On se dit : « Ah ! la Joconde, c’est vraiment beau. Ce sourire de la Mona Lisa ! » Et puis on pense à Léonard de Vinci, et on consulte Wikipedia : « Léonard de Vinci, mort en 1519 ». Cinq siècles ! Cinq cents ans !
Je viens de répondre à un commentaire qui évoque les peintres Bram van Velde et Marcus Rothko, en disant que quant à peindre comme le fit van Velde, je préférais de loin la manière de Roberto Matta. Et je me trompe initialement dans mon commentaire : je mentionne comme date de la mort de Matta, « 2010 » au lieu de « 2002 ». Puis je corrige. Mais en même temps, au moment de corriger, je me dis que le quantitatif « 2002 » n’a en réalité aucune importance puisque la seule chose qui compte, c’est le qualitatif : le fait qu’il soit mort plutôt que vivant en ce moment-même : Matta « n’est plus des nôtres », au sein de ce monde sensible où nous nous trouvons encore, cher lecteur, vous et moi.
Et je me souviens du coup du thème « stop-crève », que ressassait Cavanna dans Charlie-Hebdo en 1976 : ses questions bizarres sur pourquoi il se fait qu’on doive mourir, et l’embarras qui enflait alors comme la marée parmi ses collègues du magazine : leurs allusions de plus en plus appuyées au fait que « François disjoncte un peu en ce moment, c’est pas grave, faut pas faire attention, ça va passer ! », alors que les questions qu’il posait étaient celles qui feraient la fierté de l’anthropologue : non pas « Pourquoi les Papous de Nouvelle-Guinée se passent-ils une plume en travers du septum nasal et les Indiens d’Amérique dans un bandeau autour de la tête ? », mais « Pourquoi mangeons-nous, buvons-nous, faisons-nous l’amour, chions-nous et pissons-nous, et pourquoi sommes-nous né un jour, et mort un autre jour, mais que la plupart du temps auquel on puisse penser, nous ne sommes soit pas encore né, soit déjà mort ? »
La question n’a pas d’importance si on se dit qu’on est là simplement, comme dans la salle d’attente du dentiste, en attendant d’aller au ciel. Mais si on pense qu’il n’y a au firmament que des étoiles, des planètes, leurs satellites, et vraiment beaucoup de vide ?
P.S. : Julien A. et François L. communiquent : « Paul disjoncte un peu en ce moment, c’est pas grave, faut pas faire attention, ça va passer ! »
189 réponses à “LES VRAIES QUESTIONS QUE SE POSENT LES ANTHROPOLOGUES”