L’ÉCONOMIQUE COMME L’INTERACTION HUMAINE DANS LA PERSPECTIVE DU PRIX

Ce que je vais faire ici est un peu inhabituel : je vais vous proposer comme billet, trois pages d’un de mes livres. La raison est la suivante : dans « Les questions qui restent à résoudre » que je termine en ce moment de rédiger, je reviens entre autres, et dans une perspective plus globale, sur des questions que j’ai déjà évoquées dans mon livre « Le prix » (2010 : 295-297). La question que je vous pose, c’est celle-ci : à la lumière du débat que nous avons eu il y a quelques semaines autour de mon feuilleton des « questions à résoudre », faut-il modifier les conclusions que je proposais dans ce livre il y a deux ans ?

L’économique comme l’interaction humaine dans la perspective du prix

Une nouvelle théorie de l’économie est impliquée par la double hypothèse développée dans cet ouvrage, du « prix comme interaction humaine », et de « l’économie comme les choses dans la perspective du prix ». Il a été suggéré ici que l’équation abondance ou rareté des personnes contribuant à définir le risque de crédit qu’elles constituent pour les autres, à quoi s’ajoutent la dangerosité des activités exercées et l’irrégularité de celles-ci, le risque global des personnes déterminant leur statut, le statut relatif de différents sous-groupes définissant le prix, procure le cadre d’une nouvelle théorie de la société où le prix des personnes détermine le prix des choses.

Une ligne qui se dégage, et qui s’inscrit logiquement dans l’évolution récente de l’anthropologie économique, est la nécessité d’envisager l’économie non pas comme un domaine autonome mais comme un élément serti (embedded) dans le contexte sociopolitique. C’est là une réalité à laquelle m’a confronté la décision de prendre au sérieux les conceptions qu’entretiennent les acteurs qui me fournirent mes données initiales relatives aux marchés de producteurs. En accordant foi aux représentations des pêcheurs artisans européens et africains eux-mêmes sur la formation des prix, j’ai refusé de suivre la « ligne de moindre résistance » qui s’offrait tout naturellement à moi : qu’en cas de désaccord entre le pêcheur et l’économiste, ce dernier avait nécessairement raison et le premier nécessairement tort.

En dépit de la possibilité toujours offerte au pêcheur d’alterner ou même d’invoquer simultanément le modèle de l’économiste valant pour la Réalité-objective et son modèle à lui valant pour le monde réel, leur mise en parallèle finit toujours par achopper sur ce fait central à l’économie telle qu’elle est vécue par le pêcheur : l’importance vitale de pouvoir « défendre sa marchandise » au cours de la vente, condition sine qua non pour lui, non seulement de la réussite sociale mais plus simplement de la satisfaction humaine. La perspective qui se dégage dans la ligne esquissée par le pêcheur évoquant ses ventes, suggère en effet que le facteur déterminant de la formation des prix ne serait pas la confrontation nue de l’offre et de la demande mais le statut réciproque des parties mises en présence dans la vente des produits de la mer.

Cela signifie que l’« économisme » inhérent aux sciences sociales contemporaines, et qui conduit souvent à rendre compte de la sociologie de nos sociétés en termes de leur contexte économique (voire – dans le pire des cas – à vouloir construire une sociologie autour de l’homo oeconomicus), devrait être inversé : c’est au contraire, semble-t-il, l’économie dont il devrait être rendu compte dans le contexte du tissu social dont nos sociétés se composent. C’est donc un « sociologisme » qui remplacerait nécessairement l’« économisme » dans des réflexions du type de celle que je mène ici.

Pour ce qui touche au débat interne aux sciences économiques, entre économie politique et science économique (marginaliste), il devrait être clair que, dans l’examen des faits présentés ici, les perspectives ouvertes par la première s’avèrent plus éclairantes que celles ouvertes par la seconde, qui demeure emprisonnée dans un psychologisme et un moralisme dont elle est bien loin de maîtriser les implications méthodologiques et épistémologiques. Notons cependant que la théorie de la valeur sous-jacente à l’économie politique, d’Adam Smith à Marx en passant par Ricardo, celle du coût du travail (social) incorporé, semble, elle aussi, battue en brèche, dans la mesure où il est possible de se passer entièrement d’une théorie économique de la valeur au profit d’une théorie sociologique du statut.

J’ai cependant retenu à titre d’hypothèse plausible, la notion de salaire de subsistance dont le montant doit être nécessairement incorporé au prix obtenu dans les échanges, et dont les parties en présence tiennent compte implicitement quand elles expriment leur évaluation d’un « juste prix ».

Si la voie entrouverte ici, qui reconnaît au statut social des acteurs un rôle déterminant dans la formation des prix, devait se révéler féconde, il serait a posteriori surprenant que Marx ne l’ait pas envisagée lui-même : la notion de détermination du prix en termes de statut social des parties n’est-elle pas en fait mieux accordée à sa théorie politique, que la théorie de la valeur en termes de quantité de travail incorporée aux produits, théorie qu’il emprunta sans plus à Smith et à Ricardo, et qui pose alors à son tour la question devenue insoluble de la valeur du temps de travail ?

Le paradoxe n’est qu’apparent qui me conduit – sur la suggestion de Polanyi – à retrouver chez Aristote une conception de la formation des prix davantage en prise avec les faits que l’ensemble de celles proposées par la science économique : l’économie à petite échelle de la Grèce antique, où le partage de la société en classes, en conditions, avait valeur légale, se prêtait sans doute mieux à ce qu’apparaisse la subordination de l’économique au sociopolitique, que celle des sociétés modernes où les variations de prix peuvent être attribuées, avec une vraisemblance relative, à la seule confrontation de l’offre et de la demande.

La conception aristotélicienne présente aussi l’avantage décisif de rendre compte de manière satisfaisante du sentiment probablement justifié éprouvé par pêcheurs et mareyeurs qu’ils jouent un rôle effectif dans la détermination du prix. Elle rend compte également d’une observation banale que nulle théorisation n’a cependant prise au sérieux : que dans nos sociétés, c’est le statut social qui détermine la fortune, et non l’inverse, en tant qu’il règle l’accès à cette fraction du surplus qui revient aux partenaires économiques au titre de rente, de profit ou de salaire.

Partager :

192 réponses à “L’ÉCONOMIQUE COMME L’INTERACTION HUMAINE DANS LA PERSPECTIVE DU PRIX

  1. Avatar de Troncal
    Troncal

    J’avoue être un peu déboussolé par toutes ces grandes envolées sur le prix.
    J’ai appris successivement à l’école primaire, que le prix d’un bien, c’était le prix de revient + un « juste » bénéfice. Puis plus tard, que le prix, c’était selon la théorie du surplus du consommateur, ce que le consommateur est prêt à y mettre. (voir l’article de Wikipedia pour les détails). Pourquoi je vendrais mon poisson 3 euros si quelqu’un veut l’acheter 4 ? en quelques sortes, ce sont les enchères, ça marche en situation de rareté relative des biens. (exemple de la fixation du prix des licences de télécom, ou de diffusion de droits sportifs…)
    Maintenant ce qui apparait c’est que le prix, c’est « le prix du marché », le balancier étant passé du coté des « consommateurs » : pourquoi je paierais mon poisson 4 euros, puisque certains pêcheurs veulent bien me vendre le même (et c’est une vrai question de se différencier au moins en apparence) 3 euros ? ça marche en situation de surplus de production (par rapport à une demande solvable bien sûr, ça ne veut pas dire qu’il y aura du poisson pour tout le monde). L’exemple récent, ce sont les panneaux photovoltaïques chinois, qui mettent en faillite les producteurs du même bien européens, allemands ou français (rattrapés par les cheveux par EDF, au moins jusqu’aux élections)…Et un pays, ou une firme peut produire à perte pour tuer toute concurrence (avant d’augmenter de nouveaux les prix lorsqu’il ou elle aura « fait le ménage »).
    Ce qui est important, c’est qu’il n’y a pas un mais des mécanismes de fixation des prix, qui se complètent, se concurrencent, se chevauchent à une même période et se différencient pour les différents types de biens et services
    Il faut y ajouter quelque chose de très sous-estimé systématiquement, qui est l’influence des acteurs qui ne sont ni producteurs ni consommateurs, mais ayant de puissants moyens d’action sur la décision d’achat (voir entre mille autres l’exemple du général indien Singh http://www.opex360.com/2012/03/28/le-coup-de-gueule-dun-general-indien/). Là ce sont les courtiers payés à la commission en fonction des produits vendus, ailleurs les intermédiaires traditionnels de grande distribution, ailleurs des politiques ou leurs représentants…
    Vouloir dire comment se fixe « les » prix en général me parait assez problématique

  2. Avatar de Yann Q.
    Yann Q.

    Et quid du volet environnemental du prix?

  3. Avatar de G L
    G L

    J’ai cependant retenu à titre d’hypothèse plausible, la notion de salaire de subsistance dont le montant doit être nécessairement incorporé au prix obtenu dans les échanges, et dont les parties en présence tiennent compte implicitement quand elles expriment leur évaluation d’un ‘juste prix’.

    Vous devriez aller en discuter à Rome avec le Pape !

    Par cette blague – c’en est bien une – je cherche à exprimer l’idée confuse mais qui persiste depuis longtemps dans mon esprit que l’échelle à laquelle se passent beaucoup de choses (commerce ou finance mondiale, etc) la tradition était que seul le Pape puisse parfois oser prétendre qu’il y ait des « règles implicites » autres que la règle du plus fort.

    Même si elle existe encore, on ne parle pratiquement plus de l’OIT: En 1919 les États signataires du Traité de Versailles créent l’Organisation internationale du Travail (OIT). Avec la résolution du premier conflit mondial, beaucoup sont conscients du fait «qu’il existe des conditions de travail impliquant pour un grand nombre de personnes l’injustice, la misère et les privations, ce qui engendre un tel mécontentement que la paix et l’harmonie universelles sont mises en danger» (Wikipedia)

    Faut-il suggérer la création d’un groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution de l’économie et des finances mondiales (sur le modèle du GIEC) visant à élaborer un consensus scientifique sur ces questions ?

  4. Avatar de PHILGILL
    PHILGILL

    Merci @ BasicRabbit et @ Jorion pour tous ces éclaircissements. Certains textes méritent parfois d’être répétés pour des personnes qui n’en auraient pas pris connaissance par la lecture, ou comme moi, autodidacte(s) ayant besoin en plus de pédagogie, la répétition en étant une.
    Ma contribution très modeste à ce blog, me permet aussi de compléter petit à petit (et le chemin est long) ma connaissance sur des sujets économiques et domaines culturels variés.
    Merci à Rabbit, dont j’apprécie de plus en plus sa ferveur à nous faire partager sa passion pour R. THOM.
    Merci à JORION qui aime à nous faire entendre ARISTOTE. Et qui par la «magie» du savoir et du langage «s’entretient » encore avec les meilleurs esprits d’aujourd’hui. En héritage de quoi, nous devons nous réjouir de la Philosophie…
    Aussi malgré tout, de l’Histoire dans laquelle, nous pauvres mortels continuont de voguer contre vents et marées et qui nous rappellent à chaque occasion de tempêtes, nos suffisances souvent partagées (et les miennes… dans le lot).
    Merci encore pour cet enrichissement et porte-voix citoyen qui a en prime le gros avantage de ne pas percer le porte-monnaie, seulement une juste contribution en intérêt général.

    Montaigne, que j’apprécie particulièrement avait fait peindre sur les poutres du plafond de sa tour des sentences grecques et latines. Je vous cite l’une d’entre elles.
    – «Servare modum finemque tenere Naturamque sequi»
    Lucain (poète)
    – Garder la mesure, observer la limite et suivre la Nature.
    On se sent respirer….
    «Comprendre, c’est en partie résoudre. La bonté c’est d’y intégrer le reste.»
    PhilGill (votre serviteur)

  5. Avatar de MAZERAN Jean-marc
    MAZERAN Jean-marc

    Le domaine des normes juridiques peuvent-elles atteindre à la formations des prix (cette dernière étant une capacité à la négociation en de l’échange plus ou moins par le statut social) Législation anti-truste, contre les entente, monopole de fait, abus de position dominante….?

    Même si nous sommes tous des losers potentiels ou avérer (comme moi), la seule manière de redresser un prix déloyal, vu qui est une construction sociale et de lancer contre lui une autres construction sociale?…. Soit par le droit , soit par groupement ou réseau social (internet ou pas), entente d’une multiplicité de consommateur….

  6. Avatar de MAZERAN Jean-marc
    MAZERAN Jean-marc

    Mais au départ dans la doctrine économique de base, le prix est un gain de temps dans l’échange. Les individus n’ont pas besoin de se parler….

  7. Avatar de juan nessy
    juan nessy

    J’ai relu les deux premières lignes de votre développement :

     » – le prix comme interaction humaine  »

    « – l’économie comme les choses dans la perspective du prix  »

    Est que la synthèse , plutôt que votre titre de billet ( l’économique comme l’interaction humaine dans la perspective du prix ) , n’est pas plus naturellemnt , en jouant du prix comme pivot présent dans vos deux assertions :

     » l’économie comme les choses dans la perspective de l’interaction humaine  »

    ?

    1. Avatar de juan nessy
      juan nessy

      Pour être plus conforme à mes intutions , ce serait d’ailleurs plutôt :

       » l’économie comme les choses dans la perspective d’une partie de l’interaction humaine  »

      Le prix y a bien sûr une place , mais en « transition  » ( comme le pivot de vos deux phrases ) entre  » l’économie  » et  » l’interaction humaine  » , un objet de « transit » affecté par les deux domaines qu’il alimente , et qu’il devrait  » représenter » pluitôt que s’en nourrir .

    2. Avatar de timiota
      timiota

      C’est l’analogue de « l’objet transitionnel » de Winnicot ?

      1. Avatar de juan nessy
        juan nessy

        C’est tout bêtement un point d’accroche entre deux propositions dont semble-t-il Paul Jorion souhaite faire une seule .

        Donald n’était pas caché derrière la porte .

  8. Avatar de MAZERAN Jean-marc
    MAZERAN Jean-marc

    Si les différents prix des échanges de notre vie quotidienne synthétiser notre rapport aux autres(notamment en terme de statut social), j’espère que ce n’est pas le seul mode de rapport humain, sinon cela déshumanise le rapport à l’autre. J’espère que le prix n’est à la fois une synthèse et une réduction des rapports sociaux…. Si cela était, ce serait peut-être pour cela que le modèle que nous vivons dans les pays occidentaux est en crise.

    1. Avatar de DidierF
      DidierF

      Totalement d’accord avec vous monsieur Mazeran.

    2. Avatar de juan nessy
      juan nessy

      Voir le succès de  » l’analyse transactionnelle  » , chère à Eric Berne .

  9. Avatar de schizosophie
    schizosophie

    En guise d’amicale contribution critique, deux extraits de Paul Mattick que je traduis et commente, relativement au forceps demandé par le « billet ». Je ne propose pas d’autre conclusion puisque, par définition, une conclusion est censée faire le bilan d’un texte. Mais voyant bien que celle-ci propose une perspective, j’en propose une autre… déjà ancienne.

    In any case, our practical inability to reduce price to value, or value to price, cannot alter the fact that whatever the workers receive in terms of prices must be less than they produce in term of prices, and whatever falls to the capitalists in form of profit must be extracted from the workers in the production process. A realistic analysis of prices and profits leads inescapably to value and surplus value.

    According to Marx, the confusions of the classical economists with regard to value and price can be traced to their various attempts to abstract from the difference between surplus value and profit, in order to maintain the value concept, or to give up the latter altogether in favor of market prices. What was necessary, however, were further abstractions, so as to disclose the identity of value and price, of profit and surplus value, for society as a whole, in the value form of necessary and surplus labor, witch underlies all other economics categories.

    (p. 51, The Transformation problem in Marxism Last Refuge of the Bourgeoisie ?)

    « Quoi qu’il en soit, notre inaptitude pratique à réduire le prix à la valeur, ou la valeur au prix, ne peut pas altérer le fait que quoi que les travailleurs reçoivent en termes de prix, cela doit être moins que ce qu’ils produisent en termes de prix et que quoi qu’il échoit aux capitalistes sous forme de profit, cela doit être extrait des travailleurs dans le processus de production. Une analyse réaliste des prix et des profits mène immanquablement à la valeur et à la plus-value. Cependant, il est nécessaire d’aller plus loin dans l’abstraction afin de dévoiler l’identité entre la valeur et le prix, entre le profit et la plus-value, pour la société dans son ensemble, sous la forme valeur du travail nécessaire et du surtravail qui sous-tendent toutes les autres catégories économiques.

    Selon Marx, les confusions des économistes classiques en ce qui concerne la valeur et le prix peuvent être repérées par leurs différentes tentatives de faire abstraction de la différence entre la plus-value et le profit soit en vue de conserver la notion de valeur, soit pour abandonner cette dernière en faveur de la notion de prix du marché. »

    Mattick appelle ici « économistes classiques » ceux qui lui sont contemporains. Ceux qui ne dévoilent pas l’identité génitrice de confusion entre valeur et prix et qui choisissent l’existence de l’une au détriment de le celle de l’autre. Or, la valeur leurre parce qu’elle est prise pour le prix, or elle n’existe pas positivement, par exemple le taux d’exploitation dont s’enquiert Castoriadis n’est pas dicible, puisqu’elle prend sa source dans un écart qu’on appelle aussi exploitation, extorsion, extraction, chagrin, etc. C’est pourquoi elle l’ombre du salariat, lequel est la norme du statut social du citoyen ne disposant pas, ou à peine, de capital. D’ailleurs, les statuts sociaux non immédiatement liés à la condition salariale y sont indicés : l’étudiant comme aspirant salarié, le retraité selon le temps qu’il y a passé, le chômeur selon les deux, etc. Pour ceux qui disposent de capital, la fortune détermine le statut social. Dans ce contexte, la notion de salaire de subsistance peut sembler une rupture, mais elle fut déjà réalisée sous la forme du RMI, qui fonctionne comme une soupape sociale de sécurité et dans une société où presque rien ne vaut rien, hors les contributions amicales. Les hommes sont plus pauvres avec 25 euros en poche pour la journée dans l’environnement moderne où la séparation règne qu’avec rien là où les hommes sont capables de bon commerce sans un.

    (…) Bortkiewicz approaches the value relations as if they were actually ascertainable in price relations. Like Ricardo, he conceives of labor-time value in terms of physical commodity units, and not, like Marx, in terms of socialy necessary abstract labor time.

    (p. 49)

    « (…) Bortkiewiecz aborde les relations de valeur comme si elles étaient réellement vérifiables en tant que relations de prix. Comme Ricardo, il conçoit le temps de travail en termes d’unités de marchandises physiques, et non pas, comme Marx, en termes de temps de travail socialement abstrait. »

    Voilà des bribes de ce qu’écrivait Paul Mattick, décédé en février 1981. Son dernier livre parut en 1983 chez M. E. Sharp, Inc. J’ai traduit ce second extrait pour deux raisons. Parce que ce qu’il y est dit de Borkiewicz dit très clairement ce qui me vient à travers les yeux en lisant Paul Jorion. Parce que lorsque Jorion écrit que Marx « emprunta sans plus à Smith et à Ricardo », il me semble abstraire, au sens d’oublier, le terme abstract, qui fait toute la différence entre les notions de valeur respectivement utilisées chez Smith ou Ricardo et chez Marx.

    1. Avatar de Nemo3637
      Nemo3637

      C’est ce que je voulais dire mais je n’avais pas le temps… Merci

  10. Avatar de PHILGILL
    PHILGILL

    que dans nos sociétés, c’est le statut social qui détermine la fortune, et non l’inverse, …

    …en tant qu’il règle l’accès à cette fraction du surplus qui revient aux partenaires économiques au titre de rente, de profit ou de salaire.

    Je viens cette fois ci, encore sur cette phrase qui ne cesse de m’intriguer. Non pas tant pour sa première partie que je trouve avoir l’avantage de poser le principe social dans l’ordre bon et tenant compte de l’expérience et la juste observation que Jorion présente…
    Mais intervenir, sur ce que je «ressens» plus sur la deuxième partie.
    Je dis, ce que je ressens, car vouloir développer ici, une «physique sociale», je n’en serais bien-sûr pas capable.
    En faisant cependant une introduction rapide, en rappel : «De la division du travail social» :
    «…Comment se fait-il que, tout en devenant plus autonome, l’individu dépende plus étroitement de la société ? Comment peut-il être à la fois plus personnel et plus solidaire ? Car il est incontestable que les deux mouvements, si contradictoires qu’ils paraissent, se poursuivent parallèlement ». Durkheim
    (Si les sociétés peuvent concilier ordre et liberté, répond Durkheim, c’est grâce à la « division du travail ». Celle-ci doit en effet permettre de passer d’une solidarité mécanique, fondée sur la similitude, au développement d’une solidarité organique, c’est-à-dire résultant de l’interdépendance qui existe entre des individus aux activités différentes mais ayant besoin les uns des autres pour vivre…

    Mon approche sera donc peu orthodoxe. Ce qui n’a rien pour me déplaire en tant qu’autodidacte.
    À la première lecture de cet article et plus précisément sur sa conclusion, une image m’est venue aussitôt en tête. Et comme souvent, comme pour d’autres occasions, c’est un tableau.
    https://plus.google.com/u/0/
    En l’occurence : «Le changeur est sa femme ». Peint par le peintre flamand Quentin METSYS, et réalisé en 1514. Oeuvre picturale, des plus magnifiques. Mon illustration n’en sera que très partielle, je m’en excuse, mais ne servira que pour mener mon argumentaire (brouillon) à terme.
    Elle portera donc dans un premier temps sur le rapport «mécanique» et ou «organique» du prix, en échange.
    J‘entends par PRIX MÉCANIQUE le «statut social» qui règle la mécanique fiscale/sociale – recette/salaire (qu’à enrayée très sérieusement la crise dans sa justification même).
    J’entends par PRIX ORGANIQUE la «fortune» comme énergie potentielle fixée par les corps sociaux entre eux. Échange d’énergie en biens d’ action/production – repos/travail ( dont sa revalorisation réelle aurait pour impact déterminant la mutation de l‘économie. Du moins peut on en déduire par le raisonnement et l’observation.
    Nous pourrions alors dresser une nouvelle carte et territoire de la division du travail,
    à travail égal.

    Au centre du tableau, ce qui attire notre regard en premier lieu comme pour les regards des trois personnages (le troisième étant le client en reflet dans le miroir convexe), est l’or.
    Mais que cache en réalité son attente ?
    Regarde t-il le prêteur, échanger des valeurs contre des espèces sur le trébuchet ?
    Ou au contraire, regarde t-il sa femme durant cette transaction et un mouvement inverse.
    Ce que l’on voit c’est que du coût, la femme détourne son regard du livre sacré, et se laisse absorber (apparemment) par le trébuchet, comme attirée par l’or, de même que son mari, à la pose légèrement alanguie et ennuyé est tout entier (apparemment) à sa pesée. Mais le client joue des sentiments contraires – matériels et amoureux.
    Tandis que l’un pèse et additionne, l’autre se voit (un temps) soustrait, par l’enlèvement et ruse des pièces, à la lecture du livre sacré. (À souligner ici qu’il s’agit d’un livre d’heures); un tiers (en la personne du client, mis en retrait, presque abstrait, mais pourtant au devant et au centre du tableau par sa représentation factice et imitée : l’or) aurait fait basculer l’attention du couple, du virtuel au matériel.
    Faisant de ce tableau une Allégorie (du prix mécanique/organique – CQFD – Enfin je crois… d’une manière allégorique)

    Citation biblique ajoutée et aujourd’hui effacée du cadre du tableau :
    Statura justa et aequa sint pondere – « Que la balance soit juste et les poids égaux ».

    1. Avatar de schizosophie
      schizosophie

      L’image de PHILGILL :

      Quentin Metsys (1514) « Changeur » ou « Prêteur », il semble que la traduction oscille.

      et une bien ressemblante :

      Marinus van Reymerswaele (1540)

      1. Avatar de PHILGILL
        PHILGILL

        @ schizosophie

        Merci pour le e-change.

Contact

Contactez Paul Jorion

Commentaires récents

  1. Mauvaise passe pour le Donald : appel rejeté dans sa condamnation pour diffamation de Jean Carroll à 83 millions de…

Articles récents

Catégories

Archives

Tags

Allemagne Aristote bancor BCE Bourse Brexit capitalisme centrale nucléaire de Fukushima ChatGPT Chine Confinement Coronavirus Covid-19 dette dette publique Donald Trump Emmanuel Macron Espagne Etats-Unis Europe extinction du genre humain FMI France Grèce intelligence artificielle interdiction des paris sur les fluctuations de prix Italie Japon John Maynard Keynes Karl Marx pandémie Portugal psychanalyse robotisation Royaume-Uni Russie réchauffement climatique Réfugiés spéculation Thomas Piketty Ukraine ultralibéralisme Vladimir Poutine zone euro « Le dernier qui s'en va éteint la lumière »

Meta