La réforme du système bancaire de la zone euro est facile à faire, par Pierre Sarton du Jonchay

Billet invité.

Chers amis de Finance Watch,

Comme vous pouvez le lire sur le Blog de Paul Jorion, nous décrivons sous l’angle politique, scientifique et technique les décisions que l’Union Européenne doit prendre pour transformer l’euro en système monétaire international de la démocratie. Nous achevons un prototype informatique de chambre de compensation appliquant les règles du bancor. Nous pouvons montrer que la Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie est applicable dans l’espace numérique mondial moyennant la transformation de l’Union Européenne en confédération d’États subsidiaires de la démocratie des Européens.

La création d’un État confédéral européen consiste à doter la zone euro d’un Trésor Public confédératif présidé par un gouverneur élu par le Parlement Européen. Le Conseil Européen devient le sénat de l’État confédéral : il défend et représente les intérêts nationaux dans la politique monétaire et bancaire de la zone euro. La mission fondamentale de l’État confédéral est la régulation d’un espace économique européen conforme aux droits nationaux et aux solidarités sociales de la démocratie européenne.

Le pilier de la régulation économique et sociale de l’Union est la monnaie. Le vecteur de la régulation est le système bancaire en euro régi par le droit multinational de l’économie des échanges. Le principe de la régulation est la compensation keynésienne type bancor : les États y sont des acteurs financiers à égalité de droit avec les acteurs privés ; le prix économique de la régulation politique du marché est intégrée dans l’équilibre général des prix. Le pouvoir d’achat de l’euro n’est plus alors seulement défini par les traités monétaires européens librement interprétés par la BCE et par les banques mais par la politique budgétaire et fiscale de tous les États européens coordonnés par l’arbitre confédéral de politique financière.

Techniquement, le système interbancaire de paiement en euro est muté en chambre de compensation centrale du marché monétaire européen. La condition d’accès à cette compensation est l’application des règles financières et monétaires de l’euro souverainement contrôlées et arbitrées par l’État confédéral. Le gouvernement financier confédéral est financé par une fiscalité directement prélevée en compensation et votée par le Parlement Européen. La taxation des transactions financières est la prime d’assurance de la démocratie dans la monnaie. La Confédération Européenne a ses ressources propres distinctes des États nationaux qui conservent intégralement leur souveraineté et leur politique propre.

Le nouveau marché monétaire en euro a deux fonctions : il fournit une valorisation légale, fiable et concurrentielle du collatéral à l’émission monétaire de la BCE ; il assure les budgets et les passifs de toutes les institutions admises dans la compensation paneuropéenne. Le pillage bancaire des finances publiques nationales est stoppé net. Ce ne sont plus les États nationaux concurrents qui assurent en dernier ressort la solvabilité des institutions financières en euro mais le budget confédéral européen ; lequel alimente un fond public européen d’assurance de la stabilité financière et monétaire des États et des banques.

Sur le plan politique, la compensation en euro-bancor restaure une économie de l’intérêt général. Ni les gouvernements nationaux, ni les entreprises, ni les banques ne peuvent plus se cacher derrière des règlementations factices pour spéculer sur leurs intérêts particuliers aux dépens de la démocratie du bien commun. Il est mis fin à la propriété exclusivement privée du capital : le prix du capital dans la compensation centrale en euro ne peut plus être coté en dehors de la monnaie (out of the money) ; c’est à dire hors de la contribution fiscale à l’état de droit et au prix réel du travail dans la démocratie.

La réintégration du droit de la démocratie dans l’euro donne une autre signification à la libre circulation du capital et au libre échange. Ce n’est plus la définition morale des biens et des services qui est libre mais bien le travail de conception, de production et de réalisation des objets marchands à l’intérieur d’une loi commune qui appartient à tout le monde. Dans la chambre de compensation en euro du droit des Européens, toute collectivité constituée a un capital de paiement proportionnel à l’estimation marchande des biens et services conformes à la loi qu’elle est engagée à livrer.

Le vrai capital restauré par la compensation est la garantie du crédit qui est l’application de la loi commune dans la production des biens et services. La non-livraison par un État, une entreprise ou une personne physique d’un bien vendu en compensation contre un prix en liquidité monétaire, est sanctionné par une imputation sur le capital de la personne morale fautive de la moins-value mutualisée en monnaie. Le mécanisme quantitatif de la compensation est de facto appliqué quand tous les acteurs d’une même loi sont nommément identifiés dans un même état civil, c’est à dire dans une même citoyenneté.

Nous savons bien à quel point la technologie de la compensation est rationnelle, simple, pratique et équitable. Le problème de la mise en œuvre n’est pas technique mais politique. L’effondrement de notre civilisation vient de la disparition par la globalisation numérique de toute limite à l’idéalisme néo-libéral : toute réalité humaine y est négociable dans un marché asymétrique de l’information dirigé par les seigneurs de la finance qui ne font pas du commerce. Vous avez tout à fait raison de faire appel aux citoyens : les élites de notre Union Européenne sont institutionnellement déconnectées de la réalité concrète.

Maintenant, nous avons une délicate mutation intellectuelle à accomplir collectivement. La démocratie que nous avons perdue n’est pas une théorie mais une pensée commune transformable en réalité. Il nous faut reconstruire la discussion du vivre ensemble dans la réalité concrète présente ; il faut que nous puissions dire dans un vrai marché ce qui marche et ce qui ne marche pas selon notre perception commune et singulière de notre réalité européenne. Donc, il faut que le Parlement Européen proclame un État confédéral européen à égalité de droit, de devoir et de pouvoir en euro avec les Etats nationaux.

La compensation keynésienne offre un cadre constitutionnel objectif à un coup d’état légal européen. La réintégration par la monnaie de la fiscalité du droit dans l’économie spécialise l’état national sur les droits de la personne physique et l’état supra-national sur les droits de la personne morale. Avec un euro-bancor, l’Union Européenne devient une société d’États démocratiques dans une économie de droits objectifs en monnaie commune et prix partageables. Les banques redeviennent des banques, c’est à dire des moteurs de calcul de la comptabilité du droit des citoyens.

Voulez-vous que nous coordonnions nos démarches auprès du Parlement Européen ?

Bien à vous.

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