CHINE : Célébration de Sun Yat sen, par DD & DH

Billet invité.

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Aujourd’hui 12 novembre la Chine célèbre officiellement, par la voix de Xi Jinping en personne, le cent cinquantième anniversaire de la naissance (12 novembre 1866) du docteur Sun Yat sen (plus couramment appelé en mandarin Sun Zhongshan). Sun Yat sen est en effet la figure tutélaire par excellence de la Chine du XXIe siècle. Son portrait est le seul à présider aux commémorations du 1er mai en se dressant sur la place Tian An Men, en vis-à-vis de celui, bien connu, de Mao, à l’exact emplacement où trônèrent jusqu’en 1980 (autres temps !), date à laquelle on les remisa, les visages de Marx, Engels, Lénine et Staline. Quant au mausolée gigantesque qui fut édifié pour sa dépouille en 1925, couvrant toute une colline des environs de Nankin, il attire toujours des foules de tous âges, venues de toute la Chine pour exprimer leur respect au père fondateur de la Première République. Sun Yat sen, dont l’héritage est célébré à Pékin comme à Taipei, incarne celui qui le premier proclama le droit de la Chine à la modernité politique. Né au Guangdong, d’origine paysanne, familier des hui (sociétés secrètes) et admirateur des ambitions émancipatrices du mouvement Taiping, Sun, profondément imprégné des traditions chinoises, s’est aussi frotté aux idées occidentales en faisant ses études d’abord à Honolulu où réside son frère aîné, puis à Hong Kong chez les missionnaires anglais. Il y suivra des études de médecine jusqu’à l’obtention de son diplôme. De retour en Chine, il se jette dans l’aventure révolutionnaire en créant une hui, la « Société pour la Régénération de la Chine » (Xingzhonghui) et en fomentant en 1895 à Canton, puis en 1900 à Huizhou des soulèvements qui échouent et le vouent à l’exil. Il voyage alors en Europe et aux États-Unis avant de vivre au Japon, là où s’élaborent la majorité des traductions en chinois d’ouvrages occidentaux, en particulier les œuvres des premiers socialistes et des marxistes qu’évidemment il découvre et dévore. L’année 1904 pendant laquelle il rencontre un autre Chinois, Huang Xing, fondateur comme lui, mais au Hunan, d’une hui « Renouveau de la Chine » (huaxinghui) et réfugié lui aussi au Japon, va être décisive pour Sun : grâce à l’alliance avec Huang Xing, il est désormais reconnu par les intellectuels révolutionnaires qui se méfiaient de lui jusqu’alors. C’est de la fusion des hui existantes que naît la « Ligue Jurée » (Tongmenghui) qui emprunte encore, comme son nom l’indique, aux rituels et modes d’affiliation des hui, mais se donne une doctrine qui l’apparente à un Parti au sens moderne du terme : la forme de gouvernement à mettre en place est une république et celle-ci sera du peuple, par le peuple et pour le peuple. Le programme de ce gouvernement consiste en ce que l’on a appelé le « tridémisme » (sanminzhuyi), à savoir l’application conjointe des trois principes que sont le nationalisme, la démocratie et le bien-être du peuple.

Quand, après l’effondrement de la dynastie Qing et les menaces d’anarchie dues aux troubles de l’année 1911, la République de Nankin est proclamée le 1er janvier 1912, Sun Yat sen en confie la présidence à Yuan Shi kai. Cette république sera très éphémère puisqu’elle débouchera dès mars 1913 sur la dictature de Yuan Shi kai qui livrera bientôt la Chine aux exactions et désordres des Warlords, les « seigneurs de la guerre » qui vont se partager non sans férocité les dépouilles de l’Empire pourrissant. La Ligue Jurée, quant à elle, va mal résister au parlementarisme qui s’instaure avec la république et on la voit éclater en un éparpillement de partis qui déconcerte l’opinion et rend le peuple sceptique. C’est au sein de cette floraison de groupes partisans éclectiques qu’est fondé en août 1912 le Guomindang (parti nationaliste pour le peuple) qui sera amené à se réorganiser en 1924 pour associer en son sein communistes et nationalistes et à la tête duquel Tchang Kaï-chek accèdera à la mort de Sun Yat sen en 1925.

Un petit extrait du discours prononcé par Sun Yat sen le 5 janvier 1912 pour célébrer l’entrée en vigueur de la Première République chinoise peut éclairer les raisons qui rendent son personnage si en phase avec la Chine de Xi Jinping :

« La construction, sur des bases solides et durables, d’une organisation nationale accordée aux capacités de ce pays si longtemps délaissé, représentera notre but constant et l’objet de tous nos efforts. Nous lutterons pour faire progresser notre peuple et lui garantir la paix et nous légiférerons pour sa prospérité.

Nous referons nos lois, réviserons nos codes civil, pénal, commercial et minier ; nous réformerons nos finances et abolirons les restrictions qui pèsent sur les affaires et le commerce ; et nous garantirons la tolérance religieuse. Nous travaillerons sans cesse à améliorer nos relations avec les peuples et les gouvernements étrangers. Avec ce message de paix et de bonne volonté, la République de Chine a espoir qu’elle sera admise dans la famille des nations non seulement pour bénéficier de droits et de privilèges mais aussi pour coopérer à la grande et noble tâche qu’impose la construction d’une civilisation mondiale » (c’est nous qui soulignons).

Des virgules à changer en 2016 ?

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