Comment j’ai découvert le mécanisme de la conscience … en 1999 – Épisode zéro. Un de ces polars où on vous donne le nom de l’assassin à la première page.

Illustration par ChatGPT

Oui, il s’agit d’un de ces polars où on vous révèle tout de suite le nom de l’assassin, ce qui ne le rend pas moins palpitant – voire le rend plus – parce qu’on vous a donné une réponse alors que vous ignorez encore tout des questions.

Dans le feuilleton qui débute ici, c’est la même chose : j’ai décrit le mécanisme de la conscience en 1999, mais les questions de neurosciences qui ont mis en évidence qu’il s’agissait bien de la réponse ne sont venues que dans les années qui ont suivi. Cela sera expliqué ici.

Il fallait aussi qu’apparaissent les IA bulldozers de la pensée en silo pour que l’on puisse connecter les pointillés entre les questions venant plus tard et la réponse donnée plus tôt.

J’expliquerai tout cela en allant assez vite pour éviter ce que j’ai pu observer lors de mes précédents feuilletons quand j’ai passé beaucoup de temps à dire : « Un peu de patience : j’avais prévu votre objection : il y sera répondu dans l’épisode 3 … ou dans l’épisode 5 … ou l’épisode 8, etc. »

Le nom de l’assassin

J’explique le mécanisme de la conscience dans « Le secret de la chambre chinoise », un article qui paraît dans la revue L’Homme en 1999 (150 : 177-202), une traduction paraîtra ensuite en anglais. Par ailleurs, dès 2002, lorsque Douglas White – l’anthropologue qui m’avait invité à l’Université de Californie à Irvine en 1997 – crée ma page Wikipédia en anglais, il tient à y signaler ma découverte du mécanisme de la conscience :

Mémoire et conscience

Dans un article publié en 1999, Jorion a proposé une nouvelle théorie de la conscience qui va au-delà de la notion freudienne selon laquelle certaines de nos décisions ont des motifs inconscients, en suggérant qu’en fait, toutes nos décisions ont des racines inconscientes, révélant ainsi que le libre arbitre est une illusion. La conscience apparaît comme la conséquence d’un mécanisme qui nous permet de percevoir comme simultanées les sensations produites séparément par nos cinq sens, condition préalable nécessaire à la création de traces mémorielles, qui sont elles-mêmes la condition préalable à tout processus d’apprentissage. Tirant les conséquences d’une observation faite par Benjamin Libet, selon laquelle l’intention est un artefact puisqu’elle surgit dans la conscience une demi-seconde après l’action qu’elle est censée avoir générée, Jorion a en outre suggéré que la conscience se trompe lorsqu’elle se prend pour la cause des actions humaines alors qu’elle n’est rien de plus qu’une conséquence accessoire du processus d’enregistrement qui permet à la mémoire de se constituer.

Elle s’y trouve depuis. Que s’est-il passé alors durant ces vingt-trois années ? Ou plutôt « Que ne s’est-il pas passé ? »

(suite au prochain épisode …)

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4 réponses à “Comment j’ai découvert le mécanisme de la conscience … en 1999 – Épisode zéro. Un de ces polars où on vous donne le nom de l’assassin à la première page.”

  1. Avatar de Chabian
    Chabian

    Je me souviens d’un article de vous sur ce thème de la conscience, publié ici sur ce blog il y a quelques (dix ?) années… et plus simple à lire que celui de la revue L’homme, que je viens de parcourir. J’en ai gardé : un exemple facile (Je suis déjà à fuir dans l’escalier et je me dis que j’ai dû prendre une décision qui est la bonne) et deux idées qui me servent de boussole : la conscience est une activité a posteriori, auto-justificatrice et peu utile, mais marque de l’humain (en tous cas dans son développement) ; les « valeurs » morales sont une construction qui n’ont que peu d’intérêt en pratique.
    Voilà ce que j’en ai retenu, à ma façon. Mais je sens que je vais maintenant apprendre d’autres choses.
    N.B. Cela doit aussi à mes lectures sur les singes, selon Frans de Waal ou Shirley Strum…
    De là, je perçois souvent les interventions de la « bonne conscience » et de la « mauvaise conscience » dans les discours, sans que cela change grand chose aux pratiques.

    1. Avatar de Paul Jorion

      C’était probablement la retranscription d’une vidéo où j’avais résumé ce que je disais dans cet article.

  2. Avatar de Otromeros
    Otromeros

    Conversation avec ma préhistorique IA
    ++++++++++++++++++++++++++++
    Q : Définir ‘conscience’ . Y a-t-il plusieurs types de conscience? Précisez

    R : « La conscience est une notion complexe et polysémique, qui recouvre plusieurs aspects à la fois en philosophie, en psychologie et en neurosciences.
    On peut la définir de manière générale comme la faculté d’un individu d’avoir une connaissance, intuitive ou réflexive, de sa propre existence, de ses états psychiques et du monde qui l’entoure.

    Il est possible de distinguer plusieurs types de conscience :

    1. Conscience psychologique (ou conscience de soi)

    C’est la conscience d’être un « moi », un sujet pensant et agissant.

    Elle nous permet de nous percevoir en tant qu’individu distinct des autres et du monde extérieur.

    Elle se manifeste par la capacité à se remémorer le passé, à se projeter dans l’avenir et à réfléchir sur ses propres pensées et actions.

    Certains philosophes comme Descartes l’ont mise au centre de leur réflexion (le fameux « Je pense, donc je suis »).

    2. Conscience d’objet (ou conscience perceptive)

    C’est la conscience des choses extérieures à soi.

    Elle est la faculté de percevoir le monde à travers les sens et de se le représenter mentalement.

    Elle nous permet d’être attentif à notre environnement, d’interagir avec lui et d’avoir une connaissance immédiate des objets et des événements.

    3. Conscience morale

    C’est la capacité de l’individu à distinguer le bien du mal et à porter un jugement sur ses propres actes.

    Elle est souvent perçue comme une « voix intérieure » qui nous guide et nous pousse à agir selon des principes éthiques.

    Elle est liée au sentiment de responsabilité, de culpabilité ou, au contraire, de bonne conscience.

    4. Conscience collective

    Ce terme fait référence à un ensemble d’idées, de valeurs, de croyances et de sentiments partagés par un groupe social.

    Il ne s’agit pas d’une conscience au sens individuel, mais plutôt d’un sentiment d’appartenance et d’une cohésion sociale qui unit les membres d’une communauté.  »

    Q : ‘ Jorion a en outre suggéré que la conscience se trompe lorsqu’elle se prend pour la cause des actions humaines alors qu’elle n’est rien de plus qu’une conséquence accessoire du processus d’enregistrement qui
    permet à la mémoire de se constituer.’ Quid?

    R :  » La perspective que vous mentionnez, attribuée à l’anthropologue et essayiste Paul Jorion, est une idée provocatrice qui remet en question la place centrale de la conscience dans notre compréhension de l’action humaine.

    La Conscience comme Conséquence :

    Selon cette thèse, la conscience ne serait pas la cause de nos actions, mais plutôt une conséquence accessoire d’un processus neurobiologique et cognitif plus fondamental.
    Autrement dit, nos décisions et nos actes seraient principalement le résultat de mécanismes neuronaux inconscients. La conscience ne ferait qu’enregistrer ces événements après qu’ils se soient produits, créant l’illusion que nous en sommes à l’origine.

    Cette idée se rapproche de certaines conclusions tirées d’expériences en neurosciences, notamment celles de Benjamin Libet. Dans les années 1980, Libet a montré qu’un potentiel de préparation du cerveau, une activité électrique cérébrale, précède l’instant où une personne devient consciente de sa décision de bouger.
    Pour certains, cela suggère que la conscience n’est qu’un spectateur tardif d’une décision déjà prise par le cerveau.

    Le Rôle de la Mémoire

    La mémoire joue un rôle clé dans cette approche. La conscience serait un sous-produit du processus d’enregistrement qui permet à la mémoire de se constituer.
    La fonction de la conscience serait de créer une narration cohérente de nos actions passées, ce qui nous donne le sentiment d’un contrôle et d’une continuité dans notre existence.
    C’est un peu comme si le cerveau agissait en coulisses et que la conscience ne faisait qu’écrire le compte rendu final, après que tout soit terminé.

    Une perspective plus large

    Cette vision déterministe de la conscience s’oppose à la conception traditionnelle qui en fait le fondement de notre libre arbitre et de notre responsabilité morale.

    Toutefois , d’autres interprétations des travaux de Libet et de la neuroscience cognitive soutiennent que, même si la conscience n’initie pas l’action, elle peut avoir un rôle de « veto ».
    Elle aurait la capacité de bloquer ou de moduler une action en cours, ce qui lui conférerait tout de même une certaine influence sur nos choix.

    La conscience reste un sujet de débat intense entre philosophes et scientifiques.  »

    Paul Jorion – Sidération et prise de conscience : https://www.youtube.com/watch?v=zE9wvsWZs6k
    +++++++++++++++++++++++++++++++++++++

  3. Avatar de PAD
    PAD

    Et si ce qui n’avait pas eu lieu pendant vingt ans, relier l’inconscient neuronal à l’illusion du libre arbitre était en train de se produire grâce à l’IA elle-même ?

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