J’ai écrit hier que cela me prendrait cinq ans de mettre au point une théorie de la monnaie qui me satisfasse. Je n’avais envisagé qu’un seul cas : celui où nous serions seuls, vous et moi, travaillant ensemble. Or, j’ai reçu du renfort, par courrier. Ute Höft me fait parvenir un exemplaire de Le syndrome de la monnaie de Helmut Creutz, originellement paru en 1993 et traduit de l’allemand par Economica en 2008.
Je vais pouvoir gagner du temps parce que l’auteur analyse de nombreux aspects de la monnaie auxquels je n’ai pas encore l’occasion de réfléchir, et que sur ceux dont j’ai débattu ici, nous disons lui et moi strictement la même chose.
Donc si mes explications pourquoi les banques commerciales ne créent pas de monnaie ex nihilo vous ont convaincu, vous n’apprendrez peut–être pas grand-chose en lisant les pages du livre que je reproduis ci-dessous (169 à 171) mais si vous croyez toujours à la création monétaire par les banques commerciales, un autre auteur réussira peut-être là où j’ai échoué jusqu’ici.
(Vous reconnaîtrez au passage dans le texte de Creutz mon « principe de conservation des quantités », mon explication des masses monétaires en termes de double emploi, ma « reconnaissance de dette », ainsi que la distinction que je fais entre flux monétaires et opérations comptables).
La « surmultiplication de la création monétaire »
La plupart des livres d’enseignement affirment que les possibilités de création monétaire des banques sont en principe illimitées. Elles ne sont restreintes que par des ratios d’encaisse ou de réserves bancaires qu’elles doivent maintenir auprès des banques centrales ou d’émission, soit de plein gré, soit parce qu’elles y sont obligées. Et cette relation entre le montant des réserves et l’accroissement monétaire est même calculée par les théoriciens de la surmultiplication de la création monétaire avec une grande exactitude mathématique. Si les réserves se montent en tout à 5 % du portefeuille des dépôts, les banques peuvent, à partir de chaque dépôt bancaire effectué créer un montant de crédit dix-neuf fois supérieur, neuf fois supérieur en cas de réserves de 10 % et quatre fois supérieur en cas de réserve de 20 %. Le résultat de la création monétaire est donc inversement proportionnel au montant des réserves retenues.
[Prenons l’exemple de 100 millions provenant d’une banque d’émission, soumis à des réserves fractionnaires de 10 %, et qui créeraient ainsi des « fonds de crédit » de 900 millions.]
En additionnant les crédits accordés en chaîne on arrive dès la troisième étape à un montant de 244 millions. En continuant ainsi la série infinie où les valeurs diminuent d’étape en étape, effectivement on arrive arithmétiquement à une somme de 900 millions, soit neuf fois plus que l’apport initial de 100 millions.
Mais si l’on reprend les opérations, pas à pas, en laissant la théorie de côté, on constate :
1) que lors de chaque réutilisation du premier dépôt supposé de 100 millions, suite au crédit qu’il a permis d’accorder, il se produit à chaque fois un nouveau dépôt d’un client quelconque de la banque, dépôt qui, bien entendu, peut être de nouveau prêté ;
2) que l’enchaînement des octrois de crédits et des constitutions de réserves par les banques tel qu’il est décrit ne peut se faire qu’aussi longtemps qu’aucun des déposants ne dispose de son avoir en effectuant un retrait ou un virement ;
3) qu’en réalité, au fil du processus, on n’assiste nullement à un accroissement de la masse monétaire mise en circulation, de quelque manière que ce soit, mais toujours à une réutilisation, tandis que, à chaque étape, la masse monétaire réellement existante est inéluctablement le résultat de l’addition des réserves constituées jusque-là et du crédit accordé en dernier, et équivaut au montant initial de 100 millions ;
4) que non seulement il ne se produit pas d’accroissement de la masse monétaire mais, qu’en fait, en ce qui concerne la masse monétaire active et axée sur la demande, elle diminue même constamment, étant donné que sur les 100 millions initiaux, des montants de plus en plus élevés sont gelés dans les réserves des banques jusqu’à être totalement absorbés ;
5) que l’utilisation répétée de la monnaie, que ce soit pour procéder à des achats, la prêter ou en faire cadeau, n’accroît jamais sa masse mais uniquement les opérations d’achats, de prêts ou de dons ainsi effectués, qui, bien entendu, additionnées, donnent des montants de plus en plus élevés.
Les faits énumérés ci-dessus sont encore plus clairs lorsqu’on se représente cet enchaînement, non pas au niveau de banques, mais au niveau d’opérations commerciales, et qu’il s’agit non plus de prêts à répétition mais de ventes à répétition. Là aussi, on peut supposer que chaque commerçant met dix pourcent de sa recette de côté et qu’il dépense le reste directement ou indirectement dans un autre magasin pour faire des achats. Là encore, l’addition des opérations d’achat donnerait le même résultat que celles des opérations de crédit dans le cas de la « surmultiplication de la création monétaire ». Et pourtant personne n’irait prétendre que la masse monétaire a été multipliée par neuf ou que les commerçants ont créé 900 millions [ex nihilo].
Où est donc l’erreur de raisonnement de certains théoriciens ?
L’erreur de la théorie classique de la création monétaire réside dans le fait qu’on additionne des avoirs ou des crédits se reconstituant au fil du temps, ou des postes de crédit, aux montants reçus au départ et qu’on déduit de cette addition qu’il y a une création monétaire ou une création de crédit. En d’autres termes : cette théorie assimile l’utilisation multiple de l’argent à un accroissement, elle confond moyen de transport et opération de transport. Mais, pas plus que l’utilisation répétée de wagons ou de camions pour des transports n’entraîne un accroissement du nombre de wagons ou de camions, l’utilisation répétée d’argent pour des achats ou des prêts n’entraîne un accroissement de son montant.
L’erreur de raisonnement et d’interprétation des théoriciens de la création monétaire est sans aucun doute due en grande partie au fait que l’on continue à considérer les avoirs et les portefeuilles de crédit comme du numéraire. Or, en fait, il ne s’agit que de postes de comptabilisation qui documentent le montant des prêts d’argent et les obligations de remboursement qui en résultent, sans que ceux-ci fassent augmenter la masse monétaire en circulation. C’est pourquoi tous les regroupements de numéraires et de dépôts sous la rubrique « masse monétaire » sont si discutables. Ceci vaut surtout pour l’addition des M1 et M3.
Helmut Creutz, Le syndrome de la monnaie, Economica, Paris (2008) : 169-171.
273 réponses à “Pourquoi il n’y a pas de « création monétaire » par les banques commerciales, par Helmut Creutz”
Suffisamment convaincant.
Toutefois, pour moi, la difficulté réside dans la question suivante : qu’est-ce que cela change, concrètement, que la masse monétaire soit égale uniquement au numéraire en circulation et que les autres montants disponibles comme moyens de paiement ne soit que des re-circulations du même numéraire de base (du moins comme potentialité) OU que ces différents montants soient considérés comme une masse monétaire surnuméraire à la forme scripturale (théorie habituelle des masses jusqu’à M3) ?
Quel est fondamentalement l’enjeu de cette discussion ? (sur le plan juridique, économique, politique ?)
Il est très tard et je viens de lire d’un trait ce billet. Tanpis je pose la question qui me vient à l’instant. L’auteur ne semble pas intégrer la vitesse de circulation de la monnaie? Ce paramètre est pourtant présent et influe de diverse façons? Merci d’avance pour toute réponse
Bonne nuit pour ceux de ce fuseau horaire!
Au sens strict du terme, alors on pourrait dire qu’il n’y a création monétaire que quand les banques centrales font tourner la planche à billet alors ?
Toutes les confusions viendraient du fait que le système économique ne fait pas de différence majeure entre espèces et les autres moyens de paiement basés sur les comptes bancaires ?
D’un certain point de vue il peut sembler que le crédit finalement ne sert qu’à faire une avance sur des richesses futures à créer. On obtient un prêt, la banque fait quelques opérations comptables, nous avance ce qu’on compte bien recevoir plus tard et que nous rembourserons ensuite ? On prête parce que les emprunteurs paraissent crédibles, parce qu’on pense qu’ils ont les moyens de gagner cet argent dans le futur et ainsi rembourser l’avance faite, plus intérêts évidemment.
Rien n’est clair en économie décidément. C’est vrai qu’en même temps il n’est pas facile de concevoir la possibilité de prêter de l’argent qu’on ne possède même pas soi même mais que d’autres nous ont laissé à garder et faire fructifier, d’accorder des moyens de paiements démultipliés en fonction de l’argent qu’on a encaissé, et qu’on a encaissé de bien des manières différentes si bien qu’on ne sait même plus qu’elle est l’origine exacte et la nature de cet argent. Il y a de l’argent papier émis par les banques centrales, il y a des moyens de paiement très divers par chèque, carte de crédit, virement, etc. De l’argent qui n’a pas forcément la même durée de vie, et tout ceci se mélange inextricablement et indistinctement sur les comptes bancaires.
C’est le sens qu’on pourrait donner au proverbe l’argent n’a pas d’odeur ?
Tout ceci ressemble quand même à un vaste système pyramidal genre château de cartes.
Le monde est riche de dettes alors. Le système du crédit qui permet de multiplier les moyens de paiements, d’anticiper sur la création future de richesse ne fait que créer des dettes, des richesses assez potentielles qui n’attendent que de se réaliser ou non.
Quel dommage que le manque de connaissance approfondie embrouille tout comme en philosophie. Souvent on a les idées, mais pas les bons mots, le bon signe pour symboliser notre pensée effectivement. Mais l’idée est là.
Je suppose que c’est cela le crédit crunch, le fait que les différents acteurs économiques ne soient plus solvables, n’arrivent plus à rembourser ce qu’on leur avait prêté. Faute de confiance dans les différents acteurs, le cycle du crédit se tarit, on prête beaucoup moins, on se contente d’essayer de se faire rembourser ce qu’on a déjà prêté aux autres, ou alors de rembourser ce que les autres nous ont prêté, un engagement en appelant souvent des autres et nous y sommes tenus. Moins on peut tenir nos engagements de remboursement et moins les prêteurs seront disposé à prêter de nouveau.
J’en conclurais presque qu’il serait assez futile, dérisoire et dangereux même de vouloir résoudre les problème de crédit actuel en recourant à d’autres formes d’endettement comme celui que tentent les états ? Est-ce qu’on peut résoudre une crise du crédit en inondant le marché de crédit ? Est-il bon de résoudre les problème de dettes en créant d’autres dettes encore plus grandes qui ne feront que transférer le problème sur d’autres acteurs ou le différer dans le temps ?
Il va falloir qu’on parle sérieusement de cette question des dettes publiques et privées encore une fois. Cela devient un sujet de plus en plus récurrent partout. Et puis c’est intrinsèquement lié à la « création monétaire » non ? Banque commerciale et banques centrales, dettes privées et dettes publiques, argent papier et moyens de paiements. Où tout cela nous mène t’il avec le resserrement du crédit ? Ce n’est déjà pas si simple avec les banques commerciales, alors maintenant que des organismes comme la Fed compliquent la donne. J’avoue que je ne comprends rien mais absolument rien à la façon dont fonctionnent ces banques centrales et cette Fed en particulier. Un jour on va vraiment finir par perdre confiance dans l’intégrité de nos système financiers, la valeur et la stabilité de nos monnaies …
Merci d’avoir partagé ce texte pour ce qu’il étaye vos convictions.
Ca met fin, pour moi (mais j’avoue n’avoir fait que survoler, tant ça me paraissait ardu), à une impression de ‘spéculation’ sur la création monétaire que ce blog aurait été le premier à dénoncer.
Maintenant, je ne peux qu’espérer que vous continuerez à nous éclairer sur les divers mécanismes financiers, car je vous trouve passionnant.
et si ??? au préalable, on essayait de définir le terme de CREATION qui semble poser problème (en soi..?), et susciter des turbulences..
Approche constructive dans « le monde s’est-il créé tout seul ? » (xuan thuan, prigogine, jacquard, de rosnay, pelt, atlan) . Extrait : « Nous avons une créativité. Et les questions se posent par anticipation, par souci de l’avenir. Et automatiquement se posent aussi les questions de la mort et donc de la signification de la vie. Mais il faut nous faire à l’idée qu’à ces questions là aussi, la réponse est désormais totalement indéterminée » (Prigogine)
Bonjour,
Depuis le retour de Jean Bayard sur le post « Notre débat sur la monnaie : et si c’était à refaire ? » (http://www.pauljorion.com/blog/?p=1067) j’ai commencé à reprendre espoir…
Mais là c’est carrément l’euphorie ! L’extase ! And the winner is : Helmut Creutz ! Mais qu’on lui donne un prix Nobel, vite, n’importe lequel, mais un Nobel…qu’on puisse lui tirer dessus à boulets rouges à ce Helmut ! Et merci encore à toi Helmut car on a bien failli oublier le « ex nihilo » !
A propos de ex nihilo, un grand merci aussi à ghostdog pour le lien donné sur un autre post : http://carfree.free.fr/index.php/2008/02/02/lideologie-sociale-de-la-bagnole-1973/
André Gorz à qui je décernerais volontiers un prix, un vrai, en économie, pour l’apport de ce texte à la création ex nihilo…Sans parler d’écologie.
Et un grand merci à Monsieur Jorion pour ce blog si rafraîchissant !
PS : Au rythme où vont les choses, à votre place, je commencerais à les mettre de côté les mercis et les grands mercis, ou à les échanger…
ah..l’intérêt de la métaphore et du métalogue… je comprends mieux l’économie avec des wagons et des camions..
« erreur de raisonnement » donc…revenons à l’épistémologie et aux confusions de type logique ( encore Russell).. continuons donc à déconstruire avant de reconstruire.
Donc -oui : ne pas confondre moyen de transport (camion : substantif, forme) et opération de transport (transporter : verbe, processus; habituellement situé entre un sujet et un complément d’objet)
D’où en ce qui nous concerne confusion entre « utilisation multiple, répétée et accroissement ». On avance, mais continuons..
La métaphore transport me paraît riche et sa cartographie pertinente.. pour détecter les erreurs épistémo. Mais difficile de faire passer des mots et des flèches sur un blog.
Je vous propose un petit jeu: prendre un grand papier et différencier/relier : les produits transportés (argent liquide >citerne), messagers et destinataire, les réseaux, (routes et voies ferrées, swift), les gares et bases logistiques (euroclear, clearstream..), les tunnels.. les passages à niveau,
vitesse et accélération (m/s et m/s/s), les variations surface/volume (en éco je vois mal,mais il doit bien y avoir quelque-chose d’importantà ce niveau) …les péages, les contrôles (conservation des quantités !), les usines de production de nouveaux moyens de transport et de nouvelles marchandises et leur relation, etc… …et les voies de garage ! provisoires et définitives…
Un petit dessin plutôt que de longs discours… Si ce n’est ni « créatif », ni productif, mes excuses pour le temps perdu…Pour prochain rendez-vous, s’adresser au chef de gare…
–
Bonjour,
Dans wikipedia l’on trouve cette définition des aggrégats monétaires. Il est clairement stipulé par wikipedia que cette définition n’est pas finalisée.
Paul, à la lumière de ce que vous nous expliquez, pourriez vous nous en corriger les principales erreurs.
Que devrions nous donc comprendre de l’augmentation incensé de M1 aux US et Japon ces dernières décennies et sont envolées en ces années 2007 et 2008 aux US.
Merci,
Brehat.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Masse_monétaire
Sommaire [masquer]
1 Composants de la masse monétaire
2 Impact des variations de la masse monétaire sur l’inflation
3 Régulation du niveau de la masse monétaire
4 Notes et références
5 Voir aussi
Composants de la masse monétaire [modifier]
Désolé lien précédent incomplet : http://fr.wikipedia.org/wiki/Masse_monétaire
Les composantes de la masse monétaire sont des agrégats. Les agrégats monétaires sont des indicateurs statistiques regroupant dans des ensembles homogènes les moyens de paiement détenus par les agents d’un territoire donné. Il y a plusieurs niveaux d’agrégats statistiques dans la masse monétaire, selon le degré de liquidité.
M1 correspond aux billets, pièces et dépôts à vue.
M2 correspond à M1 plus les dépôts à termes inférieurs ou égaux à deux ans et les dépôts assortis d’un préavis de remboursement inférieur ou égal à trois mois (comme, par exemple, pour la France, le livret jeune ou le CODEVI, le livret A et bleus, le compte d’épargne logement, le livret d’épargne populaire…)
M3 correspond à M2 plus les instruments négociables sur le marché monétaire émis par les institutions financières monétaires (IFM), et qui représentent des avoirs dont le degré de liquidité est élevé avec peu de risque de perte de capital en cas de liquidation (ex : OPCVM, certificat de dépôt.
M4 correspond à M3 plus les Bons du Trésor, les billets de trésorerie et les bons à moyen terme émis par les sociétés non financières.
Les billets et les pièces ne constituent qu’une fraction de la monnaie en circulation, la monnaie scripturale en représente maintenant plus de 90 %. Si la banque centrale produit la monnaie fiduciaire, les banques commerciales créent la monnaie scripturale en accordant des crédits sous l’égide des banques centrales. « Les crédits font les dépôts », selon un adage toutefois simplificateur.
Leduc @ 6 décembre 4h32 dit:
« Il va falloir qu’on parle sérieusement de cette question des dettes publiques et privées encore une fois. Cela devient un sujet de plus en plus récurrent partout »
En premier, bien potasser le livre de André-Jacques HOLBECQ et Philippe DERUDDER préfacé par Étienne CHOUARD
– La Dette Publique une affaire rentable – (éd. Yves Michel mai 2008)
et alors dit :
6 décembre 2008 à 10:19
J’avais pensé à ceci : Les banques: sont les gares « subordonnées » à la gare centrale de triage
Le sytème financier: ce sont les voies, les aiguillages, la circulation
La monnaie: ce sont les trains
Ces explications sont confuses et peu convaincantes.
Si les augmentations des masses monétaires ne sont pas issues des banques commerciales par la demande de crédit et leur capacité à les accorder, d’où viennent-elles ?
Oublions les termes ex-nihilo et scandale, les masses monétaires augmentent c’est un fait, quel est le mécanisme ?
Les explications d’un des commentateurs basées sur les monnaies fiduciaires bases et monnaies scripturales semblaient de bon sens et plus convaincantes.
Bru
L’opinion de Hayek (dans Prix et production) sur un certain nombre des questions que vous reprenez de post en post (qu’est-ce que la monnaie, y a-t-il conservation des quantités, le crédit fait-il partie de la monnaie, etc) :
But at this point we must take account of a new
difficulty which makes this concept of the total
quantity of the circulating medium somewhat vague,
and which makes the possibility of ever actually fixing
its magnitude highly questionable. There can be no
doubt that besides the regular types of the circulating
medium, such as coin, bank notes and bank deposits,
which are generally recognised to be money or currency,
and the quantity of which is regulated by some central
authority or can at least be imagined to be so regulated,
there exist still other forms of media of exchange which
occasionally or permanently do the service of money.
Now while for certain practical purposes we are
accustomed to distinguish these forms of media of
exchange from money proper as being mere substitutes
for money, it is clear that, ceteris paribus, any increase
or decrease of these money substitutes will have
exactly the same effects as an increase or decrease
of the quantity of money proper, and should therefore,
for the purposes of theoretical analysis, be counted as
money.
In particular, it is necessary to take account of
certain forms of credit not connected with banks which
help, as is commonly said, to economise money, or to do
the work for which, if they did not exist, money in the
narrower sense of the word would be required. The
criterion by which we may distinguish these circulat-
ing credits from other forms of credit which do not act
as substitutes for money is that they give to somebody
the means of purchasing goods without at the same time
diminishing the money spending power of somebody
else. This is most obviously the case when the creditor
receives a bill of exchange which he may pass on in
payment for other goods. It applies also to a number
of other forms of commercial credit, as, for example,
when book credit is simultaneously introduced in a
number of successive stages of production in the place
of cash payments, and so on. The characteristic
peculiarity of these forms of credit is that they spring
up without being subject to any central control, but
once they have come into existence their converti-
bility into other forms of money must be possible if
a collapse of credit is to be avoided. But it is important
not to overlook the fact that these forms of credits
owe their existence largely to the expectation that it
will be possible to exchange them at the banks against
other forms of money when necessary, and that, accord-
ingly, they might never come into existence if people
did not expect that the banks would in the future
extend credit against them. The existence of this
kind of demand for more money, too, is therefore no
proof that the quantity of the circulating medium
must fluctuate with the variations in the volume of
production. It is only a proof that once additional
money has come into existence in some form or other,
convertibility into other forms must be possible.
Before proceeding to investigate whether there
exist any genuine reasons which would make changes
in the amount of the circulation necessary in order to
keep money entirely neutral towards the economic
process (i.e., to prevent it from exercising any active
influence on the formation of prices), it is useful to ask
whether, under the circumstances just described, it is
at all conceivable that the quantity of the circulating
medium can be kept invariable, and by what means
a monetary authority could attain that end. I may
say at once that, in spite of the qualifications that
I shall introduce later, this question seems to me
not merely a question of theoretical interest, but also
a question the answer to which may prove very
important in the shaping of a more rational monetary
policy.
The credit system of a country has very often been
compared to an inverted pyramid, a simile which serves
very well for our purpose. The lowest part of the
pyramid corresponds of course to the cash basis of the
credit structure. The section immediately above to
central bank credit in its various forms, the next part
to the credits of commercial banks, and on these
finally is built the total of business credits outside the
banks. Now it is only in regard to the two lower
parts, cash and central bank credit, that an immediate
control can be exercised by the central monetary
authority. So far as the third part, the credits of the
commercial banks, are concerned, it is at least con-
ceivable that a similar control could be exercised.
But the uppermost section of the pyramid–private
credits–can be controlled only indirectly through
a change in the magnitude of their basis, i.e., in the
magnitude of bank credit. The essential thing is
that the proportion between the different parts of the
pyramid is not constant but variable, in other words
that the angle at the apex of the pyramid may change.
It is a well-known fact that, during a boom, the amount
of central bank credits erected upon a given cash basis
increases, and likewise the amount of credits of the
commercial banks based on a given amount of central
bank credit, and even the amount of private credits
based on a given amount of central bank credit. This
is certainly true on the continent of Europe, where the
possibility of rediscounting takes to a large extent the
place of actual cash reserves. So that, even if central
banks should succeed in keeping the basis of the credit
structure unchanged during an upward swing of a cycle,
there can be no doubt that the total quantity of the
circulating medium would none the less increase. To
prevent expansion, therefore, it would not be sufficient
if central banks, contrary to their present practice,
refrained from expanding their own credits. To com-
pensate for the change in the proportion between the
base furnished by the credit and the superstructure
erected upon it, it would be necessary for them
actually to contract credit proportionally. It is pro-
bably entirely Utopian to expect anything of that
kind from central banks so long as general opinion
still believes that it is the duty of central banks to
accommodate trade and to expand credit as the increas-
ing demands of trade require. Unfortunately, we are
very far from the more enlightened times when, as
John Fullarton complained, » the words * demand’
and ‘ legitimate demand ‘ could not even be mentioned
in Parliament in connection with this subject un-
accompanied by a sneer « .* None the less, I am
strongly convinced that, if we want to prevent the
periodic misdirections of production caused by addi-
tional credit, something very similar to the policy
outlined above, absurd as it may seem to those accus-
tomed to present-day practice, would be necessary.
I do not delude myself that, in the near future, there
will be any opportunity of experimenting with such
a policy. But this is no excuse for not following the
implications of our theoretical arguments right through
to their practical consequences. On the contrary,
it is highly important that we should become fully
conscious of the enormous difficulties of the problem
of the elimination of disturbing monetary influences,
difficulties which monetary reformers are always so
inclined to underrate. We are still very far from the
point when either our theoretical knowledge or the
education of the general public provide justification
for revolutionary reform or hope of carrying such
reforms to a successful conclusion.
L’avatar du Dollar n’est pas le Dollar, celui de l’Euro non plus, …etc…
Les avatars des monnaies ne sont pas les monnaies, mais alors où est la VRAIE monnaie?
Les démonstration est très claire, on ne peut ajouter la masse de la chenille à celle du papillon pour connaitre la masse globale du système. Pourtant le système dépôts/crédits me semble impliquer un accroissement de la masse monétaire, pour deux raisons. La première est contenue dans la démonstration de Helmut Creutz:
« que l’enchaînement des octrois de crédits et des constitutions de réserves par les banques tel qu’il est décrit ne peut se faire qu’aussi longtemps qu’aucun des déposants ne dispose de son avoir en effectuant un retrait ou un virement »
et
« que non seulement il ne se produit pas d’accroissement de la masse monétaire mais, qu’en fait, en ce qui concerne la masse monétaire active et axée sur la demande, elle diminue même constamment, étant donné que sur les 100 millions initiaux, des montants de plus en plus élevés sont gelés dans les réserves des banques jusqu’à être totalement absorbés »
Effectivement si le premier dépôt est retiré en totalité, pas de problème la banque le possède en garantie auprès de sa banque centrale. Mais si le deuxième dépôt est retiré, la banque sera obligé (il me semble ?) de l’emprunter à sa BC qui devra le créer « ex-nihilo » (on y revient !) au moins temporairement.
La deuxième cause de création monétaire liée au système dépôts/crédit se trouve dans la production du différentiel d’ intérêts entre dépôts et crédits, qui n’existent pas dans la démonstration de M. Creutz , mais qui existent bien « in fine » dans le bilan des établissements de crédit. Comment et par qui cette monnaie est-elle créée ?
Il me semble que la transposition:
« Là aussi, on peut supposer que chaque commerçant met dix pour cent de sa recette de côté et qu’il dépense le reste directement ou indirectement dans un autre magasin pour faire des achats. Là encore, l’addition des opérations d’achat donnerait le même résultat que celles des opérations de crédit dans le cas de la « surmultiplication de la création monétaire ». Et pourtant personne n’irait prétendre que la masse monétaire a été multipliée par neuf ou que les commerçants ont créé 900 millions [ex nihilo] »
N’est pas suffisante pour représenter le système dépôts/crédit au regard de la création monétaire…
« L’art ou la manière d’en tirer ce qu’on veut » (un titre pour un futur post)
Le site « officiel » de l’auteur du livre que vous citez est ici: http://www.helmut-creutz.de/
L’auteur soutien la Geldreform, http://www.geldreform.de/ (notamment les travaux de silvio gesell, travaux également repris par paul grignon sur son prochain film)
Voir en francais: http://userpage.fu-berlin.de/~roehrigw/french/
Ils pronent la monnaie franche (voir monnaie fondante)
Ute Höft (qui est derrière la traduction) comme Helmut Creutz arrive a la même conclusion:
« Notre argent est une invention fantastique mais tel qu’il est aujourd’hui il finit par détruire notre monde ».
Bonjour,
Merci pour cette référence très intéressante ; j’ai bien sûr commandé ce livre.
En voici un commentaire intéressant.
(Au passage, je viens de finir de scanner le livre de Gesell, un très vieux livre qui est littéralement passionnant.)
Aussi séduisant et intéressant qu’il soit par ailleurs, il me semble qu’Helmut Creutz (amateur passionné, comme nous, si j’ai bien compris) commet (lui aussi) une erreur.
________________
Nous devrions d’abord correctement DÉFINIR le mot MONNAIE, en terme simples.
Que pensez-vous de cette définition, pour commencer ?
Aujourd’hui, il semble que TOUS ces signes soient des RECONNAISSANCES DE DETTES :
– soit des dettes de l’État (billets et pièces),
– soit des dettes des banques (provision des DAV, dépôts à vue).
Des reconnaissances de dettes suffisamment FIABLES, émises par des débiteurs suffisamment indestructibles, pour inspirer CONFIANCE à tout le monde et servir de monnaie d’échange.
L’échange a lieu en faisant CIRCULER LE TITRE de la dette (titre éventuellement dématérialisé, peu importe), un peu comme on fait circuler une traite ou un chèque par endossement (sauf qu’il n’y a pas toujours besoin d’endos : pour la monnaie fiduciaire –billets et pièces–, on n’a pas besoin de signer au dos du titre pour céder la créance).
Les mécanismes de la circulation monétaire s’apparentent donc à la CESSION DE CRÉANCE.
_________________________
Si vous me le permettez, je vais décrire deux fois le même mécanisme, de façon comparable pour faire sentir le PARALLÈLE qui existe entre l’État créateur de monnaie-pouvoir-d’achatet les banques créatrices de monnaie-pouvoir-d’achat (dites-moi si je me trompe, s’il vous plaît) :
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Si Jean (avec les créditistes) a raison, il suffit aux hommes de produire la monnaie (fiduciaire et/ou scripturale) en proportion de ce que les producteurs sont capables de produire pour ne JAMAIS causer d’inflation, et créer l’ABONDANCE qui n’est une utopie que parce que nous nous imposons nous-mêmes une rareté non nécessaire.
Au contraire, le système de L’ARGENT DETTE ACTUEL crée et entretient UNE RARETÉ (non nécessaire) puisqu’il interdit à l’État de créer librement de la monnaie permanente, et puisque TOUTE MONNAIE NOUVELLE DOIT ÊTRE BIENTÔT DÉTRUITE (rareté de la monnaie qui, à l’évidence, ne profite qu’à quelques privilégiés qui en perçoivent le prix – le prix de l’argent, c’est l’intérêt– et qui, eux, et eux seuls, vivent dans l’abondance).
==============================
Donc, pour revenir au raisonnement de Helmut Creutz, je trouve qu’il ne prend pas en compte (il fait comme si n’existait pas) la création de POUVOIR D’ACHAT, indiscutablement observée quand la banque prête plus qu’elle ne possède.
Je trouve que la comparaison avec les moyens de transport ne tient pas : certes, la réutilisation d’un wagon plusieurs fois ne multiplie pas le nombre de wagons, évidemment ; certes, la réutilisation plusieurs fois de la même monnaie ne multiplie pas la monnaie : personne n’a jamais dit cela, que je sache : on parle là de la vitesse de CIRCULATION de la monnaie qui est un AUTRE SUJET.
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Enfin, si on a vu que les deux dettes se ressemblent (celle de l’État et celle des banques), il est important de souligner une différence de taille : on l’oublie (ou on fait semblant de l’oublier), si les dettes des banques doivent toutes être remboursées (les banques ne peuvent créer que de la monnaie temporaire), L’ÉTAT, LUI, PEUT FORT BIEN CRÉER DE LA DETTE QU’IL NE REMBOURSERA JAMAIS, de la monnaie PERMANENTE.
Il lui suffit de le décider. C’est une question POLITIQUE.
Ainsi, les 26 milliards que va engager la France pour relancer notre économie le seront à coup de dette publique, par de la monnaie temporaire et coûteuse, une monnaie qui se paiera cher, plus tard, avec nos privations, nos souffrances, nos impôts futurs, alors qu’on aurait aussi bien pu créer de la monnaie permanente et gratuite, sans endetter finalement qui que ce soit.
(Il aurait mieux valu penser également, d’ailleurs, à fermer un peu les frontières pour éviter que tout cet argent ne file vers les caisses délocalisées de concurrents déloyaux qui ne respectent ni les hommes ni la nature.)
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Mais décidément, chaque jour un peu plus, on se demande si les gouvernants du monde servent l’intérêt général ou des intérêts particuliers.
S’ils s’avérait que nos représentants se soient mis hors de notre contrôle pour ne plus servir que quelques acteurs influents, ce serait bien de notre faute de A à Z, nous qui nous préoccupons si peu de contrôler et punir les pouvoirs (toujours dangereux, par nature), tant il est vrai qu’il n’y a pas de mauvais pouvoir, il n’y a pas d’un côté des « gouvernants vicieux » et de l’autre des « gouvernés vertueux », il n’y a pas de complot des méchants puissants qui écraseraient leurs gentils sujets :
Quelques remarques à cette adresse ainsi que le chapitre 12 « LA « CRÉATION MONÉTAIRE » PAR LES BANQUES COMMERCIALES », du livre de Creutz.
J-P Voyer
Shiva dit : 6 décembre 2008 à 12:38
Je suis tout à fait d’accord avec son intervention.
Et sous réserve de mon défaut de compréhension rapide et suffisamment lucide, quelques interrogations.
De même, losque H. Creutz écrit:
Question->à 3) » (….)la masse monétaire réellement existante est inéluctablement le résultat de l’addition des réserves constituées jusque-là et du crédit accordé en dernier, et équivaut au montant initial de 100 millions »
Question->Ce: « …et du crédit accordé en dernier … signifierait une série constante de crédits divers? Donc, ici ce serait un « arrêt sur image » d’un mouvement?
Plus loin, lorsque H. C. écrit:
« (…) la masse monétaire active et axée sur la demande, elle diminue même constamment, étant donné que sur les 100 millions initiaux, des montants de plus en plus élevés sont gelés dans les réserves des banques jusqu’à être totalement absorbés »
Question->Ces: … montants de plus de plus élevés sont gelés….jusqu’à être totalement absorbés. Absorbés comment et par quoi? Cela paraît abscons.
Plus loin H. C. écrit:
« 5) que l’utilisation répétée de la monnaie, que ce soit pour procéder à des achats, la prêter ou en faire cadeau, n’accroît jamais sa masse mais uniquement les opérations d’achats, de prêts ou de dons ainsi effectués, qui, bien entendu, additionnées, donnent des montants de plus en plus élevés. »
Question->Il faudrait prendre en compte la vitesse de circulation de la monnaie? (de même d’ailleurs, plus haut à 3)
Plus loin H. C. écrit:
« Les faits énumérés ci-dessus sont encore plus clairs lorsqu’on se représente cet enchaînement, non pas au niveau de banques, mais au niveau d’opérations commerciales, et qu’il s’agit non plus de prêts à répétition mais de ventes à répétition. Là aussi, on peut supposer que chaque commerçant met dix pourcent de sa recette de côté et qu’il dépense le reste directement ou indirectement dans un autre magasin pour faire des achats. Là encore, l’addition des opérations d’achat donnerait le même résultat que celles des opérations de crédit dans le cas de la « surmultiplication de la création monétaire »
Question-> Là aussi, la vitesse de circulation doit-elle être prise en compte?
Enfin lorsque l’auteur parle de la confusion entre moyen de transport et opération de transport et du nombre de wagons et de camion, je sais que les exemple analogiques sont limités, mais l’ « explication », ici, est-elle dans le nombre de véhicules de transport ou dans ce qu’ils tranportent? Et toujours rien sur la quantification des mouvements de tout cet ensemble, à quelle vitesse s’effectuent ces mouvements?
D’autre part tout argent émis qui ne circule pas est, pour l’économie en général, comme s’il n’existait pas. C’est une certitude. ou alors, quelles explications?
« on n’assiste nullement à un accroissement de la masse monétaire mise en circulation, de quelque manière que ce soit, mais toujours à une réutilisation »…
Réutilisation en vertu de quel droit ?
On peut certes faire l’analyse du phénomène économique, mais Etienne CHOUARD a raison de rappeler que celui-ci s’inscrit dans un cadre légal…
L’ARGENT : Un révélateur d’un disfonctionnement humain ?
Par Gilbert Dubouch
Le terme « argent » est un terme moderne pour exprimer ce qui existe depuis l’aube de l’humanité à savoir, un moyen d’étalonner (une unité de mesure) les échanges, donc les communications, entre les hommes.
L’argent, un moyen
Il s’agit donc d’un médium utilisé pour se nourrir, pour échanger et pour créer ; il est, à ce titre, neutre, c’est-à-dire qu’il contient les 2 polarités fondamentales de la manifestation divine puisqu’il peut très bien être utilisé à bon ou à mauvais escient mais également à bon et à mauvais escient. Or, aujourd’hui comme hier, « l’argent » est l’objet de tous les phantasmes, de toutes les projections, de toutes les convoitises. Pourquoi un médium, dont l’existence n’a d’autre but que de fluidifier les relations humaines, a-t-il été chargé de (presque) tous les maux de l’humanité ? Pourquoi de neutre, « l’argent » est-il devenu sale, corrupteur, bénéfique, maléfique, objet de culpabilité voire de culpabilisation … ?
Une recherche de réponse pourrait nous mener à ce grand débat sur l’intérêt ou la plus-value recueillie sur des sommes possédées. La perception d’intérêt, de plus-values sur « l’argent » prêté ou placé serait la plus grande hérésie humaine car contraire au principe divin qui met à la disposition de tout humain Sa Création afin que celui-ci en jouisse comme bon lui semble mais en respectant l’harmonie collective. Il y a là deux erreurs d’appréciation : d’une part, parce que la Création divine n’est pas parfaite dans le sens achevée, elle est parfaite dans son fonctionnement, mais elle est en devenir comme IL l’est LUI-même. Tout est mouvement, évolution et chaque règne (minéral, végétal, animal, humain) a fourni une base d’évolution au règne suivant par « une plus-value » qui a permis l’évolution du minéral, au végétal, à l’animal et à l’humain. La plus-value est donc une création divine et l’humain essaie de la répliquer, maladroitement peut-être, à travers le principe de plus-value et d’intérêt sur le médium « argent » ; d’autre part, encore une fois, on cherche la source d’un mal-être hors de soi en fustigeant ceux qui s’enrichissent, et qui enrichissent les autres, au lieu de chercher en soi ce qui nous perturbe personnellement ( est-ce parce que nous ne sommes pas récipiendaires de ces plus-values ? ).
Une autre piste pourrait nous mener aux anathèmes lancés contre la « Finance internationale » et tous ses corollaires tels que : corruptions, asservissements, paupérisations, thrombose financière, influences néfastes … Et de proposer des contrôles, des taxes, des amendes, des protections etc. Mais question : qui sera récipiendaire des sommes recueillies ? Comment ces sommes seront-elles redistribuées ? Où iront-elles ? Qui sera le garant de la « moralité » de l’utilisation de ces sommes ? Quels seront les critères de répartition ? Et, surtout, qui sera le garant, du garant, du garant qui garantira la moralité et la juste redistribution ? Qu’est ce que la moralité et qu’est-ce qui est juste en ce domaine ? On s’aperçoit qu’il y a d’un côté, les perversions liées à la possession de sommes d’argent colossales par une poignées d’humains et de l’autre, une poignée d’humains également tentant de rétablir un « équilibre », en fonction de leur conception de l’équilibre. Là, de nouveau, le médium « argent » est chargé de toutes les responsabilités du sous-développement, de la corruption, de la paupérisation …
L’argent : un messager
Il n’est point utile de développer tous les comportements face à « l’argent ». En effet, cela équivaudrait à faire un listage de tous les méandres du psychisme humain. Parce qu’en réalité, « l’argent », en tant que médium relationnel entre les hommes, prend la couleur, l’odeur que nous voulons bien lui donner, chacun selon son histoire et son vécu. Ainsi que nombres de traditions spirituelles l’ont décrit, « l’argent » peut être comparé au sang circulant dans un corps humain. Le sang est un messager livrant les « informations et les colis » qui lui ont été confiés par tous les organes du corps, sans exception, là où cela doit être livré et jusqu’au plus petit bout de chair, chaque partie selon ses besoins. La perfection de la création divine réside dans ce type de fonctionnement, notamment. Le sang peut être comparé à une énergie irriguant parfaitement le corps : il doit en être de même de « l’argent ». Il devrait, dans l’idéal, irriguer, selon les besoins, chaque être humain composant l’humanité. Nous savons tous que ce schéma n’est pas encore en vigueur. Il commence, toutefois, à se mettre en pratique par le système des « micro crédits » créé par Mr YUNUS au Bangladesh grâce à la « Grameen bank » en 1981. Cette création des micro crédits fait constater qu’il y a une voie qui, elle, crée et apporte une réelle solution. Cette réalisation est sans « effet de manche », elle a été mise en place pour les plus humbles dans un pays qui était l’un des plus pauvres au monde. Actuellement, cette réalisation tente d’être adaptée dans des pays développés tels que la France. Ainsi, il est possible de synthétiser cette entreprise en disant que c’est par une analyse, sans concession, de l’état des besoins d’une population, des forces dont dispose le pays et de la responsabilisation de chacun face à l’utilisation des ressources mises à disposition, avec la volonté de concrétiser des solutions trouvées, qu’une répartition harmonieuse du médium « argent » pourra commencer à se mettre en place. Cela passera par une remise à plat de l’attitude de chacun face à « l’argent », toujours sans concession mais aussi sans jugement ni critique. Il est possible de constater que les comportements face au médium « argent » peuvent se résumer à deux attitudes :
* de possession
* de pouvoir
Ces deux attitudes ont une origine psychologique commune : le désir de posséder comme celui du pouvoir ont, comme substrat identique, le désir de reconnaissance que ce soit de la communauté familiale ou clanique, de la société, du conjoint etc.
« L’argent » n’est pas la cause de ce dysfonctionnement, il en est simplement un révélateur. Si tout un chacun parvenait à comprendre, à travers son utilisation, les rouages intimes qui président aux abus, aux excès en tout genre dont il fait l’objet, alors l’humanité entrerait dans un véritable « âge d’or ».
source : soleil-levant.org
Merci à Fred L. de nous donner l’occasion de relire l’un des textes fondateurs du « monétarisme », on y voit en particulier, qu’au lieu d’essayer de clarifier ce qu’on entend par monnaie, von Hayek propose de considérer comme « monnaie » tout ce qui peut s’échanger, ce qui ouvre la voie à ces définitions de « masse monétaire », de M1 à M4, qui permettent de compter les mêmes sommes d’argent de 2 à 5 fois.
Il ne s’agit peut–être pas d’introduire la confusion délibérément mais c’est bien à cela que l’on arrive : à un « Tout est dans tout et réciproquement » généralisé, où l’on considère à la fois le système monétaire comme fermé : « monnaie centrale », et comme ouvert : plus toutes les promesses de richesses à venir. La raison, il la donne à mots couverts : « Où le pouvoir doit-il s’exercer ? » D’où faut-il tirer les ficelles ? Et il donne la réponse : à partir des banques centrales.
Ceci dit, la manière dont il s’y prend est intéressante aussi : éliminons le public de ce genre de discussions, à qui il dit, « C’est si compliqué que vous n’y comprendrez jamais rien » (« the education of the general public ») autrement dit : « Circulez, y a rien à voir = Laissez les experts s’occuper de cette question », même s’il ajoute que l’expertise des experts n’est peut–être pas au point non plus (« our theoretical knowledge »). Quoi qu’il en soit, la conclusion est celle qui sied à l’un des plus formidables théoriciens du conservatisme : « Surtout ne touchons à rien = laissons le pouvoir à ceux qui l’ont déjà » : » We are still very far from the point when either our theoretical knowledge or the education of the general public provide justification for revolutionary reform or hope of carrying such reforms to a successful conclusion. »
Cette démonstration de Creutz et Jorion n’est pas conforme aux explications de la FED quand elle décrit comment les banques commerciales créent l’argent qu’elles prêtent…
http://www.truthsetsusfree.com/ModernMoneyMechanics.pdf (lire les pages 6 à 11 suffit)
Alors en qui avez-vous le plus confiance pour comprendre comment fonctionne le système bancaire sur les réserves fractionnaires ?
Moi j’ai largement confiance en la FED pour m’expliquer cela… Plus qu’en des personnes qui ne travaillent pas dans ce domaine !
La vérité est que personne ne perd son pouvoir d’achat !
D’ailleurs à chaque fois que vous dîtes que des gens risquent de perdre leur dépôt car il a été prêté vous employez toujours le conditionnel car il n’y a aucun exemple de ce type ! Tout simplement car le dépôt des uns n’est pas prêté aux autres !
@ Eminence Thénar
Pouvez-vous être plus spécifique ? Où se trouve la réfutation de ce que nous avançons dans ce gros document ? Un numéro de page par exemple ?
D’où tenez-vous que je « ne travaille pas dans ce domaine » ?
@ Eminence Thénar
Je viens de lire le texte entier, il dit exactement la même chose que Creutz et moi-même. D’où tenez-vous qu’il dise le contraire ?
Pardon, Paul, mais j’ai repris ce texte parce qu’il me semblait répondre à votre question – pour autant que je la perçoive 🙂
Hayek explique en creux pourquoi il retient une conception large de la monnaie : parce qu’il veut construire une théorie monétaire des cycles économiques et que, de ce point de vue, ses idées valent pour tout ce qu’il appelle monnaie et pas seulement pour M1. Sa thèse – qu’il reprend à Mises – est en gros que le fonctionnement du système de crédit contient en lui le germe des crises, puisque chaque crise débute par une abondance de crédit déformant les perspectives d’investissement. Cette abondance excessive pouvait être provoquée par la banque centrale (chemin que suivra le monétarisme mais en rajoutant l’hypothèse d’une monnaie externe, ce que Hayek ne croyait pas, en tout cas dans ce livre) ou par les banques commerciales. Keynes ne dira pas autre chose, sauf qu’il ira plus loin. Pour lui, ce n’est pas la création monétaire en soi qui est la cause des crises, il faut encore ajouter la spéculation; sans spéculation une abondance de crédit peut tout au contraire favoriser la croissance, analyse qui fonde depuis les politiques monétaires expansionnistes.
Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi ces idées vous repoussent alors qu’elles sont les plus compatibles avec votre vision globale de la situation actuelle (pour autant que je me la représente), puisque ce sont les seules qui permettent de comprendre la crise actuelle (même si pour une analyse plus globale, il faudrait faire appel à Marx et aux post-keynésiens, puisque la déformation de la répartition du surplus au détriment des salaires est un facteur crucial). La définition de la monnaie n’est pas une question en soi, autrement cela devient de la scolastique; une définition dépend du problème que l’on considère; quel est le problème que vous considérez ? S’il s’agit de la création monétaire, alors oui, il vaut mieux définir largement la monnaie pour en comprendre l’impact sur le fonctionnement de l’économie.
La raison pour laquelle il n’est pas absurde de définir largement la monnaie, c’est que cela correspond à sa propriété la plus profonde en ce qu’elle permet une projection vers le futur, tant individuelle que globale. Aujourd’hui la monnaie n’est plus seulement un intermédiaire des échanges, elle est aussi ce qui permet au capitalisme de se projeter dans le futur et d’évaluer collectivement le monde, ce qu’on appelle traditionnellement sa fonction de réserve de valeur. Cette définition large de la monnaie est nécessaire pour comprendre l’impact de l’incertitude et le rôle de la spéculation dans nos économies, c’est tout l’apport de Keynes d’avoir soutenu cette conception large de la monnaie, tandis qu’au contraire les monétaristes nous ont rencentré sur la définition étroite de la monnaie comme base monétaire, ce qui nous a rendu de nouveau aveugles aux question de crédit, d’incertitude et de spéculation. En cela le monétarisme s’est fait l’allié des « rentiers » et des « capitalistes », qui ont à nouveau bénéficié de la spéculation (d’autant plus qu’on reprivatisait et dérégulait les banques) tandis que les gouvernements (puis les banques centrales) maintenaient l’austérité salariale et une faible inflation.
Si je comprends bien tout ce débat, la multiplication des opération de transport (pour reprendre l’analogie) n’est pas vraiment problématique statistiquement.
Il y a quand même cette ‘magie’, qui transforme une opération de transport utilisant un wagon en une deuxième opération de transport n’utilisant pas de wagon (intérêt sans valeur ajouté par exemple). Cela n’est pas possible dans le monde rationnel, un nouveau wagon est forcément créer pour rétablir l’équilibre.
Comme le rappelle Étienne, on ne manipule que des opérations de transport. Impossible de calculer les moyens et leurs évolutions à partir des opérations seules. Si scandale il y a, on ne le verra jamais. Peut être que quelqu’un est capable d’évaluer le % de wagon créer ‘ex-nihilo’ à partir d’une opération de transport. A moins que cette création n’existe pas non plus ?
Bonjour à tous.
A propos du ModernMoneyMechanics
En suivant les liens présenté dans d’autres posts de ce blog, je suis aussi tombé sur ce ModernMoneyMechanics il y a un ou deux jours. Car il est dit par Bankster que c’est sur ce document de la Fed que Paul Grignon s’est majoritairement basé pour faire son film. Un tel document est assurément très intéressant.
En ce qui concerne l’effet multiplicateur du crédit. Le document en question n’a de cesse de parler de création monétaire. Pourtant, et toujours en fonction des faits exposés par le document, la formulation de création monétaire quand il s’agit de la multiplication du crédit par réserves fractionnaires semble inapproprié. (voir le post de Paul). Il ne s’agit pas d’idéologie, de philosophie de la monnaie ou de quoi que ce soit de ce genre, mais seulement de faits. L’effet multiplicateur du crédit tel qu’il est décrit partout ou je l’ai vu expliqué, n’est pas de la création. Cette formulation est abusive.
En revanche, d’après ModernMoneyMechanics, il y a bien une création d’argent qui, pour le coup, surgit réellement de nulle part. C’est la création par les banques centrales. Et ce, d’une manière qui me semble des plus étranges : par l’achat de bons du trésor. Le document ne s’attarde malheureusement pas sur cette partie, qui me semble pourtant être la seule relatant une réelle création : Les banques centrales, quand elle veulent augmenter la masse monétaire en circulation le font en achetant des bons du trésors à partir d’argent nouveau. Et quand elle veulent la diminuer, elle vend ces même bons. L’achat se fait à partir d’argent nouveau, créé à partir de rien. Et l’argent récupéré de la vente est détruit. Pourquoi diable des bons du trésor ?
Je me pose alors une foule de questions :
1/ Est-ce le même fonctionnement pour la FED, la BCE et les autres banques centrale ?
2/ Si une banque commerciale achète un bon du trésor à l’état, peut-elle le faire en créant de l’argent complètement nouveau ? Ou cela est-il uniquement le privilège de la banque centrale ? (a priori, c’est juste le privilège des banques centrales, mais on ne sais jamais).
3/ Existe-t-il d’autres actifs ayant le même pouvoir de ‘création monétaire’ que les bons du trésors ?
4/ Sérieusement, si cet argent est réellement créé à partir de rien pour financer la dette de l’état, pourquoi diable l’état ne le créé-t-il pas lui même (à partir de rien : rien de plus facile 🙂 ) et sans avoir à payer d’intérêts ?
5/ Ce n’est pas vraiment une question : Ce processus de contrôle de la masse monétaire avec injection et retrait de dette du pays me paraît des plus douteux. Ce qu’on attend d’une dette, c’est qu’elle soit remboursée rapidement. Pas qu’on en fasse un actif financier duquel en en suce le maximum d’intérêt. Il me semble bien que c’est ainsi que les choses se passent aux états-unis, et pas seulement par rapport aux sub-primes, mais aussi par rapport aux T-Bond ? Pensez-vous que j’ai tord ? Savez-vous si les choses se passe différemment en Europe avec la BCE ?
Chère Eminence, écoutez donc le conseil de G. Bernard Shaw :
« laissons faire les fous, voyez où les sages nous ont menés… »
@ Fred L.
Je ne nie pas l’intérêt de ressusciter ces textes. Je me contente comme vous l’avez vu d’analyser le passage de von Hayek que vous citez. Je suis un fanatique de la clarté conceptuelle et je dis : « Voyez à qui l’opacité profite ! », à von Hayek et ses complices.
Sur von Hayek et Keynes. J’y ai déjà fait allusion : « On me dit, si von Hayek avait tort, c’est donc que Keynes avait raison, n’est-ce pas ? » Et je réponds : « Les économistes aimeraient bien que si l’un d’eux a tort, un autre d’entre eux ait nécessairement raison. Je n’exclus pas cette hypothèse mais il y a trop de choses en économie que tous ensemble (Marx et post-Keynésiens y compris) n’ont pas expliquées pour que je ne l’écarte pas a priori ».
Archimondain dit :
@ 6 décembre 2008 à 20:50
« »4/ Sérieusement, si cet argent est réellement créé à partir de rien pour financer la dette de l’état, pourquoi diable l’état ne le créé-t-il pas lui même (à partir de rien : rien de plus facile ) et sans avoir à payer d’intérêts ?
5/ Ce n’est pas vraiment une question : Ce processus de contrôle de la masse monétaire avec injection et retrait de dette du pays me paraît des plus douteux. Ce qu’on attend d’une dette, c’est qu’elle soit remboursée rapidement. Pas qu’on en fasse un actif financier duquel en en suce le maximum d’intérêt. Il me semble bien que c’est ainsi que les choses se passent aux états-unis, et pas seulement par rapport aux sub-primes, mais aussi par rapport aux T-Bond ? Pensez-vous que j’ai tord ? (….) » »
Mais Archimondain, tu as déduit exactement la vérité! Et ces « détails » cruciaux sont durs à faire passer tellement profond sont ancrés les réflexes des uns et des autres. Souvent il faut comprendre et « enquêter » en creux et par défaut. C’est le règne de l’implicite contre l’explicite.
Je remets par copié collé de ce que je transmettais dans: « Tout notre Débat sur la Monnaie »
Rumbo @ le 12 août 2008 à 9h44.
Voici:
– L’exemple des obligations est élucidant. Voici, en résumé et actualisé ce que disait en substance l’inventeur américain Thomas Edison. Si un pays peut émettre, par exemple, une obligation d’une valeur de 50 euros, le même pays peut très bien émettre un billet de 50 euros. Si l’obligation est bonne, pourquoi le billet (ou les chiffres comptables) de 50 euros ne le serait pas ?
La différence est criante, mais dissimulée sous toute une série d’ “écrans et de rideaux de fumée”.
La différence entre l’obligation et la monnaie (ici l’euro) est donc que l’obligation permet aux prêteurs d’argent de ramasser au bilan 2 fois le montant de l’obligation, plus quelques 20% additionnels, alors que l’argent mis en circulation ne paye que ceux qui contribuent à la production et à tout ce qui est utile à la vie ici-bas. Il est absurde de dire que notre pays peut émettre 500 millions en obligations, et pas 500 millions en monnaie. Les deux sont des promesses de payer, mais l’un engraisse les usuriers, et l’autre aiderait le peuple. Si l’argent émis par le gouvernement n’était pas bon, alors, les obligations ne seraient pas bonnes non plus. C’est une situation terrible lorsque le gouvernement, pour augmenter la richesse nationale, doit s’endetter et se soumettre à payer des intérêts ruineux à des groupes d’intérêts qui s’introduisent, indirectement mais ABSOLUMENT, dans les gouvernements eux-mêmes et font élaborer des “lois” pour assurer leurs seuls intérêts contre ceux de la société, laquelle qui n’y voit goutte et soupire d’impuissance.
(….)
De grâce, arrêtons d’insulter la providence, nous avons tous les moyen de concevoir un système d’argent dont l’étalon est la production. –
Je m’étonne que ma question soit restée totalement inaperçue :
Toutefois, pour moi, la difficulté réside dans la question suivante : qu’est-ce que cela change, concrètement, que la masse monétaire soit égale uniquement au numéraire en circulation et que les autres montants disponibles comme moyens de paiement ne soit que des re-circulations du même numéraire de base (du moins comme potentialité) OU que ces différents montants soient considérés comme une masse monétaire surnuméraire à la forme scripturale (théorie habituelle des masses jusqu’à M3) ?
Quel est fondamentalement l’enjeu de cette discussion ? (sur le plan juridique, économique, politique ?)
La réflexion de Rumbo sur les fuseaux horaires me fait penser à cette masse monnétaire non quantifiable qui circule électroniquement en permanence autour du monde suivant les ouvertures des marchés et dont le passage se résume à une entrée-sortie permanente . C’est vrai que la vitesse de circulation de l’argent assure une image comptable plus que douteuse d’une masse monnétaire à un instant donné .
@ Dani
Je pense pour ma part que la question essentielle à se poser ici est :
Comment tout un chacun peut-il comprendre les rouages de la création monétaire lorsque les spécialistes ici présents ne les comprennent pas encore ?
@dani…mais non pas totalement inaperçue…mais rien d’étonnant pour l’instant…dans la mesure ou personne encore ne peut dire « comment il sait » ce qu’il avance…courage..
@ Etienne Chouard
Vous dites : « Si j’ai bien compris, quand une banque prête de l’argent (quand elle reconnaît une nouvelle dette contre elle), il n’est pas question de réutiliser de la monnaie existante : LA BANQUE N’A PAS LE DROIT DE PRÊTER L’ARGENT QUI M’APPARTIENT, elle n’a pas le droit de céder la créance que j’ai contre elle, je suis le seul, en droit, à pouvoir faire ça. »
Etes-vous si sûr de ce que vous avancez ? Car ce que vous dites est CAPITALE. Retrouvez le texte de loi qui l’interdit et vous aurez gagnez « la bataille » de la création ex nihilo, si vous avez tort ou que vous ne puissiez pas le prouvez alors c’est Jean Jorion qui a raison.
Toute théorie doit être passée à l’épreuve des faits pour s’imposer.
Ce sont donc des données factuelles qui pourraient permettre de sortir de cette « crise » des spécialistes.
Les banques prêtent-elles les dépôts de leurs clients ou une monnaie créée à cette fin ?
Dans cette étude de la BCE, les établissements de crédit sont bien considérés comme créateurs de monnaie.
A mon avis pour en sortir « par le haut » il nous faut du factuel, encore du factuel, toujours du factuel…
Connaissez-vous un directeur de banque ?
Shiva dit : « Connaissez-vous un directeur de banque ? »
Je travaille dans une grande banque et je crois que presque personne ici n’a idée de tout ce qui est discuté sur la monnaie. Le travail y est assez routinier, on suit des procédures et on ne se pose pas de questions hautement théoriques sur la nature de la monnaie.
Je ne vois toujours pas quelle est la question en débat.
Pour l’instant, on a l’impression de voir deux camps qui s’affrontent sur leurs définitions respectives.
Premier camp ; si l’on restreint l’usage du terme de monnaie à la seule base monétaire (M1, monnaie banque centrale), alors bien sûr que les banques ne créent pas de monnaie, elles créent du crédit (M3-M1, moyens de paiements, monnaie banques privées); c’est la définition restreinte de la monnaie privilégiée par le monétarisme et plus généralement par la théorie quantitative de la monnaie; quand la monnaie banque centrale circule plus vite ou voit sa quantité augmenter, les banques peuvent distribuer plus de crédit; il y a (vaguement) conservation des quantités de monnaie (au sens de la base monétaire). C’est à cause de cette première conception que les banques centrales ont vécu dans l’illusion de contrôler l’encours total de crédit via la maîtrise de la base monétaire. C’est la conception de la monnaie exogène. Mais ce que l’on découvre aujourd’hui c’est que ce n’était qu’une illusion, puisque le lien entre la base monétaire et l’encours total de crédit est beaucoup plus élastique que ne le suppose la théorie (et les petits modèles simplifiés sur lesquels chacun raisonne).
Deuxième camp : si l’on étend l’usage du terme de monnaie à l’ensemble de la masse monétaire (M3 ou M4 par exemple), alors cette fois on peut dire que les banques commerciales créent de la monnaie, via le multiplicateur de crédit. Les banquiers ne s’en rendent pas compte, car au niveau d’une banque individuelle les contraintes comptables semblent indiquer le contraire, mais au niveau de l’économie tout entière, il peut y avoir création ou destruction (collective) de monnaie. Comme le remarque l’auteur dont vous reproduisez le texte, le mécanisme est analogue au multiplicateur de dépense keynésien, et cela est normal, puisqu’il en est la contrepartie sur le plan réel. – Qui contrôle alors la création monétaire ? En fait tout le système économique : la banque centrale via la base monétaire et l’obligation de réserves, les banques privées via leur politique de crédit, les entreprises et les ménages via leur demande de crédit, etc. C’est la conception endogène de la monnaie.
Ce qui m’apparaît depuis le début à la lecture (rapide) des discussions, c’est que le débat reste bloqué à cette querelle de définitions, sans aborder les conséquences qu’entraîne l’un ou l’autre choix. Or une définition de la monnaie ne se juge qu’à l’aune des questions qu’elle permet de poser et des réponses qu’elle leur apporte, tout le reste demeure abstrait (au mauvais sens du terme).
@ Fred L.
http://www.pauljorion.com/blog/?p=1047#comment-10838 et #comment-10842
Encore une question éludée !
Sauf par Armand (#comment-10870 de l’article cité plus haut).
@ Archimondain qui dit « Pourtant, et toujours en fonction des faits exposés par le document (Modern Money Mechanics), la formulation de création monétaire quand il s’agit de la multiplication du crédit par réserves fractionnaires semble inapproprié (voir le post de Paul).
N’avez-vous jamais imaginé que ce puisse être l’inverse ?
@ Paul Jorion :
J’ai déjà précisé les pages importantes : 6 à 11.
La différence entre l’explication de Modern Money Mechanics (MMM) et votre théorie :
– vous dites que si une banque reçoit 1000 en dépôt d’un individu A, elle en garde 100 et en prête 900 lors d’un crédit à un individu B. Il y a conservation des quantités. Si B ne rembourse pas, et que la banque n’y pallie pas (par l’ensemble de ses fonds), A a perdu son dépôt. Cela signifie que A et B ne peuvent utiliser leurs comptes en même temps (s’ils représentent tous les clients de la banque).
– MMM explique que si une banque commerciale reçoit 1000 en dépôt de A, elle en garde la totalité (1000) et crée 900 lors d’un crédit pour les prêter à B. Les individus A et B peuvent tous les deux utiliser leur somme pour la dépenser, personne ne perd son pouvoir d’achat.
« The important fact is that these deposits do not disappear. They are in some deposit accounts at all times. All banks together have $10,000 of deposits and reserves that they did not have before. However, they are not required to keep $10,000 of reserves against the $10,000 of deposits. All they need to retain, under a 10 percent reserve requirement, is $1000. The remaining $9,000 is « excess reserves. » This amount can be loaned or invested. See illustration 2.
If business is active, the banks with excess reserves probably will have opportunities to loan the $9,000. Of course, they do not really pay out loans from the money they receive as deposits. If they did this, no additional money would be created. What they do when they make loans is to accept promissory notes in exchange for credits to the borrowers’ transaction accounts. Loans (assets) and deposits (liabilities) both rise by $9,000. Reserves are unchanged by the loan transactions. But the deposit credits constitute new additions to the total deposits of the banking system. »
D’ailleurs d’après votre théorie quelle monnaie serait détruite lors du remboursement du crédit de l’individu B ? Le dépôt de A ? Il va être content…
Par contre si on suppose que B a reçu une somme qui n’a rien à voir avec le dépôt de A, cet argent pourra être détruit et on se retrouvera à la phase initiale concernant la masse monétaire. La seule différence remarquable est un transfert d’intérêts de B vers la banque commerciale.
D’où je tiens que vous ne « travaillez pas dans le domaine de la monnaie » ?
Car j’ai suivi tous les débats sur la monnaie.
Parce-que comme tout le monde ici nous sommes obligés d’aller chercher nos justifications ailleurs…
Moi dans la FED, vous dans Creutz…
Et après tout ca, tu m’étonnes qu’il y a des gens qui écrivent des théories du complot avec de riches banquiers qui ont envie de mettre main basse sur le monde, de contrôler l’argent et la création d’argent, d’imposer leur nouvel ordre mondial.
Et tu m’étonnes qu’il y a des gens pour y croire vu la façon dont se déroule les choses actuellement dans le monde de la finance, le manque de clarté à pouvoir expliquer ce qui se passe, le manque de sens qui semble jaillir de tout ca.
Euh finalement, parfois je me dis que la théorie de la conspiration des banquiers avec CFR, trilatérale, Bildergerg et compagnie me parait BIEN PLUS crédible que tout ce qu’on a pu essayer de rationaliser sur la monnaie
Bon toute proportion gardée, n’exagérons rien non plus 🙂
@Shiva :
Je connais (très bien – difficile d’aller plus près…) un directeur de banque et il admet que les « banques créent de la monnaie ». Mais son avis n’est ici qu’un avis parmi d’autres. Ce débat échappe largement aux questions qui font le quotidien des banquiers comme cela a déjà été souligné.
Pour moi, la question reste : qu’est-ce que cela change si les banques commerciales « créent » de la monnaie ou si elles mettent en circulation des « promesses » en multipliant les moyens de paiement sur la base de la monnaie existante ?
Peut-être que résoudre cette question fondamentale permet d’être plus crédible (et je soupçonne que ce soit un point fondamental de la recherche de Paul Jorion), mais après…. on en fait quoi ?
Le point important est de déterminer la responsabilité dans la crise monétaire.
Sont-ce plutôt les banques, et leurs prêts « déraisonnables » à vue spéculative, ou est-ce plutôt la Banque Centrale?
Faut-il plutôt utiliser le diviseur monétaire entre M1 et la monnaie fiduciaire, les banques commandent, la B.C. suit, ou plutôt le multiplicateur monétaire, la B.C. contraint, les banques commerciales suivent.
Le débat n’est donc pas « que » théorique.
Cordialement, B. L.
@ Eminence Thénar
‘N’avez-vous jamais imaginé que ce puisse être l’inverse ?’
Je ne suis pas sûre de comprendre votre question.
Dans l’extrait que vous présentez ici, les 10.000 qui « n’existaient pas avant » sont bien les 10.000 créés à partir de rien par la banque centrale, lors d’un achat de T-Bond. Ce n’est pas de l’argent qui provient d’une multiplication par réserve fractionnaire. De plus, l’extrait que vous présentez est précédé de celui-ci :
Il est clairement écrit que si la personne retire ses 10.000, la banque n’a plus ni réserves ni dépôts. Une astuce comptable fait que ces 10000 apparaissent deux fois. Une fois pour les réserve et une fois pour l’argent du dépôt. La banque peut alors prêté 90% de l’argent des réserves comme si celui-ci avait été créé. Cependant, ces réserves sont directement corrélés au dépôt. Et si la personne retire son dépôt, cela retire aussi l’argent des réserves. Ce nouvel argent n’est donc pas vraiment du nouvel argent. Pour ma part, je ne comprend pas l’intérêt de présenter les choses comme elles le sont dans ModernMoneyMecanism. Je trouve que ça porte à confusion.
Certains semblent déçu de nous voir pinaillez autour de cet aspect très particulier des choses, à la place de traiter des questions plus intéressantes et d’élever un peu le débat. Aussi, je m’excuse de faire partie de cet inertie qui ramène les discussions toujours au même point. Si vous pensez qu’il est temps de passer à autre chose, je le ferais avec plaisir. Mais selon moi, si l’on arrive déjà pas à répondre à des questions simples, il y a peu de chance qu’on arrive à répondre à des questions plus compliquées.
@ Archimondain :
Ce que vous expliquez est juste mais ne remet rien en cause, ce sont des points différents du phénomène.
Si l’individu A met 1000 dans sa banque, ce n’est pas de l’argent qui appartient à la banque (contrairement à ce que dit Paul dans son post avec Eusèbe, Casimir et la banque Tirelire), ce n’est pas non plus une dette de la banque à l’individu A. Par contre la banque s’en servira pour ses établir ses fonds et ses capacités d’emprunts dans le respect des réserves fractionnaires.
Ainsi quand A dépose 1000, la banque pourra créer et prêter 900 car ses fonds augmentent.
Par contre si l’individu A retire ses 1000 euros de son compte, ça diminuera les capacités de crédits de la banque qui pourra créer moins de monnaie.
Il faut lire les pages 6 à 11 et pas seulement mon extrait dont la phrase clé est :
« Of course, they do not really pay out loans from the money they receive as deposits. If they did this, no additional money would be created. »
Si il y en a qui sont déçus c’est seulement ceux qui, fidèles de ce blog depuis des mois, ne peuvent ou ne veulent plus s’y exprimer car leur avis contraire a été censuré…
@Patrick
Pourquoi M3 n’est plus officiellement publié par la réserve fédérale ?
Personne ne peut répondre à sa place, mais je dirais que c’est parce que c’est un repère notoire de monétaristes qui prétendent que le seul indicateur de référence est M1. Par ailleurs, on sait que dès lors qu’une banque centrale se fixe un objectif quantitatif, la relation qui préexistait se modifie, les agents économiques changeant de comportement.
Cela dit, je ne vois pas où trouver une conspiration là-dedans. Si vous souhaitez connaître M3, vous allez sur wikipedia, vous suivez le lien et vous arrivez là : http://www.shadowstats.com/alternate_data. Et bien sûr, que voyez-vous ? Une chose évidente : que M3 a fortement augmenté ces dernières années. Qu’est-ce que cela signifie ? Que comme dans toute crise financière, l’encours de crédit a fortement augmenté, d’où la suspicion que sans cette augmentation, les bulles qui sont en train d’éclater n’auraient pu se former aussi vite. {C’est pour cela que j’ai posté les pages de Hayek plus haut…)
NB : avant de chercher des conspirations, il faut commencer par comprendre les explications traditionnelles; si elles paraissent problématiques, voire impossibles, alors oui, allez dans cette voie (par exemple pour le 11/09), mais si vous le faites avant d’avoir pris connaissance des informations disponibles, vous décridibilisez ceux qui luttent contre de véritables conspirations.
Fred L. dit : « Je ne vois toujours pas quelle est la question en débat. »
Quelle est la différence entre la monnaie émise par l’état (fiduciaire), et celle émise par une banque privée (scripturale) dans laquelle on a déposé cette monnaie (fiduciaire donc), et qui donne droit à ladite banque privée d’émettre de la monnaie (scripturale cette fois) à hauteur de la réserve fractionnée (dont le taux est imposé par l’état) ?
Sur les billets imprimés par l’état est marqué le sceau de l’état, ce qui lui donne une force de convertibilité. Les chiffres donnés par les banques privés sur VOTRE relevé de compte… c’est quoi qui leur donne force de convertibilité ? Si j’imprime une feuille et j’y marque dessus 1 €uro, qui va l’accepter ? En quoi c’est différent d’un chèque de banque ? Que récupère l’état contre sa garantie et sa défense de la monnaie scripturale ?
Par ailleurs, il existe des livres d’école et de vulgarisation sur les trous noirs et les noyaux temps-réels, sur la sexualité des fourmis et les maladies génétiques, mais sur la création monétaire, RIEN. N’est-ce pas louche en soi ? On ne devrait même pas avoir à discuter de la chose, « normalement » il devrait suffire de lire quelques ouvrages universitaires qui font référence. Où sont-ils, ces ouvrages universitaires ? Si on se réfère à la seule source officielle (ModernMoneyMechanics.pdf by FED), on y lit (page 3)
« Who Creates Money?
Changes in the quantity of money may originate with actions of the Federal Reserve
System (the central bank), depository institutions (principally commercial banks), or the
public. The major control, however, rests with the central bank.
The actual process of money creation takes place primarily in banks. »
« The actual process of money creation takes place primarily in banks. »
Bon, c’est clair, là ?
The actual process of money creation takes place primarily in banks.
The actual process of money creation takes place primarily in banks.
Bonjour Dani,
J’ai bien du mal à vous répondre, je fais une troisième tentative…
« qu’est-ce que cela change si les banques commerciales “créent” de la monnaie ou si elles mettent en circulation des “promesses” en multipliant les moyens de paiement sur la base de la monnaie existante ? »
– Un « bonne » compréhension du système actuel, me semble plutôt indispensable pour » faire du neuf »…
– L’idée que des entreprises privées puisse agir en toute liberté, sur ce qui est l’énergie de l’économie et de la prospérité humaine dans un but de recherche du profit maximal me pose un gros problème moral.
le « parasitage » d’un bien, à mon sens universel, me semble moins important, voir absent, si les organismes de crédit agissent dans un cadre et sur une base monétaire décidée et gérée par un organisme plus proche du contrôle démocratique et de l’intérêt commun.
@Fred L.
http://www.shadowstats.com/imgs/sgs-m3.gif?hl=ad
Et bien nous ne lisons pas le même graphique Fred, car selon l’indicateur fourni « SGS M-3 », il semble bien en effet y avoir eu une forte augmentation jusqu’à début 2008, mais suivie d’une chute vertigineuse de cette même simulation d’agrégat, conjointement à une hausse astronomique et simultanée de l’indicateur M1.
équation : hausse M3 – baisse M1 = …
NB : Ce sont des faits qui n’ont rien à voir avec une quelconque conspiration.
Bankster.tv remercie Eminence Thénar pour avoir fait et dit ce qui nous a été censuré
Modern Money Mechanics a été utilisé par Paul Grignon et le Zeitgeist mouvement pour Zeitgeist Addendum.
(comme cité sur notre site, et la page de l’Argent Dette sur Vimeo, mais ce lien comme les autres semblent trop durs a cliquer pour certains)
C’est un document officiel de la FED de chicago et c’est grâce a ce document notamment que l’on sait ce qu’il se passe.
J’avais déjà conseillé a Paul Jorion de le lire avant de se prononcer (idem pour tous les autres qui s’expriment sur la monnaie ici)
Parce que tant que vous ne l’avez pas lu, vous parlez de quelque chose que vous ne connaissez pas.
Il faut lire les règles du jeu avant de les commenter et de dire que les films amateurs qui les expliquent sont faux.
Si vous voulez être sur de perdre un jeu, jouez avec celui qui a inventé les règles…
@Dani
Autre chose, si je recherche des données factuelles c’est que la loi et les règlements européens que j’ai pu trouver me semblent flous sur le droit de création monétaire par les organismes de crédit. A tel point que j’ai l’impression qu’ils ont la possibilité de faire comme ils le souhaitent, à savoir; du crédit « comptable » à qui mieux mieux en respectant les 12,5% du ratio McDonough de fonds propres (pondéré…) par rapport au risque de crédit; et utiliser comme ils le souhaitent (en tant que liquidités) les fonds déposés en respectant le ratio de réserve (actuellement 2% dans la zone euro) sachant que les nouveaux crédits produiront de nouveaux dépôts. Si ils deviennent illiquides, financement automatique par leur banque centrales qui ne peut courir le risque d’une faillite dans son secteur…
J’ai peur que le système fonctionne comme cela, mais je n’en sais rien, je n’en ai aucune preuve factuelle.
Les modèles théoriques ne permettent pas de répondre pas à la question de l’origine « comptable » ou « monétaire » (dépôts) des prêts. Les doc de la FED de la BCE, les déclarations de banquiers ou de comptables de banques, voir de concepteurs de logiciels bancaires, me semblent plus probants…
@ Patrick
« Et bien nous ne lisons pas le même graphique Fred, car selon l’indicateur fourni “SGS M-3”, il semble bien en effet y avoir eu une forte augmentation jusqu’à début 2008, mais suivie d’une chute vertigineuse de cette même simulation d’agrégat, conjointement à une hausse astronomique et simultanée de l’indicateur M1. »
Exactement : hausse de M3 quand les taux d’intérêts étaient bas et que les bulles se développaient – tout le monde était optimiste – et maintenant que les bulles ont explosé M3 chute et les banques centrales tentent de la compenser en créant de la base monétaire M1.
@ Zolko
« Par ailleurs, il existe des livres d’école et de vulgarisation sur les trous noirs et les noyaux temps-réels, sur la sexualité des fourmis et les maladies génétiques, mais sur la création monétaire, RIEN. N’est-ce pas louche en soi ? On ne devrait même pas avoir à discuter de la chose, “normalement” il devrait suffire de lire quelques ouvrages universitaires qui font référence. Où sont-ils, ces ouvrages universitaires ?
Mais il y en a des milliers, écrits depuis des siècles, il suffit d’aller dans une bibliothèque ! N’importe quel manuel de théorie monétaire en parle, plus tous les grands économistes de l’histoire.
“The actual process of money creation takes place primarily in banks.” Ce n’est pas à moi qu’il faut le dire, mais ce n’est pas une nouveauté.
Fred L. dit: « Mais il y en a des milliers, écrits depuis des siècles, il suffit d’aller dans une bibliothèque ! N’importe quel manuel de théorie monétaire en parle, plus tous les grands économistes de l’histoire. »
Références s’il vous plaît ? Dire « toutes les preuves sont là, à vous de les chercher » n’est pas une preuve, n’est pas scientifique. Et ne fait que renforcer la thèse selon laquelle justement, ces preuves n’existent pas. Elles n’existent pas soit à cause d’une conspiration des banquiers, soit à cause d’un système mal-fichu (ce qui expliquerait pourquoi il sa casse la gueule).
Dans tous les cas, on peut conclure scientifiquement que le système est mauvais. Les monnaies scripturales et fiduciaires ne peuvent être identiques, ni même similaires. Le système actuel est équivalant à l’autorisation de la fausse monnaie.
@zolko
Je ne peux pas vous laisser dire cela.
Indépendamment du fait que j’ai raison ou pas quand j’affirme que les banques commerciales ne créé pas d’argent. Quand bien même ce serait le cas, tout le monde s’accorde alors pour dire que cet argent est détruit une fois remboursé. Si la personne ne rembourse pas, la banque doit le faire à sa place.
Les faux-monnayeurs ne s’encombre pas d’une telle contrainte.
Notez que je ne cautionne pas non plus le système actuel, dont l’échec est flagrant quand au fait de permettre à l’ensemble de l’humanité de ‘vivre bien’ (terme à développer) ne serait-ce que matériellement. Cependant, je le redis, la critique doit rester juste et cohérente avec la réalité, sans quoi nous ne sommes qu’une bande de mécontent sans pensée construite et sans crédibilité.
Dans un organisme vivant, les sang joue un rôle très important.
Il serait intéressant d’ étudier l’ évolution différents regards des scientifiques, des philosophes, des poetes, sur ce sujet.
En effet, si on demande a n’ importe qui ce qu ‘est le sang, on vous répondra d’ un haussement d’ épaule, que c’ est evident : c’ est un fluide qui est necessaire a la vie de l’ organisme.
Descartes avait compris la fonction des artères et des veines.
En approfondissant un peu, on vous dira qu ‘il est nécessaire au fonctionnement de chaque organe.
Un organe qui ne reçoit plus de sang va « appeler a l’ aide » en envoyant des signaux de nature variés (nerveux, hormonaux, biologiques…), la composition du sang va se modifier pour essayer de dissoudre un caillot, ou colmater un saignement, voire se modifier de façon générale en provoquant une coagulation chaotique et disséminée de tous les petits vaisseaux sanguins de l’ organisme entraînant la mort de l’ organisme (CIVD).
Le sang transporte autre chose que l’ oxygène : il transporte notamment les effecteurs du système de défense cellulaire de l’ organisme contre les infections.
Il transporte de nombreuse hormones necessaires a la régulation de la quantité d’ eau dans le corps, au réglage du diamètre des vaisseaux sanguins, de la pression du sang, de la vitesse de battement du coeur…
Notre débat sur la monnaie ressemble a celui qu ‘ aurait pu avoir Descartes avec un mécanicien des fluides d’ aujourd ‘ hui: quelques règles de 3, un peu d’ équations différentielles, agrémenté d’ un peu de théorie du Chaos…
Mais ce débat n’ est jamais que quantitatif, et ne nous parle pas de la fonction, ou des fonctions de la monnaie.
Ce débat de mécaniciens ne peut aboutir qu ‘à deux choses : la transfusion ou la saignée.
Ce traitement peut certes parfois sauver le malade (si les petits vaisseaux ne sont pas irréversiblement bouchés), mais il n’ apporte aucune connaissance sur la maladie et sa récurrence.
Archimondain dit : « Indépendamment du fait que j’ai raison ou pas quand j’affirme que les banques commerciales ne créé pas d’argent. »
Selon la FED, vous auriez tort: “The actual process of money creation takes place primarily in banks.”
« cet argent est détruit une fois remboursé. »
Oui, comme vous dites, « cet argent là », mais les intérêts sur « cet argent là » ne le sont pas (détruits). C’est bien expliqué dans Zeitgeist Addendum (2), les banques privées créent de la monnaie, qui est détruite lorsqu’elle est remboursée, mais elle est remboursée avec intérêts, et l’argent pour rembourser les intérêts, il vient d’où ? Il vient du futur, c’est la dette perpétuelle. Dans le système actuel, il n’y a pas assez d’argent en circulation pour payer la totalité des crédits en circulation, à cause des intérêts. Donc la masse monétaire augmente sans cesse. C’est inscrit dans les bases fondatrices du système.
Bonsoir,
H. Creutz ne me convainc point. De ses « points de réflexion », je tire l’inverse de ce qu’il affirme. Qui a raison?
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1) que lors de chaque réutilisation du premier dépôt supposé de 100 millions, suite au crédit qu’il a permis d’accorder, il se produit à chaque fois un nouveau dépôt d’un client quelconque de la banque, dépôt qui, bien entendu, peut être de nouveau prêté ;
____________________________________
C’est bien cela même, le principe du « multiplicateur de crédit », n’est-ce pas? Le système permet, à chaque tour, de prêter une nouvelle fois la somme initiale, moins le % de réserve fractionnaire obligatoire. C’est une équation de décroissance exponentielle, de la forme M(t) = M(0).exp(-%t), qui exprime le montant M qui peut être prêté au tour t, sachant que le montant initial est M(0), et que le taux de rétention est %. Cette équation tend asymptotiquement vers zéro, ce qui fait que au bout d’un nombre restreint de tours, le cumul des prêts n’augmente plus significativement. Le cumul tend à se borner à 9 fois le montant initial quand % = 0,10 (soit 10%)
_________________________________________
2) que l’enchaînement des octrois de crédits et des constitutions de réserves par les banques tel qu’il est décrit ne peut se faire qu’aussi longtemps qu’aucun des déposants ne dispose de son avoir en effectuant un retrait ou un virement ;
_________________________________________
Je ne comprends pas Creutz sur ce point. Cela voudrait dire que, si je prends un crédit pour acheter une voiture, je bloque la chaîne des dépôts-crédits dès lors que j’achète réellement la voiture, mais pas tant que je diffère l’achat, bien que la somme ait été inscrite sur mon DAV? Je ne vois pas les implications de cette affirmation.
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3) qu’en réalité, au fil du processus, on n’assiste nullement à un accroissement de la masse monétaire mise en circulation, de quelque manière que ce soit, mais toujours à une réutilisation, tandis que, à chaque étape, la masse monétaire réellement existante est inéluctablement le résultat de l’addition des réserves constituées jusque-là et du crédit accordé en dernier, et équivaut au montant initial de 100 millions ;
_____________________________________
Donc, ma banque peut prêter 10 000. Elle me propose un crédit de ce montant, pour que j’achète une voiture. Je donne l’argent à mon concessionnaire. Il le dépose sur son compte. Sa banque en retient 1000 comme réserve, et en reprête 9000 à un boulanger, qui veux réinvestir dans un four neuf. Il achète son four, et le fournisseur du four dépose la somme sur son compte. Sa banque en retient 900, et et reprête 8100 à un famille qui fait des travaux d’isolation de son logement. Ils payent l’entrepreneur, etc.
Faisons la somme des biens achetés à partir des 10 000 de départ: 10 000 + 9 000 + 8 100 = 27 100. A ce point, certes, il y a utilisation de la même somme successivement, ce qui conforte l’idée que les banques ne créent pas de monnaie, mais que les additions des opérations permises par cette même monnaie est une sorte d’erreur conceptuelle. Seulement voilà: cette monnaie, au départ, n’appartient pas aux acheteurs des biens, qui doivent simultanément rembourser 27 100 aux banques, quand seulement un peu plus de 1 000 existent vraiment au départ (la réserve fractionnaire de 10% de ma banque =1 111). Il y a donc accroissement de la dette totale. A partir du moment où l’on accepte l’idée que la monnaie bancaire est une dette, il y a bien accroissement de la monnaie bancaire. Ce qui m’amène a considérer que l’opposition entre pro et anti « ex-nihilo » se situe surtout sur un terrain sémantique : qu’est-ce que la monnaie? Et par exemple, qu’est-ce que « la monnaie réellement existante » citée par Creutz?
_____________________________________
4) que non seulement il ne se produit pas d’accroissement de la masse monétaire mais, qu’en fait, en ce qui concerne la masse monétaire active et axée sur la demande, elle diminue même constamment, étant donné que sur les 100 millions initiaux, des montants de plus en plus élevés sont gelés dans les réserves des banques jusqu’à être totalement absorbés ;
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Cette affirmation ne fait rien d’autre qu’exprimer autrement l’équation de la décroissance exponentielle du montant résiduel éligible au prêt (qui tend vers zéro), autrement dit, le fait que le « multiplicateur de crédit » est un nombre réel qui dépend du « ratio prudentiel ». Elle n’apporte rien au débat.
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5) que l’utilisation répétée de la monnaie, que ce soit pour procéder à des achats, la prêter ou en faire cadeau, n’accroît jamais sa masse mais uniquement les opérations d’achats, de prêts ou de dons ainsi effectués, qui, bien entendu, additionnées, donnent des montants de plus en plus élevés.
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Sauf que dans le cas des échanges commerciaux en séries il se produit une somme croissante d’extinctions de dettes aussitôt celles-ci contractées (vous prenez un objet au magasin, vous déclarez vouloir en devenir propriétaire, vous êtes en dette face au commerçant, vous acquittez cette dette en entier avant de quitter le magasin) ; dans le cas de la réutilisation de monnaie pour des prêts en série, il se constitue une somme croissante de dettes bien réelles, qui devront être remboursées par le travail bien réel des emprunteurs (et en plus, avec un intérêt considérable)
____________________________________
Les faits énumérés ci-dessus sont encore plus clairs lorsqu’on se représente cet enchaînement, non pas au niveau de banques, mais au niveau d’opérations commerciales, et qu’il s’agit non plus de prêts à répétition mais de ventes à répétition. Là aussi, on peut supposer que chaque commerçant met dix pourcent de sa recette de côté et qu’il dépense le reste directement ou indirectement dans un autre magasin pour faire des achats. Là encore, l’addition des opérations d’achat donnerait le même résultat que celles des opérations de crédit dans le cas de la « surmultiplication de la création monétaire ». Et pourtant personne n’irait prétendre que la masse monétaire a été multipliée par neuf ou que les commerçants ont créé 900 millions [ex nihilo].
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Ceci reprend ce que j’ai écrit au dessus de ce même paragraphe: il ne faut pas confondre multiplication du crédit (=extension de la dette globale) et vitesse de circulation de la monnaie (=extinction de plusieurs dettes par une même monnaie), car les processus ne sont pas symétriques, ni bien évidemment leurs conséquences.
Avant de poster ce message, je voudrais faire, très humblement, une tentative de réconciliation des partis pro et anti « ex nihilo », sur la base de cette dernière réflexion. Je propose pour cela deux tableaux, dont l’un exprime le point de vu de Creutz sur les échanges commerciaux, et l’autre les visions croisées de pro et des anti « ex nihilo » sur la monnaie. Le premier tableau est là pour démontrer que le dernier argument de Creuz (son point 5) n’est pas valable en tout point, du fait d’une dissymétrie des processus en jeu.
Tableau 1: la vitesse de rotation de la monnaie.
Somme disponible au départ: 10 000. Rétention par chaque intervenant: 10% (on peut d’ailleurs discuter de ce point, car finalement, ces 10% finiront bien par servir à quelque chose au sein de l’économie réelle: ils ne sont pas « bloqués » comme le sont les 10% de la réserve fractionnaire de la banque)
Somme reçue en paiement Somme retenue Somme transférée à l’acteur économique suivant
10 000 1 000 9 000
9 000 900 8 100
8 100 810 7 290
7 290 729 6 561
etc…
Résultat: une même somme de monnaie de 10 000 a permis d’échanger des biens et services pour 40 951, en intégrant le premier paiement de 10 000. Ces échanges sont réels, et fermes. Il n’y a plus aucune raison de revenir dessus, tout est classé entre tous ces acteurs économiques, jusqu’à la prochaine fois.
Tableau 2: la multiplication du crédit
Réserve obligatoire de la première banque: 1 111
Crédit accordé (et déposé sur un autre compte ailleurs) Réserve retenue Capacité résiduelle de crédit
10 000 1 000 9 000
9 000 900 8 100
8 100 810 7 290
7 290 729 6 561
6 561 656
etc…
Nous voyons ici que, comme l’exprime Creutz, la somme initiale de 10 000 va progressivement de retrouver « bloquée » dans les réserves obligatoires : c’est le cumul des réserves retenues (4 095, soit 40% de la monnaie initiale en seulement 4 tours). De son côté, la capacité résiduelle de crédit décroît asymptotiquement vers zéro. Il semble donc bien à ce point que ce soit le prêt successif de la même monnaie, systématiquement amputée de 10% de son montant à chaque tour, qui permette une succession d’échanges commerciaux. En effet, chaque crédit accordé va fatalement servir à un échange commercial (une voiture, un four de boulanger, des travaux d’isolation, etc).
Seulement, au terme de la série des prêts successifs, il y aura une dette totale de l’ensemble des emprunteurs qui sera ici de 40 951, et qui va perdurer au delà de l’échange commercial permis par l’emprunt!!! Or, cette dette est ce que s’échangent les acteurs économiques, puisque ce sont ces montants, inscrits sur leurs comptes DAV, qu’ils s’échangent par le truchement des moyens de paiement scripturaux! Cette dette est donc, dans l’économie réelle, une monnaie!
Donc, selon que l’on se réfère à la première ou à la deuxième colonne du tableau, il y a, ou il n’y a pas, création monétaire! C’est à mon sens là qu’il faut situer l’opposition entre pro et anti « ex nihilo ». C’est la confusion des termes et des sens attachés à chacun d’eux qui provoque cette opposition. En réalité, ce que multiplie le crédit bancaire, c’est la dette globale. Et ce que s’échangent, comme si c’était une monnaie réelle, les acteurs économique, c’est de la dette. Si, sur la base de sa capacité à l’échange commercial, cette dette est elle aussi appelée « monnaie », tout s’embrouille!
Dernier point: les mécanismes du tableau 1 et du tableau 2 sont couplés par le fait que les sommes retirées des comptes des emprunteurs inscrits au tableau 2 vont circuler au sein de l’économie réelle, selon le principe du tableau 1. Chaque somme prêtée (donc chaque dette qui circule) sert plusieurs fois, et permet donc des échanges économiques au delà de sa valeur initiale. Et chaque unité monétaire circulant ainsi finira, à un moment ou à un autre, par revenir éteindre, auprès d’une banque, une partie de la dette globale. Donc, au final, quand tous les échanges souhaitables ont été faits, et toutes les dettes remboursées, il n’y a plus de monnaie, mais plus non plus d’économie souhaitée, donc plus besoin de cette monnaie. C’est parfait. Sauf que les banques exigent un intérêt sur chaque prêt…
En conséquence, la dette globale, du fait de l’intérêt, est tout simplement inextinguible. D’une part parce que les remboursement principal + intérêts ponctionnent de la dette en circulation au delà de la dette globale émise, et d’autre part parce que cette destruction de dette se traduit par une ponction de biens réels par les créanciers, quand certains acteurs se retrouvent insolvables (c’est la » chaise musicale » de Paul Grignon). Cette accaparement de biens réels produits un besoin de les remplacer ou de les racheter, deux options génératrices de nouveaux crédits, donc de nouvelles dettes.
C’est pourquoi le système bancaire actuel est souvent considéré par ses détracteurs comme un « aspirateur à richesses réelles », au bénéfice des acteurs de ce système, et au détriment du bien commun. Ce qui, à mon sens, n’est pas faux, et amène à une réflexion POLITIQUE sur les rôles de la finance, de la banque, et de la monnaie au sein de nos sociétés qui se disent « démocratiques ».
En m’excusant de la longueur…
Brieuc
Une dernière réflexion: la dissymétrie entre la vitesse de rotation de la monnaie et la multiplication de la dette tient tout simplement à la rémanence de la dette au delà du moment de l’acte d’échange commercial pour lequel elle a été créée.
C’est cette persistance de la dette dans le temps qui crée son accroissement tout au long du cycle dépôt-crédit, et donne, au final, une augmentation des moyens d’échange disponibles.
Comme la dette est utilisée pleinement comme une monnaie (moyen d’échange, réserve de valeur, unité de compte), il apparaît clairement que la persistance de la dette au delà du temps de l’échange pour lequel elle a été créée, crée de la monnaie, même si celle-ci est temporaire. Toutefois, ce « temporaire » est tout relatif, puisqu’il est démontré que les fondements mêmes du système bancaire et financier imposent une augmentation exponentielle de la dette. Donc, si chaque unité de monnaie de dette est temporaire, la monnaie de dette en elle même est permanente, et sa masse s’accroît avec le temps.
@ Fred L.
Plus intéressant cette fois car les statistiques proviennent de la FED:
FEDERAL RESERVE statistical release (4 décembre 2008)
http://www.federalreserve.gov/releases/h3/Current/
H.3 (502)
Table 1
AGGREGATE RESERVES OF DEPOSITORY INSTITUTIONS AND THE MONETARY BASE
in Millions of dollars, adjusted for changes in reserve requirements
Mois______|Monetary_base_| borrowings from the Federal Reserve NSA
2007-11___|___825.422M$_|_____366M$
2007-12___|___823.348M$_|__15.430M$
2008-01___|___821.406M$_|__45.660M$
2008-02___|___822.560M$_|__60.157M$
2008-03___|___826.994M$_|__94.523M$
2008-04___|___824.408M$_|_135.410M$
2008-05___|___826.461M$_|_155.780M$
2008-06___|___832.528M$_|_171.278M$
2008-07___|___838.142M$_|_165.664M$
2008-08___|___841.709M$_|_168.078M$
2008-09___|___903.524M$_|_290.105M$
2008-10___|_1.128.479M$_|_648.319M$
2008-11___|_1.433.092M$_|_698.786M$
Que vous inspirent donc ces chiffres ?
@Tigue
Je vous offre une autre vision anatomique et physiologique de la monnaie et du crédit, par un autre grand penseur qui lui aussi pouvait parler du sang, puisqu’il était médecin, et surtout métaphysicien, d’une époque ou les ravages du cartésianisme n’avaient pas encore imposé cette folie de retirer l’observateur de l’expérience et de séparer la philosophie de la science.
Bonne lecture en vieux François bien sur !
@ Archimondain
@shiva : je suis d’accord avec ce que vous dites, ma question ne porte pas là-dessus. Je constate juste que si c’est de la monnaie créée ou si c’est des multipliants de la monnaie, cela revient au même : des entreprises privées, recherchant le profit, se sont accaparé une « institution d’utilité publique ». C’est pareil dans les 2 cas et je ne vois pas ce que cela a de tellement important de vouloir absolument trancher entre ces deux interprétation qui font l’essentiel du débat ici.
Ou alors, je suis incapable de voir les réels enjeux de cette distinction… et dans ce cas j’aimerais les découvrir, d’où ma question.
@ Shiva & tigue
http://fr.wikisource.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Rabelais
Voir « Le Tiers Livre » (arrêté malheureusement d’être mis en page le 4 août 2007 à 11:01)
@Brieuc Le Fèvre
Point 2: je l’avais interprété comme le retrait d’un dépôt par un déposant (spontané) ayant permis un crédit par la banque (crédité).
@ Brieuc Le Fèvre
« C’est pourquoi le système bancaire actuel est souvent considéré par ses détracteurs comme un “aspirateur à richesses réelles”, au bénéfice des acteurs de ce système, et au détriment du bien commun. Ce qui, à mon sens, n’est pas faux, et amène à une réflexion POLITIQUE sur les rôles de la finance, de la banque, et de la monnaie au sein de nos sociétés qui se disent “démocratiques”. »
A vous l’honneur, s’il vous plaît.
@ fab
Brieuc Le Fèvre a dit le 7 décembre 2008 à 18:01 sur « Notre débat sur la monnaie : et si c’était à refaire ? »
@ Nadine :
Vous me dites :
Je suis en train d’en préparer une démonstration comptable avec Jean Bayard (la comptabilité des banques laisse peu de place à la fantaisie et permet de « voir » la création monétaire en pleine lumière), mais Eminence Thénar a déjà correctement étayé mon affirmation en s’appuyant, lui, sur un texte de la Réserve Fédérale américaine de Chicago (à vérifier peut-être ?).
Je rappelle ce passage de l’explication d’Eminence Thénar que je trouve important :
Il me semble que cette explication de la Réserve Fédérale colle parfaitement avec la formulation que je proposais hier, quand je disais :
_________________________
=> Donc, à mon avis, Helmut Creutz se trompe dès le départ quand il dit :
Son erreur (l’erreur de Paul ?), c’est que le crédit bancaire ne RÉUTILISE PAS les dépôts, il CRÉE la monnaie nécessaire au prêt en quantité PROPORTIONNELLE aux dépôts, sans toucher aux dépôts, ce qui est très différent.
IL N’Y A PAS « CONSERVATION DES QUANTITÉS ».
____________________
Par ailleurs, l’image des BALLONS (celle de Boris) ne me paraît pas pertinente, car elle introduit une CONFUSION entre la richesse réelle (les biens que la monnaie permet d’acquérir, comme les ballons) et la monnaie elle-même qui ne doit pas être perçue autrement, je pense, que comme UNE CRÉANCE contre la banque ou contre l’État, créance transférée quand la monnaie circule et détruite quand la créance est remboursée.
Tous les livres universitaires qui expliquent la création monétaire que j’ai à la maison décrivent la création monétaire par les banques privées. Je m’étonne qu’on en soit encore ici à contester ce mécanisme de base.
Et je ne vois pas pourquoi la pensée (passionnante par ailleurs, semble-t-il) de ce « technicien, puis entrepreneur et enfin architecte indépendant, mais aussi moniteur d’aviation, inventeur et auteur » qu’est Helmut Creutz recueille auprès de Paul autant de crédit alors qu’il n’est, finalement, pas beaucoup plus expert que nous tous ici (mais je peux me tromper) 😉
__________________
Si on cherche, on retrouve la création monétaire par les banques privées « à tous les coins de rue », au détour de tous les documents les plus officiels et les plus sérieux.
Par exemple, dans ce bulletin de la Banque de France n°73, page 61, intitulé « Sources et mécanismes de la création de monnaie dans le cadre de l’Eurosystème », on peut lire :
Autre exemple, sous la plume de Monsieur Trichet (page 4), qui ne passe pas pour un farfelu dans ce domaine, on peut lire :
Encore un exemple, assez gratiné : dans un document intitulé « les contreparties de la masse monétaire M3 et leur évolution en 1994… », la Banque de France nous explique :
C’est-à-dire que les crédits consentis par les banques aux États sont bien, eux aussi, à base de création monétaire (et, je le rappelle au passage, moyennant un intérêt non nécessaire que je considère –jusqu’à ce qu’on m’ait démontré sa légitimité– comme scandaleux).
Dans ce même document de la Banque de France, on peut lire (mais faut-il encore des preuves ?!) :
En fait, TOUTES les pages de la Banque de France consultables sur le sujet de la création monétaire confirment que ce sont les banques privées qui créent la monnaie, chaque fois qu’elle accordent un crédit, que ce soit aux entreprises, aux particuliers ou à l’État.
Cher Paul, est-ce que ces sources ne sont pas « sérieuses » ?
Est-ce que la Banque de France ne publie pas des documents d’« experts de la finance » ?
Cher Paul, je vous renouvelle ma requête, pressante : donnez-nous, s’il vous plaît, les noms de ces auteurs et les titres de ces ouvrages que vous évoquiez il y a peu comme des références expertes nombreuses prouvant cette évidence selon vous que les banques ne créent pas la monnaie qu’elles prêtent, donnez-nous des indications précises de pages à lire, des citations… des références indiscutables en un mot.
Merci pour votre patience et pour tout ce que vous faites.
Amicalement.
Étienne.
Tiens : je tombe par hasard sur un excellent article de François Grua paru dans le Recueil Dalloz 1998 qui devrait pouvoir alimenter votre (passionnante) réflexion :
Le dépôt de monnaie en banque
1 – La pratique du dépôt de monnaie en banque est la plus simple qui soit. Pourtant son analyse juridique a toujours laissé une impression d’embarras.
D’où la tentation d’imaginer qu’elle aurait pu se fourvoyer dans ses prémices et qu’en éliminant les fausses pistes le droit lui aussi saurait être simple.
D’où les quelques antithèses qui suivent.
1. La garde de la chose n’est pas essentielle
2 – Si on a pris l’habitude de déposer son argent en banque, ce n’est pas tellement pour le conserver à l’abri des voleurs ou du feu. C’est à cause d’une limite naturelle des espèces monétaires : elles se prêtent mal aux paiements importants et à distance. Les hommes n’ont jamais trouvé mieux qu’elles pour résoudre leurs échanges, mais leur remise implique des déplacements ennuyeux et risqués. Il est bien commode de se décharger du transit sur un banquier, qui met l’argent là où on veut qu’il aille.
Le principal dessein du déposant est donc d’utiliser plus aisément son argent, au moyen d’ordres qu’il adressera à sa banque (chèques, virements, etc.). Telle est au départ l’originalité majeure de ce contrat : une manière de se dessaisir d’une chose pour la rendre mieux apte à son emploi.
3 – Cette considération porte à laisser de côté la discussion classique, qui s’enlise vite, de savoir si le contrat tient du dépôt proprement dit (quoique irrégulier) ou plutôt du prêt. Ni l’un ni l’autre n’ont été conçus pour permettre au remettant de mieux utiliser lui-même la chose.
La garde peut être mise hors sujet, d’autant qu’elle n’a franchement guère de sens, appliquée à une chose qui n’a pas vocation à dormir. Le sujet véritable réside dans ce tour de prestidigitation juridique grâce auquel on parvient à conserver pour soi ce qu’on donne.
2. Le dépôt de monnaie ne transfère aucun droit de propriété
4 – Une idée communément admise, même par la Cour de cassation, est que le dépôt transfère au banquier la propriété des espèces sur lesquelles il porte. La jurisprudence évite de qualifier le contrat, mais ses effets principaux seraient ceux du dépôt irrégulier : les espèces étant choses de genre, le déposant en perd la propriété dès leur remise et ne dispose plus que d’un droit de créance(1).
Mais cette idée de transfert de propriété est une fiction, car en réalité les espèces ne semblent pas des choses dont on soit propriétaire. Elles ne sont pas des biens.
5 – La monnaie est la seule chose qui soit faite uniquement pour être due. Sa seule fonction est d’être objet d’obligation. Cela donne un rapport singulier entre l’obligation monétaire et son objet. A la différence des autres sortes d’obligations, qui vont chercher leur objet parmi les choses qui ont par elles-mêmes une utilité, des choses qui existent autrement que par le fait qu’elles sont dues, qui sont des biens, les obligations monétaires se fabriquent un objet rien que pour elles. La monnaie accède ainsi à l’état d’objet de l’obligation sans avoir eu besoin de passer préalablement par l’état de bien.
Devient-elle alors un bien parce qu’elle est objet d’obligation ? Tel est probablement le cheminement de ceux qui croient en sa propriété. Mais il ne suit pas l’ordre logique des facteurs. C’est la qualité de bien qui permet normalement à une chose de devenir objet d’obligation, pas l’inverse. Une chose est ou n’est pas un bien ; elle ne le devient pas par la fonction juridique qu’on lui fait remplir.
6 – Si malgré tout l’idée de propriété des espèces conserve quelque vraisemblance, c’est à cause d’une certaine propension de l’esprit à leur prêter une valeur. Quoique dans la réalité elles ne vaillent rien, pas même leur coût de fabrication, on s’imagine volontiers qu’elles portent cependant une valeur, vu qu’elles permettent d’acquérir des choses qui elles-mêmes en ont une. Un billet de banque serait, somme toute, comme un petit tableau de maître, ou sa reproduction, qu’on aurait artificiellement doté d’une valeur de convenance afin qu’il puisse s’échanger avec n’importe quoi. Les espèces seraient donc au moins des biens artificiels.
Mais cette fiction n’apporte à la monnaie rien dont elle ait besoin. Ce n’est pas elle qui explique les vertus de la monnaie et la convoitise qu’elle suscite. Un marteau est recherché pour la force de frappe qu’il contient ; un litre de lait, pour ses lipides. Au contraire les espèces sont des choses faites uniquement pour être remises, donc détenues. Elles sont recherchées pour leur seule détention, qui est une fin en soi, parce qu’elle est la condition nécessaire et suffisante de leur utilisation. Peu importe donc ce qu’elles contiennent. Ce n’est pas dans la chose, mais dans le fait de sa détention que réside la capacité d’achat.
Ce n’est pas non plus en prêtant de la valeur aux espèces qu’on expliquera le phénomène du paiement, c’est-à-dire de l’extinction de la dette par leur remise. Un paiement avec de la monnaie n’est pas un échange entre deux choses regardées comme portant en elles, chacune de son côté, une égale quantité de valeur. Ce n’est pas l’équivalence avec ce qu’on acquiert qui fait le paiement. La monnaie n’est équivalente à rien, car il faut qu’elle soit rien pour être tout, contrairement aux autres choses, qui parviennent à être quelque chose en étant juste ce qu’elles sont. La monnaie n’éteint pas la dette par voie d’égalité, mais par voie d’autorité.
7 – A s’en tenir à la réalité, les espèces parviennent à remplir leur fonction en étant rien, rien que des signes, sans avoir à singer les biens. Monnaie et obligation monétaire n’existent que l’une par l’autre et échappent au néant en s’accrochant l’une à l’autre, en marge du droit des biens(2). Mieux vaut donc alléger l’analyse du dépôt de monnaie de cette idée de propriété qui l’encombre(3). Ce contrat est une remise volontaire d’espèces, un transfert de détention, ni plus ni moins.
3. L’argent n’est pas déposé pour être restitué
8 – Il y a deux manières d’utiliser la monnaie. Remise en paiement, elle éteint une dette. Remise sans dette, elle fait naître une créance.
Certains contrats sur l’argent ont précisément pour fonction d’exploiter cette seconde virtualité de leur objet. Ainsi le prêt à intérêt. Si le prêteur abandonne ses espèces, ce n’est pas pour rendre service à l’emprunteur, mais parce qu’il préfère une créance à des espèces. Il remet l’objet d’une créance qui n’existe pas pour devenir titulaire d’une créance ayant cet objet. Il troque, pour ainsi dire, ses espèces contre une créance. C’est que les espèces ne produisent pas directement de fruits. Seules les créances ont cette vertu, seules elles produisent intérêts.
Le principe du dépôt en banque est le même. Lui aussi n’est qu’un paiement à l’envers. Lui aussi a pour but de fabriquer une créance avec de la monnaie.
En soi ce but n’a rien d’original : tous les contrats sont conclus pour faire naître des créances. Mais d’ordinaire, ce qui intéresse un créancier n’est pas vraiment la créance, c’est son paiement. De lui viendra sa véritable satisfaction. Au contraire, dans le dépôt de monnaie en banque, le déposant n’attend pas sa satisfaction de l’exécution par le banquier de l’obligation de restitution qui naît, car seul un fou déposerait son argent pour le plaisir qu’on le lui rende. Ce que désire le déposant est simplement l’état de créancier. Cela lui suffit. Dans l’immédiat, il est satisfait sans paiement, parce qu’il trouve dans sa créance exactement ce qu’il cherche : l’origine de cette prérogative qui va lui permettre de disposer des espèces du banquier, comme si c’était les siennes, pour régler les tiers.
9 – Cette prérogative tient à un mécanisme général du droit des obligations : toute créance de somme d’argent, pas seulement sur un banquier, est une réserve d’espèces à la disposition du créancier, car un créancier peut demander à son débiteur de porter les espèces à un tiers qu’il lui indique. Cette figure juridique, connue sous le nom d’indication de paiement, est prévue par le code civil dans ses art. 1277, al. 2, et 1937.
Elle suppose le consentement du débiteur, le créancier n’étant sûrement pas en droit de lui imposer contre son gré le surcroît de charge qu’implique le transport des fonds au tiers indiqué. Dans le cas du dépôt en banque ordinaire, le consentement du banquier est normalement acquis d’avance, par l’ouverture du compte, qui contient ce service particulier. Mais c’est dire que l’accord des volontés se situe hors du dépôt. Le dépôt a bien pour but de placer des fonds à la disposition du déposant, mais à lui seul il n’y parvient pas. Il ne fait que créer une situation : rendre le déposant créancier. Un autre contrat est nécessaire pour exploiter cette situation. Le dépôt n’est qu’une étape dans la production des effets qui en sont attendus, mais qui ne sont pas produits par lui.
Il y a d’ailleurs des dépôts qui n’ouvrent pas la possibilité de disposer des espèces du banquier en ordonnant à celui-ci de payer des tiers. C’est le cas de ce qu’on appelle le gage-espèces. Sa différence essentielle avec le dépôt en banque ordinaire est qu’il engendre une créance nue, non assortie du droit de disposer des espèces du banquier.
10 – Ce qui précède conduit à distinguer deux manières pour le déposant d’utiliser sa créance pour payer les tiers. Il peut d’abord la céder. Alors c’est une créance qui change de titulaire. Le tiers cessionnaire est investi du droit de réclamer paiement au banquier. Mais le déposant peut aussi demander au banquier de transférer des espèces à un tiers qu’il lui indique. Alors ce sont des fonds qui changent de mains. Le tiers n’est investi d’aucun droit sur le banquier dépositaire. Son rôle se borne à recevoir les fonds qui lui sont adressés.
La pratique bancaire utilise les deux procédés. Ainsi un chèque est de par la loi un mode de transfert de créance, la provision. Au contraire, le virement est un mode de transfert d’espèces, non d’une créance, puisque ce n’est pas le bénéficiaire, mais le déposant, qui donne l’ordre de payer.
11 – Ces vues divergent de celles qui sont communément admises en doctrine aujourd’hui. L’analyse habituelle part aussi de la constatation que le déposant est titulaire d’une créance, mais elle considère qu’un droit de cette nature ne répond pas aux exigences de la pratique, car les transmissions de créances sont des opérations compliquées (cf. art. 1690 c. civ.) et peu sûres (cf. opposabilité des exceptions). La pratique aurait besoin que ces créances nées de dépôts se transmettent aussi simplement et aussi sûrement que les espèces. Elle cherche donc à assimiler ces créances à des espèces. Elle découvre la solution dans une fiction, encore une : celle que les créances nées de dépôts s’incorporent dans les écritures en compte, comme elles s’incorporent dans les effets de commerce, de sorte qu’elles se transmettraient par simple jeu d’écritures. Ainsi s’expliquerait le virement.
La doctrine monétaire recourt volontiers aux fictions, quoique l’utilisation de la monnaie paraisse bien naturelle à tout le monde et qu’on n’explique pas les phénomènes naturels à coup de fictions. Elles permettent évidemment à la pratique de retomber sur ses pieds, mais sans souplesse. Et l’ennui, avec elles, c’est le risque que le profane ne se laisse gagner par l’impression qu’il est en face d’un rideau de fumée derrière lequel seuls les initiés ont accès et qu’ils s’y taillent à leur aise leur petit empire dans le savoir. Mieux vaut se passer d’elles quand on le peut.
Or aucune fiction n’est nécessaire pour expliquer la simplicité du virement. C’est très naturellement qu’il est un transfert d’espèces, non de créance. Il suffit de voir qu’il est une forme d’indication de paiement. Ce n’est pas parce que les dépôts engendrent des créances que les virements sont a priori des transferts de créances. C’est au contraire ce qui leur permet d’être des transferts d’espèces, des espèces détenues par le banquier débiteur.
Cette fiction que les écritures en banque sont comme des espèces est à la rigueur acceptable quand elle ne fait que décrire la réalité, c’est-à-dire quand, derrière la créance du déposant, on trouve en effet des espèces mises à disposition par le banquier. Mais quand ce n’est pas le cas, elle fausse l’analyse. Ainsi dans le gage-espèces, on ne saurait assimiler la créance qu’il fait naître à des espèces, à moins de donner à fond dans cette fiction que toute écriture en banque est comme des espèces et tomber dans le piège qu’on s’est soi-même tendu.
4. Les avoirs en banque ou « monnaie scripturale » ne sont pas assimilables aux espèces monétaires
12 – Les économistes ont sûrement les meilleures raisons d’assimiler les avoirs en banque à des espèces et de parler de « monnaie scripturale ». Mais pour les juristes subsisteront toujours des différences irréductibles.
13 – Les avoirs en banque ne sont pas des instruments de paiement aussi complets que les espèces, parce qu’ils n’apportent pas au créancier une satisfaction égale, quelle que soit la manière dont ils sont utilisés.
Quand un créancier reçoit l’avoir de son débiteur à l’état de créance par exemple dans un chèque, il n’est pas payé, car une remise de créance ne vaut pas paiement. Seul l’encaissement de cette créance vaut paiement(4). Donc, dans cette hypothèse, l’avoir reste ce qu’il est : une créance.
Et quand le créancier reçoit l’avoir par virement, alors il reçoit bien des espèces(5) et il est payé. Mais ces espèces passent aussitôt pour lui à l’état de créance, sous forme d’avoir dans son propre compte. Or cette forme ne lui convient pas nécessairement, car une créance est une chose vulnérable. Elle se compense sans qu’on y puisse rien, elle se saisit, elle se prescrit, elle se bloque, elle est exposée au contentieux, serait-il infondé. C’est pourquoi cette forme de paiement est subordonnée en principe au bon vouloir du créancier. Hors quelques exceptions d’inspiration fiscale, on n’est pas obligé de recevoir son dû sous forme d’avoir en banque. Autrement dit, à la différence des espèces, la « monnaie scripturale » n’a pas cours légal, et c’est là un attribut monétaire fondamental qui lui manque. La monnaie ne valant que par sa capacité de réutilisation, le cours légal est la garantie juridique, pour celui qui la reçoit, qu’il pourra l’utiliser à son tour en l’imposant en paiement à ses propres créanciers. Sans cette garantie, la satisfaction du créancier prend en droit un caractère aléatoire. C’est donc seulement en fait que les avoirs en banque jouent le rôle de monnaie ; et même en fait ils n’y parviendraient pas si, derrière eux, il n’y avait les espèces(6).
14 – De manière plus générale, ce n’est pas en baptisant monnaie ce qui est un droit qu’on fera oublier au créancier qu’on ne paye pas avec un droit. Ni un droit de créance ni un droit de propriété. Aucun créancier ne sera d’accord si son débiteur lui dit : « J’ai oublié chez moi sur le manteau de la cheminée les espèces que je devais vous remettre. Elles y sont parfaitement individualisées. Je vous en transfère la propriété. Vous voilà payé ». Le droit peut préparer la satisfaction du créancier, il peut l’entourer de garantie, mais il ne peut pas la créer. Ce qu’il faut au créancier, ce n’est pas un droit à la chose ou sur la chose, mais la chose elle-même(7).
15 – Les rapports des espèces et des avoirs en banque avec le droit privé sont foncièrement différents.
Les espèces, face au droit, sont comme l’amour ou l’enfant de Bohème : la répulsion est immédiate et réciproque. Dostoïevski a dit que l’argent, c’est la liberté frappée. Donc le non-droit. Les espèces s’y réfugient d’autant mieux qu’elles ne sont pas des biens, qu’elles ne sont rien. La régularité et la moralité n’y trouvent pas toujours leur compte, mais c’est pareil pour toutes les libertés, et après tout celle-là en vaut d’autres qui sont homologuées comme publiques dans les ouvrages spécialisés(8).
Les avoirs en banque n’ont pas ce charme anarchique. Ils sont du droit, puisqu’ils sont créances. Contrairement aux espèces, qui ne sont pas faites pour être individualisées, et même faites pour ne pas l’être, les avoirs le sont nécessairement sous leur forme d’écritures. On le suit à la trace dans le dédale des comptes. On décèle leur origine et leur destination. L’oeil des autres, et leur nez, s’y insinue aisément(9). Ils sont congénitalement sujets aux contrôles étatiques. Ils obligent à rendre des comptes. Bref, la liberté de Dostoïevski se laisse mal déposer en banque(10).
Il y a là un paradoxe. Le droit ne peut pas vraiment tenir la « monnaie scripturale » pour de la monnaie, précisément parce qu’elle est du droit, seulement du droit.
Conclusion
16 – Si les analyses qui précèdent sont exactes, le dépôt de monnaie en banque est le contrat le plus simple de tout le droit des obligations. Sa seule finalité, son unique effet, est la naissance d’une créance monétaire. Cette créance permet de déplacer de la monnaie, mais elle ne se métamorphose pas elle-même en monnaie. Créance elle est, créance elle reste.
Notes
(1) Ainsi Cass. 1re civ., 7 févr. 1984, Bull. civ. I, n° 49 ; Defrénois 1984, art. 33427, note Larroumet. L’idée d’un transfert de propriété de la monnaie par le dépôt conduit aussi à analyser le gage-espèces comme une aliénation fiduciaire à titre de garantie. Cf. Cass. com., 3 juin 1997, Bull. civ. IV, n° 165 ; JCP 1997, II, n° 22891, rapp. Rémery ; D. 1998, Jur. p. 61, note François ; D. 1998, Somm. p. 104, obs. Piedelièvre.
(2) Le code civil considère manifestement les espèces comme des biens, comme des choses susceptibles de propriété. Voir notamment l’art. 1238. C’est qu’en 1804 les espèces étaient réellement des biens, car elles étaient ou représentaient une créance d’or ou d’argent. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Voilà plus de vingt ans qu’aucune monnaie n’est plus rattachée à un métal, ni directement ni indirectement. Cela a coupé les espèces du monde des biens pour les réduire au seul état d’objet d’obligation.
(3) Dans le contentieux, l’idée de propriété de la monnaie ne paraît jamais avoir servi à rien. A admettre le principe de la revendication des espèces en cas de vol (cf. Cass. req., 25 nov. 1929, DH 1930, p. 3 ; RTD civ. 1934, p. 184, obs. Solus) ? Mais, en pratique, la revendication butte contre l’impossibilité d’individualiser les espèces dans le patrimoine du voleur. De même la question du moment du transfert de propriété de la monnaie ne se pose jamais. C’est qu’on ne paye pas avec un droit de propriété. Cf. infra, n° 14.
(4) Cass. com., 23 juin 1992, Bull. civ. IV, n° 245. V. aussi l’abondante jurisprudence énonçant que la remise d’un chèque ne vaut pas paiement.
La fiction de l’incorporation de la créance dans les effets de commerce n’a donc jamais suffi pour que la remise d’un effet de commerce vaille paiement, pour que l’effet soit assimilable à de la monnaie. Comment, dès lors, dans le dépôt en banque, la fiction de l’incorporation de la créance dans les écritures pourrait-elle suffire à transformer cette créance en monnaie ? Le paiement est une épreuve de vérité. Il n’a que faire des fictions.
(5) Cf. supra, n° 10.
(6) Pour un juriste, l’euro ne sera donc pas une véritable monnaie tant qu’il sera dépourvu du cours légal et n’existera que sous forme d’avoirs.
(7) C’est une autre raison qui, en droit privé, empêchera l’euro d’être une monnaie véritable, distincte des monnaies nationales, tant qu’il n’aura pas ses propres espèces.
C’est aussi une autre raison pour laquelle l’idée de propriété de la monnaie ne sert à rien.
(8) L’art. 221 c. civ. aurait dû aller sans dire.
(9) Le secret bancaire procéda visiblement, à l’origine de sa pratique, de l’idée de rendre les comptes en banque aussi opaques que les portefeuilles et réduire ainsi, autant qu’il était possible, cet écart naturel entre les espèces et les avoirs en banque. C’est ce qui lui donnait sa particularité par rapport aux autres secrets professionnels. Mais le droit positif y a apporté tant de limites qu’il semble en avoir fait un secret professionnel comme un autre.
(10) C’est une raison de plus qui empêchera l’euro d’être une monnaie véritable tant qu’il n’existera que sous forme d’écritures dans les comptes. Allez payer un dessous-de-table en euros…
@Patrick Barret
Je suppose que la toute la force de votre argument provient du fait qu’il y ait écrit ‘Prix Nobel’ en bas de cette citation 🙂
(déjà maintes et maintes fois répliquée sur ce blog). Évidement, le titre de prix Nobel m’impose un grand respect. Cependant, ça reste un titre prestigieux et non un argument. Moi j’ai expliqué en quoi la ‘création d’argent’ par les banques commerciales et celle par les faux-monnayeurs était différente. Votre citation ne fait que l’affirmer sans donner aucune explication.
@ Brieuc Le Fèvre
Merci pour cette réfection que je trouve personnellement très intéressante. La question des intérêts et évidement cruciale. Et au fond peut-être qu’anti et pro ex-nihilo sont d’accord sur l’essentiel. Ce qui bloque n’est peut-être qu’une dispute autours d’un terme. (Je pourrais bien finir par céder à force…). Mais avant de développer dessus d’avantage, je voudrais lever une ambiguïté. dans votre deuxième tableau, vous semblez dire que la banque peut créer un crédit de 10.000 à partir de réserves fractionnaires de 1111,11. Entendez-vous que la banque n’a réellement pas d’autre argent que ces 1111,11 au moment ou elle contracte le crédit de 10000 ?
@ nuknuk66,
merci pour cette formidable trouvaille (dont la numérotation est un peu baroque, au premier abord, cependant 😉 ) : chaque relecture de cette riche analyse donne de nouveaux éclaircissements.
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Il me semble pourtant qu’il y manque un aspect essentiel de la monnaie-dette, celui de la dette sous-jacente à la monnaie fiduciaire :
Quand le Dalloz écrit (point 10, al.2) : « Au contraire, le virement est un mode de transfert d’espèces, non d’une créance », ou encore (point 11, al. 3) : « Or aucune fiction n’est nécessaire pour expliquer la simplicité du virement. C’est très naturellement qu’il est un transfert d’espèces, non de créance. », l’auteur oublie que les billets et les pièces (la monnaie fiduciaire), les espèces, sont aussi des créances, des créances contre l’État cette fois –et jamais remboursables, c’est vrai, depuis la non convertibilité en or–, mais des créances quand même.
Quand un paiement a lieu par transfert d’ESPÈCES, c’est donc, encore et toujours, un TRANSFERT DE CRÉANCE, mais une créance contre un autre débiteur qu’une banque, une créance contre l’État.
L’auteur sent bien que le débat n’est pas clos, d’ailleurs, quand il souligne la différence d’approche entre les juristes et les économistes (point 12).
Au point 14, l’auteur en vient même à confondre lui-même la monnaie fiduciaire à une chose, c’est amusant : même les plus fins analystes s’y perdent, décidément 😉
Sa distinction se fonde sur ce point, important mais dont il exagère la portée (point 13, al. 3), je trouve :
Il me semble qu’insister sur cet aspect aléatoire de la créance contre les banques (que constitue la provision des DAV) est un peu « un juridisme » ; d’un point de vue économique, c’est quasi négligeable : la solvabilité des banques (garanties par l’État jusque dans les pires tempêtes comme on peut le constater en ce moment) est quasi parfaite.
À mon sens, LE POUVOIR D’ACHAT DES DEUX MONNAIES, FIDUCIAIRE ET SCRIPTURALE, EST LE MÊME.
Et le fait (pour revenir à notre débat, ici) que les banques privées puissent créer du pouvoir d’achat (moyennant un intérêt ruineux) n’est pas envisagé par l’auteur.
La distinction de l’auteur est donc compréhensible (passionnante même), mais discutable :
L’enjeu de cet oubli (l’oubli que les espèces sont aussi une dette, une dette contre l’État), c’est d’oublier ce fait POLITIQUE majeur que l’État est, lui aussi, tout à fait capable de créer la monnaie –précieux TITRE DE DETTE FIABLE qui facilite tant nos échanges et QU’ON PEUT CRÉER À VOLONTÉ.
On risque alors d’oublier de se battre pour que l’État conserve cette fonction régalienne, en oubliant que ce mode de création monétaire-là, L’ÉMISSION MONÉTAIRE PAR L’ÉTAT, EST INFINIMENT MOINS COÛTEUSE POUR LA COLLECTIVITÉ (pas de charge d’intérêt, et même pas forcément de charge de remboursement, pas toujours).
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Décidément, la pertinence de la parabole des ballons est vraiment très contestable, et la confusion règne, apparemment, en matière de création monétaire, même chez de nombreux professionnels de l’argent.
Utile débat, donc.
Comme d’habitude, de la discussion jaillit la lumière.
Ne pas avoir peur de se tromper : en réalisant qu’on se trompait, on progresse, c’est à la fois banal et positif.
Étienne.
Merci Etienne pour ta dernière conclusion.
Je conseille, avec le peu de tact d’un scientifique, à la plupart des intervenants ici de travailler un cours d’analyse en mathématiques niveau 2ème année de Licence (notamment bien comprendre la notion de séries numériques).
Ca peut prendre du temps, mais franchement, au lieu de lire et écrire autant de trucs pseudo-philosophiques assurément absurdes, vous finiriez peut-être par gagner du temps. AMHA
Cordialement
Pariste
@Etienne Chouard
Je viens de lire l’article de « nuknuk66 » qui est exceptionnel. En se plaçant sous l’angle JURIDIQUE et non comptable (on peut faire dire ce qu’on veut à un bilan) les banques privées ne créent pas la monnaie ex nihilo, seule la BCE a le pouvoir de le faire (monnaie fiduciare). Le terme « monnaie scripturale » est un abus de langage et n’est pas de la monnaie au sens juridique.
Les banques n’ont que le pouvoir de créer des créances mais à la limite moi aussi…
Je crois que Jean Jaurion grâce à l’article de nuknuk66 a pris une sacrée longueur d’avance !
Qu’en penses tu Etienne ?
@ Archimondain
Je n’ai fait que contre-argumenter votre « tout le monde » avec une citation prestigieuse !
Ayant beaucoup de mal à m’exprimer sur ce blog sans me faire « modérer », je n’ai pas toute la lattitude souhaitée pour argumenter plus en avant, où lorsque je le fais, mes propos ne sont pas toujours publié !
Mais il semble néanmoins que depuis que je m’exprime sans pseudonyme sous ma véritable identité (et sans lien de site), les choses s’améliorent ; les préjugés et les à priori latents sur ma personne évoluent semble-t-il également progressivement.
Je tenterais donc à l’avenir de développer davantage mes explications.
@ Patrick Barret
Effectivement, vu comme ça. Mon ‘tout le monde’ est bien contredit par votre citation 🙂
Seriez-vous l’ex-surhumain ? (qui avait coutume de parler par citation). J’ai cru pendant un moment que ce dernier s’était métamorphosé en Transmutateur. Mais peut-être est-ce vous aussi ?
@ Pariste
Ca c’est pas très sympa.
@archimondain
Oui c’est vrai que ma remarque peut paraître assez brutale, mais je pense qu’il ne faut
pas essayer de parler d’économie si on ne maîtrise pas un tantinet les chiffres
et les raisonnements.
Quand je dis apprendre des mathématiques, je veux aussi dire apprendre à
parler d’un problème en se demandant de quoi on parle (les mathématiques
sont basées avant tout sur des définitions précises, pui sur des règles
de logique assez élémentaires). Je ne suis pas expert
en économie, loin de là, mais de ce que je lis, je suis sûr que la plupart
ici ne savent pas prendre un problème par le bon bout. C’est-à-dire par les définitions.
Ce ne serait qu’un début, car après ça, des concepts mathématiques relativement peu
évolués rendent les choses limpides.
@Fred L. et aux autres.
Je suis tout à fait d’accord avec votre analyse du débat. Le point d’achoppement porte très exactement sur la définition de la monnaie.
Par ailleurs, l’extrait d’Hayek que vous proposez me semble en l’espèce tout à fait pertinent sur le thème, non pas en tant que remède mais en tant qu’outil d’analyse.
Surtout si on y ajoute une analyse de la spéculation, en tant que facteur aggravant de l’expansion démesurée du crédit.
Pourquoi diable s’acharnerait-on, par pure convention, à ne pas regrouper sous une même appellation, une chose qui fonctionne très exactement selon la même logique de base ?
Pourquoi diable s’acharnerait-on, par pure convention, à différencier la monnaie fiduciaire et la monnaie scripturale, alors qu’il s’agit très exactement d’un seul et même mécanisme : la reconnaissance de dettes ?
A ce petit jeu-là, il y a quelque chose que je n’arrive pas à comprendre, Paul.
Comment se fait-il que nous ne soyons pas tous d’accord pour dire que la monnaie, ce que vous appelez « l’argent », c’est forcément/nécessairement/essentiellement de la « reconnaissance de dettes » ?
Puisque la monnaie est un média de l’échange qui se justifie lorsque le troc est impossible.
Puisqu’on peut en déduire que le principal atout de la monnaie est d’inscrire l’échange dans une temporalité.
Alors, par définition, la monnaie est une reconnaissance de dettes.
Sinon, le troc fait parfaitement l’affaire, et il n’est nul besoin de monnaie.
Je crois qu’il y a une sorte d’aveuglement épistémologique à VOULOIR considérer les différentes fonctions de la monnaie comme étant de natures différentes.
Comprendre le mécanisme du crédit, c’est une chose; mais dire que le crédit, c’est autre chose que de la monnaie, ça relève du biais cognitif, à mon avis.
Ainsi, la notion pré-systématique de chacun, c’est la définition de la monnaie.
Et à ce titre, il me semble simple de vous démontrer, à vous, à Boris, ou à Helmut que l’argent est, quoiqu’il arrive, une reconnaissance de dettes.
@ Archimondain
Vous êtres très perspicace, mais Transmuteur serait plus exact !
Pour ne pas nous faire mentir, voici donc une citation inédite celle-là (enfin je l’espère) et très à propos :
http://www.lexpressiondz.com/article/8/2008-12-01/58397.html
Même si je suis d’accord avec l’extrait de H Creutz et l’article du 4 décembre sur l’argent, fortune et reconnaissance de dettes, ces raisonnements n’invalident pas l’expression de création monétaire ex nihilo.
A mon tour donc de présenter une histoire pour expliciter ma perception du débat. Soit Pierre qui possède 10 billets de 100 euros avec lesquels il ouvre un compte à la banque Patrinomia, dont il est le seul client. Jean contracte alors auprès de cette banque un prêt de 900 euros et achète avec ces billets un bel ordinateur à Paul. Paul dépose ces 9 billets de 100 à la banque Fortunat. Arrive la saison des fraises dont nos trois personnages raffolent. Jean contracte alors un nouveau prêt de 810 euros à la banque Fortunat. Pierre, Jean et Paul se rendent sur le marché aux fraises munis de leur chéquier, et chacun achète autant de fraises à la fermière prénommée Catherine qu’il a d’argent, c’est à dire respectivement pour 1000, 810 et 900 euros.
On est donc bien d’accord pour dire qu’il n’existe jamais que 10 billets de 100 euros. Pourtant Catherine a bien 2710 euros sur son compte. Donc bien qu’il n’y ait pas création de monnaie le marché voit 2710 euros et non 1000. Et ce sont ces 2710 euros qui influent sur les prix : si Catherine n’avait pas eu assez de fraises elle aurait pu augmenter ses prix. Mais comme en général l’offre est supérieure à la solvabilité de la demande, le marché est en sous-régime et Catherine regrette que les banques n’aient pas pu prêter plus d’argent car elle va devoir jeter les fraises non achetées. On retrouve là un des axiomes de la théorie du major Douglas : la quantité d’argent doit être à tout moment égale à la quantité de biens et services échangée : trop c’est l’inflation, pas assez c’est le gaspillage ou la pauvreté « artificielle ». Ce qui suppose aussi d’aborder le problème de l’argent comme unité de réserve : l’épargne n’est pas et ne peut pas être un droit absolu sur les biens et services futurs…
Donc si du point de vue d’un physicien il n’y a pas de création, car tout crédit génère une dette, le crédit ex nihilo permet d’ajuster commodément la quantité monnaie à celle nécessaire pour échanger les biens et services disponibles ou demandés sur le marché. Pour le dire autrement, il n’y a pas création mais les effets à court et moyen terme (à long terme il faudra rembourser et c’est dès fois très très problématique comme on le voit aujourd’hui) du crédit imitent d’une manière absolument indétectable les effets d’une véritable création ex nihilo par la planche à billets. Donc comme la cause est indiscernable et les conséquences strictement identiques on peut dire que le crédit est une création ex nihilo d’argent. Et ceux qui parlent d’abus de langage commencent par dire quel est dans leurs comptes le montant d’argent physique et le montant d’argent dette. S’ils y arrivent alors ils pourront aussi déterminer le montant des créances pourries dans la finance mondiale ce qu’aucune banque n’est capable de faire actuellement même pour elle-même.
Étienne Chouard dit : 7 décembre 2008 à 23:39
Étienne ne fait ici que confirmer avec le soin et le scrupule qu’on lui connaît , preuves à l’appui, ce que j’avais retenu
(sans déifier personne évidemment) d’auteurs fiables par leur investigations tel que (dans le désordre): Maurice Allais,
Jacques Duboin, Louis Even, dont le major Douglas (sans doute moins bon théoricien que Keynes, mais meilleur praticien)
disait de lui que L. Even était celui qui avait le mieux saisi ses investigations et leur portée, et quelques autres encore.
D’ailleurs, si l’augmentation des masses monétaires n’accompagnent pas, selon un même « graphique », de l’augmentation
de la richesse générale, donc sociale, c’est là l’indice majeur de l’erreur, de la fausseté, de la toxicité, appelons ça comme
on veut, c’est qu’il y a une « fuite », ou une « congélation définitive » ou de nombreux « by-pass », etc, dans ce circuit plus
que suspect.
Je m’avance un peu (je peux me tromper) en supposant que les livres que Paul a cité et a utilisé pour son travail
d’ingénieur financier dont son témoignage, ne l’oublions jamais, est irremplaçable pour les lecteurs, se situent sans doute
– en aval – de la question de la – création monétaire ex-nihilo ou non -.
Et on peut souligner que – jusqu’à 2007 – si la « moyenne » d’enrichissement a augmentée dans le monde, exemple: quoique numériquement faible, le nombre de milliardaires dans le monde a augmenté statistiquement d’année en année depuis le « raz de marée libéral » sur le monde des années 1980, témoignant ainsi d’un enrichisement, car s’il y a plus de milliardaires, il devrait y avoir aussi davantage de couche de population plus riches qu’avant, cela aussi est vrai, mais, les faits sont là, dans une mesure moindre qu’on l’a dit.
Ainsi la moyenne qui nous trompe ressemble à une moyenne générale de véhicules allant de quelques formule-1, en passant par des voitures courantes et vieillissantes de classes moyennes, et une foule de mobylettes obsolètes et poussives et même des vélos déglingués. Oui, la moyenne a augmenté avec quelques formules-1 dont les « performances » masquent la baisse généralisées des possibilités des autres véhicules « en course »… On pourrait pousser l’exemple plus loin. Maintenant que 9/10 (tient! Ça me dit quelque chose cette proportion…) des formule-1 sont HS et la 10ème en réparation hasardeuse, la moyenne plonge vertigineusement.
La réalité conclut toujours les polémiques
pariste dit :
[quote]Je conseille, avec le peu de tact d’un scientifique, à la plupart des intervenants ici de travailler un cours d’analyse en mathématiques niveau 2ème année de Licence (notamment bien comprendre la notion de séries numériques).[/quote]
Je rebondirais sur cette suggestion en demandant aux créateurs de monnaie de tous bords de remplir un tableau (prenons les 10 dernières années, voulez-vous) mentionnant la masse monétaire en circulation, sa nature (M1, … fiduciaire, scripturale…) et son origine, la quantité de billets imprimés, le taux de croissance (du PIB ?) le volume des intérêts et toute quantité monétaire en relation.
Pour être franc, je serai bien incapable de remplir un tel tableau, et pourtant l’information est de première importance. Les journaux nous abreuvent des changements de taux d’intérêts de la BCE et des dixièmes de % de croissance, des hausses et baisses de la bourse avec analyse de telle ou telle entreprise avec ses perspectives de développement, mais JAMAIS, JAMAIS, il n’y a la moindre question sur l’origine de l’argent que 100% de la population utilise 100% du temps. Et cette absence d’information est déjà un problème. Donc, vu la quantité d’énergie mise en jeu pour faire semblant de parler d’économie SANS JAMAIS mentionner l’éléphant blanc de l’origine de l’argent, et vu la quantité d’analyses sur des sujets baroques comme la blessure de Makelelé et les frasques sexuelles de la princesse de Monaco, il est difficile, scientifiquement, de conclure à autre chose qu’une conspiration des banquiers.
Avec ceci, je vous mets au défi de prouver le contraire. Donnez-moi les références des cours universitaires où la création de monnaie est enseignée, avec les livres qui s’y rapportent, et ce sera une contre-preuve suffisante.
Moi je me souviens de Deleuze: « Quand quelqu’un dit « en tant que » dans une phrase il parle en philosophe ».
C’est ainsi qu’Aristote condamnait nombre des conclusions de Platon, que des définitions floues conduisaient à des paralogismes. « Excis » se dit en plusieurs sens…
La rigueur commence par la précision conceptuelle.
L’argent est l’argent. Une reconnaissance de dettes est une reconnaissance de dettes.
Dire que l’un « se ramène » à l’autre en tant que nous considérons la question sous tel angle déterminé et non pas tel autre, c’est une chose.
Dire que PARCE QUE l’un se ramène à l autre sous tel angle déterminé nous devrions les traiter de la même manière, en les appelant également « monnaie » en est une autre.
Car il faut déjà avoir montré en amont que cet angle déterminé est, parmi tous les autres angles possibles ou à découvrir, l’angle le plus pertinent.
Si « se ramène » signifie « ont la même fonction/ sont interchangeables », alors il y a de fortes chances pour que je ne sois pas d’accord. Ce n’est pas suffisant. Car avoir de l’argent et avoir une reconnaissance de dette c’est, du point de vue de la structure de la relation qui unit/sépare les agents TRES différent. Si nous cherchons à fixer les termes de la coopération sociale en la matière, ce dernier point de vue, anthropologique/sociologique (ce que vous voulez) constitue pour moi la SEULE base pertinente. En tout cas cette question de la selection du point de vue légitime vient avant toutes les autres.
Et pour ma part je préfèrerais qu on reconstruise le système en se passant du terme « monnaie », si possible. La monnaie n’est pas une définition DE DEPART. Ce n’est qu’un paquet qu’on fait A L ARRIVEE.
Notez que le point de vue doctrinal (juridique) ne constitue pas non plus un point de vue pertinent. Par définition le droit est pris en étau entre la philosophie/théologie et la sociologie. De plus l’article sus-cité montre bien comment le juriste, placé devant un problème normatif (au sens politique et moral) QUI N EST PAS DE SA COMPETENCE mais qui a des implications pour sa pratique (cohérence des décisions rendues par les tribunaux et requisit – politique- de l’égalité des citoyen EN TANT QUE JUSTICIABLES – et non pas en tant que citoyens- devant la loi), tend à traiter une question politique en adoptant systématiquement le point de vue du professionnel du droit. Il s’agit de « mettre de l’ordre », de la « cohérence » là ou il n’y en a pas (évidemment ce que je dis ne vaut pas de la même manière pour le droit de la common law; le problème est particulièrement sensible là ou le droit prend la forme de « codes » qui sont autant de « grammaires politiques », voire de métaphysiques implicites tout court). L’angle du professionnel du droit nous renseigne sur le point de vue… du droit. Le droit en décrit pas la réalité. Il est toujours déjà une mise en forme de cette réalité. Une mise en forme du type de celle qui est attaquée ici.
Tout ce sur quoi nous renseigne la doctrine c’est sur le « point de vue publiquement accepté/ institutionnellement reconnu » quant à ce qui se passe. Mais bien sûr, dans son effort de rationalisation juridique stricto sensu, le juriste peut mettre le doigt sur des distinctions potentiellement pertinentes.
Bref ne cherchez aucune aide dans le droit… Vous allez vous perdre. Retenons juste que du point de vue du droit – comme c’est étonnant!- notre problème pose problème…
@Zolko
« Avec ceci, je vous mets au défi de prouver le contraire. Donnez-moi les références des cours universitaires où la création de monnaie est enseignée, avec les livres qui s’y rapportent, et ce sera une contre-preuve suffisante. »
Commencez par la page wikipedia http://en.wikipedia.org/wiki/Money_supply (et toutes les références qu’elle cite), puis prenez le manuel de F.S. Mishkin, The economics of money, banking and financial markets (le chapitre 14 est tout entier consacré à la création monétaire), pour obtenir la version traditionnelle de la création monétaire (ou du reste n’importe quel autre manuel équivalent, mais vous vouliez une référence), pour le reste, c’est-à-dire toutes les questions plus profondes concernant la monnaie eh bien, il n’y a pas d’autre solution que de lire les grands économistes.
@Antoine
Vous dites : « L’argent est l’argent. Une reconnaissance de dettes est une reconnaissance de dettes. »
Pour moi, c’est un parti pris normatif que vous prenez, sans le démontrer.
Qu’est-ce qui justifie cette distinction, sinon une convention ? Quelle est la légitimité de cette convention ?
Il me semble assez simple de démontrer que derrière le mot « argent » et derrière le mot « reconnaissance de dettes » se cache exactement la même chose. Un support d’échange permettant de dépasser l’immédiateté du principe de l’échange.
Par ailleurs, vous dites : »la monnaie est un paquet qu’on fait à l’arrivée », c’est quand même en partie faux.
Il y a des déterminants de la « monnaie » qui sont invariables du fait de ce qu’elle est, un outil abstrait. Quand bien même cet outil est largement modifiable, là, je suis d’accord.
Ce qu’il vous faudrait reconstruire, si je comprends bien votre approche, c’est davantage la relation de l’homme à la question de l’échange.
A ce titre, la monnaie est un outil qui a ses limites; en ce sens, que, par définition, elle n’est pas du tout utile dans un système d’échange basé sur le don, par exemple.
@Antoine
« Car avoir de l’argent et avoir une reconnaissance de dette c’est, du point de vue de la structure de la relation qui unit/sépare les agents TRES différent. Si nous cherchons à fixer les termes de la coopération sociale en la matière, ce dernier point de vue, anthropologique/sociologique (ce que vous voulez) constitue pour moi la SEULE base pertinente. En tout cas cette question de la selection du point de vue légitime vient avant toutes les autres. »
Je n’avais pas accordé assez d’importance à ce passage, qui me permet de comprendre votre opposition « de principe » à une définition simple de la monnaie regroupant « reconnaissance de dettes » et « argent ».
Mais, vous noterez qu’il s’agit également d’une preuve que vous choisissez ce système de définition, en raison de ce qu’il permet bien décrire un contexte tout à fait spécifique.
Il est tout à fait vrai que socialement ce qui est reconnu comme « argent » et ce qui est reconnu comme « reconnaissance de dettes » catégorise diablement les tenants de l’un et les tenants de l’autre.
Mais il me semble que vous mêlez causes et conséquences, car, à mon avis, c’est bien parce que nous avons déconnecté l’argent de son principe moteur (à savoir être une dette représentant un service rendu) que nous sommes aujourd’hui incapable d’en évaluer sa juste mesure (salaires absolument disproportionnés, patrimoines démesurés…) et que nous considérons l’argent comme un bien, en lui-même.
C’est bien parce que « l’argent » est en soi une « reconnaissance de dettes » qu’il devrait être légitime d’interroger sa transmission en tant que patrimoine, la facilité avec laquelle on l’accumule, la perception d’intérêts… etc, etc.
J’aurais mieux fait de dire : « la facilité avec laquelle certains l’accumulent, tandis que d’autres non »
L’observation de la masse monétaire à un instant T ne montre aucun accroissement .C’est l’observation « en bloc » « hors du temps « de toutes les transactions rendues possibles par Bâle qui amène de façon illusoire à additionner les actes de prêt passés et à venir semblant accroitre la masse monétaire.
Ce n’est qu’à présent que j’ai pu lire les divers apports depuis 24h, et en particulier le long commentaire d’Etienne et l’article très éclairant de François Grua (merci nuknuk66). J’apprécie le souci d’Etienne d’alimenter le débat, mais l’accumulation de citations provenant de mêmes milieux et employant les mêmes termes (en particulier « création ») pour décrire ce qui est l’objet de la réflexion collective de ce blog ne me parait pas probant, en ce qu’elle révèle plutôt un discours dominant, avec des mots convenus, qu’une réelle analyse permettant une véritable compréhension.
Cela me fait penser à l’emploi quasi universel de cet archaïsme que sont les pourcentages pour décrire des évolutions en « plus » ou en « moins » en induisant une interprétation additive, alors qu’il s’agit de relations multiplicatives. Exemple : parler d’une augmentation de 50% suivie d’une diminution de 50% amène à croire qu’il y a retour à l’état antérieur (+50-50=0), alors qu’il y a en réalité diminution de 25% (il s’agit de multiplier par 1,5 puis par 0,5 ce qui donne 0,75 soit 75% du montant initial).
L’article de François Grua montre très bien à cet égard comment un corpus de notions et un vocabulaire partagé permet d’étayer la pensée, mais contribue aussi à l’entraver lorsqu’il s’agit de dégager et d’intégrer des aspects jusqu’ici inaperçus ou considérés comme subsidiaires alors qu’ils se révèlent (ou deviennent) centraux.
Parmi les usages langagiers qui me paraissent à interroger : le fait de se concentrer sur l’aspect « dette » alors qu’il s’agit d’interrelation, qu’il faut examiner dans les deux sens ; parmi les aspects qui émergent mais n’ont pas encore leur vraie place : la vitesse et la multiplicité des modes de diffusion, avec quasi instantanéité et ubiquité.
Je veux reprendre car j’aimerais qu’il n’y ait pas de confusion dans l’approche que je développe plus haut :
Je souscrits à la remarque de Paul Jorion sur l’illusion de la création monétaire par les banques commerciales, via le système du crédit. Le principe est très bien décrit par la distinction reconnaissance de dettes/argent/fortune, voire par l’explication d’Helmut.
Il n’y a pas de création, il y a circulation. C’est très clair dans l’exemple que donne Paul.
En revanche, ça ne remet pas en cause deux effets pervers du système de crédit via les banques commerciales :
– Une incitation à la création monétaire par les banques centrales, via le système des intérêts du crédit par les banques commerciales. Ce qui est un peu différent, mais qui a pour conséquence au final une augmentation nécessaire de la masse monétaire totale.
– Une incitation à la création monétaire par les banques centrales, quand l’objet du crédit des banques commerciales se porte sur des pratiques spéculatives, et non pas productives ou de consommation.
Ensuite, il y a malgré tout un gros problème : nous ne considérons pas l’argent que nous mettons en dépôt à la banque comme étant une reconnaissance de dettes de la part des banques, mais nous revendiquons sa capacité à circuler dans l’instant (ballons). A ce titre, nous ne considérons pas qu’il s’agit d’une reconnaissance de dettes, en raison même du fait que cet argent déposé est censément liquide. Du coup, pour que la distinction fonctionne, il faudrait que le principe soit clairement établi qu’il s’agit d’une reconnaissance de dettes et non plus d’argent. Nous ne dirions plus : j’ai 100 euros sur mon compte, mais, j’ai prêté 100 euros à ma banque, ce qui est ra-di-ca-le-ment différent.
Enfin, je remarque que nous considérons beaucoup de « reconnaissances de dettes » comme de « l’argent », alors qu’il nous faudrait considérer tout notre argent comme étant des reconnaissances de dettes.
Mais on est encore loin d’être arrivé au bout de ce chemin qui mène vers la connaissance vraie de la nature de la monnaie. Donc, ne brûlons pas les étapes.
Désolé d’avoir embrouillé un débat qui n’a pas besoin de ça.
@ TOUS : … le problème n’était donc pas où nous le pensions. Les derniers « rebondissements » (encore l’histoire des ballons?) de notre hagiographie de la « sainte monnaie » ont enfin permis de mettre les mots adéquats sur la pierre d’achoppement. Il ne s’agissait pas de savoir ce qu’est la monnaie d’un point de vue pratique, philosophique, économique ou même quantique comme nous nous sommes efforcés de le faire. Non, le problème était simplement de savoir : est-ce que les banques prêtent les dépôts de leurs clients?
2 écoles :
– Paul Jorion – Helmut Creutz (et quelques autres) ==> oui, et c’est bien pour cela qu’il n’y a pas de création monétaire (j’omets volontairement « ex nihilo » pour ne pas raviver les blessures de certains…), qu’il y a conservation des quantités, et que le « scandale » des banques qui créent de l’argent n’en est pas un.
– Jean Bayard, Etienne Chouard (et quelques autres) ==> non, les banques ne prêtent pas les dépôts. Chaque crédit accordé est donc source de création monétaire. La Banque perçoit des intérêts sur les sommes qu’elle prête de façon indue. C’est l’Etat qui doit user de son droit régalien de création monétaire et réinvestir les intérêts perçus (si tant est qu’on conserve le principe des intérêts). C’est donc un scandale.
J’inaugure modestement une 3ème école (qui est en fait celle de Paul Jorion, avec 1 petite précision destinée à réconcilier tout le monde) :
– oui, les banques prêtent les dépôts , à concurrence de 92 % de la valeur de ceux-ci. Mais elles ne s’arrêtent pas là. Car oui, elles prêtent aussi de l’argent qu’elles n’ont pas, mais elles ne « créent » pas cet argent : ELLES L’EMPRUNTENT! Par refinancement : soit à long terme par l’émission d’obligations, soit à court terme en empruntant sur le marché interbancaire ou auprès de la Banque Centrale.
Si les banques ne prêtaient pas les dépôts comme certains le suggèrent, et qu’à partir d’un dépôt de 100, elles soient capables de créer 900, alors les ratios « Loans to deposits » ne seraient pas de 130% ou 140% comme c’est le cas de beaucoup de banques aujourd’hui, mais de 900%. CQFD.
Ce que j’ai dit plus haut n’est pas directement en rapport avec le billet de Paul Jorion. Mais il faut bien trancher la question du « point de départ ».
Il y a deux questions me semble t-il (ceci est évident pour tout le monde je pense):
1/ Que FONT les banques?, qui implique également aussi de savoir ce que nous faisons exactement quand nous « plaçons » de l’argent sur un compte ou quand nous contractons un emprunt.
2/ Que DEVRAIENT faire les banques?, qui implique la question plus radicale de la manière dont on devrait organiser l’entreprise de coopération sociale en la matière (par exemple, « faire une loi constitutionnelle de la Finance », « Instituer un système de souble/triple monnaies », « Nationaliser les banques », « Abolir le système bancaire »…)
Je ne vois pas pourquoi nous avons besoin de plus d’une seule notion pour répondre à la question 1. A priori celle d’ »argent », au sens défini par Paul Jorion devrait suffire. Le reste, ce sont des compte-rendu d’opérations des différents agents, qui impliquent des verbes d’action. « L’employeur fait ceci ». ‘Le salarié fait cela ». « La banque fait ceci et cela »… etc etc…
A un certain moment nous en viendrons à : « Mais il n’est pas normal que tel agent puisse faire ceci/ cela ».
Certains diront: « Pourquoi pas? Si vous pensez que c’est anormal et nous normal, c’est parce qu’une distinction moralement signifiante pour vous n’est pas moralement signifiante pou nous (au hasard: parce que nous considérons que l argent et la dette peuvent légitimement être considérés de la même manière. D’ailleurs c’est cela que nous disons quand nous affirmons que tout ceci c’est de la monnaie. En disant cela nous affirmons en effet EN MEME TEMPS que ce qui les différencie sous un certain rapport n’est pas POUR NOUS moralement pertinent). »
Et les premiers répondront: « Il n’empêche. L’argent c’est l’argent. La dette c’est la dette. Vous pouvez bien dire que tout argent est une reconnaisance de dette. Mais alors rebelotte il y a « reconnaissance de dette » et « reconnaissance de dette ». Car ici « reconnaissance » (voire peut être même « dette ») ne désignent pas la même chose (c’est évident dans votre exemple). Et c’est pourquoi le premier type de reconnaissance de dette qu’on appelera « argent » ne devrait être produit et circuler que de telle ou telle manière. Et c’est pourquoi le second type de reconnaissance de dette qu’on appelera « dette » ne devrait circuler lui que de telle ou telle manière. Ce qui implique telles institutions, telles règles de droit et telles règles de comptabilité.
(Bien sûr il est possible d’être d accord sur l’idée de monnaie comme argent+dette et être en désaccord avec le système en place, mais pour d’autres raisons). C’est pourquoi tout ceci est un travail de longue haleine. Et 5 ans ne me paraissent pas de trop…
Il y a donc peut-être deux manières non pas de décrire mais d’interpréter ce que font exactement les agents, chacune reposant sur une interprétation préalable de ce que se doivent mutuellement les agents d’une communauté politique lorsqu’ils n’accordent pas de signification morale déterminante aux mêmes faits.
Par ailleurs si la monnaie (l’argent) est un instrument d’échange en tant que tel absolument neutre, il est aussi un « moyen » de réaliser telle ou telle conception particulière de la justice sociale (cf. l’idée des « billets qui rouillent » à l’opposé de la conception traditionnelle de la monnaie qui implique au contraire un metal inaltérable, ou l’idée de double monnaie chère à certains fédéralistes).
(Notez que le choix de partir de la signification sociale plutôt que de la fonction impliquerait une lecture plus fine du rapport entre confiance et monnaie, d’une part parce que le concept de confiance est l’un des plus discutés qui soit (c’est une pomme de discorde sévère entre l’approche linguistique de la philosophie analytique anglo-saxonne et l’approche plus « phénoménologique » de la philosophie continentale: faire confiance, est ce toujours déjà un « pari »?), ensuite parce-qu’il s’en faut de beaucoup que la « confiance » soit réductible à la « reconnaissance » pure et simple (différents types de rapport de confiance = différents modes de la reconnaissance mutuelle), enfin parce que parler de « confiance » comme s’il s’agissait d’une décision individuelle de l’accorder ou de ne pas l’accorder c’est oublier qu’il y a avant la confiance des circuits, des structures, par lesquelles celle-ci circule). Au mieux la façon dont les économistes traitent de la confiance est incomplète. Au pire elle est confuse, et conduit comme pour la question de la monnaie à des approximations problématiques.
Pour parler de « salaires disproportionnés » il faut déjà s’appuyer sur une idée de ce que serait une juste proportion, ce qui implique une certaine conception de la justice sociale. Si écart il y a selon vous entre « avoirs » et « services rendus » c’est surtout parce que vous ne partagez pas la conception de la justice sociale qui la sous-tend (quant à ce qui constitue une juste répartition des bénéfices et des charges de la coopération sociale). Je ne vois pas le rapport avec l’idée de l’argent-dette. On peut très bien soutenir cette idée et en même temps partager la conception de la justice que vous jugez, vous, disproportionnée. En fait c’est le « C’est bien parce-que » que je ne comprend pas.
Oui mais non, Antoine.
Je ne cherche pas à faire exercice de ma morale afin de choisir la définition qui lui convient.
Je cherche à faire exercice de ma raison, pour choisir la définition qui lui convient, au-delà de toute approche morale.
Et il se trouve que cette dernière rend plus difficile les démarches de légitimation de la transmission de patrimoine ou d’accumulation de patrimoine, et éclaire la notion de proportion. Pourquoi ?
Parce qu’en raccrochant le concept global de la monnaie au concept de dette, en remarquant que ce qu’on appelle « argent » est équivalent de fait à ce qu’on appelle « reconnaissance de dettes », on la remet à sa place : celle d’être un outil conceptuel et mathématique. On lui vole une partie de sa capacité à se faire passer pour un bien.
Une reconnaissance de dettes, on comprend plus facilement que ce n’est pas une richesse en soi, mais seulement une promesse de services, et on essaie de se garder d’en accumuler à ne plus savoir quoi en faire et on fait en sorte de s’en faire rembourser de temps en temps; et puis on questionne plus facilement sa transmissibilité… par exemple, dans le cadre d’une SARL; ce qui est rarement le cas de ce qu’on appelle… « l’argent ». Et puis, on ne prétend pas recouvrir les reconnaissances de dettes qui datent de 1480, ou datant du temps des pharaons.
Donc, pour moi, découvrir et accepter que le principe même de toute monnaie, c’est d’être de la reconnaissance de dettes, c’est non seulement un raisonnement logique, mais également un grand pas vers la rationalisation de l’outil. J’irais même plus loin, c’est en admettant que la monnaie est un outil conceptuel et mathématique qu’on peut le plus facilement arriver à défendre la réduction des écarts de richesse, non pas en s’appuyant sur des arguments moraux, mais en s’appuyant sur ce qui est aujourd’hui l’ennemi : la modélisation mathématique. A ce titre, par exemple, la démarche permet de donner corps au principe de monnaie fondante, en se passant tout à fait de préalable moral.
Donc, Antoine, tant que vous ne vous serez pas attaqué à une explication justifiant l’existence d’un machin qu’on appellerait « l’argent » et qui ne serait pas une forme de reconnaissance de dettes, je n’y adhérerai pas.
En somme, il va falloir que vous m’expliquiez quel est cet « argent » immanent qui n’aurait pas la caractéristique d’être au fond très exactement un petit papier comme un autre…
Par contre, cet échange contribue à brouiller la tentative d’explication du principe du crédit développée par ailleurs et notamment le principe de conservation des quantités, que la distinction ballons/papiers (argent/reconnaissance de dettes) permet de bien comprendre dans un cadre conceptuel traditionnel.
En fait je ne comprends pas non plus en quoi « tout argent est une reconnaissance de dette ». Je ne suis pas d’accord avec ça.
La question est:
En quoi « l’argent qui est dû en remboursement d’un prêt » doit-il/ peut-il être traité de la même manière que « l’argent possédé qui est le produit du paiement d’un salaire »? On peut bien sûr appeler « dette » les deux sommes d’argent en ce qu’elles correspondent toutes deux à « une somme d’argent qui au départ était dûe (quoique pour des raisons différentes), mais alors on a substitué au concept « juridico-legal » de la dette un concept anthropologique -du même type que celui du « don »- et on a escamoté le problème de départ.
Pour ce qui est de la circulation d’argent.
Je fais donc un prêt à la banque. L argent étant toujours disponible pour moi, faut-il dire que la banque me fait également un prêt simultané de la même somme dont je peux librement disposer (même si dans les faits je choisis de ne pas en disposer)? Cet argent elle le tire d’où? Des autres épargnants? Mais ce qui vaut pour moi vaut également pour tous les autres épargnants. N’y a t-il pas là déjà doublement de la quantité d’argent DISPONIBLE ? Et bien en fait non parce que si c’était le cas il resterait exactement autant d’argent à la banque qu’il y a dans la poche de tous les épargnants réunis si chacun de ces derniers retirait ses billes. Ce qui n’est pas le cas. La banque coulerait. La seule solution concevable c’est qu’effectivement tout le monde n’utilise pas tout l’argent en même temps. Qu’il « circule ». Mais alors quelle est la nature du contrat passé avec la banque? Qu’est ce que j’attends de ce contrat ? (si c’est un prêt fait à la banque j’y gagne que dalle! Et je paie pour ça en plus…). Ceci implique déjà, ce me semble, que seule une banque de dépôt devrait avoir le droit d’exiger des frais de dossier. Je note que la solution retenue par le juriste pose le problème de la légitimité de l’existence même de banques commerciales privées, en tant que le genre de créance qu’il retient est associée par lui à une fonction d’intérêt public.
Ce qui me semble clair c’est que les banques font plusieurs choses en même temps. Et que comme l’argent n a pas d’odeur on mélange ces différents trucs. Il n’y a qu’une seule manière de clarifier tout ça. Soit certaines opérations de transfert sont prohibées. Soit un même établissement ne peut pas en même temps être une entreprise de protection des dépôts (je paie pour le service), être une entreprise qui fait du crédit (je prête à la banque et la banque ne peut se servir de cet argent pour faire crédit à des entrepreneurs ou des particuliers… et elle me rembourse avec un échéancier fixé par avance, avec les intérêts… entre temps cet argent n’est plus disponible pour moi… et c’est intéressant pour moi car ça m évite d’avoir à chercher un emprunteur auquel je ferais signer une reconnaissance de dette de plus la banque par sa taille est solvable…), et être un établissement financier chargé de faire fructifier les avoirs de X/Y/ qui spécule sur le marché des actions/obligations etc…)
J ai la vague intuition qu’un parallèle avec les banques d’organe, et les polémiques récentes qui y sont associées quand à la question de savoir qui doit quoi à qui serait peut être éclairant (Qui est client de qui?).
Et bien c’est assez simple. Depuis qu’il n’est plus étalonné sur l’or, l’argent est un petit papier qui fonctionne exactement sur le même principe que ce que vous appelez « reconnaissance de dettes »… il n’y a plus aucune différence, sinon une différence purement conceptuelle que nous tenons en héritage des temps passés.
Paul Jorion a écrit :
« J’ai écrit hier que cela me prendrait cinq ans de mettre au point une théorie de la monnaie qui me satisfasse. Je n’avais envisagé qu’un seul cas : celui où nous serions seuls, vous et moi, travaillant ensemble. »
Pour vous, un système dont le but est d’augmenter la puissance d’une seule machine serait alors plus efficace pour résoudre un problème complexe qu’un système distribué ?
Ce n’est pas tellement faire confiance dans l’intelligence collective. Il y a certainement moyen de créer une théorie plus rapidement en s’appuyant sur vos lecteurs. Cela nécessite de distribuer les questions et d’accepter les réponses. Pas vraiment facile à faire, je le reconnais.
La théorie sera finalisé avant qu’une personne n’en soit satisfait. L’analyse complète n’est possible qu’a-posteriori.
Difficile de faire confiance en quelque chose qu’on ne comprend pas ? Pourtant c’est ce qu’on fait à chaque fois qu’on utilise notre monnaie. Pour ma part, un système conçu à partir d’une théorie ‘collective’, même sans en comprendre toute la portée, devrait pouvoir faire mieux, haut la main, que notre système actuel.
De plus, la fenêtre pour proposer un autre système financier crédible risque d’être fermé dans 5 ans. Ce serait dommage que votre travail ne débouche pas sur du concret.
OK Dav… je crois comprendre ce que vous tentez de faire.
Ce que je dis c’est juste que toute position ici implique une décision normative. Non pas que, pour des raisons normatives (et pas nécéssairement arbitraires d’ailleurs), vous choisissez telle ou telle définition.
J’aimerais savoir ce que font les banques dans votre logique même dans le cas le plus simple décrit par Paul. Si l’argent est toujours une forme de dette, une promesse d’échange contre un service, comment décririez vous ce que fait une banque commerciale, même dans le cas le plus simple? Elle échange une dette contre une créance contre une dette contre une créance… ad nauseam (en ce cas elle ne traite pas la reconnaissance de dette comme une promesse de service, mais comme une promesse de davantage de reconnaissances de dettes!, ce qui est contraire à l’effet recherché qui est d’empêcher l’accumulation/ réification si je vous suis bien).
Qu’est ce qui m’empecherait d’ailleurs d’avoir moi-même envie d’accumuler des reconnaissances de dette, si elles ont bien le même effet pratique que l’argent?
Si la question est celle de la proportionalité, alors il va falloir fixer un montant pour chaque dette particulière. Si la justice sociale consiste à spécifier le contenu des attentes légitimes des citoyens les uns à l’égard des autres, en quoi le fait d’avoir fait de l’argent une reconnaissance de dette change t-il quoique ce soit? Je ne vois pas en quoi ceci aide à spécifier le contenu des attentes légitimes des citoyens. On ne peut pas discuter de la répartition/distribution des fruits de la coopération sociale sans adopter un point de vue normatif.
Ex:
Wilt Chamberlain est un célebre joueur de basket-ball. Il s’est mis d’accord avec l’équipe dans laquelle il joue pour être payé par une part des recettes sur chaque match, étant la star de l’équipe. La foule se déplace pour le voir. Plutôt que de s’acheter l’intégrale des oeuvres de Thomas d Aquin ou une collection de DVD, ou que sais je encore, les gens choisissent librement de venir le voir jouer. Il a donc acquis beaucoup de reconnaissances de dettes. Des millions. Concrêtement, en quoi cette idée de l’argent comme reconnaissance de dette change t-elle quoique ce soit à la disproportionnalité de l’exemple sus-cité?
(On pourrait dire que Wilt a acquis ses talents dans le contexte d’une certaine société qui lui a donné les moyens de les exploiter, ou encore que Wilt a ici une situation de rente indue, la rente étant tout ce qui excède le montant minimal en deça duquel il prefererait gagner sa vie autrement qu’en jouant au basketball etc etc…).
Quel est le lien – DEPOURVU DE PREMISSE MORALE- qui relie votre critique de la disproportionnalité observée ici (à moins qu’elle ne vous choque pas, mais alors laquelle par exemple vous semble indue) et votre conception de l’argent comme dette?
Je ne vois pas pourquoi une reconnaissance de dette, une fois qu’elle a pris la forme de l’argent, ne pourrait pas s’hériter… Si l’argent n’est qu’un moyen, une reconnaissance de dette, une promesse de service, alors son étude en tant que telle ne nous dira rien sur ce que devrait être une distribution juste/adéquate des reconnaissances de dette? (sauf si bien sûr, et là c’est intéressant, vous pouvez montrer que seul un certain genre de distribution permet de le contenir dans cette fonction de reconnaissance de dette…)
Pour moi il n’y a pas de « nature » de l argent. L’argent est un instrument, comme un râteau ou une pelle. Il est ce que nous voulons bien en faire. Il remplit les fonctions que nous voulons bien le voir remplir. Ces fonctions impliquent le contrôle de la production et des canaux de circulation de l’argent par les citoyens. La question étant: la manière dont l’argent est produit est-elle compatible avec 1/ la fonction que nous avons bien voulu accorder à l’argent 2/ les idéaux politiques et moraux d’une société démocratique/républicaine?
Je m’étonne du changement de posture de Paul. La maïeutique et le doute ont-ils laissé place à la certitude de l’expert qui n’a plus le droit d’admettre ignorer – l’économie, science ô combien exacte – à présent que les médias l’ont reconnu ? Ai-je très mal lu, est-ce ma mémoire qui défaille, ou bien Paul s’était autorisé, plusieurs fois, il y a quelques mois encore, à changer d’avis publiquement sur les fils de son blog traitant de la monnaie – ou bien encore il rappelait parfois qu’il n’était pas issu du métier (ce qui ne veut pas dire ne pas avoir travaillé dans le métier) ? Est-il devenu économiste certifié ? Qui plus est, spécialiste en matière monétaire ? L’ « avis aux amateurs » lancé en tête d’un billet récent m’a laissé un goût amer. Je trouve d’autant plus regrettable la posture que prend Paul que la qualité des débats qui ont eu lieu sur ce thème et sur ce blog est plutôt remarquable.
A ce stade, et pour repartir du thème « ex nihilo », je me permets d’exposer cette thèse : les dialogues de sourds naissent de questions mal posées. Moi qui en connais sans doute bien moins sur le sujet que Paul et d’autres, je suis pourtant stupéfait devant la grossièreté de quelques affirmations, alors je m’attache à quelques éléments clairs et nets, il me semble, pour répondre.
Ma banque prêterait à d’autres clients l’argent que j’ai sur mon compte courant ?
De deux choses l’une. Soit c’est vrai, et alors c’est contraire la constitution, la Déclaration de 1789 faisant de ma propriété un droit inaliénable ; et ce qui est sur mon compte m’appartient et n’appartient pas à ma banque – dans ce cas, notre régime serait un scandale. Soit c’est faux, et alors les banques commerciales créent de la monnaie, ce qui est, pour certains, un scandale, le scandale en question.
Une confrère d’Attac, qui semble être du métier et qui critiquait la vidéo de M. Grignon, proposait un document explicatif du bilan d’une banque (de crédit). J’en tire ici un petit extrait – exemple – en chiffres, car il me semble parlant. Son exemple était le suivant, sur une base 100 :
* Passif : * Actif :
————————————— ——————————————————–
– capital : 8 – prêts à des particuliers ou entreprises : 80
– dépôts des clients : 30 – prêtés à une Banque Z : 14
– obligations à 10 ans : 52 – immobilisés en réserves obligatoires : 6
– empruntés à la banque Y : 10
————————————— ——————————————————–
Total : 100 Total : 100
1. Ratio de réserves obligatoires et ratio de fonds propres sont respectés.
2. La banque prête (peut prêter) autant, et même moins, qu’elle reçoit – et immobilise – d’argent (sous diverses formes).
Vu comme ça, on se dit : qu’un banquier soit de bonne foi en disant que la banque (commerciale) ne crée pas de monnaie, on le comprend puisque effectivement, du point de vue comptable de la banque, celle-ci ne peut prêter que si on lui prête… ou si des clients déposent d’abord de l’argent chez elle. Un argent qu’elle croit prêter. Pour cause : elle doit d’abord en recevoir tant pour pouvoir en prêter autant – sauf à en trouver ailleurs (marché interbancaire, émissions d’obligations, BC).
Dans cet exemple, on peut voir que les 30 au passif sont considérés comme étant homogènes aux contenus des autres postes du passif, qui eux sont à l’évidence des sommes immobilisables par et pour la banque (ce qui justifie qu’elle paie des intérêts pour en disposer).
Pourtant, comme l’a rappelé AJH, ma banque n’affiche pas un débit ni je ne sais quel emprunt passager sur mon compte, un vide dans mes dépôts à vue, lorsqu’elle prête de l’argent à un autre client. Manifestement, ce n’est pas évident pour tout le monde. Pour les banquiers en particulier.
Autre manière de traduire le dilemme qu’a présenté Paul en pensant contredire l’affirmation de M. Allais dans son billet précédent sur la question : d’un côté, la loi est censée garantir à chacun des déposants sa propriété, que n’importe qui ayant des dettes envers lui sera contraint, au besoin par la force, de le rembourser dès lors qu’il est en droit d’exiger son bien ; mais de l’autre côté cela ne vaut que si l’accusé est solvable (même un flique et son flingue ne peuvent faire cracher de l’argent à un clochard). L’État admettrait, donc, précisément que les banques soient en permanence en faillite potentielle. Pas mal, pour qui continue de prélever des intérêts.
Est-ce que l’exemple cité est faux – ou représentatif d’une banque n’ayant pas le pouvoir de certaines autres ? Comment expliquer, sinon, qu’année après année, comme on peut constater dans les rapports de la Banque de France, l’encours total des crédits augmente d’environ 10% par an dans la zone euro – il en est de même pour la masse monétaire en billets et pièces. Ce qui signifie, au présent, de l’ordre 1 200 milliards d’€ de plus de crédits des banques aux particuliers et entreprises, d’une part, et de 80 milliards d’€ de plus de billets et pièces d’autre part. Au moins 15 fois plus.
Il faudrait nous expliquer comment cette tendance apparaît, de manière soutenue, sinon parce que les banques créent de la monnaie (autant dire : la monnaie, vu le ratio de 15 / 1 au moins). Que je sache, aucun financier ni aucun politique n’a dit que cette tendance devra s’inverser rapidement parce que ces milliers de milliards qui nous servent à tous de monnaie au quotidien sont l’image – démultipliée – de promesses de… créations de richesses qu’on ne pourra pas créer.
Mais, vu autrement, si justement on peut les créer, ces richesses futures sur lesquelles toute cette monnaie scripturale est gagée, et puisque le souverain estime que toute cette monnaie scripturale est légale, il faudrait expliquer pourquoi les gens, les entreprises, et les États (même indirectement) sont d’autant plus endettés auprès des banques que tout ce beau monde qui produit est capable de créer des richesses… Car au final, c’est à ces banques, pas à nous-mêmes ou à l’État, qu’on doit principal et intérêts. On peut ajouter que le problème se pose surtout si les banques sont (au mieux) imposées comme n’importe quelle entreprise, tandis que leurs bénéfices sont proportionnels aux crédits qu’elles allouent (non pas à une richesse effectivement – et déjà – crée). Pour le reste, il est évident que « les banques », entités complexes, ont aussi leurs prêteurs. Faut-il préciser que « les banques », ici posées en tant que bénéficiaires, renvoient à une multitude de personnes physiques, qui sont diverses catégories de prêteurs ? De même, dans la fameuse tirade de Maurice Allais sur les « faux monnayeurs », celui-ci dit que « ce ne sont pas les mêmes » qui en profitent, il ne dit pas qui, précisément, en profite. Une chose de sûre, ce sont essentiellement des rentiers.
Si ce ne sont pas les banques commerciales qui créent la monnaie, qui le fait ? Les États, par ici, n’ont plus le droit de le faire. La Banque centrale ? Elle n’est qu’un organe d’émission primaire qui fournit les banques.
Note en passant : en 2006 (rapport de la BdF, p61), alors que la BCE prélevait 814 millions d’€ aux banques de la zone euro au titre des intérêts du refinancement, elle leur versait 904 millions d’€… au titre de la rémunérations des réserves obligatoires… « des banques astreintes à réserves obligatoires » (la formule – cf. p 59, tableau de gauche, laisse donc entendre que certaines ne le sont même pas.) Pas mal, un solde de 90 millions créditeur des banques… tandis qu’elles se faisaient rembourser par les agents des intérêts en proportion de quelques 10 000 milliards et qu’elles augmentaient de quelque 1 000 milliards l’encours de crédit à l’économie.
Mon petit tableau se lit sur deux colonnes… ça n’est pas passé.
@ Julien Alexandre
Je ne veux pas diminuer votre mérite d’avoir introduit une
mais j’attire quand même votre attention sur le fait que cette précision se trouvait déjà dans mon premier billet sur la monnaie – celui qui a lancé tout le débat le 7 février : Le scandale des banques qui « créent » de l’argent
@Julien Alexandre
Bonsoir,
« Si les banques ne prêtaient pas les dépôts comme certains le suggèrent, et qu’à partir d’un dépôt de 100, elles soient capables de créer 900, alors les ratios “Loans to deposits” ne seraient pas de 130% ou 140% comme c’est le cas de beaucoup de banques aujourd’hui, mais de 900%. CQFD. »
Ce que vous dites est vrai si les banques font systématiquement « le plein » de crédits (ce qui est d’ailleurs un postula implicite des modèles simplificateurs donnés en exemple), a mon avis ce n’est probablement pas le cas.
Pourquoi les banques chercherait-elles de nouveau clients à qui elle ne pourraient rien proposer ?
Pourquoi les contrats subprimes ?
Que signifierait la surabondance du crédit ?
Ce que je dis là n’apporte rien au débat de fond bien sur, et votre troisième voie me semble d’ailleurs plus en accord avec le réel.
A mon avis les banques gèrent leurs masses monétaire comme elles l’entendent, puisque la loi ne les contraint pas en terme de gestion.
Elles créent le crédit par une simple opération d’écriture comptable et électronique en respectant les 12,5% du ratio McDonough de fonds propres (pondéré…) par rapport au risque de crédit.
Elles affectent comme elles le souhaitent (crédits, opérations sur les marchés monétaires…) les dépôts des clients avec leurs autres actifs liquides en respectant le ratio de réserve (actuellement 2% dans la zone euro) pour ces premiers.
Si elle manquent de liquidités et qu’elle ne les trouvent pas sur le marché monétaire, le financement par leur banque centrale national est quasi certain puisque cette dernière ne peut courir le risque d’une faillite qui mettrait en perdition tous son secteur…
Partant du principe que ce qui n’est pas interdit est autorisé, j’imagine que c’est un peu comme cela que les banques « fonctionnent », comme toute entreprise qui achète, crée, vends; ici, de la monnaie, sous différentes formes.
Un calcul de ratio prêts/dépôts réalisé par feu Lehman Brothers (paix à son âme) en 2007:
http://www.journaldunet.com/economie/expliquez-moi/banques-ratio-prets-depot/en-savoir-plus.shtml
Au niveau individuel, il me semble que Paul a raison : le bilan de chaque banque est équilibré, par définition la création de monnaie n’apparaît pas. Et pourtant samedi a lui aussi raison, au niveau global la masse monétaire augmente, il y a bien création collective de monnaie (c’est la raison pour laquelle le multiplicateur de crédit s’explique dans les manuels d’économie avec un modèle simplifié comprenant plusieurs banques, ce n’est pas quelque chose qui se comprend au niveau d’une seule banque.) – Maintenant, comment cela se passe-t-il au niveau comptable de chaque banque? De pleins de manières, et comme je ne connais rien à la comptabilité, ce n’est pas moi qui l’expliquerai. Mais il me semble – un exemple parmi d’autres – que la règle du price to market a permis aux banques de surrévaluer la valeur de leurs placements à l’actif, ce qui leur a permis d’augmenter le crédit qu’elles offraient à l’économie, toutes les banques faisant cela, il y a bien eu création de monnaie, qui plus est liée à une croyance déterminée, en l’espèce une bulle sur l’immobilier à surprime.
@ Samedi
« Mais, vu autrement, si justement on peut les créer, ces richesses futures sur lesquelles toute cette monnaie scripturale est gagée, et puisque le souverain estime que toute cette monnaie scripturale est légale, il faudrait expliquer pourquoi les gens, les entreprises, et les États (même indirectement) sont d’autant plus endettés auprès des banques que tout ce beau monde qui produit est capable de créer des richesses… Car au final, c’est à ces banques, pas à nous-mêmes ou à l’État, qu’on doit principal et intérêts. »
Mais par définition, c’est cela le libéralisme; il n’y a pas de scandale propre à la rente bancaire; tout le capitalisme repose sur la captation de rentes via des rapports de domination (ie d’inégalité); de ce point de vue, les banques fournissent un « service productif » comme un autre (c’est ce qu’aurait dit Say).
« De même, dans la fameuse tirade de Maurice Allais sur les « faux monnayeurs », celui-ci dit que « ce ne sont pas les mêmes » qui en profitent, il ne dit pas qui, précisément, en profite. Une chose de sûre, ce sont essentiellement des rentiers. »
Oui, cela dure depuis la fin des années soixante dix, autrement dit depuis la fin de l’inflation et le début de la spéculation financière (du moins pour la France).
Mais il y a d’autres formes de rente qui durent depuis beaucoup plus longtemps : sur le capital, sur les ressources, sur la terre en particulier, que beaucoup d’économistes ont rêvé de nationaliser, etc.
@ Paul : en effet, j’ai réinventé la roue! 🙂 Merci d’avoir remis votre commentaire. Il en va donc de la réflexion sur la création monétaire comme du cinéma : c’est souvent la première prise que l’on garde!
Je pense néanmoins qu à ce stade du débat, la précision était importante car c’est précisement les points de controverse soulevés par Etienne Chouard et Jean Bayard.
Pour la petite histoire, j’ai eu l’opportunité récemment de vérifier de façon empirique au plus haut niveau auprès de la Deutschbank le bien fondé de ce que nous avançons. « Pas de miracle ».
Aprés lecture de l’ensemble des commentaires et réflexion j’en déduit ce qui suit:Pouvez vous me dire si je me trompe?
La banque ne crée pas ex-nihilo la monnaie quand elle accorde un crédit, ELLE S’ENDETTE en même temps qu’elle endette l’emprunteur.
Quand une banque accorde un crédit elle s’endette car les crédits font les dépots et les dépots c’est ce que doit la banque à ces déposants.
Quand la banque accorde un crédit elle ne crée pas d’argent, en fait elle s’endette avec l’obligation de rembourser la totalité de sa dette en monnaie fiduciaire si le déposant de son crédit l’exige. Si elle ne le peut pas c’est la faillite. Par contre pour l’emprunteur, la banque ne peut réclamer que les mensualités.
La banque joue gros dans cette affaire d’où les régles prudentielles (Bâle 2).
Dans l’argent dette de Paul Grignon la population est endettée par le « méchant » banquier avide d’argent mais en fait le banquier doit la même quantité d’argent qui a été prêté (les crédit font les dépots) sauf que le déposant peut réclamer immédiatement à la banque la totalité de ce qu’elle lui doit ( les dépots).
De plus l’emprunteur peut faire faillite et les garanties ne pas couvrir la totalité de la somme empruntée .
Ceux ci justifient l’usure ou intéret (le montant de celui ci peut se discuter mais ce n’est pas le propos )
Donc les banques s’endettent (moyennant rémunération: l’intéret) pour que les gens puissent acheter leur maison , voiture ou spéculer en bourse ou je ne sais quoi peu importe mais je ne vois pas ou est le scandale, au contraire heureusement que les banques existent pour prendre ce risque à notre place ! On peut toujours améliorer le système car il y a toujours des abus ou des malversations mais le système en lui même n’a rien de choquant mais je me trompe peut être (excusez les fautes d’orthographes et les répétitions mais il est tard)