Pierre Nora était un homme très affable, d’une affabilité telle qu’on ne pense pas qu’elle puisse cacher un très grand courage.
Pierre Nora m’a accueilli dans sa collection « Bibliothèque des sciences humaines » chez Gallimard, ainsi que dans la revue Le Débat, qu’il co-dirigeait avec Marcel Gauchet.
Il m’a presque publié une seconde fois. Ça s’est passé comme ça. J’apprends qu’un autre de mes livres a été accepté en comité de lecture, un jeudi si j’ai bon souvenir. On me contacte le lendemain pour me dire que je serai appelé lundi, du siège de la maison dans ce qui s’appelait encore la rue Sébastien Bottin, par deux personnes avec qui je réglerais les détails de la publication.
Ces deux messieurs m’appellent le jour dit, et je m’entends dire : « Ah, désolé : votre livre ne sera pas retenu ! » Je réponds qu’il y a malentendu : si nous nous réunissons, c’est pour parler de l’édition du livre. « Non ! Non, la décision était négative, etc. » Je me souviens avoir dit : « Et il aurait fallu que nous soyons trois dans une conversation téléphonique pour que l’on m’apprenne qu’on ne retient pas mon manuscrit ? ça n’a pas de sens ! ».
Mais, j’avais un homme à moi dans la maison, par qui j’appris bientôt le fin mot de l’histoire. Le jour du comité de lecture, Pierre Nora était arrivé en retard, on lui avait communiqué les décisions prises et il avait éclaté : « Ah ! Non ! Jorion me doit toujours son manuscrit pour [ma collection] Témoins ! Celui-là viendra après ! » Un homme affable, mais dur en affaires !
Et le manuscrit pour Témoins ? J’en avais des bouts, ils ont paru sur le blog, en feuilletons intitulés « Mon séjour dans l’Île de Houat » (6 épisodes), « Cambridge University » (6 épisodes) et « L’Afrique et moi » (8 épisodes). Mais raconter toute ma vie d’un bout à l’autre, bof ! … quand je serai vieux peut-être !
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