Les 5 immenses défis pour la génération actuelle, par Alexis Toulet

Ouvert aux commentaires.

Parmi les défis que la génération actuelle – non les hommes qui vivront dans trente ans ou dans cent – devrait rencontrer, et auxquels il lui faudra bien (tenter de) faire face, je listerais :

1. Plafonnement des extractions d’énergie fossile
Le pic pétrolier a été décalé par la mise en production des gisements de pétrole de schiste aux Etats-Unis et le retour à la production de l’Irak après la fin de l’occupation américaine. Il reste prévisible à échéance de quelques années, parce que la plus grande partie des gisements mondiaux atteignent ou ont déjà dépassé leur pic et la capacité des schistes américains à compenser n’est pas infinie et pourrait être limitée dans le temps.

Les impacts du passage du pic pétrolier sont discutés mais ne pourront qu’être profonds, car le pétrole reste indispensable à l’économie mondiale notamment les transports. Passer le pic du pétrole sans avoir de solution technique disponible pour le remplacer pourrait être la première collision de l’humanité avec les limites physiques de la planète.

2. Stabilité du système financier mondial
Inutile de développer beaucoup ce point déjà très étudié sur ce blog ! Il suffira de rappeler que la gestion des banques centrales n’est jamais sortie depuis 2008 d’une phase d’assouplissement quantitatif et de taux zéros dont elle ne saurait sortir sans restructurer profondément l’ensemble des dettes mondiales, alors même que les politiques d’assouplissement quantitatif et de taux zéro sont malsaines en elle-même, et alors même que l’ensemble de la machinerie financière qui avait été à l’origine de la crise – spéculation sans frein sur les prix futurs, spéculation automatique ultra-rapide par IA, collatéralisation des dérivés etc. – est resté pratiquement intact sans aucune autre réforme que cosmétique au mieux.

Une nouvelle crise financière mondiale ne pourrait que se transformer en crise économique généralisée aux dimensions du Monde, avec impacts imprévisibles mais probablement brisants à beaucoup de degrés.

3. Désagrégation d’Etats faillis
L’ensemble des tensions soit locales soit structurelles subies par de nombreux Etats les plus fragiles dans le Monde augmente en tendance. Suivant les cas, citons des ressources naturelles limitées surchargées par une démographie très active que ne compense pas une élévation suffisante de l’efficacité économique, ou encore des conflits non résolus entre peuples peu intégrés à un Etat qui ne les représente pas, ou encore l’influence de réseaux idéologiques ou criminels tels djihadisme ou drogue, ou encore l’influence de puissances extérieures luttant pour leur influence réciproque. Somalie, Irak, Syrie, Libye, Yémen, Sahel, Mexique…

Les efforts pour au minimum contenir le désordre, sans parler de le faire reculer, sont insuffisants de la part des principales puissances, quand encore elles ne contribuent pas à l’empirer par leurs luttes.

L’extension de la zone de l’anarchie guerrière d’une part aurait localement des conséquences humaines graves, d’autre part contribuerait à empirer d’autres risques et menacerait de faire tache d’huile si le « modèle » d’Etat djihadiste agressif était réutilisé avec succès dans trop de régions du monde à la fois – menaçant alors d’emporter les défenses.

4. Transition géopolitique avec sortie du moment unipolaire
C’est un lieu commun de constater que la phase de domination écrasante et active des Etats-Unis sur la scène politique mondiale touche à sa fin. D’une part d’autres puissances s’élèvent avant tout la nouvelle superpuissance qu’est devenue la Chine, tandis que certaines deviennent plus actives notamment la Russie, d’autre part les Etats-Unis fatigués de l’Empire et déçus des mécomptes de leurs récentes aventures souhaitent se replier sur eux-mêmes afin d’améliorer leur situation intérieure – désir partagé quoique certes dans des versions extrêmement différentes à la fois à droite et à gauche du spectre politique américain, seul un candidat représentatif du « monde d’avant » tel Joe Biden peut faire exception et sans doute plus pour très longtemps.

Historiquement, ce genre de transition soit vers un système bipolaire américano-chinois chacun conservant ses affidés européens ici russe là, soit vers un système multipolaire – vision du président Macron d’un pôle paneuropéen, ascension de l’Inde – a souvent généré des conflits longs alors que la puissance relativement déclinante s’accrochait à sa position de pouvoir, parfois jusqu’au déraisonnable, tandis que la puissance montante affirmait son ambition parfois jusqu’à l’excès.

Même si une guerre directe ouverte est peu probable vu l’existence des armes nucléaires, une suite de conflits prolongés indirects – parallèle à ce que fut la Guerre Froide – est un risque réel, dont les conséquences en termes humains et en termes de gâchis de ressources seraient importantes.

5. Renouveau des migrations de masse
Déséquilibres démographiques entre Sud et Nord, rapidité du partage de l’information qui fait que l’on sait partout sur la planète comment vivent les habitants des pays développés, élévation rapide du niveau éducatif au Sud sans compter l’impact des Etats faillis contribuent à fortement augmenter la possibilité de migrations de masse importantes du Sud vers le Nord.

Suivant les circonstances, les politiques suivies, et encore bien évidemment l’échelle du phénomène, ces migrations peuvent tout aussi bien s’avérer un phénomène enrichissant pour des pays d’accueil capables à la fois de limiter les flux et de les intégrer effectivement en nouveaux citoyens productifs, ou un phénomène brisant pour des pays qui ne sauraient ni intégrer ni limiter et dont la stabilité sociale deviendrait sujette à caution.

J’ai tenté de « classer » ces défis du plus grave ou plus fondamental à celui qui l’est moins. L’ordre peut toujours être discuté, mais il me paraît clair que 3. 4. et 5. sont sur le fond des problèmes « tels que l’humanité en a souvent rencontrés » à de nombreuses époques et sous des formes variées. Ils n’ont rien d’une potentielle discontinuité historique – sauf s’ils détournaient les énergies de problèmes plus fondamentaux, bloquant ou ralentissant leur résolution. 2. est d’un côté un problème qui a déjà été rencontré, de l’autre un problème dont l’ampleur est peut-être nouvelle. Et il a à coup sûr le potentiel pour gêner et retarder considérablement la résolution des problèmes fondamentaux, alors que le temps presse.

Seul le problème 1. à mon sens à la fois fait partie véritablement des problèmes fondamentaux ET se présentera sans échappatoire possible aux gens de la génération présente.

Les problèmes encore plus fondamentaux que sont les menaces d’effondrement de la biodiversité et notamment d’un réchauffement climatique aigu qui précipiterait cet effondrement ont cette caractéristique qu’ils ne feront sentir leurs effets les plus graves que dans une génération ou plus, s’ils ne sont pas enrayés, MAIS ils ne peuvent être suffisamment enrayés que par la génération actuelle !

Il existe un espoir d’utiliser l’évidence spectaculaire des prodromes de ces problèmes – les incendies en Australie ou en Amazonie n’en sont qu’un avant-goût très limité – pour aider à convaincre la génération actuelle d’agir de manière décidée plutôt que de laisser le bébé à la suivante. Mais il ne s’agit cependant… que des prodromes.

S’agissant des maladies nouvelles telles le coronavirus 2019 nCov, aussi dommageables qu’elles puissent être humainement parlant – un scénario en millions de morts ne peut être exclu – il ne s’agit aussi cruel que cela puisse paraître que d’un incident à l’échelle de l’humanité. La grippe espagnole de 1918-19 a tué 2,5% de l’humanité de l’époque, sans avoir de véritable influence délétère de long terme. Pas d’événement brisant à redouter de ce côté-là.

Quant aux reconfiguration de coopérations internationales, comme la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, c’est encore beaucoup moins important à l’échelle de l’humanité. Le premier ministre Johnson est possiblement un danger public pour la prospérité à court terme de son pays – s’il persiste à vouloir s’éloigner drastiquement des normes du marché unique, fermant de nombreuses voies au commerce extérieur du Royaume-Uni – mais il ne peut faire de dégâts plus importants. Le déclenchement d’une crise financière mondiale si aucun traité n’était signé au 31 décembre 2020 entre UE et RU notamment paraît improbable étant donné que les banques auront eu plusieurs années pour se préparer à ce risque.

Le président Trump, c’est différent. Son refus de prendre au sérieux la menace climatique, sa volonté apparente de sortir d’autant de traités de désarmement nucléaire que possible et la stratégie d’étranglement économique qu’il a mise en place contre l’Iran, puissance capable de provoquer une crise économique mondiale en cassant l’extraction de pétrole dans le Golfe, présentent des risques réels de conséquences graves au niveau mondial.

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20 réponses à “Les 5 immenses défis pour la génération actuelle, par Alexis Toulet”

  1. Avatar de Arnould
    Arnould

    Juste pour être précis, la génération actuelle, selon vous, c’est quel intervalle d’âge ?

    1. Avatar de Paul Jorion

      Entre 0 et 115 ans. Mais ce n’est pas une question d’opinion, c’est un fait établi.

    2. Avatar de Toulet Alexis
      Toulet Alexis

      Je pense plutôt génération comme un intervalle de temps d’environ trente ans.

      Dire qu’un défi s’imposera à nous lors de cette génération, c’est dire que ses conséquences nous frapperont dans quelques années ou dans dix ans, plutôt que dans trente ou dans cent.

      Et bien sûr le défi le plus redoutable est le sixième : réchauffement aigu et effondrement de biodiversité. Redoutable parce que l’essentiel ne nous en frappera que dans quelques décennies, alors que c’est maintenant qu’il reste une chance d’échapper au pire.

      Aussi impressionnants soient ils, il est encore possible à des responsables politiques ou économiques de détourner le regard des incendies d’Australie. Le moment où plus personne ne pourra détourner le regard, il est peut-être loin dans l’avenir… mais alors, il sera trop tard.

  2. Avatar de timiota
    timiota

    Sur la base du cas de Gaza, l’approvisionnement en énergie peut en effet déterminer grandement ce qui reste fonctionnel ou pas.
    Un des rares « burst éditorial » du tranquille mais assez profond journal scientifique IEEE Spectrum (IEEE = Institute of Electrical and Electronics Engineers ) fut leur article sur Gaza en 2009, qui leur valu moult courrier des lecteurs très polarisé par le conflit israélo-palestinien.
    https://spectrum.ieee.org/energy/policy/gaza-power-strip
    Il m’avait néanmoins semblé instructif d’une possible « sujétion énergétique » entre régions plus ou moins séparés comme nous les préparent les dystopies en gésine qu’évoque le présent billet.

    Pour se faire un peu de bien à côté, un ancien ingénieur en propulsion de la NASA arrive à se faire un nom pour le « farming [ferme agricole, intensive dans ce cas] à hydrogène, » (solaire d’origine) après une petite dizaine d’année de mise en place d’une belle usine à gaz, au sens noble du mot (H2, NH3). Ca se passe dans l’Iowa, sans caucus ni cocus, ni crocus sans doute.
    https://spectrum.ieee.org/energy/environment/a-retired-jpl-engineers-journey-from-space-probes-to-carbonneutral-farming
    (Octobre 2019)

    1. Avatar de Arnaud Castex
      Arnaud Castex

      Cool… 14kwh d’énergie solaire pour faire 3,8kwh d’énergie ammoniaque et H2… Qui n’est qu’une énergie primaire et non finale. Soit un rendement 26% en primaire. Hypothesons un rendement Thermique du moteur de 40%.ca fait du 10,5% de rendement en meca… Avec 1,5 kwh…et que peut on faire avec ça… https://www.edf.fr/groupe-edf/espaces-dedies/l-energie-de-a-a-z/tout-sur-l-energie/le-developpement-durable/que-peut-on-faire-avec-1-kwh
      Faudra juste « accompagner », l’acceptation de la frugalité qui va avec !

      1. Avatar de timiota
        timiota

        20 fois mieux que la photosynthèse quand même.
        Le plus intéressant est de faire l’essai, ce que la DARPA n’avait pas osé (fin de l’article). Ca agit beaucoup plus sur notre façon de voir les possibles (en voyant le degré précis de performance des apparentes réussite ou des apparentes impasses tout aussi bien) quand il y a une tentative concrète qui donne la loi d’échelle.
        Oui, moi aussi j’ai ma mâchoire qui s’est décroché quand j’ai vu la propulsion au NH3. Mais quoi qu’on fasse dans notre monde plein d’O2 oxydant, le réducteur en chef sera toujours une molécule hydrogénée. Le vivant s’en sort avec des version light comme NADPH/NADP (le mécanisme de l’Adénosine Tri-ou Di phopshate) pour faire une chaine énergétique, je ma garderais de dire qu’il y a une seule bonne solution. Dès qu’on cherche à côté des solutions triviales (combustion directe) on a pas mal de complexité, ça commence avec le AdBlue (~urée) , additif pour aider le diesel à moins polluer (si c’est fait avec grand soin comme sur les camions haut de gamme, ça marche assez bien). Et ca finit avec les ultra-subtils complexes moléculaires de la photosynthèse, nano-merveilles, mais dont le rendement est bridé (pour que la feuille ne crame pas entre autre raison, la photosynthèse prend déjà un malin plaisir à se passer d’absorber les photons les plus abondants, les verts, qu’elles nous envoie pour que nous nous rincions la rétine; pardon : que nous nous la greenwashions).
        Donc y’a du taf (voir le projet européen « SUNRISE » qui adresse la photosyntèse artificielle par exemple).

    2. Avatar de Dominique
      Dominique

      Je prefère encore les solutions low tech d’Yves Cochet , mais avec une populations de 10 milliards d’habitants ça va être chaud

  3. Avatar de daniel
    daniel

    « Le pic pétrolier a été décalé par la mise en production des gisements de pétrole de schiste aux Etats-Unis […] »
    Les canards ont la vie dure mais c’est faux.
    En plus, les USA sont toujours importateur net d’hydrocarbure.
    Beaucoup plus d’infos ici:
    https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/petrole-americain-ce-que-l-on-nous-fait-croire-837645.html
    Même avec la fermeture – temporaire, probablement- des ports pétroliers libyens, le pétrole n’a pas cessé de baisser (-14% sur un mois).

    Les sociétés trempant dans les gaz et pétrole de schiste sont déficitaires, environ 200 à 400 milliards de dollar. C’est de la pure spéculation avec des effets heureux: les usines sidérurgiques ont tourné plein pot, les contractants et spécialistes (une dizaine d’intervention par puits ) ont survécu et pas mal d’emplois créés, souvent durs mais bien payés. Tant que ça dure, comme dirait Létizia… mais ça ne durera pas.

    Il se dit que les USA veulent nous inonder de leur gaz liquéfié ( Freedom gas). A 3 fois le prix du gaz russe rendu sur place en Allemagne, ça se comprend. Et il y a des acheteurs; la liberté n’a pas de prix. Le plus drôle, il paraît que les liquéfieurs-expéditeurs manquent parfois de matière première. Ils l’achètent donc aux Russes. Mais c’est certainement du persiflage malveillant. Le circuit Yamal-Boston-Dantzig, c’est impossible.

    1. Avatar de Toulet Alexis
      Toulet Alexis

      La question du pic pétrolier est une question de rythme d’extraction du pétrole au niveau mondial. Ce n’est pas une question sur les échanges extérieurs énergétiques de tel ou tel pays, ni sur le prix du pétrole, ni sur les manipulations financières permettant à des sociétés d’extraction de schistes de produire alors que leurs coûts ne sont pas couverts par leurs ventes, ni sur les tentatives de telle superpuissance de fourguer son gaz cher à ses affidés sous des prétextes politiques.

      C’est un fait que la production mondiale de pétrole continue à légèrement augmenter, alors qu’il pouvait sembler que le pic aurait lieu quelque part entre 2010 et 2015. Ceci essentiellement du fait de la mise en production à grande échelle des schistes américains, secondairement du fait du retour de l’Irak sur le marché pétrolier.

      Si on s’intéresse au pétrole « hors schistes » … le pic a déjà eu lieu.

      Et bien sûr ce n’est que partie remise, au fur et à mesure de la baisse de production des gisements « hors schistes » et compte tenu des limites des schistes. Sans même parler d’un possible « accident » financier rendant impossible de continuer à soutenir les pétroliers schisteux en dépit de leurs coûts – en pratique, de continuer à refinancer leurs dettes croissantes.

      Sur le sujet pétrolier, je conseille l’excellent Matthieu Auzanneau, notamment le blog Oil Man hébergé par le Monde, ou son livre-somme « Or noir »

  4. Avatar de Denis Monod-Broca
    Denis Monod-Broca

    « Même si une guerre directe ouverte est peu probable vu l’existence des armes nucléaires […] »
    N’évacuez-vous pas un vite ce risque ? Les armes nucléaires, et aussi les armes biologiquement chimiques, sont en elles-mêmes un risque majeur.
    Contenir la violence homicide d’homo sapiens ne reste-t-il le principal défi à relever encore et toujours ? Les défis économiques, écologiques, financiers… ne nous servent-ils pas de masques cachant ce défi-là ?

    1. Avatar de Toulet Alexis
      Toulet Alexis

      Je ne pense pas évacuer le risque de violence, puisque plusieurs des défis que je cite y sont directement liés. Et encore, essayant de distinguer dans la politique du président Trump ce qui est simplement désagréable mais sans conséquence grave, ou encore réellement nocif mais seulement pour son pays, de ce qui est vraiment potentiellement dangereux pour le Monde, deux des trois points que je distingue sont liés à la violence : la question des traités de limitation des armements nucléaires, la question de l’étranglement économique de l’Iran.

      Concernant les armes nucléaires, l’humanité par essais, erreurs, et un peu de chance, est parvenue à un système international globalement stable dont le fondement est la dissuasion nucléaire. Qui fonctionne, là n’est pas le souci. Mais ce système inclut aussi comme partie intégrante les traités de limitation des armes nucléaires : il n’est pas certain que la seule dissuasion « nue » suffirait, surtout entre les deux Gros qui préfèrent accumuler les armes nucléaires plutôt que se contenter d’un minimum comme Chine, France ou d’autres.

      C’est là à mon sens que se situent les risques, et même si la sortie de Washington du traité ABM en 2002 a déjà troublé les eaux et les programmes russes de « nouvelles » armes nucléaires et hypersoniques en sont une conséquence – mais qui pourrait en susciter d’autres suivant la dialectique de l’action et de la réaction – le principal il me semble est la sortie des Etats-Unis du traité FNI en 2019 et surtout leur menace de sortir du traité New START début 2021. Ce traité est tout simplement le DERNIER des traités de désarmement nucléaire, et le plus général, sans lui le Monde reviendrait à la situation de la fin des années 1960, avant que Nixon et Brejnev n’aient l’intelligence de commencer cette démarche commune.

      Le plus stupéfiant est que tout cela est l’oeuvre d’un président américain qui se présentait pendant sa campagne comme voulant se rabibocher avec la Russie ! Présentement, Vladimir Poutine qui n’est certes pas exactement un enfant de chœur mais qui a une compétence minimale lui, n’arrête pas de proposer aux Etats-Unis d’au moins reconduire le traité existant pour cinq ans, s’il n’est pas possible de faire mieux. Les néoconservateurs dont Trump s’est fait la marionnette ne sont pas intéressés, et trouvent des prétextes pour décliner. Et Poutine repart bredouille, et il se plaint, et il gronde… mais n’y peut rien. « It takes two to tango », il faut être deux pour jouer la partition de la limitation des armements.

      Je ne sais pas si la Russie a vraiment « donné un coup de pouce » à l’élection de Donald Trump en aidant à publier les malversations du comité de campagne démocrate contre Bernie Sanders comme les « services » américains le disent, mais il est clair en tout cas que le président Trump n’est pas actuellement sous le contrôle du président russe. C’est dommage, il serait moins dangereux !

  5. Avatar de chabian
    chabian

    Je viens de rechercher « moutons + sécheresse » en recherche. Deux infos, l’une sur les bergers afghans (Libération etc), l’autre sur les bergers de Namibie (LeMonde). L’herbe et l’eau manque, les animaux meurent, la laine et les fibres textiles ne conviennent plus pour fabriquer les tapis et autres produits, les populations rejoignent des villes déjà frappées par le chômage. On a jadis parlé de la sécheresse en Syrie comme une des causes de la guerre civile. Et notre Europe « cherche » désespérément une cohérence dans l’accueil (?) de ces réfugiés climatiques et politiques et de guerre… qui ne peuvent que se multiplier.
    Cela fait un certain temps que je me dis que « la gangrène sociale » est la première menace et qu’elle est déjà en cours et qu’elle sera incontrôlable. De plus en plus d’événements sont « clivants » et provoquent de la désunion. Aux réactions « égoïstes » qui créent des antagonismes de groupes, nous n’avons que peu de réponses politiques. Le populisme et l’extrème-droite renaissante en émergent. Bien sur, il y a un socle matériel à ces dérives (énergie, réchauffement) mais il n’est pas juste d’envisager d’atteindre l’effondrement énergétique ou climatique pour que les guerres civiles n’éclatent. Les guerres civiles sont inattendues (sans quoi on les éviterait), très irrationnelles et émotionnelles, tout en ayant des causes réelles. Elles peuvent durer des décennies et laisser des traces centenaires (USA, Irlande). Et elles « viennent de loin », elles mûrissent lentement.
    Mais nous n’avons pas de compétence en guerre civile. Nous avons tendance à les effacer comme une question passagère (cfr. les guerres de religion en France de 1520 à 1700) et inexplicable.
    L’effondrement des ressources a été annoncé dès 1960 (Club de Rome) et l’effondrement écologique dès 70 (Rapport ONU-Brundlandt). Le déni et le brouillard accompagne la prise en compte, à partir de Rio 1992. Les mots, les objectifs sont détournés : le développement durable devient croissance verte , la réduction des pollutions devient le marché des droits de polluer. Par contre, les guerres pour l’énergie, pour l’eau, se multiplient.
    Tout se crispe dans la société alors que le taux de croissance et le taux de profit s’écroulent. Les inégalités explosent, une caste de parias (contrats précaires, chômeurs, pauvres, personnes sans domicile, sans papiers, etc.) apparaît durablement. La gauche elle-même se trouve chaque jour des clivages nouveaux.
    L’effondrement social me parait en marche depuis longtemps (les trente glorieuses se terminent en 1975, avec les crises pétrolières). Trump, le Brexit sont des signes d’aggravation de cette gangrène.
    Mais il semble difficile de considérer à l’avance et de prendre la mesure de ce défi spécifique (combiné bien sûr à des causes matérielles).

  6. Avatar de Hadrien
    Hadrien

    Les 5 « immenses défis » ne sont pas fondamentaux. Ils résultent de deux et seulement deux facteurs:
    1) La démographie.
    2) Le niveau de vie.
    Ce qui relève de l’hallucinant, c’est la puissance du tabou qui cache cette évidence relevant des maths et de la physique d’école primaire.
    Aucune solution n’est possible si on ne commence pas à nommer correctement le problème.
    Lire JM Jancovici.

    1. Avatar de daniel
      daniel

      Persévérant, faut vous reconnaître ça.
      Une pensée au vol: les ceusses qui incriminent la démographie n’ont pas confiance dans le genre humain, ni dans eux-mêmes. Concernant la part personnelle certain indice montre qu’ils ont bien raison de douter…
      J’essaie -j’essaie- de me retrouver dans l’autre part.
      Notre devoir et notre honneur est de ne pas croire aux sirènes du simplisme. « Tuez les tous », quelqu’en soient les moyens, en particulier ceux doux ou progressifs tels rendre les naissances rares, ne fait pas parti de l’arsenal humain. Le but, surtout s’il est comptable, ne justifie jamais rien.
      Nous sommes condamnés à nous hisser, tant bien que mal, à la hauteur des enjeux sans perdre notre humanité. Aussi imparfaite soit-elle.

      1. Avatar de Jeanson Thomas
        Jeanson Thomas

        Et si nous perdons notre humanité, deux sur Terre, ce sera encore trop.

      2. Avatar de arkao

        Si j’étais malpoli, j’utiliserais le qualificatif obtuse plutôt persévérante pour la ritournelle hadrianesque.
        Onesttropnombreuxsurlaplanètelisezjancoviciqu’atoutcompris.

    2. Avatar de timiota
      timiota

      @Arkao, Hadrien (et Maltus qui aimait le malt ? détendons l’atmosphère)

      Surtout que c’est la première fois que les démographes entrevoient une stabilisation de la population planétaire (de mémoire 10-11 milliards vers 2060 suivant les scénarios). Avec une incertitude certes sur la natalité de l’Afrique.

      La dénatalité en « extrême orient » est flagrante par exemple (Corée, Taiwan). A voir quand ça va arriver en Philippines/Vietnam/Thailande, Indonésie, et enfin Inde.

      Dans les choses qui ne croissent pas toujours comme on le pensait, on a sous les yeux un monde sans inflation à bas taux d’intérêt, donc ni comme le XIXè siècle (taux = 5%, merci les colonies entre autres), ni comme les autres périodes sans inflations, ce qui laisse les économistes (avec guillemet) perplexes. L’immobilier n’est pas pour rien là-dedans, il y aune colonisation intérieure des riches dont le péri-urbain est l’autre nom.
      Matière à panser, comme dit mon cheval.

  7. Avatar de un lecteur
    un lecteur

    Je considère que la civilisation pétrolo-capito-chrétienne-USA centré est déjà morte. Nous vivons sa liquefaction avec la mise à nu de ses structures profondes que certains démagogues se plaisent à brandir comme des trophées.
    Le grand défi est de nous fixer une fin, au-delà du chaos qui s’annonce, pour avoir la force et une raison de l’affronter.

  8. Avatar de Francois Corre
    Francois Corre

    @Hadrien
    En effet, hallucinant et primaire…

  9. Avatar de Pierre-Yves Dambrine
    Pierre-Yves Dambrine

    Et puis il y a des évènements qui rebattent les cartes. Des évènement de dimension mondiale, comme l’épidémie en cours.
    Quid de la représentation que se font les chinois eux-mêmes de leur destin au sein de la communauté des humains sur cette planète avec le choc qu’ils reçoivent en ce moment ?
    Quid de la croissance mondiale dont les puissants de ce monde attendent tout ?

    Voyons : un pays coupé du monde, une économie à l’arrêt dans zones très peuplées. Un pays qui est la première économie mondiale.
    Or le ralentissement de l’économie chinoise a toujours été vu comme la raison principale pour laquelle le régime aux mains du PCC sous l’égide de son « nouveau Mao » pourrait voir son crédit entamé, voire jouerait sa survie.
    Ce moment redouté attendu par certains, redouté par d’autres, est arrivé. IL est encore prématuré de dire si Xi Jinping conservera le pouvoir, mais il est clair qu’il joue sa survie politique en ce moment, et chaque jour qui passe est un nouveau défi pour un parti qui aux yeux de nombreux chinois a failli.
    Le pouvoir central a eu beau jeu de pointer les fautes des fonctionnaires locaux affiliés au PCC, beaucoup de chinois ne sont plus dupes tant l’évidence crève les yeux : plus de trois semaines de perdues pour juguler l’épidémie à Wuhan, c’est un temps infini de perdu, et les propos du maire de Wuhan selon lesquels il n’avait pas pu agir car pour cela il lui fallait l’aval des autorités centrales, ne sont pas tombés dans l’oreille de sourds. C’est l’évidence qu’un système bureaucratique tel que celui qui est en place fonctionne avec l’aval des instances dirigeantes, au moins tacitement.
    La responsabilité locale est écrasante dans ce drame, mais en haut lieu rien n’a été fait pour libérer les initiatives locales, lesquelles pétrifiées, n’ont eu de cesse de suivre les directives en vertu desquelles il faut préserver avant tout la stabilité du parti, en toute conformité avec la pensée Xijinping dont on voit aujourd’hui cruellement les limites. Le même Xi jinping qui lors de sa rencontre avec le chef de l’OMS déclarait qu’il a toujours suivi personnellement la conduite des affaires relatives à l’épidémie, démentant de facto la thèse selon laquelle les locaux seraient les seuls principaux responsables.

    La propagande nationaliste qui servait d’exutoire, ne fonctionne plus, beaucoup sur les réseaux sociaux approuvent par exemple la décision des Etats-Unis de fermer ses frontières aux personnes qui sont allées en Chine ces 15 derniers jours. A contrario d’une diplomatie chinoise, et Xi en tête, en décalage complet lorsqu’elle accuse les US.
    Comment pourrait-elle fonctionnait alors que des villes entières sont mises en quarantaine ? « La Chine est au monde ce que Wuhan est à la Chine » dit justement un analyste de Duowei, média en langue chinoise spécialisé dans la politique chinoise, basé à New York.

    La lettre de Xu ZhangRun (ex) professeur éminent de droit constitutionnel chinois mais qui a été démis de ses fonctions de l’université de Qinhua en mars 2019 (une des trois ou quatre des plus prestigieuses universités chinoises) a écrit une lettre ouverte toute en verve et au style impeccable, elle a circulé sur le net chinois.
    Il s’adresse à Xi Jinping en ces termes : “ … conserver le pouvoir est devenu le coeur de la pensée des dirigeants, avec comme prix à payer le musèlement de l’expression du peuple. Les fonctionnaires du haut en bas de l’échelle cachent la vérité sur l’épidémie ….. mais le peuple en colère n’a plus peur… »
    « Alors que la grande Voie s’accomplit, dans ce vaste monde pour tous, que viennent faire ces manières de seigneur local jaloux de son pouvoir ? Le monde va son cours avec son rythme impétueux, à quoi bon gesticuler à contre-courant ? Deux mandats déjà ; rentrez-donc chez vous pour vous reposer ! Le Classique * dit : « dragon hautain, il y a des regrets »

    Quant à Xu Xu ZhiYong, qui a déjà connu la prison, un universitaire de droit constitutionnel qui milite en Chine pour une constitution ouverte (dans le cadre imparti par la constitution chinoise qui sur la papier garantit un certain nombre de droits), il vient d’adresser une lettre ouverte à Xi Jinping sur le réseau chinois, il est actuellement en cavale, après que certains de ses camarades ont été appréhendés par la police lors d’une réunion à XiaMen (ville cotière de la Chine) à laquelle il participait, une réunion lors de laquelle se sont réunies des personnes désireuses comme lui de réfléchir à l’avenir de la Chine… Sa lettre, publiée le 4 février s’intitule : « exhortation au retrait » (il termine sa lettre en disant : monsieur Xi Jinping, cédez votre place. Rien de moins.

    * Il s’agit du Yi Jing, et en particulier du premier hexagramme, dont la figure symbolique est le dragon, un dragon décliné en autant de situations et de potentialités qu’il y a de traits dans la figure, en partant du trait du bas jusqu’au trait supérieur, soit 6 positions, dans ce cas-ci toutes « yang ». Le dragon dans sa phase initiale est encore plongé dans les eaux marécageuses, prêt à s’ébrouer, c’est le dragon en gestation, encore plein de ses potentialités, jusqu’au dragon final, de hauteurs, hautain même, qui est celui qui s’étant déployé, est au plus haut de son ascension, se croit invincible, présumant de ses forces, et de sa grandeur, c’est le dragon au bord du déclin, voire de la chute abrupte.

    Les infos proviennent de ces deux articles : http://www.rfi.fr/cn/%E4%B8%AD%E5%9B%BD/20200204-%E5%A4%A7%E9%9A%BE%E5%BD%93%E5%89%8D-%E8%AE%B8%E7%AB%A0%E6%B6%A6%E4%BA%BA%E6%B0%91%E4%B8%8D%E5%86%8D%E6%81%90%E6%83%A7-%E8%AE%B8%E5%BF%97%E6%B0%B8%E4%B9%A0%E8%BF%91%E5%B9%B3%E8%AE%A9%E4%BD%8D

    http://www.rfi.fr/cn/%E4%B8%AD%E5%9B%BD/20200205-%E8%BF%99%E4%B8%80%E6%AC%A1-%E4%B8%AD%E5%85%B1%E6%94%BF%E6%9D%83%E5%A4%B1%E5%8E%BB%E4%BA%86%E8%AE%B8%E5%A4%9A

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