— Que faisiez-vous aux temps chauds (décembre 1968) ?
— Je baguenaudais, ne vous en déplaise,
avec un début de mémoire sur Merleau-Ponty ;
j’approfondissais le marxisme entamé dès l’été,
et envisageais plutôt un mémoire sur la philosophie de Lénine,
croisant phénoménologie et empiriocriticisme,
avec une pincée obligée de thomisme (!),
on est à l’université catholique de Louvain, que diable !) ;
et j’assurais une traduction tout à fait lacunaire
entre jeunes gauchistes partageant les mêmes espoirs,
l’usage du français étant devenu tabou pour les flamands.
Moi un mois de job en usine m’avait déniaisé
et permis enfin de me jeter dans ce sabir
que j’avais potassé durant 11 années de scolarité.
Les postures outrancières de ces forcenés de l’ULB bruxelloise,
mécréants et coupeurs de cheveux en quatre,
nous paraissaient particulièrement exotiques
(à 25 kilomètres de là pourtant !),
tandis que nous accompagnions les grévistes de la faim,
étudiants palestiniens de l’OLP ou latinos menacés d’excommunication,
qui occupaient notre « Centre international » à Louvain,
en affichant des dazibaos lumineux au restaurant universitaire.
— Vous baguenaudiez, j’en suis fort aise !
Eh bien, engagez-vous maintenant !
devenez bourgeois ou ouvrier, psychanalyste ou aventurier,
et vivez ! jusqu’a la fin des saisons qui feront vos destinées.
Je crois bien que Serge a évoqué avec assez bien de vérité ce qui se passait sur le plan de la vie intellectuelle dans les groupes de contestataires comme nous étions dénommés dans la Presse. Nos préoccupations intellectuelles allaient de Marx en passant par Lénine pour en arriver à Michel Foucault.. On lisait « La cause des Peuples » de Jean Edern Hallier , ou « Cent ans de solitude » de José Garcia Marquez. Mais, je retardais de 10 ans au niveau mode de pensée du fait de mon attachement à la pensée structuraliste de Claude Lévi – Strauss. Passion que je partageais avec Serge..
Un bouquin de l’époque que je n’oublierai pas,c’est le récit autobiographique de Conrad Detrez ,ancien journaliste à la RTBF qui a couvert pour la radio, la chute de la dictature fasciste au Portugal par le MFA ((Mouvement des Forces armées ), récit bien oublié de nos jours : »L’Herbe à Brûler » ..
Oui c’est vrai, que Serge a été « promené » par les flics durant un allez long moment devant la haie des étudiants massée devant le Cercle des Nations.
Je crois bien que c’était pour les flics une manière de stigmatiser le malheureux » gauchiste » qui s’était un peu trop rapproché de leur groupe..
Et de dissuader les pauvres malheureux petits étudiants qui auraient été trop téméraires d’en faire autant.
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