L’ITALIE SUR UNE PENTE GLISSANTE, par François Leclerc

Billet invité.

Matteo Renzi et Beppe Grillo y étant favorables, la perspective de la tenue en juin prochain des élections législatives italiennes se confirme et celle d’une victoire du Mouvement des 5 étoiles se renforce. Si celle-ci se concrétise, l’appartenance de l’Italie à l’union monétaire sera vite remise en question.

Chacun a ses bonnes raisons de précipiter les élections et de croire qu’il les emportera. Matteo Renzi ne veut pas risquer de perdre le contrôle du Parti démocrate (PD). Il pense que le temps joue aussi pour le mouvement de Beppe Grillo si la vie politique italienne se poursuit sur le mode chaotique actuel, et que lui seul peut y remédier. Et ce dernier estime ne pas avoir besoin d’attendre davantage pour l’emporter.

Entretemps, une réforme de la loi électorale devra être votée, les deux partis étant favorables à l’unification des modèles électoraux des deux chambres que le Président de la République a demandée. Cela reviendra à aligner celui du Sénat sur celui de la Chambre des députés qui est issu du dernier arrêt de la Cour constitutionnelle. De facto, celui-ci instaure la proportionnelle, car aucun parti ne sera en mesure d’atteindre le seuil de 40% des votes qui déclenche le bonus de sièges destiné à donner au gouvernement qu’il formera son assise parlementaire et sa stabilité.

Le PD est au bord de l’éclatement en raison du désaccord portant sur ce calendrier électoral. Pier Luigi Paoli, le prédécesseur de Matteo Renzi au poste de secrétaire général, est opposé au projet d’élections en juin. Il est rejoint par Massimo d’Alema, le leader de la gauche du parti, qui est également favorable à une scission. Celle-ci consommée, une telle évolution du paysage politique où coexisteraient un centre-droit faible et une gauche morcelée serait favorable au Mouvement des 5 étoiles, s’il arrive en tête. Il pourrait chercher des alliances afin de constituer autour de lui une majorité parlementaire.

Ces préparatifs interviennent alors que les rapports entre le gouvernement et la Commission se tendent. Cette dernière est de moins en moins encline à poursuivre des négociations sans fin et a donné à Rome jusqu’à mercredi pour revoir son budget 2017. La prévision actuelle de déficit est de 2,3% du PIB, alors que 1,8% est exigé et que la dette publique est en 2016 de 133% du PIB. De son côté, le gouvernement tergiverse à l’habitude, opposant à « un ajustement budgétaire improvisé », aux effets dépressifs, l’adoption d’une stratégie à long terme comme la lutte contre la fraude fiscale. Des mesures concernant la TVA sont toutefois envisagées, mais il renvoie à fin avril la discussion à ce sujet. Tout cela pourrait se terminer par l’adoption par Bruxelles, excédé, d’une procédure pour dette excessive.

La Commission est prise entre deux impératifs contradictoires. Critiquée pour son laxisme par Wolfgang Schäuble, elle doit réagir. Mais elle va par son intervention placer l’Italie dans l’Europe au centre de la campagne électorale, si les élections ont lieu en juin prochain, et donner des armes au Mouvement des 5 étoiles, fragilisant d’autant le PD et contrecarrant le retour de Matteo Renzi. La pente est glissante.

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