun s’interroge : « Qu’est-ce donc que ce film étrange ? ».
Personne ne semble se souvenir que 2 ans auparavant, dans Le Mépris, Fritz Lang, le metteur en scène de Metropolis (1927), était l’un des principaux acteurs. Même si les critiques évoquent à l’unisson pour Alphaville, une « oppressante métropole » : « Alpha-ville » = « métro-polis ». Ils sont aux abonnés absents.
Personne ne prête attention à Godard disant du support du film : « Cette pellicule ultrasensible confère à l’image un aspect lunaire. C’était très important pour moi. Je voulais un style expressionniste ».
« Expressionniste », il l’a pourtant bien dit. Mais personne n’entend que le vrai nom du Dr. von Braun, le père de Natacha, est Léonard Nosferatu.
Nul n’attache la moindre importance non plus au fait que la Natacha en question soit un robot, ni que quand elle dit « Je vous aime », pour en finir avec le film, elle l’énonce précisément comme un robot : « Je-vous-aime ». Non, la critique, comme un seul homme, s’extasiera sur le « miracle de l’amour ». Que ce soit celui d’une robote pour un tueur en série sera traité comme quantité négligeable.
Des perles aux cochons, vous dis-je ! Qu’importe, a dû penser Godard, l’homme qui dit : « Un film sur la sale guerre qui transperce la France ? Le voici ! (Le petit soldat) Et maintenant une comédie musicale ? La voilà ! (Une femme est une femme) Une longue scène de ménage avec Brigitte Bardot ? Tout de suite ! (Le mépris) Un film expressionniste allemand, comme en 1927 ? Allons-y ! (Alphaville) Mais sans les projos : juste avec la pellicule Ilford 400 ASA ! Regardez bien, comme à chaque fois avec moi : sans les mains ! »
Musique de Paul Misraki
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