Fascisme, capitalisme, et Trump, par Chabian

Illustration par Stable Diffusion (+PJ)

En introduction, je considère que les discours récents de Trump sont fascinants !

Il se présente aux médias avant d’entrer dans une audience d’inculpation majeure ? « C’est un jour noir pour l’Amérique ». (C’est la fin de la démocratie, etc.) D’une phrase, il échappe à la vision normale d’un accusé qui se défend, et impose la vision (paranoïaque) d’un grand homme poursuivi par des salopards illégitimes. Il dénonce d’ailleurs « l’instrumentalisation sans précédent de la justice », ce qui évoque d’un mot un complot que d’autres dans son public assumeront sans vergogne. Il désigne chaque juge à la vindicte.

Il ne cherche aucunement à discuter de la scène institutionnelle légale, qui l’incrimine ; il révèle un décor de carton-pâte que le peuple doit facilement renverser, en acclamant son champion pour une nation « great again ». Les faits sont sans importance, sans valeur de faits ; et le complot réel qu’il paraît avoir ourdi pour manipuler les élections à divers niveaux passe ainsi à la trappe…

Il n’évoque jamais le parti Républicain. C’est lui (et vous, ses amis, pris à témoin) contre les méchants.

Dans les deux jours suivants, il a deux prestations publiques, pour confirmer sa version des faits et sa victoire inéluctable dans les urnes :

« Chaque fois que les Démocrates radicaux s’en prennent à moi, et que les marxistes, communistes, fascistes m’inculpent, je considère que c’est un honneur, car je suis mis en examen à votre place ». « Donald Trump continue de jouer la victime, le parangon de la liberté d’expression attaqué par un État profond » commente RFI. Et il s’identifie à la Nation, ou plutôt identifie la Nation à sa cause.

Ce positionnement improbable, intenable, est une manœuvre parfaite de manipulation par le discours. Elle ne convaincra que ses partisans ? Mais la question est de conserver une masse de convaincus, un volume de voix qui le maintient en tête aux primaires. Et ensuite de piéger les Républicains qui vont concourir dans les États pour des postes locaux, et qui ne pourront s’opposer à lui. J’y reviendrai.

* * *

Une discussion est née sur les rapports entre fascisme et capitalisme, dans les commentaires du billet signé par Hervey.

L’idée commune selon laquelle les capitalistes préfèrent le fascisme, le créent ou le soutiennent dès le début, ne correspond pas aux leçons historiques, et une précision est nécessaire.

Les capitalistes souhaitent un État libéral, qui fournisse un cadre légal aux pratiques patronales. Ce cadre comporte la gestion juridique des contrats, l’établissement de normes de comptabilité, la sécurisation du système de la monnaie et des banques, toutes mesures favorables à la confiance dans les affaires. Par delà, les capitalistes varient sur la politique régalienne (police, défense…) et sur des politiques sociales et culturelles, en fonction des circonstances. Tout est bon pour encadrer, former, motiver et exploiter les travailleurs… jusqu’au point nécessaire à une soumission sans histoire. Et tout est bon pour surveiller et combattre les organisations qui perturbent sérieusement ce fonctionnement. Espionnage privé, syndicats « maison », licenciements ciblés, violences parfois, sont légitimes à leurs yeux.

Mais parfois, la démocratie dérape, les options extrêmes se fortifient, des émeutes et autres violences surviennent… Bien sûr, aucune violence désordonnée et populaire n’est acceptable aux yeux des capitalistes : les nombreuses tentatives révolutionnaires en 1917 et 1918 en Europe ont été combattues durement. Dans ces cas, le patronat est partisan d’un « État fort », de pouvoirs spéciaux, etc. Il s’agit de s’opposer à « la chienlit », à « la rue ».

Et parfois, un parti spécifique de violence anti-progressiste surgit. Il combine des idées nationalistes (« America Great Again », le « rôle traditionnel de la France dans le monde », la race supérieure des Germains, l’Empire italien depuis Rome, etc.) et des idées progressistes assez vagues, avec assurément la désignation d’un bouc-émissaire, complotiste et profiteur, sans limites de légalité, anti-national : les Juifs, les étrangers de toute sorte, etc. À ce bouc-émissaire est associée une domination financière partielle, celle des affairistes et ploutocrates, mais pas les « bons patrons » nationaux. Des groupes violents surgissent spontanément (anciens combattants, bagarreurs frustrés..) qui attaquent les mouvements progressistes et appuient très vite l’État fort, les familles possédantes, et le (nouveau) parti d’extrême-droite nationaliste/populiste. Le patronat regarde la montée de ces forces nouvelles, il s’informe, mais il reste neutre le plus longtemps possible (aux USA, il finance les deux camps avant de voir lequel a le succès électoral). Seuls quelques patrons fascistes prennent une option précoce (les ancêtres Ford et Trump auraient fait ce choix). Mais les partis nationalistes, dès qu’ils accèdent au pouvoir, et avec une forme de coup d’état ne permettant pas le retour en arrière, exigent des patrons un appui financier sans réserve, en échange d’une promesse d’écraser le mouvement social, de mobiliser la population dans sa dimension nationale et de ne prendre aucune mesure radicale contre le capital.

Bref, le Capital n’a pas désiré le Fascisme, il ne l’a pas choisi ou voulu, c’est une option neutre, parfois inutilement autoritaire ou manipulatrice, mais c’est le moindre mal et dans certaines circonstances, l’option qui s’impose. Tandis que l’option d’autonomie progressiste, même pas vraiment radicale, sera combattue sans vergogne : c’est le marché financier contre le premier gouvernement de gauche en 1981 et ses nationalisations bancaires, contre le Portugal et la révolution des œillets, etc.

* * *

Trump est-il fasciste ? Oui, avec quelques nuances, et c’est à l’honneur de Paul Jorion de l’avoir dénoncé (comme proto-fasciste) dès son avènement. Mais le moment de ses inculpations, avec le positionnement adopté, est instructif.

Trump n’a pas créé un parti, n’a pas impulsé de groupes violents. De même les groupes violents ont préexisté, sous des régimes socialistes réformistes, avant Mussolini en Italie ou Hitler en Allemagne. Et parfois longtemps avant : avec le sinistre Noske en 1918, dont l’assassinat des dirigeants radicaux Rosa Luxemburg et Karl Liebnecht par des bandes organisées, et jusqu’à l’émergence des nazis en 1936.

Mais les groupes violents se sont rassemblés autour de lui.

Trump, comme les deux dirigeants fascistes avant lui, s’adresse d’abord à la petite bourgeoisie, qui craint un déclassement inéluctable (le mouvement Tea-party aux USA) mais craint aussi la résistance progressiste. Elle cherche le retour aux affaires commerciales locales, la sécurité, le business as usual. Elle a besoin de promesse d’une grandeur retrouvée, de répression des profiteurs (donc surtout les allocataires) et des immigrants, désignés comme cause immédiate.

Ces partis fascistes sont d’abord des partis de droite traditionnelle, mais demandent une solution spéciale, simpliste pour sortir de leur crise. (Il y avait parmi le mouvement des Gilets jaunes diverses catégories de petits-bourgeois, commerçants et agriculteurs, autant que des travailleurs embourgeoisés ; et l’extrême-droite a très vite cherché à récupérer le mouvement, mais sans effet visible immédiat). Leur espace politique est différent en Allemagne, en Belgique, en Italie ou en France. Mais la tendance est parallèle.

Trump, dans le système électoral US, va tenter de profiter longtemps de son OPA réussie sur le parti Républicain. Il a un parti majoritaire à utiliser, qu’il prend en otage avec cette conjonction des élections fédérales et locales. Il n’a pas besoin d’un parti séparé, et ses adversaires Républicains ont tout à perdre dans une aventure de scission. Mais il a clairement envisagé un Coup d’État, comme ses prédécesseurs fascistes avec la Marche sur Rome ou l’incendie du Reichstag. Nul doute qu’il l’imposera inéluctablement. Et les éléments de langage qu’il crie aujourd’hui préparent cette aventure hors la loi : L’instrumentalisation de la loi par les méchants est un jour noir pour l’Amérique. C’est cela qui est fascinant.

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23 réponses à “Fascisme, capitalisme, et Trump, par Chabian”

  1. Avatar de Bertrand
    Bertrand

    Le contexte du Trumpisme ?
    Selon Bloomberg, seuls 50% des américains peuvent faire face à une dépense impromptue de 364 €.
    Le reste doit emprunter (amis, prêt sur gages, vendre un objet, prêt bancaire). 20% ne pourraient pas payer. Voilà pourquoi un milliardaire même corrompu fait rêver.

  2. Avatar de Juillot Pierre
    Juillot Pierre

    Tandis qu’en France : combien de temps et d’espaces – aux frontières objectives et/ou subjectives, alternatives, s’effaçant, s’effondrant au fil du temps et d’espaces rapprochant plus vite que peu à peu, l’espèce humaine, le vivant, de signaux de plus en plus forts de son risque ultime d’extinction, du dérèglement climatique irréversible… – peut faire gagner à la « délégation » des « ressentis » intellectualisés de « temps de cervelles disponibles » (qu’à laisser leurs doutes, incertitudes, vouer un culte féroce, à la seule « DICTATURE des émotions » capable de réconcilier leur « peur d’avoir peur » de perdre en « pouvoir d’achat » court-termiste… avec le « ras le bol fiscal », « poujadisme » ambiant..) l’impact qu’un « Chat-bot » peut lui permettre de franchir comme limite… à cette « délégation », ce « consentement », cette « acceptabilité » de l’intelligence humaine cultivée au « culturez vous »… comme barrière séparant de 5 ans, la France et les USA…?

    Pendant ce temps, au pays de la défunte déclaration universelle des droits de l’Homme et du citoyen… : Au Maire soit disant « apolitique » de Limoges déclarant :

    « Il semble qu’un refus d’obtempérer a entraîné un comportement qui aura mis en danger les deux passagers du scooter qui est venu heurter un véhicule avec à bord un père de famille et ses jeunes enfants. Ces derniers restent choqués et traumatisés. »

    Faut-il, dans « l’État de droit » du « nouveau monde », que les populations subissant plus de 5 fois par jour des contrôles aux faciès discriminatoires, impunies, illégitimes, « illégaux » (lorsqu’aucun « matricule d’identification » permet d’authentifier l’auteur porteur de l’autorité publique commettant un abus de pouvoir) et autres sévices de « discriminations systémiques » (à l’embauche dans l’accès aux logements, et aux aides sociales – RSA… et NON RECOURS, etc), ASSIMILENT que tout « refus d’obtempérer » de leurs parts à la dédiabolisation, banalisation, d’une suspicion criminelle généralisée, les stigmatisant… donne toute légitimité au personnel du « monopole de la légitime violence de l’Etat », votant plus que majoritairement pour les extrêmes droites fascisantes… à les harceler, intimider, « jusqu’à que morts s’en suivent » même accidentellement…? »

    https://www.midilibre.fr/2023/08/07/deux-morts-en-scooter-apres-avoir-fui-un-controle-de-police-a-limoges-causes-de-laccident-victimes-ce-que-lon-sait-11382944.php?fbclid=IwAR3YE_pGjfKuR3cz8LZHgfdTPwEhwVkgfD690p6o29I8q4rzBv7gPDbL5cc

  3. Avatar de l'arsène
    l’arsène

    Très bon billet , rien à rajouter excepté dans le titre.
    « Fascisme, capitalisme, et Trump », j’aurais ajouter Macron après Trump.
    Car Macron coche beaucoup de cases surtout quand ce président s’assoit sur la volonté du peuple ( les retraites ) et quand il s’assoit sur la séparation des pouvoirs ( soutien sans faille de la police contre la justice ) .
    La seule différence est que Macron est soutenu par tout le système médiatique et financier alors que Trump est un vilain canard car trop incontrôlable.
    Trump et Macron, en fait très peu de différences , uniquement dans la forme.

    1. Avatar de Chabian
      Chabian

      Pour rester dans l’analyse politique, il me semble que Macron n’est pas dans une tentative de parti national/populiste petit-bourgeois, mais au contraire une tentative de la Haute-Bourgeoisie d’imposer des réformes de régression sociale (sous couvert de modernisation), dans une option libérale (réduction de la dette). Cela provoque un peu de violence, et la question est de faire le maximum sans trop de casse dans un moment où les organisations progressistes sont faibles et la police prête à la violence légale sans état d’âme républicain. Il a d’abord détruit le PS vermoulu et cela a réussi (de peu, Fillon, Le Pen et Mélenchon n’étaient pas loin au 1er tour). Il a ensuite été surpris par le Mvt des Gilets Jaunes contre la 1ere réforme, visant à renchérir les carburants et énergies, rappelons-le. Il a dû annuler sa réforme et lacher du leurre (la conférence citoyenne) car le mvt était durable, mais sans dirigeant. Il vient de réussir la 2e réforme, les retraites ; la colère est restée réformiste, limitée, sans mvt de colère massive.
      Donc, il n’est pas encore à appliquer un gouvernement d’Etat fort (il est vrai que la Constitution Française donne déjà un régime de « pouvoirs forts »).
      Mais son camp peut très bien compter sur un scénario : après Macron, nous aurons Le PEn. Elle ne nous attaquera qu’à la marge et les marchés lui feront comprendre les limites (comme la séquence 81-83 pour Mitterand et la gauche) et l’important sera d’empêcher une émeute populaire incontrôlable.
      Et LE Pen ou ses sbires pourraient envisager le coup d’Etat qui pérennise leur pouvoir.
      Et le camp macroniste pourrait aussi envisager de se pérenniser en provoquant une crise d’Etat ? Mais il lui manquera toujours un soutien fort de la petite-bourgeoisie que Hitler et Mussolini ont pu obtenir durablement dès leur accession…
      …à moins qu’il réussisse son OPA sur le parti de droite aussi bien que sur le PS… c’est l’option en cours !

      1. Avatar de Chabian
        Chabian

        Meloni en Italie, avec Salvini, s’en prend aux ploutocrates, mais cela ne plait pas aux marchés.
        (En Belgique, le PS Magnette a lancé une pétition « tax the rich » pour renvoyer la balle d’une taxation des gros revenus au niveau européen). Pour obtenir un débat au parlement .Obtiendra-t-il une unanimité des 27 ?
        https://www.rtbf.be/article/litalie-taxe-les-profits-des-banques-et-provoque-leur-degringolade-en-bourse-11238205

      2. Avatar de ilicitano
        ilicitano

        @Chabian

        « Pour rester dans l’analyse politique, il me semble que Macron n’est pas dans une tentative de parti national/populiste petit-bourgeois, mais au contraire une tentative de la Haute-Bourgeoisie d’imposer des réformes de régression sociale (sous couvert de modernisation), dans une option libérale (réduction de la dette).  » ( Chabian)

        Macron et Haute Bourgeoisie , ne font qu’1.
        Son parcours personnel ( Brigitte) et relationnel ( Le Touquet) puis politique ( Arnault, et autres ) l’ont amené à être l’instrument de la continuité de l’action politique/économique en cours .

        Comme il est aux commandes , il ajuste ses lois pour éviter trop de révolte.
        L’important est de regarder la tendance, sur plusieurs années et décennies de l’impact des lois, qui progressivement vont dans le sens de la réduction du bien public .

        comme dirait Denis Kessler , PDG de Scor et n°2 du Medef:

        « Adieu 1945, raccrochons notre pays au monde !

        Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. Un compromis entre gaullistes et communistes. Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie.
        Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement peuvent donner une impression de patchwork, tant elles paraissent variées, d’importance inégale, et de portées diverses : statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraite, refonte de la Sécurité sociale, paritarisme…

        A y regarder de plus près, on constate qu’il y a une profonde unité à ce programme ambitieux.
        La liste des réformes ?
        C’est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Elle est là.
        Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance ! »
        ( Denis Kessler , sic)

        1. Avatar de gaston
          gaston

          Comme « disait » Denis Kessler, décédé le 9 juin dernier. D’accord la Parousie a été évoquée sur ce blog il y a 2 jours, mais évoquée seulement !

        2. Avatar de Cypher
          Cypher

          @ Chabian & ilicitano

          Que penser du concept de « national libéralisme » développé par JF Bayart dans sa vidéo sur Le Média à 34mn06 qui semble circonscrire les éléments autour desquels vous tournez ? C’est à dire le nationalisme pour les pauvres et le libéralisme pour les riches.

          Celui-ci s’articule sur 3 points :

          1/ la globalisation comme intégration du monde (le libéralisme des riches : libre circulation des capitaux et beaucoup moins des biens et encore moins des personnes) ;

          2/ l’universalisation de l’état nation comme seule source de la légitimité du pouvoir (contre l’internationalisme qui permettrait de ne pas considérer nos pauvres comme moins pauvres que les pauvres d’ailleurs dans une communauté d’exploitation pour revenir sur mes commentaires précédents en réponse à Pascal : 3,5 M de personnes dépendantes du RSA quand même !) ;

          3/ l’identitarisme, le culturalisme, voire le racisme (il parle concernant Macron de sa visite au Puy du Fou) ;

          3 pôles, donc, considérés comme contradictoires mais qui en réalité fonctionnent en synergie selon lui et dont Sarkozy et Macron seraient le pur produit inconscient.

          Contradiction apparente bloquant leur saisie simultanée – source des hésitations de vos textes – mais qui, une fois dépassée, permet de penser les liens entre capitalisme et fascisme développés par ce billet ?

          1. Avatar de Chabian
            Chabian

            Je décroche assez rapidement de ce « concept ». Car qui porte les « éléments » ? Perso, je regarde toujours le jeu des acteurs. Le FN porte le nationalisme en avant toute ! contre tout discours de progrès social et « réformes », mais avec un discours « prendre aux mauvais riches pour les « français ». C’est vrai que Sarkozy et la Droite LR portent aussi ce thème en partie (Puy du Fou). Ils portent plutôt les agriculteurs et les petits bourgeois en apparence et les riches en réalité, et ne vantent pas la mondialisation. Celle-ci et le libéralisme agressif, réformateur et modernisateur, est porté par Macron (la start up). Enfin l’universalisme est une bannière française (république et laïcité, « nos valeurs », etc.) pour faire nation. Il y a sans doute un compromis derrière cela, un melting pot, mais superficiel. Mais l’Etat porte le capital et le libéralisme (avec les partis dominants), le nationalisme et l’universalisme sont des références idéologiques sans effet pratique. Je suppose que ce concept est contruit par « réduction » plutôt que par divergences d’acteurs. Je regarderai la vidéo demain.

            1. Avatar de Cypher
              Cypher

              Bonjour Chabian,

              1/ Tout d’abord merci pour votre réponse, j’ai trop souvent constaté que les réponses aux questions se font rares sur le blog en dehors des polémiques et des invectives, même si, il est vrai, les auteurs de billets sont plus souvent soucieux du suivi de leurs productions. Etant entendu que la remarque est bien sûr à relativiser par rapport à de nombreux autres endroits.

              2/ Il faudra sans doute excuser mes compréhension et restitution lacunaires du concept de « national libéralisme » qui ne tiennent que sur les quelques minutes de l’interview, quand Bayart dit le développer depuis 2004 et, particulièrement, dans un ouvrage de 800 pages qu’évidemment je n’ai pas lu. D’où ma question, pour obtenir l’avis des grosses têtes du blog. Soit, donc, ma propre transcription et ma seule interprétation, dans le meilleur des cas lacunaires, sinon pétries de contresens.

              3/ Sur votre réponse, vous dîtes que « certains ne les portent pas ». Sans doute faut-il faire une distinction entre leurs « professions de foi » et les faits.

              a/ Pour le FN, si leur programme économique tient plus de la girouette que d’une véritable colonne vertébrale – cf Ruffin par exemple et le passage d’un reaganisme débridé à une forme de national-socialisme particulièrement confus et de facto contredit – on peut s’interroger au vu de leurs votes récents qui en font les alliés objectifs de la macronie contre les intérêts populaires.

              b/ Pour Sarkozy, le service de la grande bourgeoisie derrière le discours qu’il porte – comme vous l’affirmez vous-même – me semble aligner parfaitement les intérêts sur ceux des tenants de la globalisation (je pense immédiatement à son frère ou à Accor, sinon qu’irait-il donc faire dans cette galère ?). Affairisme et service des intérêts locaux ne me semblent pas exclusifs de la mondialisation et de l’intérêt capitaliste trans-national.

              c/ J’ai sans doute été trop bref sur l’identitarisme en ne citant que la visite adoubante à notre « Jeanne d’Arc nationale » du Puy du Fou mais la reprise du roman national et l’exaltation des grandes figures historiques – au risque de la tentative de réconciliation du gaullisme et de Vichy, de Jean Moulin à Pétain, pour faire bref – sont, selon Bayart, une antienne du FN. On retrouve là le nationalisme pour les pauvres quand les élites sont et depuis belle-lurette, derrière leurs protestations de façade, internationales et trans-frontalières.

              4/ L’universalisme de l’état nation (qui est bien une locution complète en soi chez Bayart) se constate aisément dans les faits avec les échecs perpétuels de toute tentative de coordination internationale face aux intérêts nationaux, ainsi que le démontrent encore les COPs par exemple – même à l’heure du bouleversement climatique global entre autres ou la tournure des événements à l’international (Russie-Ukraine / Taïwan / l’Afrique encore ces derniers jours…) qui semblent devoir nous conduire tout droit vers une 3ème guerre mondiale !

              5/ Enfin, pouvez-vous préciser ce que vous entendez par « réduction » que je comprenne mieux où vous voyez une faille dans ce « concept » ?

              6/ Je terminerai sur l’apparente contradiction que vous soulevez et, tout comme Bayart suggère que l’acception commune des 3 pôles nous les présentent comme contradictoires, il me semble que le capitalisme ne s’embarrasse guère de ce type d’implications logiques comme le montrent, entre autres, les discours sur l’immigration, quand, par exemple, la reprise économique de l’Allemagne des dernières années Merkel ne tient qu’au million et quelques d’immigrés qu’elle a acceptée sur son territoire et qui, pourtant, nous a été vendue sous couvert d’humanisme !

              Mensonge, dissimulation, hypocrisie, allez savoir ? Bayart est sans doute plus mesuré que moi quand il suggère que c’est inconscient (fruit de leur socialisation grande bourgeoise) chez Sarkozy et Macron.

              Toutes raisons pour lesquelles le concept me paraissait intéressant – à mon niveau de compréhension – puisqu’il appuie également sur l’absence de scrupules à gérer simultanément des niveaux apparemment contradictoires quand il ne s’agit, de fait, que d’adapter le discours à différents auditoires. Ce que l’on constate tous les jours, hélas.

              Quoiqu’il en soit, merci de m’avoir lu et merci pour votre réponse.

      3. Avatar de l'arsène
        l’arsène

        @ Chabian
        « il me semble que Macron n’est pas dans une tentative de parti national/populiste petit-bourgeois, mais au contraire une tentative de la Haute-Bourgeoisie d’imposer des réformes de régression sociale ».
        Oui, d’accord sur ce constat, Macron n’est en fait qu’un gérant, le gérant de ceux qui possèdent afin que ceux-ci continuent à s’enrichir sur le dos de l’ensemble de ceux qui font tourner la machine, employés, salariés et ouvriers, voire même petits cadres.
        Par contre, quand vous dites que « Macron n’est pas encore à appliquer un gouvernement d’Etat fort « , là, pas d’accord, le pouvoir exécutif sous Macron est de très loin celui en Europe où celui-ci possède des pouvoirs exorbitants qui font qu’il peut imposer à tout un peuple des lois que celui-ci rejette.
        Sous Macron, c’est le fascisme soft qui ne dit pas son nom mais qui en a toutes les saveurs.
        Bien sûr que les bases du macronisme sont différentes de celles de l’Allemagne nazie ou de l’Italie de Mussolini, mais une Le Pen pourrait parfaitement faire la jonction entre cette haute bourgeoisie et une partie du peuple.
        J’avais dit en 2017 et en 2022 que voter Macron c’était voter Le Pen, et on m’avait traité de facho, (un certain cloclo que je ne lis plus se reconnaitra ).
        Je crois malheureusement que ça se précise.

        1. Avatar de Pascal
          Pascal

          Je suis plutôt d’accord avec l’idée que Macron est un marchepied vers le fascisme. On peut voir au USA comment un vrai fasciste complètement stupide mais bon orateur de masse, qui n’a d’autre vision politique que d’être élu pour échapper à des poursuite judiciaire, est finalement porté au pouvoir par une bourgeoisie de milliardaires qui n’a pas trouvé d’autre cheval électoral pour conserver le pouvoir. C’est exactement ce qui s’est passé avec Hitler en Allemagne et c’est ce qui pourrait nous tomber sur le nez modérato avec Marine Le Pen, allegretto avec E Zemmour ou la nièce.

        2. Avatar de CloClo
          CloClo

          « J’avais dit en 2017 et en 2022 que voter Macron c’était voter Le Pen, et on m’avait traité de facho, (un certain cloclo que je ne lis plus se reconnaitra ). »

          Menteur, d’abord tu racontes n’importe quoi ici, et surtout tu me lis chaque fois, juste tu ne me réponds plus par orgueil mal placé. Chenapan que tu es !

        3. Avatar de Chabian
          Chabian

          L’Arsène et Pascal, Je faisais une différence entre la « situation sociale » et ses conditions, ce qu’elle demande entre la période démocratique et la période fasciste. A un moment, face à une grande instabilité, il faut fasciser la foule petite bourgeoise en union nationale contre les profiteurs d’en haut et d’en bas (comme caricatures), c’est un parti qui provoque cela et le produit jusqu’à prendre le pouvoir. Il faut introduire des « éléments de langage » qui déforment le réel (bouc émissaire, menace existentielle contre la nation…) et les imposer pour y arriver. Macron n’est pas dans cette orientation, Trump l’est beaucoup plus.
          Par ailleurs, Il y a (en principe politique) une période démocratique normale et une période démocratique « spéciale », celle où un pouvoir accru et supplémentaire est octroyé et où le contrôle des représentants est affaibli par une loi spéciale momentanée. La situation de la France est particulière parce que la Constitution offre déjà des moyens de dépasser le contrôle parlementaire et des relations trop proches entre les trois pouvoirs (indépendance insuffisante de la justice, du contrôle de la police, etc.). Sans parler de processus de « prime excessive au gagnant » et de rapprochement de date élection du président/élection du parlement, qui affaiblissent aussi au plan électoral la distance entre les pouvoirs.
          Macron utilise bien les ficelles de la constitution, mais il ne s’en vante pas, il ne dit pas que les circonstances momentanées demandent de gouverner plus dûrement, sèchement, rapidement…

  4. Avatar de Michel Gaillard
    Michel Gaillard

    Bof… Trump est un sale con, cynique, rendu fou par le pouvoir… certes… Mais la mécanique mise en place en Ukraine, qui engraisse les marchands d’armes et défend « à tous prix » et en pure perte le dollar hégémon, encore plus répugnante.
    A se demander si il n’arrange pas certains, tout comme les UFOS pour d’autres… pour cacher la merde au chat afin de continuer leur gros business.
    Et les ricains moyens pas loin de tomber de très haut comme en 29 Comme disait T. McKenna « Si tu crois en quelque chose, tu es automatiquement empêché de croire son contraire. »
    Ce monde dégage une légère odeur de vomi… Allez hop, un coup de déo et il n’y parait plus.

    1. Avatar de Pascal
      Pascal

      Hitler aussi était un sale con, cynique, rendu fou par le pouvoir… Mais n’avait pas encore la bombe atomique !😕

  5. Avatar de ilicitano
    ilicitano

    Pour enrichir le débat sur capitalisme et fascisme.

    https://www.francetvinfo.fr/monde/italie/italie-le-gouvernement-de-giorgia-meloni-decide-de-taxer-les-superprofits-des-banques-par-mesure-d-equite-sociale_5996111.html

    Italie :
    le gouvernement de Giorgia Meloni décide de taxer les superprofits des banques par mesure « d’équité sociale »
    Le gouvernement de Giorgia Meloni a décidé d’instaurer une taxe exceptionnelle sur les bénéfices des banques, qui profitent des taux d’intérêt élevés.
    Auparavant l’Italie, comme d’autre pays européens, avait déjà ciblé les entreprises du secteur de l’énergie.

    L’Italie annonce mardi 8 août qu’elle compte taxer à 40% les superprofits des banques.

  6. Avatar de Rosebud1871
    Rosebud1871

    @ Chabian « Bref, le Capital n’a pas désiré le Fascisme, il ne l’a pas choisi ou voulu, c’est une option neutre, parfois inutilement autoritaire ou manipulatrice, mais c’est le moindre mal et dans certaines circonstances, l’option qui s’impose. »

    Dans le genre « bref », c’est bref ! J’ai du lire une seconde fois pour vérifier ma première lecture.

    Le fascisme est un effet indésirable de l’espoir qu’à soulevé la révolution russe, qui comme vous le savez voulait s’étendre pour survivre dans le fil de l’enseignement de la révolution bourgeoise française dans un espace de tête couronnées et pas tranchées en bred à mon tour : pas de retour en arrière !
    Ceci dit, d’évidence les expériences socialistes comme capitalistes, fascistes ou pas ont pris différentes formes selon le terreau ambiant, et ce qui se dessine partout est déjà autre chose que les modèles des dictatures d’entre deux guerre ou d’après et ce qu’il en reste.
    Petite pensée pour les grecs, on voit ce qu’il en est aujourd’hui quand ça cède malgré le vote de jadis des grecs, ça dit les limites de la volonté électorale, mais impossible de savoir si Syriza n’avait pas cédé ce qu’il en serait advenu…un choix c’est perdre ce qu’on a pas choisi, incalculable !

    1. Avatar de Chabian
      Chabian

      Le bref vient en conclusion du billet !
      Je lis deux idées dans votre post.
      1/ »Le fascisme est un effet indésirable de l’espoir qu’à soulevé la révolution russe ». Le fascisme en Italie d’abord, en Allemagne ensuite vient des troubles dans de nombreux pays au sortir de la guerre. Dont des bandes de militaires désœuvrés partisans de la violence, qu’emploient Mussolini, le social-démocrate Noske, etc. Il y a plusieurs pouvoirs autoritaires et d’autres pays lâchent du lest aux travailleurs (Belgique). Il y a aussi le poids du Traîté de Versailles de 1918. JE ne fois pas cela comme « un effet indésirable » venu d’ailleurs.
      A côté de cela, l’URSS provoque un choc certain dans les populations, les Etats la combattent plusieurs années avec l’Armée blanche à l’intérieur, il y a de la famine, on est loin alors d’une extension de la révolution soviétique et de prévoir à sortir les guillotines ! C’est un fantasme calculé chez les occidentaux, qu’on resservira avec la Guerre Froide, et encore un peu aujourd’hui.
      Ensuite intervient une problématique de nouveaux empires, de colonies souhaitées par Rome et Berlin de remplacement des anciens empires du Sultan, des Habsbourg… C’est plus tard, après 1936 que les nazis se tournent vers l’Est et que les occidentaux les encouragent avec soulagement (on avait eu peur), et font de l’URSS l’ennemi principal, l’ennemi commun.
      2/ L’histoire ne se répète pas, les problématiques sont variables suivant le terreau, la situation est nouvelle. Je suis bien d’accord avec vous. Mais l’histoire doit être clairement perçue dans le passé, comme « leçon ». Or les rumeurs sont plus fortes et répétées. Telle cette idée que le capitalisme gère à sa guise le régime politique, crée du fascisme quand il le désire, hors de conditions matérielles et idéologiques. Il y a du complotisme spontané là-dedans. Voilà la motivation de mon billet.
      Trump est instructif de cette vie autonome du régime politique, de la manière dont il introduit les éléments de clivage et attirant la Nation à lui, en suscitant un mouvement. Ce ne sont pas les banquiers et les 1% qui imposent cela !
      OUi, la tentative Syriza était attractive et il faudrait l’analyser. Les conditions étaient-elles réunies ? Quel rôle des banques endettées, des agences de conseil, des oligocrates russses, des institutions dominantes UE et FMI. ? j’en connais trop peu sur le sujet.

      1. Avatar de Rosebud1871
        Rosebud1871

        Chabian 10 août 2023 0h00

        « on est loin alors d’une extension de la révolution soviétique »
        C’était un désaccord Staline/Trotsky !

        « C’est plus tard, après 1936 que les nazis se tournent vers l’Est et que les occidentaux les encouragent avec soulagement (on avait eu peur), et font de l’URSS l’ennemi principal, l’ennemi commun. »

        Non dès Mein Kampf 1925 les slaves comme sous-hommes de l’est étaient visés, et les négos secrètes entre France-UK et URSS ont perduré dans les 30’ jusqu’au rappel à Moscou de Litvinov en 38.
        https://fr.wikipedia.org/wiki/Maxime_Litvinov

        Trop tard et détaillé.
        http://pcf-1939-1941.blogspot.com/2014/03/les-negociations-anglo-franco.html

        Trump fait partie des 1% et s’est récemment dit persécuté par par des « marxistes » et des « communistes ». Faut-il en rire ?

  7. Avatar de Dimitri78
    Dimitri78

    Le phénomène d’explosion démographique en Afrique se retrouve aussi en Europe après les vagues de migrations

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