Une charte « Blog de Paul Jorion » pour les entreprises

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Hier après-midi, je discutais quelque part en France de l’avenir de la région avec les représentants locaux de la Chambre de Commerce et d’Industrie. Il était question du genre d’industries qu’il serait bon de voir éclore mais aussi de l’image écornée de l’industrie locale auprès de la population en termes d’emploi – le nombre d’emplois, et leur qualité. Trop de mauvais sentiments, trop d’espérances déçues.

J’écoutais essentiellement. C’est sur le chemin du retour que les idées ont commencé à germer.

Nous avons évoqué ici le mois dernier, la nécessité de passer à la phase constructive, je concluais mon billet en écrivant : « Il nous faut reconstruire. Aucun pouvoir en place ne nous aidera : le déclin, la décadence sont inscrits comme principes dans leurs tables de la Loi. Nous devrons le faire seuls ». Il n’est pas pour autant possible de tout reconstruire tout partout : comme le disait un commentateur ce matin, trop d’argent est en jeu pour qu’on nous laisse faire sans nous tomber dessus à bras raccourcis. Mais on peut tenter d’infléchir.

Et ce qui m’est venu à l’esprit, c’est une sorte de label « Blog de Paul Jorion » – il vaudrait mieux dire « charte » (merci Julien) – pour les entreprises. Celles qui souscriraient aux principes obtiendraient le label. Quitte pour les régions, les villes, les « zones », de devenir alors les fers de lance de cette nouvelle perspective, cette nouvelle manière de travailler et de partager la richesse produite.

Parce que – il faut bien le dire – si l’image de l’industrie est écornée dans les « petits pays », ce n’est pas sans bonne raison : si la piraterie est aujourd’hui cantonnée à quelques mers du globe, elle connaît toujours de beaux jours dans le domaine de l’entreprise.

Je me contente pour le moment de lancer la discussion sur ce que devrait être un carnet des charges, j’esquisse quelques pistes. Il ne faut pas faire trop long car comme le « financial overhaul » américain vient de le rappeler une fois de plus, l’enfer est pavé de bonnes intentions et le diable est dans les détails.

Voici un squelette. Je compte sur vous pour l’étoffer et/ou le mettre en pièces.

1) Les salariés sont des partenaires a part entière dans la répartition de la richesse créée par l’entreprise, pas des « coûts de production » qu’il s’agit de réduire au maximum. L’entreprise prend au sérieux le fait que c’est le travail qui produit la marchandise ou le service, pas le génie spéculatif de ses dirigeants ou de ses investisseurs. Les gains de productivité bénéficient aux travailleurs. Un salarié remplacé par un robot reçoit une partie de la richesse créée par le robot.

2) L’entreprise est axée sur l’autofinancement. On ne distribue pas toute la richesse créée en dividendes pour les actionnaires et en bonus pour les patrons – pour devoir ensuite emprunter l’argent nécessaire pour faire tourner la boîte !

3) Interdiction des stock-options. Pas de court-termisme de spéculation boursière pour les dirigeants de l’entreprise mais une visée à long terme de son avenir. Le dirigeant est un « entrepreneur », pas la personne chargée de créer une bulle financière et de filer ensuite avec la caisse, quand la compagnie se krache. Il est là pour exercer une activité qui – pour utiliser les termes de Lord Adair Turner – présente « une utilité d’un point de vue social ».

4) Démilitarisation de la structure de décision de l’entreprise. Quel est le nombre adéquat de niveaux hiérarchiques dans l’entreprise : deux ou trois ? Les influences latérales sont les meilleures.

5) Entreprises propres : pas de déchets intraitables ou non-traités.

6) Entreprises vertueuses : pas de firmes d’armement, pas de compagnies de mercenaires. On n’est pas là pour massacrer ou se faire massacrer.

(Très court) etc.

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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