L’actualité de la crise : Comment le FMI verrait la crise financière aux USA, par François Leclerc

Billet invité. Cette fois-ci encore, François Leclerc et moi procéderons en deux temps : dans un premier temps, son billet, consacré à l’entretien-choc que Simon Johnson a accordé à « The Atlantic » et dans un second temps, mon propre billet, plus proche dans son style de la chronique. L’un d’entre vous travaille en ce moment à une traduction française de ce long texte, qu’il en soit remercié : il est indispensable que chacun puisse lire les propos de Johnson, François vous fera déjà comprendre pourquoi.

COMMENT LE FMI VERRAIT LA CRISE FINANCIERE AUX USA

La vénérable revue bostonienne « The Atlantic », publie dans son numéro daté de mai 2009 un article qui risque de faire du bruit, sous la signature de Simon Johnson, ancien chef économiste du FMI (mars 2007-août 2008), professeur de la Sloan School of Management du MIT. Il est titré « Le coup d’Etat feutré ».

C’est au nom de son expérience passée au FMI, ainsi qu’en s’appuyant sur ses études approfondies des crises financières passées, dont il est un des experts reconnus, qu’il adopte pour cet article un angle très percutant : si c’étaient les USA qui frappaient à la porte du FMI, comme tant de pays l’ont fait une fois qu’ils avaient épuisé tous les autres recours, que lui aurions-nous dit ?

Après avoir évoqué la situation actuelle en Russie, endettée à l’extrême pour avoir cru que son secteur énergétique pourrait soutenir une croissance continue de la consommation, il explique que le FMI dirait à Poutine, le premier ministre, qu’il ne pourrait obtenir un prêt qu’à condition de faire le ménage dans son oligarchie et avoir fait un choix afin de ne conserver en son sein que les meilleurs représentants, ne pouvant prétendre assumer les dettes de tous.

D’inévitables fortes réactions de défense de cette même oligarchie ont été à chaque fois rencontrées, dès qu’une telle politique était appliquée. Simon Johnson en donne des exemples, pour conclure que cela n’a pas empêché les mesures préconisées de produire leurs effets bénéfiques. On voit que l’intérêt de cet article n’est pas son point de vue critique sur la politique menée par le FMI, ce n’est pas son sujet.

Sous le sous-titre assez ravageur « devenir une république bananière », il en vient à la crise actuelle, pour l’analyser comme le résultat direct de l’action de « l’élite des milieux d’affaires » américains, avec le soutien implicite du gouvernement US. Une situation qu’il a en réalité rencontrée lors de chacune des autres crises économiques et financières qu’il évoque, en Corée du sud, en Malaisie, en Russie ou en Argentine. Plus alarmant encore, précise-t-il, cette élite fait obstacle aux mesures qu’il serait nécessaire de prendre, et le gouvernement semble incapable de sauter l’obstacle qu’elle représente.

Revenant sur les 25 dernières années, l’auteur examine comment les Etats-Unis en sont progressivement arrivés là, sous les différentes administrations successives, comment « l’oligarchie bancaire » est montée en puissance au fur et à mesure que la participation au PIB du secteur financier augmentait. Les raisons profondes de ce double essor ne sont pas analysées, pour s’en tenir à leurs conséquences, qui font aujourd’hui problème. A la constitution de ce qu’il appelle « l’axe Wall Street – Washington ». Avec cette formule redoutable, qui rend compte du caractère proprement corrosif de l’ensemble de son article : « Bien sur, les Etats-Unis sont uniques. A un point tel si que nous avons l’économie, la force militaire et la technologie les plus avancés du monde, nous avons aussi l’oligarchie la plus développée de celui-ci ».

Simon Johnson décrit ensuite comment l’industrie financière américaine a abandonné les méthodes expéditives et violentes utilisées dans les systèmes politiques primitifs, ainsi que les pratiques classiques de corruption, pour constituer son influence politique en s’appuyant sur une sorte de capital culturel, de système de croyance. Il donne aussi les exemples des allers-retours systématiques opérés par de nombreux grands noms de la finance américaine, entre l’administration de l’Etat et le privé. Pour estimer qu’une génération entière d’homme politique a finalement été « hypnotisée » par Wall Street. De longues et précises évocations de cette situation viennent illustrer le propos de l’auteur, qui n’a pas de mal à l’étayer en s’appuyant sur son propre vécu. Avant de décrire les points d’appui sur la base desquels l’industrie financière a pu se développer, après avoir conquis en quelque sorte le pouvoir sans esclandre. D’où le titre de son article.

Sous le sous-titre « les oligarques américains et la crise financière », Simon Johnson en vient aux causes les plus immédiates de cette crise et montre en quoi les autorités comme les acteurs même de cette crise étaient aveuglés par leurs propres croyances, d’autant plus convaincus que tout allait bien que cela allait particulièrement bien pour eux. La critique qui s’en suit des mesures prises par les administrations successives Bush et Obama est sans appel, expression selon lui de la combinaison d’intérêts qu’elles cherchent à préserver, sans autre justification que ce sont les seules possibles et qu’il faut les accepter sans discussion. L’auteur montre ensuite comment le gouvernement a soigneusement évité de porter atteinte aux intérêts des institutions financières, appuyant son propos sur un décryptage des mesures qui ont été prises.

Comment sortir de cette situation ? Deux situations étroitement connectés entre elles doivent être réglées. Celle du système financier, qui fait obstacle à la réussite des plans de relance. Et celle qui donne au secteur financier un droit de veto sur la politique menée par les pouvoirs publics. Simon Johnson considère que la nationalisation des banques est la seule issue, il explique aussi le pourquoi et le comment de cette mesure radicale, selon lui indispensable. Il estime également qu’une législation antitrust est nécessaire pour le secteur financier, et qu’il faut démanteler les grands groupes financiers : « tout ce qui est trop important pour chuter est trop important pour exister ». Et quant à l’oligarchie financière, le conseil que donnerait, selon lui le FMI, à la lumière des expériences qu’il évoquait en tête de son article, ne fait pas dans le détail : « cassez-les ! »

La puissance des Etats-Unis leur permettant de survivre dans une situation de crise, en trébuchant sans arrêt sans pour autant tomber, celle-ci peut durer. Deux scénarios sont alors possibles. Le premier consisterait dans la poursuite de la confusion actuelle, un chaos dans lequel les frontières entre la légalité et l’illégalité seraient brouillées, instaurant pour « les puissants » une grande impunité, une installation dans la crise, avec d’un côté une forte inflation et de l’autre un système de crédit sous perfusion. L’auteur fait référence, à titre d’exemple, à la situation de la Russie de ces dernières vingt années.

L’autre scénario s’appuie sur la spirale descendante que décrit la crise mondiale, touchant tous les continents, mettant les Etats-Unis à genoux, pouvant créer en retour les conditions d’un sursaut. Des actions décisives seraient enfin prises et les vieilles élites se briseraient.

Comme on le peut constater, l’analyse sans concession de Simon Johnson ne brille pas par l’optimisme, mais elle est décapante. Elle décrit un monde, qu’il a fréquenté, qui laisse peu de place à l’espoir car il est arc-bouté sur son pouvoir, ce qui n’est pas en soi une nouveauté.

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81 réponses à “L’actualité de la crise : Comment le FMI verrait la crise financière aux USA, par François Leclerc”

  1. Avatar de Alain Vézina
    Alain Vézina

    Non je ne peux rien pour Simon Johnson

    Mais ce que l’on trouve ici:

    http://contreinfo.info/rubrique.php3?id_rubrique=50

    relance t-il le débat entre l’illiquidité et l’insolvabilité ?

  2. Avatar de Alain Vézina
    Alain Vézina

    Justement pas en fin de compte

  3. Avatar de maquis29
    maquis29

    Donc nationaliser les banques et les vendre par petits morceaux afin de maîtrise le risque car ce qui est trop gros pour tomber et trop gros pour exister (Anything that is too big to fail is too big to exist).
    Mais résistance de l’oligarchie financière dans son ensemble. De là 2 scénarios possibles.
    a) scénario à la japonaise. On renfloue au coup par coup et on ne nettoie jamais les bilans.
    b) crise en Europe centrale entraînant une crise dans la CE. Les économies exportatrices d’Asie s’enfoncent dans la crise. Les USA mettent finalement les 2 genoux à terre et l’administration US peut commencer le grand nettoyage.

    Tout cela est proprement incroyable et irréaliste. Mon réveil va bien sonner et le cauchemar s’arrêter. Bonne nuit à tous.

  4. Avatar de déprimé
    déprimé

    Encore une info extraordinairement importante à votre actif. Comment faites-vous ?
    Ce qui suit est très sommaire, tendancieux et ne répond pas à votre demande.
    (Ni traducteur, ni spécialiste en rien). Vite fait, mal fait, j’espère ne pas trop faire perdre votre temps…

    L’industrie financière US a atteint une importance considérable.
    Les hommes de Wall Street ont envahi le gouvernement US. Il y a va et vient.
    La crise est plus importante que celle de 29, pour autant qu’elles soient comparables.
    En elle-même elle est TRES importante.
    Les solutions sont connues du FMI. ce sont celles qu’il fait appliquer à un pays sous développé réclamant son aide.
    Pour la finance US, il y a plusieurs alternatives.
    Néanmoins, Wall Street refuse (et le gouvernement US = Wall-Street).
    Une approche de solution est la nationalisation. Comme le refus est total, les sauvetages
    seront à recommencer et sont à fonds perdus.
    Il y a une comparaison entre les Banquiers US et un ministre d’un pays en faillite :
    inflexibilité d’un côté, modestie et écoute de l’autre.
    Des gros mots sont employées tel corruption (ici la traduction est difficile), sérieuse chez les Russes, pour US c’est du folklore.
    En cas d’échec, les ‘élites’ seront balayées.

  5. Avatar de Champignac
    Champignac

    Je comprend que cet article vous intéresse.

    L’auteur y fait, aussi, bon nombre des constats qui ont, aussi, été faits ici. Une synthèse, crue et sans faux-nez, « à la Jorion & Leclerc ». Notamment sur la symbiose d’élites financières et politiques qui font tout et n’importe quoi pour ne rien changer.

    Venant d’un type qui était « en situation », au FMI, il n’y a même pas un an, c’est surprenant, cette lucidité.

    Il n’est pas, non plus, très optimiste sur la suite.

    Mais, désolé, mon Anglais est suffisamment bon pour lire & comprendre. Pas assez pour en faire une traduction littérale.

  6. Avatar de Candide
    Candide

    Désolé, Paul, mais le traducteur que je suis a trop de travail actuellement pour pouvoir traiter ce texte dans un délai compatible avec la rapidité des événements et les attentes des estimables membres de ce blog… 🙁

  7. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    Voici la traduction du début de l’article, lequel est tout de même assez long.
    Je ne suis pas bilingue, des approximations ne sont pas à exclure.
    En tous cas, si cela peut donner une idée du ton et du propos tenu par l’auteur.

    Une chose que vous apprenez rapidement lorsque vous travaillez au FMI est que personne n’est jamais très heureux d’y entrer. Caractéristique est le fait que vos « clients » viennent à vous lorsqu’ils ont été abandonnés par les capitaux privés, que les partenaires commerciaux régionaux se sont révélés incapables de vous donner un réel coup de pouce, ou que les ultimes tentatives pour emprunter à des amis puissants tels que la Chine ou l’Union européenne ont toutes échoué. Autant dire que ceux qui entrent au FMI ne sont pas les premiers de la liste pour la prochaine danse au bal des débutantes !

    La raison en est bien entendu que le FMI se fait une spécialité de dire à ses clients ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre. Je le savais ; lorsque j’étais au FMI en tant que chef économiste en 2007 et 2008 j’ai obligé de nombreux dirigeants à opérer des changement douloureux. J’ai pu alors éprouvé ce qu’est une pression du FMI, au moins indirectement, lorsque je travaillais avec les gouvernements d’ Europe de l’est qui après 1989 se débattaient pour leur survie, avec les secteurs privés en Asie et en Amérique latine durant les crises de la fin des années 90 et du début 2000. Pendant tout ce temps, je fus aux premières loges pour voir le flot constant des officiels venus d’Ukraine, Russie, Thailande, Indonésie, Corée du sud, et ailleurs, accourus au Fonds en traînant des pieds dans les pires circonstances et lorsque tout avait échoué.

    Bien entendu, chaque crise est différente. L’Ukraine connut l’hyper-inflation en 1994 ; la Russie eut un cruel besoin d’aide lorsque son plan de recouvrement de sa dette à court terme explosa à l’été 1998 ; la roupie indonésienne plongea en 1997, provoquant presque un nivellement par le bas de l’économie ; la même année la Corée du sud et ses trente années de miracle économique dut faire une brusque halte lorsque les banques étrangères refusèrent soudainement d’accorder de nouveaux crédits.

    Ici je dois vous dire que pour les dirigeants du FMI toutes ces crises présentaient un profil dépressif similaire. Chaque pays, bien sûr, avait besoin d’un prêt, mais bien plus, chacun d’entre eux avaient à effectuer des changements importants de façon à ce que les prêts puissent être réellement efficaces. Presque toujours, les pays en crise doivent apprendre à vivre par leurs propres moyens après les périodes d’excès — les exportations doivent être augmentées, les importations diminuées — l’objectif étant d’éviter les affres de la récession. Naturellement, les économistes du Fonds s’emploient à concevoir des politiques — budget, apport de monnaie et autres choses du même genre — qui sont adaptées à ce type de contexte.
    Il n’en demeure pas moins que toute solution économique est difficile à mettre en oeuvre.

    Mais en fait, non, le réel soucis des dirigeants du Fonds, le plus grand obstacle au retour à la normale, est presque invariablement la politique propre à ces pays en crise.

    De façon typique, ces pays sont dans des situations économiques désespérées pour une raison simple : les élites au pouvoir en font trop quand tout va bien et prennent ainsi trop de risques. Les gouvernements des pays émergents et leurs alliés du secteur privé forment un maillage serré et, la plupart du temps, une oligarchie plutôt « convenable » qui gouverne comme une entreprise à la recherche du profit et dans laquelle ils sont les plus gros actionnaires. Quand des pays comme l’Indonésie ou la Corée du Sud ou encore la Russie voient leur économie croître, dans la même proportion croissent les ambitions de leurs capitaines d’industrie. En tant que maîtres de leur petit univers, ces gens font des investissements qui bénéficient clairement à l’économie toute entière, mais ils se mettent aussi à faire des paris plus importants et plus risqués. Ils estiment – correctement dans la plupart des cas — que leurs connections politiques leur permettront de reporter sur le gouvernement tous les problèmes substantiels qui vont se présenter à eux.

  8. Avatar de Moi
    Moi

    A un moment, l’auteur dit que le FMI conseillerait actuellement la nationalisation des banques (s’il s’agissait d’un pays émergent par ex.). Il me semble que ce n’est pas ce qu’habituellement le FMI conseille aux pays émergents dans des cas pareils, même plutôt le contraire. Est-ce que je me trompe?

  9. Avatar de iGor milhit

    le même simon johnson interrogé par bill moyers

    et baselinescenario, le blog sur lequel lui et d’autres interviennent.

  10. Avatar de Cécile
    Cécile

    à Pierre-Yves D.
    Je suppose que vous n »avez point regardé le théma de ce soir sur Arte , titré :  » a qui profite la faim?  »

    Oui il y a un problème de gestion,
    mais il est au moins , à minima, à deux dimensions, l’une horinzontale, l’autre verticale, (il y en plus que ça, c’est largement plus compliqué)
    et le FMI ne lui reconnait que qu’une seule dimension exportation/importation (laquelle est récupérée dans l’autre dimension en économie d’échelle, laquelle stimule la paupérisation… du coup le FMI perd son temps, sinon qu’il n’est nuisible plus souvent qu’à son tour)

    Soit on nous dit les subprimes, (et il y a eu corruption, ces montagnes Ponzi, et j’en passe et des meilleurs ….), mais et après, il paraît que ce n’était pas prévisible ( comme si on ne savait pas jusqu’ici en France, dans le contraste avec les Donchichottes , jeudi noir et la pléthore d’agences immobilières remplacées les boucheries, légumes et autres commerces, et leurs dossiers, des photocopies et des photocopies…..)

    La crise était prévisible, il n’y a que l’élite qui plane (et se fout du monde) à oser feindre qu’elle ne l’était pas
    entre autre parce qu’elle est engrammée des théories (pour ma pomme abracadabrandesques ) inculquées des prophètes gestionnaires dont s’inspirent (a-t-elle le choix ?) la Banque Mondiale et mises en oeuvre du FMI

    Ce que je voudrais dire c’est que dans cette économie (je la déclare suicidaire), les maisons des subprimes existent, et ce dont personne ne parle (certainement pas le FMI, mais pas seulement lui, il n’est qu’un rouage, du moulin qui broie l’économie sur elle-même ) c’est ce qui a été détruit

    Ce qu’il serait très important serait aussi comment arrêter de prendre des vessies pour des lanternes, mais aussi, de ni non plus se prendre tellement au sérieux à se battre contre des moulins à vent (seulement cela ferait pas mal d’économie, mais c’est tellement chiant, il faut tellement se casser la tête, d’essayer de voir plus loin que le bout de son nez, que mais quel intérêt pour la finance ? pourquoi ne rongerait -t-elle pas son os jusqu’à la moële ? …)

    Je ne suis pas pessimiste, nous pouvons remettre ce monde à l’heure (mais tout de même aujourd’hui, Sarkosy est venu à Aix, les enfants qui étaient de sortis ont du attendre pour revenir à leur école, le pont sur l’autoroute était fermé à leur retour à cause du cortège de Sarkosy, et là franchement je me demande, c’est ça qu’on investit? c’est ça le G20? et y en a encore qui y croit? )

  11. Avatar de 2Casa
    2Casa

    Bon je me lance, mais 10 pages, à la volée comme ça, je ne garantis pas l’excellence et la rapidité…

    The Atlantic, May 2009. The quiet coup /Simon Johnson

    Le crash a laissé à nu de nombreuses vérités désagréables à propos des USA. L’une des plus alarmantes, selon l’un des précédents chef-économiste du FMI, est que l’industrie de la finance a bel et bien suborné notre gouvernement. Un état de fait qui décrit habituellement plutôt les marchés émergents et qui est à l’épicentre de nombreuse crises sur ces mêmes marchés. Si le FMI pouvait parler librement des USA, il nous dirait ce qu’il dit à tous les autres pays dans cette situation: la reprise échouera tant que nous n’aurons pas brisé l’oligarchie financière qui interdit la refonte totale. Et si nous voulons prévenir une véritable dépression, nous manquerons bientôt de temps.

    Par Simon Johnson.

    Le coup d’état silencieux.

    L’une des choses que l’on apprend rapidement quand on travaille au FMI, c’est que personne n’est jamais enchanté de nous voir. Habituellement, nos « clients » ne viennent nous voir que lorsque les capitaux privés les ont abandonnés, après que les partenaires d’échanges institutionnels régionaux se sont montrés incapables de vous lancer une bouée de sauvetage, après que les dernières tentatives désespérées pour emprunter auprès d’amis puissants comme la Chine ou l’Union européenne se soient évanouis, vous n’êtes jamais en tête du carnet de bal de personne.

    La raison en est bien sûr que le FMI se spécialise dans le fait de dire à ses clients ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre. Je devrais le savoir; j’ai imposé des changements douloureux à de nombreux fonctionnaires étrangers pendant le temps que j’ai passé là bas comme chef-économiste en 2007 et 2008. Et j’ai ressenti les effets de la pression du FMI, au moins indirectement, quand j’ai travaillé avec les gouvernements d’ Europe de l’Est, pendant leurs combats après 1989, et avec le secteur privé en Asie et Amérique Latine pendant les crises de la fin des années 1990 et des premières années 2000. Durant cette période, depuis cette point de vue privilégié, j’ai été aux premières loges pour voir le flot continu des officiels – d’Ukraine, de Russie, de Thaïlande, d’Indonésie, de Corée du Sud et d’ailleurs – arriver en traînant les pieds au FMI alors que les circonstances étaient calamiteuses et que tout le reste avait échoué.

    Toutes les crises sont différentes bien sûr. L’Ukraine a affronté l’hyperinflation en 1994; la Russie a eu désespérément besoin d’aide quand son modèle de rotation (rollover) de dette à court terme a explosé à l’été 1998; quand la roupie indonésienne s’est effondrée en 1997, réduisant presque à néant la « corporate economy »; la même année, le miracle économique datant de plus de 30 ans de la Corée du Sud dût marquer le pas quand les banques étrangères refusèrent tout à coup d’octroyer de nouveaux crédits.

    Mais je dois vous le dire, pour les fonctionnaires du FMI, toutes ces crises se ressemblent désespérément. Chaque pays nécessitant bien sûr un prêt, mais plus encore, tous ayant besoin de réaliser d’énormes transformations pour que le prêt puisse véritablement fonctionner. Presque toujours, les pays en crise doivent apprendre à vivre selon leurs moyens après une période d’excès – les exportations doivent augmenter et les importations décroître – l’objectif étant d’y parvenir sans dramatique récession. Naturellement, les économistes du FMI passent beaucoup de temps à mettre en place les politiques – budgétaires, financières, etc. – faisant sens dans ce contexte. Jusque là, les solutions économiques sont rarement difficiles à envisager.

    Non, le souci principal du personnel dirigeant du FMI (fund’s senior staff), et l’obstacle majeur à la reprise, est presque invariablement la politique des pays en crise.

    Habituellement, ces pays sont dans une situation économique désespérée pour une simple raison – leurs puissantes élites sont allées trop loin pendant les heures fastes et ont pris trop de risques. Les gouvernements de pays émergents et leurs alliés du secteur privé forment généralement une étroite – et la plupart du temps distinguée (« genteel ») – oligarchie, dirigeant le pays plutôt comme une compagnie à la recherche du seul profit et dans laquelle ils seraient les actionnaires principaux. Quand un pays comme l’Indonésie la Corée du Sud ou la Russie se développent, ainsi en est il également de l’ambition des capitaines d’industrie. Comme maîtres de leurs petit univers, ces gens font souvent des investissements qui bénéficient clairement à la croissance de l’économie, mais ils commencent également à faire des paris de plus en plus risqués et de plus en plus élevés. Sachant parfaitement – à raison dans la plupart des cas – que leurs connexions politiques les autoriseront à se défausser sur le gouvernement de tout problème conséquent qui se présenterait.

    En Russie, par exemple, le secteur privé rencontre maintenant de sérieuses difficultés, parce que durant les cinq dernières années ou à peu près, il a emprunté au moins 490 milliards de dollars aux banques (« global banks ») et aux investisseurs se fondant sur cette supposition que le secteur de l’énergie pourrait supporter une croissance permanente de la consommation à travers l’économie. A mesure que les oligarques russes dépensaient ce capital, en acquérant d’autres firmes et en mettant en place des plans d’investissement ambitieux créateurs d’emplois, leur importance au sein de l’élite politique s’est accrue. Leur soutien politique croissant signifiant un meilleur accès à des contrats très lucratifs, des dégrèvements fiscaux et des subventions. Les investisseurs étrangers ne pouvaient s’en trouver que satisfaits; toutes choses égales par ailleurs, ils préféraient prêter de l’argent à des gens ayant le soutien implicite de leurs gouvernements respectifs, même si ce soutien prenait des relents de corruption.

    Mais inévitablement, les oligarques des marchés émergents furent poussés dehors, ils gaspillèrent l’argent et bâtirent des empires économiques gigantesques sur une montagne de dettes. Les banques locales parfois encouragées par les gouvernements, devinrent trop conciliantes face à une extension du crédit aux élites et à ceux qui dépendaient d’eux. Sur-emprunter finit toujours mal, que ce soit pour un individu, une entreprise ou un pays. Tôt ou tard, les conditions de crédit deviennent plus drastiques et plus personne ne vous prête d’argent en des termes acceptables (« affordable »).

    Le spirale infernale qui s’ensuit est particulièrement abrupte. De gigantesques compagnies vacillent au bord de la faillite et les banques locales qui leur ont prêté s’effondrent. Les « partenariats public-privé » d’hier sont re-labellisés « capitalisme de copinage » (« crony capitalism »). Avec un crédit devenu inaccessible, s’ensuit la paralysie économique et la situation ne cesse d’empirer. Le gouvernement est contraint à diminuer ses réserves de monnaie étrangère pour payer les importations, le service de la dette, et couvrir les pertes privées. Mais ces réserves peuvent bien sûr s’épuiser. Si le pays ne peut pas se ressaisir avant que cela n’arrive, il fera défaut sur sa signature (« sovereign debt ») et deviendra un paria économique. Le gouvernement, dans sa course pour arrêter l’hémorragie devra effacer/détruire (« wipe out ») certains de ses champions nationaux – subissant des pertes massives de capitaux – et devra habituellement restructurer un système bancaire particulièrement déséquilibré. Il devra en d’autres termes se débarrasser de certains de ses oligarques.

    Se débarrasser de ses oligarques est rarement une stratégie de choix parmi les gouvernements des marchés émergents. Plutôt l’inverse: à l’apparition de la crise, les oligarques sont habituellement ceux qui bénéficient en premier lieu de l’aide du gouvernement, comme un accès privilégié d’accès à la monnaie étrangère, ou encore d’importants dégrèvements fiscaux, ou – c’est là une technique de crédit classique du Kremlin – l’achat par le gouvernement d’obligations privées. Sous la contrainte, la générosité envers les anciens amis prend une multitude de formes très innovantes. Pendant ce temps, comme on a besoin de ponctionner quelqu’un, la plupart des gouvernements des marchés émergents se tournent vers les salariés ordinaires – au moins jusqu’à ce que les émeutes deviennent trop importantes.

    Éventuellement, ainsi que les oligarques de la Russie de Poutine le réalisent maintenant, certains parmi l’élite doivent perdre avant que la reprise ne puisse démarrer. C’est un jeu de chaises musicales: il n’y a juste pas assez de réserves monétaires pour prendre soin de tout le monde, et le gouvernement ne peut pas se permettre d’éponger complètement la dette du secteur privé.

    Alors, le personnel du FMI regarde dans les yeux le ministre des finances et décide si oui ou non il est maintenant sérieux. Le FMI octroiera même éventuellement un prêt à un pays comme la Russie, mais d’abord il veut être convaincu que le premier ministre Poutine est prêt, décidé, et capable d’être dur avec certains de ses amis. S’il n’est pas prêt à jeter ses précédents associés aux loups, le FMI peut attendre. Et quand il est prêt, le FMI est heureux de faire d’utiles suggestions – particulièrement en prenant soin de retirer le contrôle du système bancaire des mains des plus incompétents et avares des « entrepreneurs ».

    Évidemment, les anciens amis de Poutine se rebelleront. Ils mobiliseront leurs alliés, feront jouer le système, et mettront la pression sur d’autres pans du gouvernements pour obtenir des subventions supplémentaires. Dans les cas extrêmes, ils tenteront même la subversion – incluant l’appel de leurs contacts aux affaires étrangères américaines (« American foreign-policy establishment ») ainsi que le firent les ukrainiens avec quelques succès à la fin des années 90.

    Nombre de programmes du FMI « déraillent » (un euphémisme) précisément parce que le gouvernement ne peut pas rester suffisamment sévère envers ses précédents amis, et les conséquences sont une inflation massive et autres désastres. Un programme « revient sur les rails » dès que le gouvernement reprend les rênes ou quand les puissants oligarques ont choisi parmi eux lequel gouvernera – et ainsi lequel gagnera ou perdra – à l’intérieur du plan du FMI. Le vrai combat en Thaïlande et en Indonésie en 1997 fut de déterminer quelles puissantes familles perdraient leurs banques. En Thaïlande, ce fut géré relativement tranquillement. En Indonésie, cela conduisit à la chute du président Suharto et au chaos économique.

    De ces longues années d’expérience, le personnel du FMI sait que ses programmes réussiront – stabiliser l’économie et permettre la croissance – si et seulement si un des puissants oligarques qui fit tant pour créer le problème sous-jacent est mis à terre. C’est le problème de tous les marchés émergents.

    (FIN PARTIE 1) Coming soon: « Becoming a banana republic ».

  12. Avatar de 2Casa
    2Casa

    @ Tous

    Je croise la traduction de Pierre-Yves D. à 2.00… Quelqu’un d’autre a-t-il commencé que nous ne soyons pas 36 à le faire ?

    Merci

  13. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    @ 2casa

    excellente traduction ! du travail de pro.
    Et aussi vite, chapeau bas 😉

  14. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    vous maîtrisez mieux que moi la langue anglo-américaine.
    Je vous laisse continuer 😉

  15. Avatar de 2casa
    2casa

    Est-ce que qqu’un d’autre est dessus ou je continue ?

  16. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    Vous maîtrisez mieux que moi la langue anglaise,
    je vous laisse continuer.

  17. Avatar de 2casa
    2casa

    Non, non, vos phrases sont plus élégantes… 8)

  18. Avatar de 2casa
    2casa

    Part II Devenir une république bananière

  19. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    En tous cas la votre est plus exacte, et c’est le plus important.
    Là où j’ai hésité vous avez fait la bonne tradution.

  20. Avatar de 2casa
    2casa

    Pas de pb, je continue alors. Bonne nuit. 😉

  21. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    bonne nuit et bon courage ! 🙂

  22. Avatar de Cécile
    Cécile

    à Paul
    merci pour vos articles (et aussi à françois)

    je comprends un peu l’usaméricain, et aussi encore moins bien le russe, mais je fais grève

    j’en ai raz la casquette de l’usaméricain qui se prend pour la langue de l’ Europe, je comprends très bien que l’anglais soit la langue des usaméricains, mais en Europe, vraiment ça m’agace, donc je boycote

    Qui a en europe comme langue maternelle, l’usaméricain, à par cette minorité d’insulaire qui peuplent l’Irlade et l’Angleterre ?
    Pour tous les autres européens, l’usaméricain est une langue apprise, seconde

    Est-ce que nous ne savons pas nous français , qui avons été une puissance coloniale combien il est important de s’imposer par la langue ?

    Alors que nous savons bien que les romains, bien évidemment, le savaient déjà.. va savoir s’ils traitaient les celtes de nuls en langues, soit disant qu’ils ne parlaient pas la leur alors même qu’ils les colonisaient, et nous qu’avons-nous oser dire aux arabes ???
    j’ai une assez bonne idée de l’aptitude soit disant si merveilleuse des usaméricains en langue étrangère, ils traduisent, ils traduisent, les autrese sont tellement nuls en langue, en parfumerie, c’est dans la notice « poncer la peau », sur la senteur « relans marins », les francophones renvoient, sous motif invendable, avec proposition contre « relan marin », « senteur marine »,
    mais bon ya qu’à dire les usaméricain sont très forts en langue, la preuve ils ne traduisent vraiment que le moins possible et sinon très mal et sinon je suppose proportionnellement quasi jamais rien, -justement parce qu’une langue seconde…- dont ils obligent beaucoup des autres , soit disant nuls en langue de maîtriser la leur, sinon, sinon, …. –
    en bref ils sont dans une attitude coloniale,
    et désolée, mais je ne vois ni les russes, ni les chinois, ni les indiens, ni les arabes, ni les hispaniques maintenir cette pression …

  23. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    @ Cécile,

    c’est vrai que la langue du business c’est l’anglo-américain.
    C’est un réel problème en effet que vous soulevez.
    Quand on dit en anglo-américain « to make money » ce n’est pas une expression indifférente, elle renvoie
    à tout un contexte aujourd’hui plus que jamais oh combien sur le devant de la scène, et pas pour de glorieuses raisons.
    « To make money » c’est fabriquer de l’argent. Et si l’on pousse le raisonnement plus loin c’est faire de l’argent avec de l’argent, les grandes spécialités de Wall Street et de la City.

    Mais le business n’est pas l’économie, et c’est tout l’intérêt d’un blog comme celui-ci que de l’exprimer et le démontrer chaque jour qu’il est possible d’être parfois plus pertinent sans pour autant parler la langue de WallCity.

    Mais ne trouvez-vous pas tout de même assez piquant que Paul nous distille jour après jour ses connaissances et réflexions, via ses percutants billets et commentaires, depuis le lieu même d’où la crise est partie, de la Californie, le pays de la ruée vers l’or et des subprimes !!. Avouez qu’il y a là comme une grande ironie de l’histoire.

    Réjouissons nous donc que Paul soit parfaitement familier de la langue et des arcanes de ce pays, et même qu’à l’occasion il nous partage certains de ses plaisants aspects. Les USA c’est le dollar, mais pas que ça. Et puis chez nous, en Europe, au Quebec, et ailleurs dans le monde francophone, l’argent n’est pas moins présent. Nous n’avons pas érigé l’argent en valeur suprême mais nous y avons aussi ses grands prêtres, ses spéculateurs, ses exploiteurs du peuple ! Et nos publicitaires du genre Ségala pour nous dire que si à 50 ans nous n’avons pas de Rolex c’est que nous avons raté nos vies !!
    Les USA ont une grande responsabilité dans cette crise, mais le système est mondial, il a donc eu un peu partout de nombreux complices.

  24. Avatar de 2casa
    2casa

    Part II Devenir une république bananière

    De par sa profondeur et sa soudaineté, la crise financière et économique US rappelle remarquablement les moments que nous avons connus sur les marchés émergents (et seulement sur les marchés émergents) : la Corée du sud (1997), la Malaisie (98), la Russie, l’Argentine (à leur heure et encore maintenant). Dans chacun de ces cas, les « global investors », effrayés que le pays ou son secteur financier ne puissent faire face à leur montagne de dette, stoppèrent soudainement leurs financements. Et dans chacun de ces cas, cette crainte devint auto-réalisatrice, à mesure que les banques échouaient à refinancer leur dette (« rollover ») et s’avéraient incapables de payer. C’est précisément ce qui a conduit Lehman Brothers à la banqueroute le 15 septembre, provoquant un tarissement de toutes les sources de financement du secteur financier en une nuit (« overnight »). Tout comme dans les crises des marchés émergents, la faiblesse du système bancaire s’est propagé à toute l’économie, provoquant une sévère contraction de l’activité économique et des privations pour des millions de personnes.

    Mais il existe une similitude plus profonde et plus dérangeante : les intérêts de l’élite des affaires – financière, dans le cas des USA – a joué un rôle central dans l’émergence de cette crise, pariant de plus en plus gros, avec l’accord implicite du gouvernement, jusqu’à l’inévitable effondrement. Plus inquiétant encore, ils utilisent maintenant leur influence pour prévenir exactement le type de réformes qui sont nécessaires, et ce, rapidement, pour sortir l’économie de son plongeon tête la première. Le gouvernement semble sans ressource (helpless), ou sans volonté, pour agir contre eux.

    Les Topbankers (Auguste on t’a reconnu !) d’investissement et les fonctionnaires du gouvernement aime à jeter le blâme pour ce qui est de la responsabilité de la crise actuelle sur la baisse des taux d’intérêts après l’implosion de la bulle internet ou, mieux encore – dans un « le dollar s’est arrêté ailleurs » ou quelque chose d’approchant (« buck stops somewhere else » sort of way) – sur le flot d’épargne provenant de Chine. Certains à droite aiment à se plaindre de Fannie et Freddie, ou même des efforts de longue durée destinés à promouvoir un plus large accès à la propriété. Et, bien sûr, c’est un axiome pour tout le monde que les régulateurs responsables « de la sécurité et de l’équilibre » se sont endormis au volant.

    Mais toutes ces politiques – régulation amaigrie, argent pas cher, l’alliance tacite US-Chine, le développement de l’accès à la propriété – avaient toutes quelque chose en commun. Même si, certaines sont traditionnellement associées aux Démocrates et d’autres aux Républicains, elles bénéficièrent toutes au secteur financier. Les changements de politique qui auraient pu endiguer la crise et limiter les profits du secteur bancaire – telle la maintenant fameuse tentative de Brookley Born de réguler les CDS à la Commodity Future Trading Commission, en 98 – furent ignorées ou balayées d’un revers de main.

    L’industrie financière n’a pas toujours bénéficié de tels traitements de faveur. Mais depuis 25 ans environ la finance s’est énormément développée (a explosé) devenant encore plus puissante. Le décollage s’est produit sous les années Reagan et il a véritablement gagné en puissance avec les politiques de dérégulation des gouvernements Clinton et Bush. De nombreux autres facteurs ont alimentés l’ascension de l’industrie financière. La politique monétaire de Paul Volker dans les années 80 et l’accroissement de la volatilité des taux d’intérêts qui l’ont accompagnée ont rendu le commerce des obligations bien plus lucratif. L’invention de la « securitization », des « interest-rate swaps », et des CDS accrût sensiblement le volume des transactions sur lesquelles les banquiers pouvaient faire de l’argent. De plus, une population vieillissante et très aisée a investi de plus en plus d’argent dans les « securities », aidée en cela par l’invention de « l’IRA et du 401(k) plan ». Ensembles, ces développements ont largement augmenté les opportunités de profit des services financiers.

    Sans surprise, Wall Street s’est précipitée sur ces opportunités. De 1973 à 1985, le secteur financier n’a jamais représenté plus de 16% des profits des entreprises nationales (PNB ?). En 1986, ce chiffre atteignait 19%. Pendant les années 90 il a oscillé entre 21 et 30%, plus haut qu’il ne l’avait jamais été pendant la période d’après guerre. Durant notre décennie (i.e 2000) il a atteint 41%. Les rémunérations se sont énormément accrues. De 1948 à 1982, les rémunérations moyennes du secteur financier se situaient entre 99 et 108 % de la moyenne pour toutes les entreprises nationales privées. Depuis 1983 elles ont décollé atteignant 181% en 2007.

    L’énorme richesse que le secteur financier a créée et concentrée a donné aux banquiers un poids politique énorme – un poids jamais vu aux US depuis l’ère JP Morgan (l’homme). Pendant cette période, la panique bancaire de 1907 ne pût être arrêtée que par une coordination des banquiers du secteur privé : aucune entité gouvernementale n’étant apte à fournir une réponse efficace. Mais ce premier âge des banquiers oligarques parvint à son terme avec l’application d’une régulation bancaire significative en réponse à la Grande Dépression ; le retour d’une oligarchie financière américaine est plutôt récente.

    That’s all folks for tonite.

    Next : Part III The Wall Street-Washington Corridor.

  25. Avatar de 2casa
    2casa

    Unless PYD is still hangin’ around ? 😉

  26. Avatar de Ken Avo
    Ken Avo

    Merci 2casa et « PYD » pour les traductions.
    Quelle perle, maître Jorion, cet article !

  27. Avatar de Paul Jorion

    Merci à tous ceux qui travaillent à une traduction : on mettra tout ça ensemble pour en faire une version définitive très belle qui sera diffusée dans le monde francophone – cela le mérite.

    Début par iGor milhit :

    La crise a mis à nu bien des vérités déplaisantes au sujet des Etats-Unis. L’une des plus inquiétantes, dit un ancien économiste en chef du Fond Monétaire International, est que l’industrie financière a effectivement mis la main sur notre gouvernement – une situation qui correspond plus habituellement à un marché émergent, et qui est au centre de beaucoup de crises de marchés émergents. Si l’équipe du FMI pouvait parler librement des Etats-Unis, elle nous dirait ce qu’elle dit à tous les pays dans cette situation: le rétablissement ne peut réussir qu’à la condition de briser l’oligarchie financière qui empêche la réforme indispensable. Et si nous voulons éviter une vraie dépression, le temps nous manque.
    par Simon Johnson.

    Le coup d’Etat feutré.

    Une chose que l’on apprend relativement rapidement lorsque l’on travaille au Fond Monétaire International, c’est que personne n’est jamais très heureux de vous voir. Habituellement vos « clients » vous appellent seulement après que le capital privé les a abandonné, après que les partenaires du commerce régional n’ont pas réussi à jeter une bouée de sauvetage suffisante, après que les tentatives de dernier recours pour emprunter à des amis puissants comme la Chine ou l’Union européenne sont tombée à l’eau. Vous n’êtes jamais le premier invité pour une danse.

    La raison, bien sûr, est que le FMI s’est spécialisé dans le fait de dire à ses clients ce qu’ils ne veulent pas entendre. J’aurais du le savoir; j’ai imposé des changements pénibles à bien des dirigeants étrangers lorsque j’était économise en chef en 2007 et 2008. Et j’ai senti les effets de la pression du FMI, au moins indirectement, lorsque j’ai travaillé au côté des gouvernements en Europe de l’Est alors qu’ils se débattaient après 1989, et avec le secteur privé en Asie et en Amérique latine au cours des crises de la fin des années 1990 et début des années 2000. A cette époque, de chaque point d’observation, j’étais aux premières loges pour voir le déroulement régulier des officiels – d’Ukraine, de Russie, de Thaïlande, de Indonésie, de Corée du Sud et d’ailleurs – venir péniblement vers le fond lorsque les circonstances étaient extrêmes et que tout le reste avait échoué.

    Chaque crise est différente, bien sûr. L’Ukraine faisait face à une hyperinflation en 1994; la Russie avait désespérément besoin d’aide lorsque son système de renouvellement d’emprunt à court terme explosa l’été 1998; la roupie indonésienne plongea en 1997, mettant presque à plat l’économie réelle; cette même année, le miracle économique long de 30 ans de la Corée du Sud fut stoppé lorsque les banques étrangères soudainement refusèrent d’accorder de nouveaux crédits.

    Mais je dois vous dire que pour les dirigeants du FMI, toutes ces crises étaient terriblement similaires. Chaque pays, bien sûr, avait besoin d’un prêt, mais plus que cela, chacun avait besoin de procéder à de grands changements pour que le prêt puisse fonctionner. Presque toujours, les pays en crise doivent apprendre à vivre selon leurs moyens après une période d’excès – les exportations doivent être augmentées et les importations réduites – et le but est de le faire sans la plus horrible des récessions. Naturellement, les économistes du fond passent leur temps à établir les politiques – le budget, les réserves monétaires et ainsi de suite – qui font sens dans ce contexte. Mais la solution économique est rarement très difficile à trouver.

    Non, la réelle préoccupation des cadres supérieurs du FMI, et le plus grand obstacle au redressement, est presque invariablement la politique des pays en crise.
    Habituellement, ces pays sont dans une situation économique désespérée pour une simple raison – leurs puissantes élites se sont emportées lors de la période des vaches grasses et prirent trop de risques. Les gouvernements des marchés émergents et leurs alliés du secteur privés forment en général une oligarchie très unie – et la plupart du temps très raffinée – dirigeant le pays à peu près comme une entreprise lucrative dans laquelle ils sont les actionnaires majoritaires. Lorsqu’un pays comme l’Indonésie ou la Corée du Sud croît, croissent également les ambitions de ses capitaines d’industrie. Tels les maîtres de leur univers miniature, ces personnes font des investissement qui bénéficient clairement à l’économie, mais ils commencent également à faire des paris plus gros et plus risqués. Ils considèrent – correctement la plupart du temps – que leurs connections politiques vont leur permettre de reporter sur le gouvernement les problèmes substantiels qui apparaîtront.

    En Russie, par exemple, le secteur privé est confronté à des difficultés sérieuses parce que, ces 5 dernières années environ, il a emprunté au moins 490 milliards à des banques et des investisseurs globaux en se basant sur la croyance que le secteur de l’énergie du pays pouvait soutenir une augmentation permanente de la consommation de toute l’économie. Comme les oligarques russes dépensèrent leur capital, en acquérant d’autres entreprises et en se lançant dans d’ambitieux projet d’investissement qui créèrent des emplois, leur poids sur l’élite politique augmenta. Un support politique grandissant offrait un meilleur accès à des contrats lucratifs, à des facilités fiscales et aux subventions. Et les investisseurs étrangers n’auraient pas pu être plus content; toutes choses étant égales par ailleurs, ils préféraient prêter de l’argent à des personnes qui avaient le support implicite de leur gouvernement national, même si cette garantie dégageait une légère odeur de corruption.

    Mais inévitablement, les oligarques des marchés émergents se laissent griser; ils gaspillent l’argent et construisent d’énormes empires commerciaux sur des montagnes de dettes. Les banques locales, parfois poussées par le gouvernement, deviennent trop désireuses d’accorder des crédits à l’élite et à ceux qui dépendent d’elle. Le surendettement finit toujours mal, que ce soit le fait d’un individu, d’une entreprise ou d’un pays. A un moment ou à un autre, les conditions de crédit se rétrécissent et plus personne ne vous prêtera d’argent dans des conditions abordables.

    La spirale descendante qui suit est particulièrement raide. D’énormes entreprises vacillent au bord du défaut de paiement et les banques locales qui leur ont prêté font faillite. Les partenariats « public-privé » d’hier sont renommés « capitalisme de petits copains ».

  28. Avatar de TELQUEL
    TELQUEL

    Merci a tous de nous permettre d’acceder a ce type d’information!Amities

  29. Avatar de JJJ
    JJJ

    Eh bien, on peut dire que Johnson appelle un chat un chat !
    Voilà qui démontre au moins qu’il existe aux Etats-Unis des esprits aptes à développer une vue d’ensemble, contrairement à Stiglitz qui vibrionne dans une éprouvette et finit par ridiculiser ses idées les plus défendables.
    Cela démontre aussi un vrai courage : il faut oser attaquer de front l’oligarchie financière au pouvoir, et réclamer ni plus ni moins la mise à mort de la plupart de ses membres, même du haut d’une chaire prestigieuse au MIT.
    Il faut également du courage à un Américain pour pronostiquer un avenir qui se situe entre la peste et le choléra. Johnson corrobore avec sérieux cette saillie de P-E Victor : « Les optimistes pensent que tout est foutu et que l’on finira par manger de la m…; les pessismistes pensent qu’il n’y en aura pas pour tout le monde » -;)

  30. Avatar de iGor milhit

    bon ben je fais un saut et reprends à la partie III.

  31. Avatar de Dominique B
    Dominique B

    Bonjour,
    Changement de régime.
    Des décennies durant, nous en avons été gavés…berk.
    Bravo à M. Simon Johnson !
    Bonne journée et continuation.

  32. Avatar de fincaparaiso
    fincaparaiso

    bonjour,
    merci aux personnes qui prennnent la peine de traduire ce texte.

  33. Avatar de JAMES
    JAMES

    Bonjour,
    Si je comprends bien, le conseil du FMI à une économie nationale en crise est d’exporter plus et d’importer moins.
    Que faire lorsque toutes les économies de la planète sont en crise et que certaines – et non des moindres – sont au bord de la cessation de paiement ? Comment vendre à celui qui ne pourra pas payer ? En lui prétant encore plus ?
    J’ai lu les derniers livres de Paul Jorion, et d’autres, et tout cela m’apprend beaucoup sur le fonctionnement, ou plutôt le non fonctionnement de l’économie capitaliste industrielle et sur la direction que prend notre civilisation mais je me pose une question : comment corriger ce système sans corriger la production industrielle dans son essence : la production de marchandises dans lesquelles la valeur d’échange a fait disparaître la valeur d’usage ?
    Bonne journée à tous.

  34. Avatar de logique
    logique

    Cela commence a devenir trés interressant, on va bien finir par comprendre a force de chercher a le faire. Merci au traducteur.

  35. Avatar de iGor milhit

    [je livre à l’état brut la partie III, sans les liens hypertexte pour les oeuvres et la citation de Bernanke… merci d’excuser le style…]

    III Le corridor « Wall Street – Washington »

    Bien sûr, les Etats-Unis sont uniques. Et tout comme nous avons l’économie, l’armée et la technologie les plus évoluées du monde, nous avons aussi la meilleure oligarchie.

    Dans un système politique primitif, le pouvoir est transmis par la violence, ou par la menace de la violence: coups d’Etat militaires, milices privées et ainsi de suite. Dans un système moins primitif, plus représentatif des marchés émergents, le pouvoir est transmis par l’argent: corruption, pot de vin et comptes dans des banques offshore. Bien que le lobbying et le financement des campagnes électorales jouent un rôle déterminant dans le système politique américain, la bonne vieille corruption – des enveloppes bourrées de billets de 100 $ – est probablement reléguée au second plan, à l’exception de Jack Abramoff.

    Au lieu de cela, l’industrie financière américaine a renforcé son pouvoir politique en accumulant une sorte de capital culturel – un système de croyance. Il fut un temps, peut-être, où ce qui était bon pour General Motors était bon pour le pays. Ces dernières décennies, l’attitude générale s’en tint à l’idée que ce qui était bon pour Wall Street était bon pour le pays. L’industrie des banques et des titres est devenue l’un des contributeurs principaux des campagnes politiques, mais au plus fort de son influence, elle n’avait pas besoin de s’acheter les faveurs des politiques de la même manière que l’industrie du tabac ou les constructeurs militaires. Plutôt, elle profitait du fait que les initiés de Washington croyaient déjà que d’importantes institutions financières et la libre circulation des capitaux étaient cruciales pour la position américaine dans le monde.

    Un canal d’influence était, bien sûr, le mouvement d’individus entre Wall Street et Washington. Robert Rubin, anciennement président-adjoint de Goldman Sachs, a servi à Washington comme Secrétaire du Trésor sous Clinton, et devint plus tard président du comité exécutif de Citigroup. Henry Paulson, PDG de Goldman Sachs pendant le long boom, devint Secrétaire du Trésor sous George W. Bush. John Snow, le prédécesseur de Paulson, quitta le Trésor pour devenir président de Cerberus Capital Management, un grand private-equity qui compte également Dan Quayle parmi ses dirigeants. Alan Greenspan, en quittant la Réserve fédérale, devint consultant à Pimco, peut-être l’acteur principal sur les marchés d’obligations.

    Ces connections personnelles furent souvent multipliées à des niveaux inférieurs au cours des trois administrations présidentielles passées, renforçant les liens entre Washington et Wall Street. C’est devenu une sorte de tradition pour les employés de Goldman Sachs d’être engagés par le service public lorsqu’ils quittent l’entreprise. Le flot des anciens de Goldman – comprenant Jon Corzine, actuellement gouverneur du New Jersey, ainsi que Rubin et Paulson – n’a pas seulement installé des gens équipés de la vision du monde de Wall Street dans les corridors du pouvoir; il a aussi contribué à établir une image de Goldman (à l’intérieur du périphérique au moins [inside the Beltway]) comme une institution quasiment de l’ordre du service public.

    Wall Street est un lieu très attirant, parfumé par l’odeur du pouvoir. Ses dirigeants croient effectivement qu’ils manœuvrent les leviers qui font tourner le monde. Il est compréhensible qu’un fonctionnaire invité dans leurs salles de conférence, même simplement pour une rencontre, tombe sous leur emprise. Tout au long de mon travail au FMI, j’ai été frappé par l’aisance d’accès des principaux financiers aux dirigeants les plus élevés du gouvernement U.S. et par l’entremêlement des carrières politiques et financières. Je garde un souvenir vivace d’une rencontre au début 2008 – entre des dirigeants politiques d’un certain nombre de pays riches – lors de laquelle l’orateur affirma, à l’approbation générale de l’assistance, que la meilleure préparation pour devenir un président de banque centrale était de travailler dans une banque d’investissement.

    Une génération entière de dirigeants politiques ont été hypnotisés par Wall Street, sont toujours et complètement convaincus que tout ce que disaient les banques était vrai. Les déclarations de Greenspsan en faveur des marchés financiers dérégulés sont bien connus. Mais Greenspan n’était de loin pas le seul. Voici ce que disait en 2006 Ben Bernanke, l’homme qui lui a succédé: « La gestion du risque de marché et du risque de crédit est devenu de plus en plus sophistiqué… Des organisations bancaires de toutes tailles ont fait des avancées significatives ces deux dernières décennies dans leur capacité à mesurer et à gérer les risques. »

    Bien sûr, tout ceci était en majeur partie une illusion. Les régulateurs, les législateurs et les universitaires partaient du principe que les dirigeants de ces banques savaient ce qu’ils faisaient. Avec le recul, on sait que ce n’était pas le cas. La division des produits financiers d’AIG, par exemple, fit 2,5 milliards de profits avant impôt, principalement en vendant des assurances sous-évaluées sur des titres complexes et mal-compris. Souvent décrites comme « ramasser des pièces de monnaie devant un rouleau-compresseur », cette stratégie n’est profitable que lorsque tout va bien, et est catastrophique lorsque ça va mal. Ainsi à l’automne dernier, AIG était engagée à assurer plus de 400 milliards de dollars de ces titres. A cette date, le gouvernement U.S., dans une tentative de sauver l’entreprise, s’est engagée à hauteur de 180 milliards de dollars en investissements et prêts pour couvrir les pertes que le modèle sophistiqué de mesure et de gestion des risques d’AIG avait déclaré virtuellement impossibles.

    Le pouvoir de séduction de Wall Street s’est même (ou spécialement) étendu jusqu’aux professeurs d’économie et de finance habituellement confinés dans les bureaux étroits des universités et dans la quête des prix Nobels. Comme les mathématiques financières devinrent de plus en plus essentielles à la pratique de la finance, les professeurs prirent de plus en plus position comme consultants ou partenaires des institutions financières. Myron Scholes et Robert Merton, deux prix Nobels, en furent peut-être les exemples les plus fameux; ils occupèrent des postes de direction dans le hedge fund Long-Term Capital Management en 1994, avant que le fond s’évanouisse dans un célèbre échec à la fin de la décennie. Mais bien d’autres suivirent le même chemin. Cette migration donna le brevet de la légitimité académique (et l’aura intimidante de la rigueur intellectuelle) au monde bourgeonnant de la haute finance.

    A mesure que de plus en plus de riches faisaient leur argent avec la finance, le culte de celle-ci se répandit dans la culture au sens large. Des œuvres comme « Barbarians at the Gate », « Wall Street », et « Bonfire of the Vanities » – toutes présentées comme des contes initiatiques – ne servirent qu’à augmenter la mystique de Wall Street. Michael Lewis indiqua dans « Portfolio » l’année dernière que lorsqu’il écrivait « Liar’s Poker », un compte-rendu d’initié de l’industrie financière, en 1989, il espérait que le livre pouvait provoquer une indignation envers les horreurs et les excès de Wall Street. A l’inverse il se retrouva « submergé de lettres d’étudiants de l’Etat de l’Ohio qui me demandaient si j’avais d’autres secret à partager… Ils avaient lu mon livre comme un manuel instructif. » Même des criminels de Wall Street, comme Michael Milken et Ivan Boesky, devinrent des idoles. Pour une société qui célèbre l’idée de s’enrichir, il était facile de conclure que l’intérêt du secteur financier était équivalent aux intérêts de la nation – et que les gagnants dans le secteur financier devaient mieux savoir que d’autres ce qui était bon pour l’Amérique et devaient travailler dans le secteur public à Washington. La foi dans la liberté des marchés financiers devint la sagesse partagée – célébrée dans les pages éditoriales du « Wall Street Journal » et au Congrès.

    De cette rencontre entre les campagnes de publicité de la finance, les connections entre personnes et l’idéologie qui se répandit, simplement lors de la dernière décennie, coula une rivière de politiques de dérégulations qui sont, avec le recul, pour le moins surprenantes:

    – l’insistance sur l’ouverture des frontières à la libre circulation des capitaux;

    – le retour en arrière des régulations datant de l’époque de la Grande Dépression, régulations séparant la banque commerciale et la banque d’investissement;

    – une interdiction de la part du Congrès de réguler les credits-default swaps;

    – une augmentation important de l’effet de levier autorisé pour les banques d’investissement;

    – une main légère (devais-je dire invisible?) à la Securities and Exchange Commission dans l’application des régulations;

    – des accords internationaux qui autorisent les banques à mesurer elles-mêmes leur propre risque;

    – et un échec international d’adapter les régulations aux fantastiques développements de l’innovation financière.

    L’état d’esprit qui accompagnait ces mesures à Washington semblait balancer entre la nonchalance et la célébration affichée: la finance libérée de tout lien, pensait-on, allait continuer à propulser l’économie de plus en plus haut.

  36. Avatar de EOMENOS
    EOMENOS

    Il ne faut pas être Grand Clerc pour deviner les liens ancestraux (et à force incestueux) entre l’argent et le pouvoir.

    Les grandes banques ont toujours fait le trottoir sur les riches avenues portant le nom des turpitudes humaines.

    Aujourd’hui les vrais riches ont cassé certains de leurs jouets et laissent au reste du monde, le « plaisir » de les réparer.
    Pour ce faire, les braves gens doivent évidemment d’abord comprendre comment ces jouets fonctionnaient.
    L’article de Simon Johnson y contribue.

    Ce qui en revanche serait beaucoup plus instructif c’est de savoir avec quoi les enfants gâtés du monde jouent aujourd’hui.

    M. Obama, lui doit commencer à avoir une idée. Il devrait en faire part au monde.

  37. Avatar de iGor milhit

    ok un petit café et j’attaque la partie IV: les oligarques américains et la crise financière.

  38. Avatar de Jimmy
    Jimmy

    Quel bel article, je tiens à remercier Monsieur Johnson, Monsieur Jorion et Leclerc et ses traducteurs d’avoir pu relayer cet article. Il a du prendre des risques considérables pour oser sa parution.
    J’espère que son courage sera reconnu par la suite et que ses propos seront utilisés pour comprendre et expliquer cette crise. J’espère également que le nouveau président du FMI possède la même intégrité que son prédécéssseur…

    Le second volet de cette cise risque de débutter un peu plus tôt que prévu après les déclarations d’une iconoclasse pareille…

    Le retour à l’étalon or, c’est un peu cliché mais n’est-ce pas là le seul moyen de faire retrouver l ‘humanité sa prospérité et son équilibre ?
    Pour ceux qui ne le connaissent pas, je vous invite à lire le brillant exposé de Ferdinand Lips.

    http://www.alterinfo.net/Les-guerres-de-l-or_a25311.html

    En attendant vos commentaires

  39. Avatar de Jimmy
    Jimmy

    Merci Mille fois iGor, sincèrement…

  40. Avatar de béber le cancre
    béber le cancre

    Merci pour la traduction.

  41. Avatar de TARTAR
    TARTAR

    Merci à 2Casa ,iGor et tous.

    Ce qui me surprend c’est la surprise de certains.
    Je pensais que le mariage contre nature entre les maitres du monde financier et les sousfifres politiques était connu de tous…
    Quoi que la nature a toujours prévu l’association (euh…commensalité ou parasitisme?) entre le sorcier et le chef, le clergé et la noblesse, les hobereaux et les rois, les industriels et les empereurs.
    Nous avons aimé la collusion entre les financiers et les présidents.
    Maintenant que c’est de notoriété publique nous aimerons la révolte.
    Monsieur Johnson c’est St Paul.

    Nous vivons beatement sur la planète des Shadoks et nous croyions à l’abri des protections sociales du plateau de Ponzi.
    C’est le plateau de Gizeh entouré de plus grosses pyramides.
    Trop de touristes maintenant.

  42. Avatar de logique
    logique

    @jimmy,

    Je pense que cela serait la pire des solutions de revenir a l’étalon OR. Tu n’imagine pas a quelle point cette relique barbare pourrait nous faire régresser. Et pour ceux qui espérent un énorme désordre,se serait bien sur la chose révé. Mais je pense qu’il y a des solutions beaucoup plus simple et moins dangereuse. Le passage a l’OR ne ferait qu’écrouler tout le système et je pense que les pays qui en sont démuni retournerait aux moyen age en moins d’une décenie. Les pays producteur voudrait tous se faire payer en OR et l’inflation serait telle que la guerre pointerait sont nez dans toutes les directions. Vue la masse monaitaire mondial, le kilo d’Or atteindrait des prix astronomique. Et les détenteur de se précieux métal deviendrait des poules entouré de millard de loup. N’oublier pas que chaque détenteurs d’or et inscrit sur le registre des vendeurs et qu’as mon avis, je ne doneerais pas chère de leur peaux si ont devait rétrograder a se point. L’OR serait pire encore que la peste et le choléra pointant leur nez enssemble. En tout cas, si cela devait arriver, je conseillerais a tout le monde de s’armer et d’apprendre a s’en servir. Car se serait surement le meilleur moyen de survivre.

    En tout cas l’articje de Mrs Johnson va dans le sens du post de Chanpignac « la routine a 20:23 hier soir ».

  43. Avatar de iGor milhit

    [la partie IV, toujours à l’état brut… et pour la suite, il va falloir soit attendre un peu soit que quelqu’un prenne le relai, parce que je fatigue là, et ça doit déja se ressentir…. d’autant qu’il y a des passages où je ne suis pas certain de bien comprendre, notamment ces histoires de preferred shares…]

    Les oligarques américains et la crise financière

    L’oligarchie et les politiques gouvernementales qui y contribuèrent ne furent pas les uniques causes de la crise financière qui éclata l’année dernière. Plusieurs autres facteurs y participèrent, comme des emprunts excessifs par les ménages et des conditions de prêts trop laxistes à l’extérieur du domaine habituel de la finance [subprime]. Mais les plus importantes des banques commerciales et d’investissement – ainsi que les hedge funds qui sont à leurs côtés – étaient les plus gros bénéficiaires des bulles jumelles de l’immobilier et des actions de cette décennie, leurs profits se nourrissant d’un volume toujours grandissant de transactions supportés par une base relativement étroite d’actifs physiques réels. A chaque fois qu’un prêt était vendu, empaqueté [avec d’autres comme pour un CDO si je comprends bien], titrisé et revendu, les banques prélevaient leurs frais, et les hedge funds qui achetaient ces titres récoltaient des honoraires toujours plus gros à mesure que leurs fonds augmentaient.

    Parce que tout le monde s’enrichissait et parce que la santé de l’économie nationale dépendait autant de la croissance de l’immobilier et de la finance, personne à Washington n’eu l’intention de s’interroger sur ce qui se passait. Au lieu de cela, Greenspan, le directeur de la Fed et le président Bush affirmaient régulièrement que l’économie était fondamentalement saine et que la croissance fantastique des titres complexes et des credit-defaults swaps étaient des preuves de la bonne santé d’une économie dans laquelle le risque était distribué de la manière la plus sûre.

    En été 2007, des signes de tension commencèrent à apparaître. La bulle avait produit tellement de dette que même un trébuchement économique mineur pouvait causer des problèmes majeurs, et l’augmentation de défaut de paiement du secteur des hypothèques subprimes fut ce hoquet fatal. Depuis lors, le secteur financier et le gouvernement fédéral se sont comportés exactement comme on pouvait s’y attendre à la lumière des crises passées des marchés émergents.

    Depuis, les princes du monde financier ont été bien sûr décrédibilisés en tant que leaders et stratèges – du moins aux yeux de la plupart des Américains. Mais alors que les mois passèrent, les élites financières ont continué à considérer que leur position de chouchous de l’économie est acquise, malgré le désastre qu’ils ont causé.

    Stanley O’Neal, le PDG de Merrill Lynch, a fortement engagé son entreprise dans le marché des MBS lors de son point haut en 2005 et 2006; en octobre 2007, il reconnu: « la vérité est que nous – enfin je – nous nous sommes trompés en nous surexposant aux subprimes, et que nous avons souffert de l’absence de liquidité de ce marché. Personne n’est plus déçu que moi de ce résultat. » O’Neal emporta avec lui un bonus de 14 millions de $ en 2006; en 2007 il quitta Merrill Lynch avec un parachute doré de 162 millions de $, même si celui-ci a bien fondu depuis.

    En octobre, John Tain, le dernier PDG de Merrill Lynch, a poussé son équipe de directeurs à lui accorder un bonus de 30 millions de $ ou plus, puis a réduit sa demande à 10 millions de $ en décembre; il retira sa requête face à un incendie de protestations, seulement après que l’affaire fut dévoilée dans le Wall Street Journal. Merrill Lynch dans son ensemble ne faisait pas mieux: le paiement des bonus, 4 milliards de dollars au total, fut avancé en décembre, vraisemblablement afin d’éviter la possibilité que ces bonus soient réduits par Bank of America qui devint propriétaire de Merrill dès le premier janvier. Wall Street versa 18 milliards de bonus de fin d’année l’année dernière à ses employés new-yorkais, après que le gouvernement déboursa 243 milliards de $ au titre d’aide d’urgence au secteur financier.

    Lors d’une panique financière, le gouvernement doit répondre à la fois rapidement et la dernière vigueur. La racine du problème est l’incertitude – dans notre cas l’incertitude sur le fait que les banques disposent de suffisamment d’actifs pour couvrir leur passif. Des demi-mesures combinées avec le recours à la pensée magique et une attitude passive ne peut pas surmonter cette incertitude. Et plus la réaction tarde, plus cette incertitude bloque le crédit, sape la confiance des consommateurs et fige l’économie – rendant le problème de plus en plus difficile à résoudre. Et bien, les caractéristiques principales de la réaction du gouvernement à la crise financière ont été le retard, le manque de transparence, et l’absence de volonté de déranger le secteur financier.

    Jusqu’ici la réponse du gouvernement peut le mieux être décrite comme « la politique du maché » [deal]: lorsqu’une institution financière majeur se trouve en difficulté, le Département du Trésor et la Réserve fédérale concoctent un sauvetage pendant le week-end et annonce le lundi que tout est en ordre. En mars 2008, Bear Stearns a été vendu à JP Morgan Chase d’une manière qui ressemblait pour beaucoup être un cadeau pour JP Morgan. (Jamie Dimon, le PDG de JP Morgan, fait partie de l’équipe de directeurs de la Réserve fédérale de New-York qui, avec le Département du Trésor, a arrangé la transaction.) En septembre, nous avons vu Merrill Lynch être vendue à Bank of America, le premier sauvetage d’AIG, ainsi que la saisie et vente immédiate de Washington Mutual à JP Morgan – le tout arrangé par le gouvernement. En octobre, neuf grandes banques furent recapitalisées le même jour en huis-clos à Washington. Et suivit les sauvetages supplémentaires de Citigroup, AIG, Bank of Amercia, encore Citigroup et encore AIG.

    Certains de ces arrangements ont peut-être été des réponses raisonnables à la situation immédiate. Mais il n’a jamais été clair (et ne l’est toujours pas) quelle combinaison d’intérêts furent servis, et comment. Le Trésor et la Fed n’agirent en accord avec aucun principe énoncé publiquement, mais élaborèrent simplement la transaction et déclarèrent que c’était ce que l’on pouvait faire de mieux étant donné les circonstances. Il s’agissait de marchés fait en fin de nuit, dans l’arrière salle, tout simplement.

    Tout au long de la crise, le gouvernement a fait particulièrement attention à ne pas déranger les intérêts des institutions financières, ou de ne pas mettre en question les bases du système qui nous a amené là. En septembre 2008, Henry Paulson demanda au Congrès 700 milliards de $ afin d’acheter des actifs toxiques aux banques, sans conditions et sans regard judiciaire sur ses décisions d’achat. Plusieurs observateurs suspectèrent que l’objectif était d’acheter à un prix surévalué ces actifs et de cette manière débarrasser les banques du problème – et en effet, c’est le seul effet positif que l’achat d’actifs toxiques eurent provoqué. Peut-être parce qu’il n’était pas possible de faire politiquement admettre un subventionnement si évident, ce plan a été suspendu.

    En lieu et place, l’argent a été utilisé pour recapitalisé les banques, pour acheté des parts dans des conditions qui furent grossièrement favorables aux banques elles-mêmes. A mesure que la crise s’approfondissait et que les institutions financières eurent besoin de plus d’aide, le gouvernement s’est montré de plus en plus créatif pour trouver des moyens complexes d’apporter des subventions aux banques afin que le public ne parviennent pas à comprendre. Le premier sauvetage d’AIG, dont les termes étaient relativement bons pour le contribuable, a été complété par trois autres sauvetages dont les conditions étaient bien plus favorables pour AIG. Le deuxième sauvetage de Citigroup et celui de Bank of America comprirent des garanties d’actifs complexes qui offraient des assurances aux banques à des taux bien inférieurs à ceux du marché. Le troisième sauvetage de Citigroup, fin février, convertit des actions privilégiées du gouvernement en actions normales à un prix bien plus élevé que le prix du marché – un subventionnement que même la plupart des lecteurs du Wall Street Journal n’auraient pas remarqué à la première lecture. Et les actions privilégiées convertibles que le Trésor achètera dans le cadre du nouveau Plan de Stabilité Financière donne l’option de conversion (et donc l’avantage [and thus the upside] aux banques, et non pas au gouvernement.

    Le dernier plan – qui a probablement pour objectif d’apporter des prêts bon marchés aux hedge funds et autres afin qu’ils puissent acheter des actifs toxiques à des prix relativement élevés – a été énormément influencé par le secteur financier, et le Trésor ne l’a pas caché. Comme Neel Kashkari, un dirigeant important du Trésor à la fois sous Henry Paulson et Tim Geithner (et un ancien de Goldman), déclara au Congrès en mars, « Nous avons reçus des propositions non sollicitées de la part de personnes du secteur privé disant: « Nous avons des réserves de capital; nous désirons acquérir des actifs des banques en difficultés. » » Et le plan permet de faire exactement cela: « En mariant le capital du gouvernement – le capital du contribuable – au capital du secteur privé et en apportant le financement, vous pouvez rendre ces investisseurs capables d’acheter ses actifs à un prix intéressant pour les investisseurs et intéressant pour les banques. » Kashkari n’a pas préciser si ce prix était intéressant pour le troisième groupe concerné: les contribuables.

    Même en laissant de côté la justice envers les contribuables, l’approche du gant de velours du gouvernement envers les banques est profondément inquiétant, pour une simple raison: ça ne va pas forcer le secteur financier à changer de comportement, habitué qu’il est à faire des affaires selon ses propres exigences, à une période où ce comportement doit changer. Comme un important dirigeant de banque anonyme l’a dit au New York Times l’automne dernier, « Peu importe combien Hank Paulson nous donne, personne ne va prêter un centime avant que l’économie se rétablisse. » Et voilà le nœud: l’économie ne peut se redresser sans que les banques soient à nouveau saines et désireuses de prêter.

  44. Avatar de Cécile
    Cécile

    un grand merci aux traducteurs

    à TARTAR, soit, mais …. il importe de décrire, ( en vue de prescrire…)  » le grand polypourri »

  45. Avatar de cfeard
    cfeard

    J’avais commencé moi aussi de mon côté, avant de m’apercevoir que 2casa m’avait ‘coiffé sur le poteau’, j’ai donc abandonné alors que j’hésitais sur la traduction de ‘assumption of private debt obligations’.
    Chapeau à 2casa.
    Après réflexion (la nuit porte conseil), je décide de livrer mon méfait. Deux seuls points dans l’œuvre de 2casa ont attiré mon attention : la traduction de ‘rollover’ (je penche pour ré-échelonnement) et celle de ‘get carried away’ (s’emballèrent – et non ‘furent poussés dehors’).

    Le krach a mis a nu bien des vérités déplaisantes sur les US. L’une des plus alarmantes, dit un ancien économiste en chef du Fonds Monétaire International, est que l’industrie financière a pris sous sa coupe notre gouvernement – une situation qui s’apparente davantage à ce qui arrive avec des pays émergents, et est au cœur de bien des crises dans ces pays. Si les équipes du FMI pouvaient parler librement sur les États-Unis, elles nous diraient ce qu’elles disent à tous les pays dans cette situation: la reprise échouera à moins de briser l’oligarchie financière qui bloque des réformes essentielles. Et si nous voulons empêcher une vrai dépression, le temps va bientôt nous manquer.

    Le coup de force tranquille
    S’il y a une chose que vous apprenez rapidement quand vous travaillez au Fonds Monétaire International, c’est que personne n’est vraiment content de vous voir. Typiquement, les ‘clients’ ne viennent à vous qu’après que les capitaux privés les ont abandonnés, après que leurs partenaires des groupements régionaux de commerce ont failli dans leurs efforts pour les sauver, après que les tentatives en dernier ressort d’emprunter auprès d’amis puissants tels que la Chine ou l’Union Européenne ont échoué. Vous n’êtes jamais en tête de liste sur le carnet de bal des demoiselles.

    La raison, c’est que le FMI s’est fait une spécialité de dire à ses clients ce qu’ils ne veulent pas entendre. J’aurais dû le savoir; j’ai exigé des changements pénibles de beaucoup d’autorités étrangères lorsque j’y étais en tant qu’économiste en chef, en 2007 et 2008. Et j’ai ressenti les effets des pressions du FMI, au moins indirectement, quand que je travaillais avec des gouvernements de l’Europe de l’est alors qu’il luttaient avec les difficultés après 1989, et avec le secteur privé d’Asie et d’Amérique Latine pendant les crises de la fin des années 1990 et du début des années 2000. A cette époque, j’ai vu de moi-même et de près le flux incessant des personnages officiels – d’Ukraine, de Russie, de Thaïlande, d’Indonésie, de Corée du Sud et d’ailleurs – aller d’un pas lourd vers le Fonds alors que les temps étaient durs et que toute alternative avait échoué.

    Aucune crise ne ressemble à une autre, bien sûr. L’Ukraine faisait face à l’hyperinflation en 1994, la Russie avait un besoin d’aide désespéré quand son plan de refinancement(ré-échelonnement) de la dette à court terme a explosé à l’été 1998; la roupie indonésienne a plongé en 1997, mettant pratiquement à plat l’économie des entreprises; cette même année, le miracle économique de la Corée du Sud s’arrêta brusquement après 30 ans lorsque les banques étrangères refusèrent d’accorder de nouveaux crédits.

    Mais je dois vous dire que, pour les représentants du FMI, toutes ces crises avaient quelque chose en commun: elles étaient toutes aussi déprimantes. Il est clair que chacun des pays avait besoin d’un prêt, mais au-delà de cela, chacun devait également procéder à des réformes importantes pour que le prêt servît à quelque chose. Dans presque tous les cas, les pays concernés doivent apprendre à vivre avec leurs moyens après une période d’excès – il faut augmenter les exportations et réduire les importations – et le but est d’obtenir ces résultats sans aboutir à la plus horrible des récessions. C’est le rôle des économistes du Fonds de consacrer du temps à élaborer des stratégies et des politiques de redressement – budget, financement, etc. – qui sont à même de venir à bout de cette crise. Mais la solution économique est rarement difficile à mettre au point.

    Non, la difficulté majeure pour les cadres du Fonds, et l’obstacle principal pour le redressement, c’est presque toujours les décisions politiques qui doivent être prises dans les pays en crise.

    Typiquement, ces pays sont dans cette situation économique désespérée pour une simple et unique raison – leurs élites au pouvoir ont été trop ambitieuses et ont pris trop de risques alors que les choses allaient bien. Les gouvernements des pays émergents et leurs alliés dans le secteur privé forment en général une oligarchie très soudée – la plupart du temps bien intentionnée – dirigeant le pays un peu comme une entreprise cherchant à maximiser le profit et dont ils seraient les actionnaires. Quand un pays comme l’Indonésie ou la Corée du Sud ou la Russie est en pleine croissance, les ambitions de ses capitaines d’industrie suivent la même pente. En tant que maîtres de leur mini-univers, ces personnes font des investissements qui profitent clairement à l’économie en général, mais leurs paris deviennent de plus en plus gros et risqués. Ils pensent – la plupart du temps à bon escient – que leurs relations politiques vont leur permettre de reporter sur le gouvernement les problèmes importants qui pourraient survenir.

    En Russie, par exemple, le secteur privé connaît actuellement de sérieuses difficultés parce qu’il a emprunté au cours des cinq dernières années au moins 490 milliards de dollars auprès des banques et des investisseurs étrangers, pensant que le secteur énergétique du pays pourrait supporter une croissance continue de la consommation dans l’économie toute entière. Lorsque les oligarques russes ont déboursé ces capitaux, acquérant d’autres entreprises et s’engageant dans des plans d’investissement ambitieux créateurs d’emplois, leur importance vis-à-vis de l’élite politique s’est accrue. Des appuis politiques plus importants signifiaient l’accès à des contrats plus lucratifs, des réductions d’impôts et des subventions plus élevées. Et les investisseurs étrangers n’auraient pu être plus satisfaits. Toutes choses égales par ailleurs, ils préfèrent prêter leur argent à des gens qui ont l’appui implicite de leur gouvernement, même si cet appui a un léger relent de corruption.

    Mais les oligarques des pays émergents s’emballent toujours. Ils gaspillent leur argent et construisent des empires économiques monstrueux sur des montagnes de dettes. Les banques nationales, quelques fois sous la pression du gouvernement, sont trop heureuses d’accroître leurs lignes de crédit pour les élites et ceux qui en dépendent. Mais le surendettement connaît toujours une fin tragique, que ce soit pour un individu, une entreprise ou un pays. Tôt ou tard les conditions du crédit se durcissent et personne ne veut plus vous prêter à des conditions qui seraient acceptables.

    La spirale qui suit est particulièrement vertigineuse. D’énormes entreprises vacillent au bord du défaut de paiement et les banques nationales qui leur ont prêté de l’argent s’effondrent. Ce qui hier encore s’appelait ‘partenariat public-privé’ est rebaptisé ‘capitalisme de copinage’. Le crédit venant à manquer, la paralysie économique s’ensuit, et les conditions ne font qu’empirer de jour en jour. Le gouvernement est forcé de réduire ses réserves en devises étrangères pour payer les importations, servir la dette et couvrir les pertes privées. Un jour ou l’autre, ces réserves s’épuiseront. Si le pays n’arrive pas à se redresser avant que cela n’arrive, il sera en situation de faillite et sera considéré comme un paria économique. Dans sa course pour arrêter l’hémorragie, le gouvernement devra liquider certains des champions nationaux – maintenant pissant du cash – et généralement restructurer un secteur bancaire totalement déséquilibré. En d’autres mots, il devra faire suivre une cure d’amaigrissement au moins à certains de ses oligarques.

    Mais affamer les oligarques n’est pas exactement la stratégie poursuivie par les gouvernements des pays émergents. Bien au contraire: au début de la crise, les oligarques sont les premiers à recevoir des aides particulières du gouvernement, tels que l’accès préférentiel aux devises étrangères, ou peut-être une gentille suspension d’impôts, ou – et ça c’est une technique de subvention qu’affectionne particulièrement le Kremlin –

  46. Avatar de iGor milhit

    je constate qu’on est bientôt au bout… si 2casa est là il en fera qu’une bouchée et avec brillo! 🙂
    de toute manière je m’y remets bientôt et on va pouvoir mettre tout ça ensemble
    si quelqu’un veut améliorer les parties que j’ai traduit, j’en serai très heureux!

  47. Avatar de Jimmy
    Jimmy

    @ logique

    Je pense que tu as raison, et que ce n’est pas une bonne solution pour le court terme. Par contre, tant que les banques auront le pouvoir de créer de l’argent ex-nihilo en amont du système économique, il aura des personnes pour arroser leur jardin avec…

    Sur le long terme, le système d’étalon-or semble peu approprié à notre société étant donné les besoins vitaux en crédit (en investissement pour surmonter les défis ultérieurs, notamment écologiques et démographiques). Cependant, le système change-or me semble réutilisable, et constitue un frein naturel à la création monétaire de part la rareté de l’or…
    Je pense que ce n’est pas pour rien que les banques centrales basent encore d’1/3 de leur réserve en or, et que la vente d’or est limitée : c’est parcequ’elles ont toujours su qu’au fond d’elles, le système de réserve fractionnaire était beaucoup trop dangereux pour être mis au main des hommes.

    Quand aux Pays dont l’arrogance leur a fait croire que du papier (dollar, titres de créances) pouvait servir de contrepartie à leur monnaie, avec laquelle ils achètent le travail réel de millions de peronnes, indéfiniment, ils ne peuvent que mériter de longues années de purge.

  48. Avatar de 2casa
    2casa

    @ Igor

    Joli boulot !

    Part V : L’issue

    Si on observe seulement la crise financière (en laissant de côté certains des problèmes de l’économie en général) nous affrontons deux difficultés majeures et intrinsèquement liées. La première est un secteur bancaire désespérément malade qui menace d’étouffer toute reprise naissante qui pourrait être générée par le stimulus fiscal. La seconde est un équilibre des pouvoirs politiques qui donne un droit de véto au secteur financier sur les politiques publiques, même lorsque ce secteur perd le soutien populaire.

    Les grandes banques, semble-t-il, n’ont cessé de gagner en pouvoir politique depuis le début de la crise. Et ce n’est guère surprenant. Avec un système financier si fragile, les dégâts que pourrait causer la faillite d’une des principales banques – Lehman était de taille modeste comparée à Citygroup ou BoA – sont bien plus importants qu’en temps normal. Les banques ont ainsi exploité cette peur alors qu’elles tiraient de Washington des accords favorables pour elles. BoA a ainsi obtenu son deuxième « plan de sauvetage » (« bailout ») en janvier après avoir averti le gouvernement qu’elle ne pourrait peut-être pas soutenir l’acquisition de Merrill Lynch, une perspective que le Trésor ne veut même pas envisager.

    Les défis que les USA affrontent sont des territoires familiers pour les membres du FMI. Si vous cachiez le nom du pays et ne montriez que les chiffres, il ne fait aucun doute que n’importe quel membre (« old hand » ?) du FMI vous dirait : nationalisez les banques et démantelez-les autant que nécessaire.

    D’une certaine manière, en fait, le gouvernement a déjà pris le contrôle du système bancaire. Il a garanti les engagements (« liabilities ») des plus grosses banques et il reste leur seule source plausible de capitaux aujourd’hui. Pendant ce temps, la réserve fédérale a repris le rôle majeur de fournisseur de crédit à l’économie – la fonction que le secteur bancaire privé est supposée tenir, et qu’il ne fait pas. Mais il y a des limites à ce que la Fed peut faire toute seule ; consommateurs et entreprises restent dépendants des banques « that lack the balance sheets and the incentives » (?) pour octroyer les prêts dont l’économie a besoin et le gouvernement n’a guère de prises sur qui dirige les banques ni sur ce qu’ils font.

    A la racine du problème des banques on trouve les pertes énormes qu’elles ont indubitablement subies sur leurs portefeuilles d’assurances et de prêts. Mais elles ne veulent pas reconnaître l’étendue complète de leurs pertes parce qu’elles devraient alors s’afficher insolvables. Alors, elles minimisent le problème (« talk down ») et demandent des aides insuffisantes pour les assainir (et une fois encore elles ne peuvent révéler l’étendue de l’aide dont elles auraient besoin pour cela), mais qui leur permettent de tenir encore un peu. Ce comportement est délétère : les banques « malades » ne prêtent pas (accumulant l’argent pour reconstituer des réserves) ou elles font des paris désespérés sur des prêts à haut risque ou des investissements qui pourraient rapporter gros, mais qui, probablement ne paieront pas du tout. Dans l’un ou l’autre cas, l’économie continue à souffrir, et par là même, les actifs des banques continuent à se détériorer – générant ainsi un cercle vicieux destructeur.

    (Désolé le devoir m’appelle. Igor si tu le souhaites je peux terminer cette partie dans l’après-midi et tu te charges de la dernière partie ? Courage !)

  49. Avatar de 2casa
    2casa

    Merci @ cfeard pour la correction des contresens. Je traduis un peu à la volée et sans dico autant dire que pour les idiomatismes et le vocabulaire technique c’est pas top. Mais, en groupe, on devrait pouvoir obtenir qq chose de bien. Désolé pour le manque d’organisation : j’attends vos commentaires avant de poursuivre cet aprèm sur cette avant dernière partie.

  50. Avatar de iGor milhit

    @ 2casa
    ok je commence la dernière partie tout bientôt de suite 🙂 et si je suis en avance ben je terminerai ce que tu as commencé… et après il faudra mettre tout cela ensemble et épuré un peu.

    dire que les cerisiers sont en fleurs! bientôt le temps des cerises quoi 😀

  51. Avatar de zoupic

    un grand merci aux traducteurs pour leur travail rapide et leur bonne volonté!
    Qu’ils dorment en paix ce soir!

  52. Avatar de Dominique B
    Dominique B

    Bonjour,
    Petits veinards…
    merci et bon ouvrage.

  53. Avatar de kerema29
    kerema29

    Un grand merci à tous les traducteurs pour ces informations capitales; effectivement , il faut largement diffuser ce texte à tout public et en particulier vers nos représentants politiques qui sont si peu innovants.
    Si je comprends bien, nous ne sommes pas sorti de l’auberge et DSK non plus….

  54. Avatar de iGor milhit

    [la partie finale, la VI donc… en attendant que la V soit terminée]

    VI : Deux chemins

    Pour paraphraser Joseph Schumpeter, l’économiste du début du 20e siècle, tout le monde a des élites; la chose important est d’en changer de temps à autres. Si les États-Unis étaient simplement un autre pays qui viendrait au FMI le chapeau à la main, je serais passablement optimiste quant à son futur. La plupart des crises des marchés émergents que j’ai mentionné se sont terminées relativement rapidement et débouchèrent, pour la partie principale, sur des rétablissements relativement solides. Mais, hélas, c’est là où nous devons quitter notre analogie entre les États-Unis et les marchés émergents. Les pays des marchés émergents n’ont qu’une prise précaire sur la richesse, et sont globalement faibles. Lorsqu’ils sont en difficulté, ils ne disposent littéralement plus d’argent – ou au moins ne disposent plus de devises étrangères sans lesquelles ils ne peuvent survivre. Ils n’ont pas le choix et doivent prendre des décisions difficiles; dans la dernière extrémité, une action déterminante fera partie du cadeau, sera comprise dans le prix [baked into the cake]. Mais, évidemment, les États-Unis sont la nation la plus puissante du monde, démesurément riche, et jouissant de ce privilège exorbitant de pouvoir payer ses dettes envers l’étranger dans sa propre monnaie, qu’elle [cette nation] peut imprimer. En conséquence, elle pourrait bien continuer encore longtemps – comme le Japon l’a fait durant la décennie perdue – de ne pas avoir le courage de faire ce qu’elle a besoin de faire, et de ne jamais vraiment se rétablir. Une franche rupture avec le passé – qui signifie la prise de contrôle et l’assainissement des grandes banques – ne semble pas être au programme actuellement. Et personne au FMI peut forcer les États-Unis à le faire.

    A mon sens, les Etats-Unis ont devant eux deux scénarios probables. Le premier est constitué d’arrangements banque après banque et d’un continuel roulement de sauvetages (répétés), comme ceux qu’on a pu voir en février pour Citigroup et AIG. L’administration tentera d’y parvenir tant bien que mal, et la confusion règnera.

    Boris Fyodorov, ancien ministre des finances de la Russie, a lutté pendant la majeur partie de ces 2 dernières décennies contre les oligarques, contre la corruption et l’abus d’autorité dans toutes ses formes. Il disait volontiers que la confusion et le chaos allaient dans le sens des intérêts des puissants – leur permettant d’agir légalement ou illégalement, en tout impunité. Lorsque l’inflation est élevée, qui peut encore dire ce qu’un morceau de propriété vaut réellement? Lorsque que le système de crédit repose sur des arrangements gouvernementaux byzantins et des transactions d’arrière-salle, comment savoir si vous n’êtes pas escroqué?

    Notre futur peut être celui où un tumulte permanent rend possible le pillage du système financier, et nous parlons de plus en plus de la manière dont nos oligarques devinrent des bandits et du fait que l’économie ne peut simplement pas revenir à la normale.

    Le deuxième scénario commence de manière plus lugubre et pourrait finir de même. Mais au moins il apporte un peu d’espoir et nous serions secoués jusqu’à sortir de notre torpeur. Voilà comment il se déroule: l’économie mondiale continue de se détériorer, le système bancaire d’Europe centrale et de l’est s’écroule, et – parce que les banques d’Europe de l’est sont pour la plupart propriétés de banques d’Europe de l’ouest – des craintes légitimes d’insolvabilité de gouvernement se diffuse dans tout le Continent. Les créanciers sont encore un peu plus mis à mal et la confiance s’éloigne encore plus. Les économies asiatiques qui exportent des biens manufacturés sont dévastées, et les producteurs de matières premières d’Amérique latine et d’Afrique ne s’en sortent pas mieux. Une aggravation de l’environnement global met l’économie américaine, déjà chancelante, sur ses deux genoux. Les taux de croissance utilisés par l’administration pour le budget en cours sont de plus en plus considérés comme irréalistes, et les « scénarios de stress » souriants que le Trésor américain utilise actuellement pour évaluer les bilans des banques deviennent la source de grand embarras.

    Sous une pression de cette nature, et devant la perspective d’un écroulement national et mondial, les esprits pourraient se montrer plus attentifs.

    La représentation communément partagée parmi l’élite est toujours que la crise actuelle « ne peut pas être aussi mauvaise que lors de la Grande Dépression ». Cette vision est fausse. Ce à quoi nous sommes confrontés pourrait, en réalité, être pire que la Grande Dépression – parce que le monde est aujourd’hui bien plus interconnecté et parce que le secteur bancaire est tellement énorme. Nous faisons face à une récession synchronisée dans presque tous les pays, une confiance affaiblie parmi les individus et les entreprises, et des problèmes majeurs pour les finances gouvernementales. Si notre leadership se réveille et intègre toutes les conséquences potentielles de cette situation, alors nous verrons peut-être des actions importantes qui seront prise sur le système bancaire et la vieille élite brisée. Espérons alors qu’il ne soit pas trop tard.

  55. Avatar de Paul Jorion

    L’un d’entre vous veut-il s’occuper de mettre tout ça ensemble, en tirant parti des éclairs de génie des uns et des autres ? Répondez-moi ici plutôt que par e-mail. Une fois que nous aurons affiché un texte définitif, j’éliminerai des commentaires toute la dimension « correspondance ».

  56. Avatar de iGor milhit

    @ paul jorion
    je suis en mode « pause » pour un petit moment là… 🙂

  57. Avatar de cfeard
    cfeard

    @2casa

    autre petite remarque subsidiaire:
    eventually -> un jour ou l’autre – ou quelque chose d’équivalent.
    (not a weak probability of occurrence – éventuellement)
    Mais cela ne retire rien à votre mérite et à mon respect auquel j’associe évidemment Pierre-Yves D. et iGor milhit.

  58. Avatar de Giraudon
    Giraudon

    Magnifique ce que vous faites!

  59. Avatar de Champignac
    Champignac

    @kerema29 & autres

    Diffuser largement? Hum, je vous rappelle, quand même, l’existence de ceci:

    « The Atlantic Monthly and the Atlantic web site, and all other text and images contained on the Atlantic web site and in The Atlantic Monthly’s products are protected by United States trademark and copyright law and other applicable law and are the property of The Atlantic Monthly, except as otherwise identified. »

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    xxx xxx xxx

    # Modify, adapt, sub-license, translate, sell, reverse engineer, decompile or disassemble any portion of the Atlantic web site; (NDLR: notez le « translate »)

    # Remove any copyright, trademark or other proprietary rights notices contained in the Atlantic web site;  »

    Un détail? 🙂

  60. Avatar de Paul Jorion

    Je vais leur écrire.

  61. Avatar de iGor milhit

    @ paul jorion
    je suis en train de tenter de mettre le tout ensemble (sans oublier qu’il manque encore un morceau de la partie V).

  62. Avatar de Patrick Reymond

    A mon avis, il y a aussi une variante : « le retour de Mad Max (imilien de Robespierre).  »
    L’enterrement d’une élite, soit venue d’en haut, soit venue d’en bas. D’en bas, c’est beaucoup plus « juteux ».

  63. Avatar de 2casa
    2casa

    Part V (suite) : L’issue

    Pour briser ce cercle vicieux, le gouvernement doit contraindre les banques à reconnaître l’échelle réelle de leurs problèmes. Pour autant que le FMI le comprenne (et le gvt US lui-même a insisté là-dessus à propos des marchés émergents par le passé) la manière la plus directe de procéder est encore la nationalisation. Au contraire, le Trésor essaie de négocier le financement banque par banque et se comporte comme si les banques détenaient tous les atouts – contournant (torturant) les termes de chaque accord pour minimiser la prise de participation (i.e. droit de regard, de vote) tout en dénonçant l’influence du gouvernement sur les orientations stratégiques des banques ou leurs opérations. Dans ces conditions, nettoyer le bilan des banques est impossible.

    La nationalisation n’impliquerait nullement une propriété définitive de l’Etat. Le conseil du FMI serait alors, principalement : calibrer le process habituel de la FDIC (Federal Deposit Insurance Corporation). Une intervention de la FDIC est basiquement une procédure de faillite des banques gérée par le gouvernement. Cela autoriserait le gvt à écarter sans ménagement les actionnaires des banques, de remplacer les directions défaillantes, nettoyer les bilans, et enfin de revendre les banques au secteur privé. L’avantage principal étant une saisie immédiate de la mesure du problème afin de le résoudre avant qu’il ne s’aggrave.

    Le gvt doit inspecter les bilans et déterminer quelles banques ne survivraient pas à une récession sévère. Ces banques devraient alors faire un choix : réévaluer leurs actifs à leur valeur réelle et lever des fonds privés dans les 30 jours, ou passer aux mains du gvt. Le gvt devant alors réévaluer (passer par profits et pertes ?) les actifs toxiques des banques sous administration judiciaire – juste reconnaissance de la réalité – et transférer ces actifs à une structure gouvernementale indépendante, qui tentera de récupérer (valoriser) tout ce qui pourra l’être pour le contribuable (comme le fit le RST (Resolution Trust Corporation) après la débâcle des caisses d’épargne dans les années 80). Les derniers vestiges de ces banques, nettoyés et aptes à prêter en toute sécurité, et par là à nouveau dignes de la confiance des autres investisseurs et prêteurs – pourraient être vendus.

    Nettoyer les « méga-banques » sera complexe. Et cela coûtera cher aux contribuables ; si on se réfère aux derniers chiffres du FMI, le nettoyage du système bancaire coûtera probablement près de 1.5 trillion de dollars (10% du PIB) à long terme. Mais seule une action décisive du gvt – mettant au jour la pleine mesure du pourrissement financier et restaurant de manière vérifiable la santé d’un « lot » de banques – pourra guérir le secteur financier dans son ensemble.

    Cela peut sembler être un traitement de cheval. Mais, en fait, bien que nécessaire, c’est insuffisant. Le second problème que doivent affronter les USA – le pouvoir de l’oligarchie – est au moins aussi important que la crise actuelle du crédit. Un conseil du FMI sur ce point serait une fois encore très simple : briser l’oligarchie (Yes, yes, yes, yes !)

    Des institutions surdimensionnées influence les politiques publiques de manière disproportionnée ; les principales banques que nous connaissons aujourd’hui tirent l’essentiel de leur puissance (pouvoir) du fait qu’elles sont « too big to fail ». La nationalisation et la re-privatisation ne changera pas cela ; [de même que le remplacement des dirigeants qui nous ont conduits à la crise bien que juste et sensé, ne serait au final, que la transformation d’un groupe de puissants dirigeants pour un autre et un changement des noms de l’oligarchie. Si ici qqu’un a qq chose à proposer je suis preneur]

    Idéalement, les principales banques devraient être vendues en pièces détachées de taille moyenne, divisées de manière régionale ou selon leurs activités. Ou cela s’avérerait impossible – si nous voulions vendre les banques rapidement – elles pourraient être vendues entières, mais à la condition d’être rapidement démantelées. Les banques restant aux mains du privé devant être sujettes à une limitation de leur taille.

    Ceci peut apparaître comme une étape brutale et arbitraire, mais c’est la meilleure manière de limiter le pouvoir d’institutions privées dans un secteur essentiel à l’économie toute entière. Bien sûr, certains se plaindront des coûts de fonctionnement d’un système bancaire plus fragmenté (morcelé), et ces coûts sont réels. Mais c’est également le cas des coûts quand une banque est « trop grosse pour faillir » – une arme d’auto-destruction massive – et qu’elle se désintègre. Quoi que ce soit de trop gros pour faillir est trop gros pour exister.

    Pour s’assurer un démantèlement systématique des banques et prévenir une éventuelle résurgence de ces dangereux béhémoths, nous avons également besoin d’actualiser notre législation anti-trust. Des lois mises en place il y a plus de cent ans pour combattre des monopoles industriels ne sont plus adaptées aux problèmes que nous rencontrons aujourd’hui. Le problème du secteur financier aujourd’hui n’est plus qu’une entreprise donnée détiennent suffisamment de part de marché pour influencer les prix ; c’est qu’une seule entreprise ou un petit réseau d’entreprises interconnectées, puissent, en cas de faillite, ébranler toute l’économie. Les stimuli fiscaux de l’administration Obama rappellent FDR, mais ce que nous avons à imiter ici c’est le démantèlement massif des trusts de Teddy Roosevelt.

    @ Igor encore 15 mn et c’est bon…

  64. Avatar de logique
    logique

    Je tiens a faire une petite remarque sur le contenu du texte de Simon Johnson,

    Aux debut, il explique que les financiers controle l’amérique économique et politique. Ont savait deja que l’argent et le pouvoir était trés lié.

    Par contre a la fin, son scénario 2 consiste encore une fois a faire reporter le risque d’éffondrement sur l’europe,via l’europe de l’est. Je ne comprends pas pourquoi les américains voudrait il que se soit chez nous que les prolèmes soient les plus importants.

    Donc malgrés, la brillante descritption que nous fait Mrs Johnson sur l’état politique des USA (état banquaire il semberait plus que politique, voire un beau panier de crabe financier et politique). Le fait de finir sont sujet par la possible déroute des européen me laisse un peut réticent quant a ces inttentions. A vrai dire se type a aussi fait partie du panier de crabe qu’il nous a si brillement décrit.

    Je ne suis pas adepte des complots, mais il faut encore une fois relire machiavel, mais je pense que se qu’as fait se monsieur reste dans la statégie US.

    Scénario 1 : C’est le G20, donc l’acceptation des méthodes US
    Scénario 2 : C’est la faillite en europe.

    Je pense que réduire une crise de cette ampleur a 2 scénario c’est un peut limite quand même, voir plutot propagandiste (désolé pour le « iste »).

    se qui m’inquiète dans tout cela c’est ce constant rappel a la faiblesse des banques européenne, certes certaines doivent être dans un état critiques, mais surement pas plus qu’aux état unis. Et si nous somme mal en piont nos cher américains n’y sont surement pas pour rien.

    Scénario 3: La BCE liquide toutes ces réserves de dollar entrainant d’autres pays a la suivre. Ensuite une fois que cela a bien chuté ont les rachetent 30% moins cher. Ont fait 2 ou 3 fois de se petit manége. Et ensuite ont discute pour savoir si ont arrète ou si ont continue.

    en tout cas si l’inttention de promulger cette article est possible. Je propose aux moins d’enlever l’histoire des scénarios. Gardont un peut d’objectivité et évitons la propagande.

  65. Avatar de iGor milhit

    @ 2casa
    merci bcp!

  66. Avatar de 2casa
    2casa

    Limiter les rémunérations des dirigeants, malgré des relents de populisme, pourrait aider à restaurer l’équilibre des pouvoirs politiques et éviter l’émergence d’une nouvelle oligarchie. L’attrait principal de Wall Street – pour les gens qui y travaillent et pour les officiels du gvt trop heureux de se « bask » (???) in its reflected glory (se glorifier de sa réussite ???) – ayant bien entendu été les montants faramineux qui pouvaient y être gagnés. Limiter ces montants permettrait évidemment de réduire la voilure du secteur financier et de la rendre plus semblable aux autres secteurs de l’industrie.

    Quoi qu’il en soit, plafonner forfaitairement les rémunérations est maladroit, particulièrement sur le long terme. Et la plupart de l’argent est gagné (made) dans des hedge-funds et des fonds de gestion (private-equity) où la diminution des rétributions peut être complexe à mettre en oeuvre. La régulation et l’impôt pourraient être une partie de la solution. Dans le temps, malgré tout, ce qui importe vraiment serait d’accroître transparence et compétition, ce qui devrait tirer vers le bas les rémunérations de l’industrie financière. A ceux qui diraient que cela conduira à la fuite des activités financières vers d’autres pays nous répondrions alors : parfait.

    Bon désolé pour les imprécisions, et particulièrement dans ces deniers paragraphes. toutes les corrections sont les bienvenues… Of course !

  67. Avatar de cfeard
    cfeard

    @2casa et iGor milhit

    propositions pour :
    dans un “le dollar s’est arrêté ailleurs” ou quelque chose d’approchant (”buck stops somewhere else” sort of way)
    1)un peu comme à la poire
    2)histoire de refiler la patate chaude à quelqu’un

  68. Avatar de cfeard
    cfeard

    @2casa

    “bask” (???) in its reflected glory (se glorifier de sa réussite ???) : exactement

  69. Avatar de Jef
    Jef

    Je ne suis pas toujours en phase, mais là…

    L’esprit d’équipe de ce blog éclipse l’individualisme, un résultat admirable, bravo au chef d’orchestre.

  70. Avatar de iGor milhit

    @2casa et cfeard
    merci je suis en train de terminer la mise en commun et rapide correction.

    pour le « bask… » : tout simplement trop heureux de se mirer dans les reflets de sa gloire ?

  71. Avatar de iGor milhit

    bon j’ai envoyé la version fondue en un à la maison mère 🙂
    quelqu’un aurait la gentillesse de me prévenir lorsque les oligarchies de tous les pays seront brisées? 😀

    sinon dernièrement en discutant avec une amie on a bien rit en parlant de monnaie fondante au chocolat, avec du piment, comme en amérique latine 😀
    ok j’arrête, j’avais juste envie de souffler un peu…

  72. Avatar de cfeard
    cfeard

    @iGor milhit

    bask … il s’agit d’une expression usuelle, donc pas d’ambigüité :
    to bask in sb’s reflected glory : tirer fierté du succès de qn. (Oxford English Dictionary)
    L’intuition de 2casa était tout-à-fait exacte

  73. Avatar de Paul Jorion

    A propos de cette expression qui vous a fait vous gratter la tête.

  74. Avatar de madar michael

    Bravo à tous le traducteurs, et merci à la « maison mère » de nous fournir de tels éclairages sur le cours de cette crise financière aux multiples effets.
    Merci à F Leclerc également.
    Je pense qu’il fautdra diffuser ce texte le plus largement possible.
    Cadeau sonore

  75. Avatar de dissy
    dissy

    What Really Happened in London

    Last week’s gathering in London of the leaders of the 20 foremost economic countries in the world had been billed as the most important global financial meeting in more than 60 years. The stage had been set for hotly contested economic policies to be hashed out with the intensity of a Cold War arms negotiation. However, for most observers, the results of the G-20 failed to live up to the billing. Other than a masterful display of haute couture by the new American first lady, there are few results that anyone can really call significant.

    But for those with a keen eye for the subtleties of diplomacy-speak and an understanding of the true dangers that face the global economy, the G-20 communiqué had much to say; none of it promising. For those hoping that the participants would move to restore sound money, allow the global financial system to undergo a badly needed deleveraging, and seek to restructure the American economy in a way that is sustainable, the communiqué was a complete disappointment.

    From the outset, the public pronouncements of some important participants led observers to believe that the G-20 meetings would prove acrimonious and strained, with rare public splits emerging over macro-economic policy. But as the meeting got down to brass tacks, the participants seemed to emphasize photo ops with big smiles and confidence-building comments. It looked like a great success for host Prime Minister Gordon Brown, who claimed the emergence of a “new world order”.

    But was the reality behind all the smiles, thumbs up and hugs? Today, the world stands at a crucial crossroads in deciding how to deal with a severe debt-based recession that threatens a world depression. It therefore appears somewhat strange that the G-20 packed so much goodwill and agreement into such a short space of time.

    In the build up to the G-20 meetings, much publicity was given to a major split between the German-led European Union (EU) and the United States and United Kingdom, or “Anglo Saxons” as French President Nicholas Sarkozy calls them. The leaders of the EU disagree fundamentally with the logic of seeking to solve a chronic debt problem with the application of yet more debt. Indeed, the current President of the EU publicly described the U.S. Administration’s stimulus-and-bailout policy as “the road to hell”! Though the leaders surely discussed these issues at length, the final communiqué actively sought to conceal any sign of discord.

    Another key issue that was papered over was the call led by China for the introduction of a new world ‘reserve’ currency to replace the depreciated U.S. dollar. However, clause 19 of the G-20 communiqué did authorize the IMF to create $250 billion of new ‘magic’ money by way of Special Drawing Rights (SDR’s). This opens the way to a new world currency and more international inflation. Meanwhile, the door was left open for the “Anglo Saxons” to continue to force their taxpayers and all holders of their currencies to finance the profligate spending of their governments.

    On the subject of maintaining free trade, many ‘non-committal commitments’ were given, leaving the field open for continued protective trade barriers and competitive currency devaluations, which will likely both deepen and lengthen any depression. Economists have long credited the Smoot-Hawley Tariff of 1930 with initiating a global wave of protectionism which doomed any hope for a quick recovery from the Great Depression. Given the far greater interdependence of today’s world economy, the consequences of a modern trade war would be even more devastating. Scaling back the advantages of global specialization would drastically lower living standards around the world, particularly in the Unites States.

    With that threat looming, the Obama Administration appears still to be persuaded to keep the walking dead (Citi, GM and AIG etc) on citizen-financed life support. Yet, there was no rebuke from G-20 leaders, many of whom lead countries that had formerly been pilloried by the U.S. for economic nationalism. Why not hold the U.S. to its own standard? What should make the Obama Administration’s bailouts so offensive to foreign leaders is that their own citizens will be asked to pay for it! It’s one thing for France to subsidize Airbus to put Boeing at a disadvantage; it’s quite another thing for America to subsidize Boeing with France’s money. In this respect, the meeting’s lack of open conflict was surprising.

    With no rancor anywhere on display, the U.S. stock market rallied in the mistaken belief that a more healthy “new world order” had been established. Smiles are nice, and hugs are grand, but fundamentals pay the bills for investors. The G-20 meeting showed no evidence of reform. If anything, it showed that the trends which we have been following are only going to intensify.

  76. Avatar de 2casa
    2casa

    @ Dissy

    Vous voulez qu’on traduise ?! 😉

  77. Avatar de Titus
    Titus

    Bonjour,

    Ce que vous faites ici est remarquable.
    C’est une source d’espoir, et d’optimisme pour l’avenir.
    Merci beaucoup pour votre générosité.

  78. Avatar de cfeard
    cfeard

    @Dissy

    Take it or leave it !
    Mais la portée de cet article (de qui? de quel journal?) est loin d’atteindre celle de l’article proposé par Paul, sans parler de son orientation.

    Ce qui s’est réellement passé à Londres

    La rencontre des dirigeants des 20 plus grandes puissances économiques à Londres, la semaine dernière, était annoncée comme la réunion internationale la plus importante de ces 60 dernières année en matière de finance. C’était l’étape cruciale pour aboutir à des décisions économiques hautement contestées à l’issue de négociations dignes de la guerre froide. Cependant, pour la plupart des observateurs, les résultats du G20 ont été bien en-deçà des espérances: rares sont ceux que l’on pourrait qualifier de significatifs – mis à part une démonstration magistrale de haute couture de la part de la first lady américaine.

    Mais pour ceux qui sont rompus aux subtilités de la langue diplomatique et comprennent les dangers auxquels fait face l’économie internationale, le communiqué du G20 était éloquent, mais pessimiste. Pour ceux qui s’attendaient à ce que les participants prennent les décisions qui s’imposent pour le rétablissement de la monnaie, le nécessaire assainissement du système financier international, et la restructuration de l’économie américaine sur une base plus durable, le communiqué fut une cuisante désillusion.

    Dès le début, les annonces publiques de certains des participants les plus importants ont porté les observateurs à croire que l’ambiance autour de la table des négociations allait être plus que tendue, des dissensions sévères étant apparues sur la politique macro-économique. Mais au moment de passer aux choses sérieuses, les participants ont préféré se tourner vers les photographes, rivalisant de sourires et de déclarations rassurantes. On aurait vraiment dit que c’était un énorme succès pour l’hôte, le premier ministre Gordon Brown, qui s’empressa de déclarer l’avènement d’un ‘nouvel ordre mondial’.

    Mais tous ces sourires, ces embrassades et ces doigts levé en signe de victoire reflétaient-ils vraiment la réalité? Le monde est aujourd’hui à la croisée des chemins, son avenir dépend de décisions qui doivent être prises pour maîtriser cette grave récession qui menace de se transformer en dépression mondiale. C’est pourquoi il est permis de douter que le G20 ait réussi à aboutir à un accord aussi complet en aussi peu de temps.

    Lors des préparatifs du G20, une différence de points de vues importante a été mise en évidence à maintes reprises entre d’une part l’Union Européenne, menée par l’Allemangne et d’autre part les Etats-unis et le Royaume Uni, aussi nommés ‘Anglo Saxons’ par le président français Nicolas Sarkozy. Les dirigeants de l’Union Européenne sont en complet désaccord avec une logique qui voudrait résoudre un problème chronique de dette en créant encore plus de dette. Le président actuel de l’UE a même qualifié la politique d’impulsions-subventions du gouvernement des Etats-unis de ‘route vers l’enfer’! Les dirigeants ont certainement discuté de tous ces sujets en long et en large, mais le communiqué final se garde bien de révéler le moindre désaccord.

    Un autre point important qui a été escamoté, c’est la demande de la Chine d’introduire une nouvelle monnaie de réserve mondiale pour remplacer le dollar US déprécié. Mais par contre, la clause 19 du communiqué du G20 autorise bien le FMI à créer 250 milliards de dollars d’une nouvelle monnaie ‘magique’ par le biais de Droits de Tirage Spéciaux (DTS), ce qui aboutira à une nouvelle devise mondiale et donc plus d’inflation. En contrepartie, les ‘Anglo Saxons’ ont le champ libre pour poursuivre leur politique de dépenses publiques inconsidérées, financées par leurs contribuables et tous les détenteurs de leurs devises.

    Concernant le maintien du libre-échange, une série d »engagements non contraignants’ ont été pris, laissant la porte ouverte à la poursuite de mesures restrictives, telles que des barrières commerciales de protection et des dévaluations compétitives, capables d’approfondir et d’allonger n’importe quelle dépression. Pendant longtemps, les économistes ont accusé le Smoot-Hawley Tariff de 1930 (établissant des barrières douanières) d’être à l’origine d’une vague de protectionnisme qui condamna toute chance de sortie rapide de la Grande Dépression. L’interdépendance de l’économie mondiale étant aujourd’hui bien plus accentuée qu’alors, les conséquences d’une guerre commerciale moderne seraient bien plus dévastatrices. Réduire les avantages dûs à la spécialisation mondiale mènerait immanquablement à une baisse du niveau de vie dans tous les pays du monde – et particulièrement aux Etats-unis.

    Devant cette menace, le gouvernement d’Obama semble toujours prêt à garder ses morts vivants (Citi, GM, AIG etc.) sous assistance respiratoire – à la charge des citoyens. Mais aucun des dirigeants du G20 n’a émis le moindre blâme, alors que beaucoup d’entre eux sont à la tête de pays qui furent jadis cloués au pilori par les US pour cause de nationalisme économique. Pourquoi ne pas appliquer les mêmes règles aux Etats-unis? Ce qui devrait choquer les dirigeants étrangers dans les subventions accordées par le gouvernement Obama, c’est que ce sont leurs propres citoyens qui devront les financer! C’est une chose, pour la France, de donner des subventions à Airbus pour prendre avantage sur Boeing, c’en est une autre, pour l’Amérique, de donner des subventions à Boeing avec l’argent de la France. C’est en ce sens que l’absence de conflit lors de la réunion est plutôt – surprenante.

    N’affichant aucune rancœur, la bourse de New-York se ressaisit, pensant – à tort – qu’un ‘nouvel ordre mondial’ avait été établi. C’est beau les sourires, et les embrassades sont majestueuses, mais ce sont les fondamentaux qui intéressent les investisseurs. La réunion du G20 n’a rien montré qui ressemble à une réforme. Si elle a mis en évidence quelque chose, c’est que les tendances qui se sont concrétisées ces derniers temps ont toutes les chances de s’intensifier.

  79. Avatar de François Leclerc
    François Leclerc

    @ Cfeard

    Je partage votre synthèse, la question restant posée de savoir comment les choses vont évoluer ? Lentement, cela me paraît acquis. Essayant de contourner l »obstacle pour ne pas avoir à l’affronter l’est également. D’où peut survenir une évolution ? La voie des régulations n’étant empruntée que dans le respect des contingences, celle de la révolte populaire balayant tout sur son passage n’étant pas la plus probable, sommes-nous des condamnés, nous aussi sous assistance respiratoire ?

    Je me suis un peu jeté sur l’ouverture chinoise de la nécessité d’une autre monaie de réserve que le dollar, non pas par amour fou du régime chinois et de ce qu’il représente, ni par ce que je crois que les pays dits émergents vont par leur essor solutionner les problèmes que nous ne savons pas résoudre.

    C’est qu’il m’a semblé que cette voie est celle qui allait être empruntée, par étapes et non sans de farouches affrontements et contradictions, afin de résoudre certaines des contradictions les plus criantes du monde actuel. Et qu’elle correspondait à un phénomène montant et irresistible, le changement d’axe du monde.

    Cela se fera pour le meilleur et pour le pire. Je crains fort que le nouvel « ordre mondial » dont ce changement est la promesse ne soit pas nécessairement celui de nos aspirations. Si les sociétés émergentes devaient en quelque sorte exporter leur modèle, comme elles le font de leurs produits…

  80. Avatar de cfeard
    cfeard

    @François Leclerc

    Je suis de nature optimiste, malgré l’évolution de ces trente dernières années. Je crois en un sens de l’histoire, malgré tous les retours en arrière. Un salarié n’est pas un esclave.

    Et même si l’on prend la période récente, ces trente ans qui nous ont amenés à cette crise, n’est-elle pas également synonyme d’une évolution considérable dans les pays émergents. Je ne nie pas les méfaits de cette marche forcée vers le ‘progrès’, mais pour moi une chose est sûre, c’est qu’elle aboutit à un amenuisement des différences entre les pays riches et cette frange toujours croissante des pays émergents. C’est d’ailleurs ce que mettent en avant les libéraux pour justifier leur politique. L’argument n’est pas sans fondement.

    Mais vous avez raison, le futur immédiat est problématique. Je ne crois pas, comme vous, qu’une solution radicale – laquelle d’ailleurs? Elle devrait être pensée avant d’être proposée, or nous n’en sommes qu’aux balbutiements – puisse être mise en œuvre par qui que ce soit.
    Comme vous je pense qu’une monnaie de réserve plus équilibrée doit voir le jour, et comme c’est l’intérêt de tout le monde, sauf des Etats-unis, je crois qu’il y a de bonnes chances que la proposition chinoise aboutisse en effet. Les Etats-unis ont accumulé trop de dettes pour pour continuer impunément à imposer leurs volontés.

    Cela renforcera inévitablement les pays émergents, en premier lieu la Chine, précipitant sa marche vers la première marche du podium des grandes puissances.
    Qu’en résultera-t-il pour le monde? Je ne crois pas que la Chine soit une ‘modèle’ exportable. Elle continuera bien sûr à connaître une évolution interne considérable. Gageons que les idées qui naissent ici, comme un peu partout sur la toile, apporteront leur contribution à ce changement. ‘L’imagination au pouvoir’ en somme 😉

    Mais j’ai abandonné là le stade du futur immédiat. Et c’est lui qui conditionne le futur plus lointain.
    Espérons que nous arriverons à le dépasser.

  81. Avatar de Jean jacques K
    Jean jacques K

    Bonjour,

    J’aimerais bien que vous donniez votre point de vue sur cette question:
    Responsabilité du Private Equity dans l’avenement de la crise des Subprime.

    Merci

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  2. En fait 500 morts en 15 jours pour 55 millions de repas en un mois c’est plutôt un mort pour…

  3. @Grand-mère Michelle On choisit toujours là où on vit et où on travaille, mais dans des contraintes économiques et structurelles…

  4. Ultra-dangereux… Je ne résiste pas à ma furieuse envie de faire partager les saloperies commandées là-bas par le gouvernement israélien…

  5. @ilicitano C’est cela, aller travailler pour gagner de l’argent pour acheter(à crédit) une maison dans la campagne et une voiture…

  6. @Otromeros Cela fait un mort pour 100 000 repas, soit 50 000 jours ou 125 ans, cela fait probablement que…

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