« Tout ce qui m’arrange, rien de ce qui me dérange »

Antoine nous propose ces jours-ci dans ses commentaires, une justification des thèses du libertarien Robert Nozick (1938-2002). Le philosophe américain était loin d’être un imbécile mais on ne peut pas laisser défendre ses thèses sans répondre.

Il y a là un a priori chez Nozick (récent à l’échelle de l’histoire humaine) que le point focal doit être l’individu et non la société humaine. Puisque Nozick se réclame d’Aristote, il faut noter tout de suite que cet a priori va à l’encontre d’Aristote quand celui-ci rappelle que l’homme est un animal politique, autrement dit social. Le point focal doit être au contraire l’homme au sein d’un ensemble organisé. Le débat peut alors porter sur le pour et le contre de telle ou telle forme d’organisation.

C’est là que les libertariens prennent le monde à l’envers : le point de vue de l’individu ne peut être envisagé qu’une fois la société définie comme son cadre. Hegel écrit : « Le principe des États modernes a cette puissance et cette profondeur extrêmes de laisser le principe de la subjectivité s’accomplir jusqu’à l’extrémité de la particularité personnelle autonome et en même temps de le ramener à l’unité substantielle et ainsi de maintenir cette unité dans ce principe lui-même » (Hegel, Philosophie du Droit, VI).

La critique des Quakers par Hegel se fonde sur cela : accepter de l’État ce qui vous arrange sur le plan privé (qu’il vous protège) tout en refusant de participer à l’effort collectif qui le permet (la défense du territoire). Antigone est le prototype de ces « faux jetons » qui font prévaloir le privé (le devoir de sépulture envers un frère) sur le public (la trahison par Polynice de la communauté), tout en acceptant de la société tout ce qu’elle lui offre.

Le « minimum d’État » des libertariens peut se résumer ainsi : « Tout ce qui m’arrange, rien de ce qui me dérange ». C’est un peu court comme système de gouvernement.

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130 réponses à “« Tout ce qui m’arrange, rien de ce qui me dérange »”

  1. Avatar de Vincent Porel
    Vincent Porel

    Par construction, « Tout ce qui m’arrange » ne peut exister qu’en la présence de « tout ce qui me dérange », sans ce qui me dérange, ce qui m’arrange perds son objet et est condamné à se réduire come peau de chagrin.

    On peut néanmoins savoir gré à Ron Paul d’oser à s’attaquer à l’hydre de Lerne (qui n’en finis plus avec son travail de Danaïdes qui se doivent en plus de nettoyer les écuries d’Augias des 30 ans de dettes avariés dont l’oncle Sam a nourri le troupeau 🙂

  2. Avatar de Paul Jorion

    Le terme « non-traditional player » utilisé par Goldman Sachs pour parler des spéculateurs purs sur le marché des matières premières (cf . le commentaire de Ton vieux copain Michel), me donne envie de qualifier Ron Paul d’« ami de la démocratie non-traditionnel ».

  3. Avatar de antoine
    antoine

    Paul tu exagères…

    Je ne défend pas la thèse de Nozick. Je l’expose pour rendre compte des nuances qu’il peut y avoir à l’intérieur même des psitions libertariennes, qui sont tout sauf un bloc monolithique. La connaissant bien j’en connais également bien les faiblesses, dont lui même n’a jamais fait mystère. Je constate malheureusement que les critiques la plupart du temps s’en tiennent à des discussions superficielles qui ne peuvent atteindre la théorie dans son coeur, aussi longtemps qu’n n’a pas clarifié tout ça.

    Je ne crois pas avoir dit que Nozick était du côté d Aristote. Au contraire il estime que les prémisses seulement probables n’ont pas droit de cité (elle ne peuvent justifier une obligation juridico-légale). Il serait en accord avec la thèse de Hegel, tout en ajoutant par après qu’une fois qu’on a dit ça… on n’a rien dit d’utile.

    En effet la question reste entière de savoir quelle est la meilleure manière d’organiser la « coopération » sociale, quel est le meilleur « mode de gouvernement ». Hegel défend une monarchie constitutionnelle et Nozick le Canevas (qui n’est pas l’Etat « veilleur de nuit » ou « gardien de zoo » des libéraux). Il n’y a pas là opposition, si je puis dire, entre une conception qui relèverait de l’individualisme méthodologique, et une position qui relèverait d’un holisme (en fait dans le cas de Hegel c’est justifié de parler de holisme). Il y a opposition entre deux manière de concevoir ce que doivent être les obligations mutuelles des individus condamnés à vivre ensemble. Nozick cherche juste à préciser ou la limite de ce qu’on peut vous faire sans votre consentement pourrait passer (et il tâtonne).

  4. Avatar de A.
    A.

    Le point essentiel des libertariens est l’auto-organisation de la société et le fait que toute intervention pour la modeler brouille cette auto-organisation et éloigne la société de ce qui constituerait un optimal. Leur pensée pousse à l’extrême les conséquences de la « main invisible » de Smith et de la ruse de la raison chez Hegel.

    Dupuy parle d’autotranscendance au sujet de l’organisation de la société voulue par Hayek qui n’est pas libertarien mais dont l’oeuvre est une source importante d’inspiration. La critique de cette pensée doit porter sur ce point : l’auto-organisation de la société n’est qu’une sorte de chaos organisé.

  5. Avatar de A.
    A.

    @ Paul

    Vous avez travaillé dans le domaine de l’IA dont les travaux, me semble-t-il, s’inspirent de Hayek et de Durkheim d’après Dupuy.

  6. Avatar de Paul Jorion

    @ A.

    C’est sans doute pour cela que cela ne marche pas (ceci n’est pas une plaisanterie). Dans mes propres travaux en IA (résumés dans mon « Principes des systèmes intelligents » – 1990), l’inspiration est double : la philosophie (en particulier scolastique) qui a étudié de très près le mécanisme du raisonnement et la psychanalyse qui a très bien compris le fonctionnement essentiellement social de l’intelligence humaine et son fondement dynamique dans l’affect.

    D’une certaine manière, mon « Comment la vérité et la réalité furent inventées », à paraître en novembre constitue un prolongement de « Principes des systèmes intelligents ».

  7. Avatar de denice
    denice

    L’auto-organisation, c’est beau comme concept!!! Mais tellement utopique!

    Avous-vous déjà tenté l’expérience d’auto-organisation rien qu’à 30?

    Alors quand la société en fait 60 millions!!!!!

    En réalité pour démarrer une auto-organisation du modèle libertarien, je crois comprendre qu’il faut qu’il y ai déjà un modèle d’organisation en place et ce dernier est amendé petit à petit.

    En gros un système non statique qui se reforme en permanence et s’adapte, un gros un système vivant, comme nos démocraties, mais centré sur l’individu (mais euh finalement quand on organise nos sociétés, on pense un peu à l’individu, non?)

    bref, rien de bien nouveau.

  8. Avatar de Jérémie
    Jérémie

    « Tout ce qui me coûte le moins, tout ce qui me flatte le plus rien de ce qui me dérange de voir »

    « Tout ce qui gène davantage les plans de l’autre, mais beaucoup moins les moins, les vendus »

  9. Avatar de Moi
    Moi

    @A. : « Le point essentiel des libertariens est l’auto-organisation de la société et le fait que toute intervention pour la modeler brouille cette auto-organisation et éloigne la société de ce qui constituerait un optimal. »

    Je n’ai jamais compris ce débat. C’est quoi une société qui ne serait pas auto-organisée? Elle serait manipulée par Dieu, les extra-terrestres, quoi d’autre? L’Etat tombe-t-il donc du ciel?

  10. Avatar de Olivier P
    Olivier P

    Pointer du doigt les libertariens, et plus précisément les libéraux-libertariens, me paraît être une évidence de plus en plus forte.
    A fréquenter leurs blogs et sites, je me dis que l’issue de la crise ne pourra être pacifique tant leur idéal de promotion de l’individu (voir de l’individualisme) et leur conception de la liberté est anti-humaniste.

    Je les trouve de surcroît sacrément de mauvaise foi quand ils accusent les keynésiens d’être responsable de la crise actuelle alors qu’il me semble que c’est leurs prêtres (Reagan, Tatcher, Bush) et tous ceux qui les ont suivis aux rênes des différents gouvernements (de gauche et de droite) qui ont créé les conditions pour que cette crise se développe sans freins.

    A titre d’illustration faites un petit tour sur le wikilibéral : http://www.wikiberal.org/wiki/index.php?title=Accueil

  11. Avatar de Vincent Porel
    Vincent Porel

    @ A.
    « Le point essentiel des libertariens est l’auto-organisation de la société et le fait que toute intervention pour la modeler brouille cette auto-organisation et éloigne la société de ce qui constituerait un optimal. »

    Qu’est-ce que « l’optimal » de la société et au delà de l’homme ?
    Quelque soit la théorie, j’ai l’impression que paradoxalement, il s’agit de s’affranchir au plus possible de la condition humaine.

    Elle fonctionne comme un élastique, plus on cherche à s’en éloigner, plus violamment elle vous rattrape.
    Alors que le moyen le plus sur de s’en affranchir est de la vivre, mais je m’écarte du sujet.

  12. Avatar de A.
    A.

    @ Paul

    L’IA est-elle une sorte de « deuxième nature », c’est-à-dire irréductible tant aux phénomènes naturels qu’aux actions humaines ?

    Vous avez écrit :
    « C’est sans doute pour cela que cela ne marche pas (ceci n’est pas une plaisanterie).  »
    Pouvez-vous expliquer ?

    L’étude sur l’IA est-elle différente des interrogations sur les phénomès d’émergence ?

  13. Avatar de Wladimir
    Wladimir

    Il faut quand même reconnaître que les libertariens ont au moins le mérite de soulever un problème bien embarrassant pour la gauche moderne, celui de la prétendue neutralité de l’Etat.
    Je rappelle que Marx fut extrêmement dur avec cette notion (d’ailleurs par opposition à Hegel). Il donne par exemple dans « L’idéologie allemande» une troublante définition pour notre époque de l’Etat:
    « C’est à cette propriété privée moderne que correspond l’État moderne, dont les propriétaires privés ont peu à peu fait l’acquisition. Du fait que la propriété privée s’est émancipée de la communauté, l’État a acquis une existence particulière à côté de la société civile et en dehors d’elle ; mais cet État n’est autre chose que la forme d’organisation que les bourgeois se donnent par nécessité pour garantir réciproquement leur propriété et leurs intérêts, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur ».
    Et dans le Manifeste du parti communiste: « La bourgeoisie, depuis l’établissement de la grande industrie et du marché mondial, s’est finalement emparée de la souveraineté politique. Le gouvernement moderne n’est qu’un comité qui gère les affaires communes de la classe bourgeoise toute entière ». Il décrit même dans le « Dix-huit brumaire », par opposition à la bureaucratie raisonnable de Hegel, l’État comme corps parasitaire avec« son armée de fonctionnaires d’un demi-million d’hommes, ,effroyable corps parasite qui recouvre comme une membrane le corps de la société française et en bouche tous les pores».
    Plus récemment, René Riesel ex-situationniste fera six mois de prison ferme pour ses fauchages de riz transgénique, dans l’indifférence générale, parce qu’il dénonçait avec virulence le soutien de l’état français pour la promotion des OGM.
    Ce que je veux dire, c’est que pour moi, il ne faut pas confondre la nécessité absolue de l’homme de s’organiser socialement à travers différentes représentations démocratiques ou délégations de pouvoir (que je souhaite temporaires par essence) avec l’Etat, prétendu Bien Public, bienveillant arbitre au-dessus de la mêlée des intérêts catégoriels et panacée universelle de tous nos maux actuels. Il est évident que dans cette époque de crise, un retour de l’Etat sera réclamé avec force, mais de quel type d’état s’agira t-il ?

  14. Avatar de Boukovski
    Boukovski

    Une société est forcément auto-organisée. C’est un pléonasme. L’idée qui flotte derrière l’expression « auto-organisation » est celle que est « auto-organisé » ce qui fonctionne sans l’intervention d’un arbitre, l’Etat en l’occurence. C’est donc un concept auto-validant, un habillage qui se veut auto-doctrinal afin qu’une partie de la société puisse s’auto-prospérer au dépend quelque fois d’une autre partie, non « auto-organisée » celle-ci.

  15. Avatar de Alain A
    Alain A

    @Antoine
    Quand vous dites : « Il y a opposition entre deux manière de concevoir ce que doivent être les obligations mutuelles des individus condamnés à vivre ensemble  » tout est dit. Puisque vous considérez que vivre avec les autres est une condamnation, toute vie en société ne sera jamais qu’un supplice. Etrange conception qui semble souhaiter la solitude: comme si chacun de nous ne naissait pas du ventre d’une femme, n’était pas élevé dans une famille, ne se formait pas dans une société… Certes, parfois cela se passe assez mal mais croire qu’on peut s’extraire d’une société bien régulée est une illusion bien infantile.
    Les Hobbes, Mandeville et autres Bentham ont décidément bien asséné leurs pensées pessimistes et mortifères, si utiles au capitalisme naissant et qui nous souhaite toujours idiots rationnels et égoïstes. Peut-être est-il en train de réussir?

  16. Avatar de A.
    A.

    @ Moi
    Je pense que Michéa donne une clé d’interprétation très intéressante de la façon dont l’organisation de la société a été pensée. Le point de départ se situe lors des guerres civiles religieuses. Le liant des sociétés se situait dans un principe transcendant. La mise en cause de ce principe organisateur extérieur a provoqué les guerres de religions et par la suite, la question de l’organisation de la vie en société s’est faite en fonction d’individus supposés ennemis et convoitant tous les mêmes choses. Il a fallu par conséquent trouver un principe d’organisation à partir de ces individus : la volonté générale pour Hobbes, la volonté générale pour Rousseau. Mais coment assurer la paix civile sans ce principe transcendant ? Hobbes et Rousseau en ont crée chacun le sien destiné à se substituer au principe transcendant. A partir de Montesquieu, on a pensé un système auto-régulé de pouvoirs et contre-pouvoirs qui est lependant de la Main invisible de Smith.

  17. Avatar de Moi
    Moi

    @Wladimir: « Il faut quand même reconnaître que les libertariens ont au moins le mérite de soulever un problème bien embarrassant pour la gauche moderne, celui de la prétendue neutralité de l’Etat. »

    Au contraire, ce sont les libertariens qui défendent de manière inavouée cette prétendue neutralité de l’Etat.

    De deux choses l’une, l’Etat est neutre ou il ne l’est pas.
    Si l’Etat n’est pas neutre c’est la société qui agit à travers lui, et donc je repète ma question « qu’est-ce qu’une société qui ne serait pas auto-organisée »?
    Et si l’Etat est neutre, quelle est la critique qu’on lui porte? Comment pourrait-il perturber l’organisation sociale spontanée en favorisant l’un ou l’autre agent social?

  18. Avatar de Pierre
    Pierre

    « Le principe des États modernes a cette puissance et cette profondeur extrêmes de laisser le principe de la subjectivité s’accomplir jusqu’à l’extrémité de la particularité personnelle autonome et en même temps de le ramener à l’unité substantielle et ainsi de maintenir cette unité dans ce principe lui-même » (Hegel, Philosophie du Droit, VI).

    Quel sera l’unité substantielle du NOM ? Quel lien uni l’occident-chrétien, l’islam, l’hindouisme, le taôisme… et tout les autres?
    Comment l’anthropologue peut-il chausser toutes ces lunettes en même temps ? Qu’entrevoit-il dans son kaléidoscope?

    De quelle « autonomie » personnelle disposons nous, nous qui avons toujours un temps de retard dans l’information comme dans nos moyens d’analyse de celle-ci, nous qui ne disposons individuelement pas de l’autonomie affective, alimentaire, energétiques, de défense,
    …. de travail, donc de pensées plus ou moins subjecto-objectives ?

    Mais « nous », c’est qui au fait? Le faux frére de on?

    Si Dieu c’est nous,…. alors, le diable c’est qui?
    Moi je vote Taô, c’est bien plus débridé, et bien plus « moderne ».

  19. Avatar de Boukovski
    Boukovski

    Le concept d’Etat (le modèle de l’Etat hegelien si on veut) est « neutre », comme tous les modèles. Par nécessité, son fonctionnement est tout sauf neutre. Sinon, où serait son efficacité et sa légitimité ?

  20. Avatar de antoine
    antoine

    Lui et Hegel ne fixent pas les limites aux mêmes endroits. La question de savoir ce que l’individu devrait devoir à la communauté politique n’a pas de sens pour Nozick, puisque les concepts rattachés à une conception stato-nationale sont dépourvus de sens dans le Canevas. Il y a des communautés multiples, variées, avec chacune leur conception de la vie bonne, de la ligne ou devrait passer la distinction entre le public et le privé, et il y a des individus qui appartiennent à plusieurs ou à aucune, qui les rejoignent à leur gré, au sein de frontières toujours mouvantes. Et il y a des “Etats” mais on ne peut plus décemment appeler ça comme ça sans introduire des contre-sens. C’est là une organisation politique et un type de gouvernement, qui n’a rien à voir il est vrai avec ce que nous connaissons. Elle est aussi le produit d’une certaine évolution des sociétés occidentales depuis les guerres de religions. Perso, je préfère un restaurant à la carte à un restaurant dans lequel il n’y aurait qu’un menu imposé. Hegel, en bon hobbesien, préférait l’autre option. La communauté dont parle Hegel n’est pas celle dont parle Nozick. Il ne s’ensuit pas de ceci qu’il n’y ait pas de projet d’intégration politique dans la conception de Nozick. Tout le contraire même. Nozick ne donne pas dans l’individualisme méthodologique: il part du “consentement” quand Hegel part de la “reconnaissance”. Et pourquoi pas?

    Il y a des points sur lesquels Hegel peut etre mis à contribution pour attaquer Nozick. C’est évident. Et Walzer s’en sert abondamment de même que tous ceux qui retiennent une forme ou une autre de théorie de la commodification. Mais stratégiquement il aurait pu être plus intéressant d essayer de retourner les arguments de Nozick contre les libertariens (ce que fait Van Parijs en un certain sens). Qu’aurait-il dit de la monnaie? Des obligations des banques? Il y en a qui auraient eu des surprises… et pas ceux qu’on croit.

  21. Avatar de Moi
    Moi

    @A. : « A partir de Montesquieu, on a pensé un système auto-régulé de pouvoirs et contre-pouvoirs qui est lependant de la Main invisible de Smith. »

    Quelle différence d’avec la volonté générale ou le Leviathan? La volonté générale est une émanation de la société, ce n’est pas un principe transcendant qui lui préexiste. Appelons cela la main invisible si vous voulez, mais c’est la même chose que la volonté générale.
    La seule différence que je vois est institutionnelle. D’un côté la volonté générale s’incarne dans l’Etat ou une assemblée constituante, dans l’autre elle ne s’incarne pas ou très peu. C’est la différence entre une constitution écrite et une société coutumière ou jurisprudentielle. Mais les deux émanent de la société, la constitution écrite ne tombe pas du ciel comme les tables de la Loi.

  22. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    J’irais même jusqu’à dire que l’auto-organisation à 2, c’est-à-dire dans un couple, ne va pas toujours de soi. 🙂

  23. Avatar de antoine
    antoine

    Je reprend: le Canevas et/ou l Etat minimal s’oppose à l’Etat (en général les libertarien reprennent Weber sur ce pint, pour s’y opposer) comme s’y opposent la Cité ou l Empire. Ce n’est pas une sous catégorie de l’Etat moderne. C’est quelque chose de radicalement « autre » qui n’avait pas été « prévu »par l’Histoire.
    Tous les cmmunautariens sont fondamentalement du coté de Nozick (sans le savoir), cette alliance théorique libertario-communautarienne s’oppose violemment à la construction historique stato-nationale classique démocrate/républicaine.
    2 visons du monde, du vivre ensemble, radicalement incmpatibles. Au coeur du débat: le concept de « souveraineté ».

    Un exemple:
    vous etes plutôt libertarien si vous pensez que les magistrates musulmanes devraient pouvoir porter le voile pendant l’audience si elles le souhaitent, et vous ne l’êtes pas si vous pensez le contraire. C’est trop facile d’opposer Hegel à Nozick. En quoi dans ce cas d’espèce la magistrate en question devrait-elle faire l’impasse sur ses croyances personnelles dans la mesure ou ceci ne change rien au bon exercice de sa mission? Au nom de quoi doit-elle cela? Les parties du procès en conflit devraient-elles avoir leur mot à dire, alors que quoi qu’il arrive la justice sera rendue? En quoi n’est ce pas une situation d’oppression? Les devoirs légitimes envers la communauté ont bon dos… les féministes s’en souviennent encre très bien! Hegel ne nous fournit rien d’autre qu’une pétition de principe pur répondre à cette question.

  24. Avatar de antoine
    antoine

    vous êtes un oppreseur si vous pensez le contraire. non je plaisante. 🙂
    Tout ça pur dire que je ne suis pas libertarien… mais qu’il ne faut pas jeter le bébé avec l eau du bain, d’autant plus que tout ceci est particulièrement stimulant ^^’.

  25. Avatar de Bob
    Bob

    Une société auto-régulé sera aussi efficace qu’un marché auto-régulé.
    Il faut définir un pacte social fort, a savoir à quelle part de liberté individuelle chaque citoyen est prêt à renoncer pour assurer bien-être et sécurité pour la collectivité.
    La France avec son modèle républicain (liberté égalité fraternité) poursuivait cette utopie (au sens de projet non abouti ) lorsque la pensée libérale est venue balayer cet idéal. Nous sommes certainement le pays d’europe qui a le plus résisté à cette idéologie. Même si notre modèle social est passablement abîmé, comparé aux modèles anglo-saxon, il est tout de même plus enviable.
    Le fait est que depuis vingt ans nous avons perdus en libertés et en sécurité.
    La neutralité de l’état est un problème démocratique qui tient à la représentativité de nos représentant. A ce titre le référendum sur le traité constitutionnel en est une belle démonstration : le peuple dit non à 55% les députés le vote à l’unanimité.

  26. Avatar de Jérémie
    Jérémie

    « Seul l’autre est toujours responsable d’un plus grand mal pour la société mais jamais moi le premier »

  27. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    Adam Smith prétend que c’est en poursuivant son intérêt égoïste que l’on contribue au mieux à la réalisation du bien-être collectif mais on oublie généralement ce qu’il dit ensuite, à savoir que ceux qui prétendent oeuvrer avant tout au nom du bien-être collectif le font généralement pour des motifs égoïstes. C’est pas bête et ça devrait nous interpeller. Prenons par exemple, un alter-mondialiste généreux qui s’écrierait « A chacun selon ses besoins! ». Eh bien, il y a de fortes chances pour que ses besoins soient plus considérables que ceux de son prochain. Pour ce qui est du communisme, Orwell a mis tout ça en musique dans sa « Ferme des animaux ».

  28. Avatar de Jérémie
    Jérémie

    « Et plus nous l’écrirons dans les livres que nous préférons lire et plus les hommes finiront tous par faire comme nous »

  29. Avatar de Mathieu
    Mathieu

    D’accord avec Antoine: je préfère une philosophie politique qui prend comme hypothèse que la diversité de la conception de la « vie bonne » est telle que une conception juste de l’état ne peut décider a priori de favoriser telle ou telle conception. Ceci doit nécessairement émerger d’un consensus encadré lui par des institutions qui garantissent que ce consensus soit « juste » (établi entre personnes informées, représentatives, etc…) et qu’il pourra être appliqué.

  30. Avatar de Bertrand
    Bertrand

    @Antoine :

    « Il y a des communautés multiples, variées, avec chacune leur conception de la vie bonne, de la ligne ou devrait passer la distinction entre le public et le privé, et il y a des individus qui appartiennent à plusieurs ou à aucune, qui les rejoignent à leur gré, au sein de frontières toujours mouvantes * »

    Que font les théoriciens du droit naturel comme Nozick si au sein des « communautés multiples et variées », avec chacune leur conception de la morale, il existait un individu ou plusieurs qui décidaient de se donner les droits absolus du Souverain (comme par exemple le port d’arme pour tous, et le droit absolu de se défendre en évoquant la légitime défense en expulsant les « envahisseurs ») ? Que faire sinon (re)créer l’Etat, ou une sorte de « minarchie » au sens libertarien ?

    A mon avis, c’est justement parce que le domaine de la morale est rejetté dans la seule sphère privée* que la défense des droits élémentaires ne peut incomber qu’à l’Etat Capitaliste, ce que les libertariens pur jus refuse d’admettre. j’avoue que c’est sur ce point que certains textes de Nozick ou de Friedman (fils) m’ont toujours fait penser à ce que Karl Marx appellait justement « des robinsonnades ». Une sorte de confusion entre le rapport à l’Etat qui découle de l’exercice de la liberté et le pouvoir de l’imagination de quelques « happy few » qui profiteraient d’un monde sans contrainte (sans impôt)…

  31. Avatar de Jérémie
    Jérémie

     » Il ne suffit pas non plus d’avoir moins la prétention d’œuvrer pour le « bien-être » pour paraître moins faire la bête « 

  32. Avatar de ghost dog
    ghost dog

    Ce post me fait penser à un excellent roman d’un auteur américain que j’adore Brett Easton Ellis :

    « American Psycho » décrit le quotidien d’un trader à la fin des années 80 qui se révèle au fil des pages être un dangeureux psychopathe qui assassine et torture dans une violence de plus en plus crescendo d’abord un homeless puis des prostituées.

    Je considère ce roman comme la critique la plus radicale, la plus originale (sous cette forme, le roman) du néolibéralisme et de ses conséquences.

    Patrick Batman n’a aucun sentiment, il n’a aucune relation avec ses semblables, les rapports sociaux dans sa « sphère » ayant perdu tout sens. Les gens n’ont plus de prénoms, ils sont des marques de costumes ou d’accessoires.

    Les rapports humains qu’il entretient avec ses semblables sont tellements superficiels qu’il est impossible pour un individu d’être un « sujet ». Batman est une coquille vide, il remplit son corps d’euphorisants ou de tranquilisants. Il fonctionne.

    Il y’a des trouvailles hallucinantes, la meilleure étant la soirée d’haloween où Batman se déguise en « psychopathe » avec un écriteau dans le dos  » j’assassine des femmes » et le doigt d’une de ses victimes comme broche.

    Il se ballade dans la soirée et tous les participants le félicitent de son costume…à son grand désespoir car il souhaite se faire arrêter.

    Tout cela pour dire que l’individualisme forcené est une impasse pour…les individus eux-même !

    Et que réduire le lien social à une lutte d’intérêts n’a au fond qu’un seul but : ne pas remettre en cause les inégalités socio-économiques et permettre aux dominants de reproduire génération après génération une structure qui défende LEURS intérêts.

    De ce point de vue la théorie de Nozick fait de lui un bon chien de garde…

  33. Avatar de Boukovski
    Boukovski

    @ antoine

    « En quoi dans ce cas d’espèce la magistrate en question devrait-elle faire l’impasse sur ses croyances personnelles dans la mesure ou ceci ne change rien au bon exercice de sa mission? »

    Exemple périlleux quoique révélateur finalement. Ce qui fonde la justice n’est pas seulement l’énoncé d’une règle de droit qu’un pouvoir régalien peut imposer. Ce qui la fonde c’est aussi sa légitimité à énoncer cette règle. Et la légitimité c’est ce qui est perçu comme tel.

    Cette règle peut-elle être perçue comme légitime (par ceux qui ne sont pas musulmans dans votre exemmple) si celle qui la dit affiche tout en la disant ses croyances personnelles ?

  34. Avatar de Moi
    Moi

    @antoine: « C’est quelque chose de radicalement “autre” qui n’avait pas été “prévu”par l’Histoire. »

    Désolé, je pense le contraire. Etat de nature ou Empire, les rapports de forces seront toujours là. Nozick veut juste changer l’oppression de l’Etat hégélien par l’oppression directe des individus entre eux.

    Prenons le cas concret de votre magistrate voilée dans une société sans Etat. Les justiciables choisiront leur arbitre et dans une société chrétienne american-style, ils choisiront un arbitre non-voilé (ou régleront l’affaire entre eux par la négociation, voire à la façon de l’ordalie moyenageuse). Dans les faits, cela ne changerait donc rien pour la magistrate voilée.

    « Les parties du procès en conflit devraient-elles avoir leur mot à dire, alors que quoi qu’il arrive la justice sera rendue? »

    Ah bon, la magistrate a son mot à dire mais pas les parties en conflit? Vous voilà bien hégélien tout à coup. 🙂

  35. Avatar de antoine
    antoine

    Juste un truc: je parlais de Nozick pour répondre à une question de « Moi » qui voulait des précisions, et PAS des libertariens. En fait le problème est que le courant est profondément divisé. Ne pas le voir, c’est manquer autant de « failles ». Certes c’est un auteur « libertarien » et classé parmi les « libertariens », mais RIEN à voir avec Rothbard, Friedman, Hayek, Rand, Gauthier (autre libertarien extrêmement intéressant qui a une approche contractualiste fondée sur une forme plus élaborée d’égoïsme rationnel, à la Hobbes) ou l’Ecole de Chicago, à qui il pose plus de problèmes théoriques qu’autre chose.

    Tous les débats contemporains se tiennent à l’intérieur de l’opposition Rawls (la version la plus sophistiquée du point de vue « hegelien » et démocratique de Paul)/ Nozick (la présentation la plus radicale d’un nouveau type de régime qui prétend être supérieur à la démocratie et ce à tous points de vue). Chacun des deux pôles, en réaction, a suscité d’autres tentatives de clarification (Walzer, Dworkin…) Je dirais qu’en fonction des problèmes, on peut être attiré par l’une ou l’autre solution. le plus difficile étant de rester cohérent.
    Notez qu’il n’y a pas UN français (et pourtant on a ça dans le sang pour ainsi dire!). Et que ca en dit long sur l’état de délabrement de cette branche pourtant fondamentale.

    cf. au passage, pour ceux que ca intéresse, P. Strawson fournit un argument transcendantal en faveur de l’institution de la propriété privée (on n’ a pas dit « de quoi », hein…), fondé sur une analyse linguistique assez intéressante.

  36. Avatar de Moi
    Moi

    @ghost dog : « Et que réduire le lien social à une lutte d’intérêts n’a au fond qu’un seul but »

    L’objectif n’est pas tout à fait là, il va de soi que le lien social comporte toujours une lutte d’intérêts. Il faut préciser: « réduire le lien social à une lutte d’intérêts INDIVIDUELS ». Et là, évidemment, les plus faibles se font pigeonner car sans s’associer ils n’ont pas la force de défendre leurs intérêts.

  37. Avatar de Bob
    Bob

    @ Ton vieux copain Michel

    Je n’ai jamais compris pourquoi la ferme des animaux est considéré comme un pamphlet anticommuniste.
    Moi j’y ai vu une critique du pouvoir qui fonctionne également très bien avec le capitalisme.

  38. Avatar de Moi
    Moi

    @Bob: « Moi j’y ai vu une critique du pouvoir qui fonctionne également très bien avec le capitalisme. »

    Dans le livre, c’est la situation de départ avec les fermiers aux commandes. Et l’objectif est de montrer que la situation d’arrivée avec les cochons est identique (voire pire). Autrement dit, communistes (cochons) et capitalistes (fermiers), chou vert et vert chou. 🙂

  39. Avatar de antoine
    antoine

    @ Moi.
    L’Empire est une chose, la Cite une autre, l’Etat encore une autre, et le Canevas encore autre chose.
    Quel rapport avec l’état de nature? L’état de nature n’existe pas. C’est bien la peine que je me sois pris la tete à tout expliquer…
    « Nozick veut juste changer l’oppression de l’Etat hégélien par l’oppression directe des individus entre eux… si vous le dites. Il faut aborder les choses sereinement. Nozick essaie de trouver un meilleur mode de gouvernement. Libre à vous de penser que le contrat n’est pas rempli. Mais présenter les choses ainsi me semble relativement « partial » et « injuste » du point de vue des intentions mêmes de l’auteur. Pour ma part, par exemple, je trouve que le concept de contrainte connexe est une idee extraordinaire qui suffirait à elle seule, intégrée à la théorie démocratique « des gentils » (puisqu’il y a les mechants et les gentils si je comprend bien), de refonder en profondeur la théorie de la responsabilité (et ca vaudrait aussi pour les banquiers). Mais il y aurait des tonnes d’autres exemples de « bon » usage qu’on pourrait faire des intuitions de Nozick.

    Mon cas concret etait dans une société ACTUELLE. Et en tant que justiciable les citoyens n’ont rien à dire sur la question (on ne choisit pas son magistrat). Et quand bien même, ce n’est pas comme ça que les choses se passent dans le canevas ( mais je reconnais que c’est l ‘une des parties les plus difficiles). Reste que quand bien même ca ferait une énorme différence. Remplacez « femme voilée » par « femme tout court ». Et demandez vous si l’origine et la modalité de l’exclusion ne fait pas de différence du point de vue du vécu. Tout est dans la nature du lien, de la relation, dans l’intersubjectivité, et pour le coup, en bon hégélien, je dirais que les conditions et modalités du refus de reconnaissance font une énorme différence. Je suppose que votre réponse n’est pas très éloignée de celles qu’auraient donné les hommes détenant le monopole sur cette fonction (on continue comme avant parce que « pour nous » ca ne change rien… ben voyons).
    (Le fait de soupçonner qu’une magistrate, parce qu’elle est voilée, serait susceptible de ne pas aller dans le sens de vos intérêts, alors qu’elle ne fait qu’appliquer la loi, donc de mettre en cause implicitement sa partialité pour cette raison même, n’est pas permis dans le canevas non plus. On choisit dans certaines limites entre différents codes, mais pas son magistrat… il en va autrement pour les avocats).

    Si ca ne fait pas de différence, alors ça ne devrait vous poser aucun problème… Maintenant étendons ça à toutes les sphères de la vie sociale… vous parviendrez au canevas, et encore une fois, ca ne fera « aucune différence » (quoique apparemment si) 🙂
    Bref ceci pour montrer le lien entre « communautariens » et Nozick. Je me garderai bien de donner mon avis sur la question.

  40. Avatar de ghost dog
    ghost dog

    @moi,

    yep ! merci pour la précision…en même temps ce concept d’intérêt me chiffonne…parce qu’il est sous-tendu par cette idée d’un individu fondamentalement égoïste…et qui décide …de le rester !

    c’est de la philo politique mais aussi …morale ! Alors il est où l’espace qui prend en compte la capacité de l’individu à refuser de se laisser guider par son seul égoïsme…ou intérêt individuel. hein Moi :°)

    Y’a pas un penseur de philo politique qui a réfléchit à un système qui prendrait en compte des individus fondamentalement égoïste mais dont l’humanité enrichit par le contact à l’autre leur donnerait la volonté de développer de l’empathie ?

    Je dis ça parce que je vois pas en quoi Rawls remet en cause le sacro-saint principe anthropologique utilitariste de l’homme fondamentalement égoïste. Genre c’est tranché, circulez y’a rien à voir…

    désolée de cette intervention un peu cavalière…je compte sur Antoine pour y remettre bon ordre…:°)

    Merci à lui en passant pour sa pédagogie et de nous faire partager ses connaissances.

  41. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    Le problème, c’est qu’en l’absence d’un Etat, on ne voit pas très bien quelle instance imposerait des limites. L’auto-régulation est un leurre. C’est frappant chez Milton Friedman, pour qui tout rapport humain est une sorte de contrat entre parties librement consentantes. Mais sur le marché du travail, s’il n’y avait pas un salaire minimum garanti par l’Etat, n’importe quel salarié accepterait quasiment de crever de faim pour avoir du travail et survivre. Les apparences seraient sauves: il y aurait contrat entre parties librement consentantes et pourtant l’une des parties serait radicalement lésée, d’autant plus lésée qu’elle aurait accepté une condition inhumaine au nom de la liberté définie par celui qui la lui impose. On n’en est pas loin mais s’il n’y avait pas d’Etat, ce serait encore pire.

  42. Avatar de Bob
    Bob

    @ Moi dit

    Entièrement d’accord avec vous, c’est pourquoi cet ouvrage n’est pas spécialement anticommuniste mais renvoit les deux systèmes dos à dos.

  43. Avatar de Jérémie
    Jérémie

    Tout ce qui pourrait me cacher plus longtemps m’arrange bien évidemment.

    Ce que nous devons d’abord voir et penser de l’homme, dépend surtout de son statut matériel.

    L’homme marchand pense et s’exprime pareillement comme autrui c’est l’individualisme collectif.

    La réussite de l’individualisme, c’est la place très haute que l’on occupe fièrement loin de l’homme.

    Dans une communauté d’intérêts, il y a danger dès qu’un membre devient trop puissant. [Jules Mazarin]

    Dans la sécheresse on découvre les bonnes sources ; dans la détresse, les bons amis. [Proverbe chinois]

    Quelle est la voix que nous devrions toujours suivre en société pour mieux nous cacher encore.

    Dans la richesse vous avez beaucoup d’ami(e)s flatteurs ; dans l’épreuve, bien peu sont là.

    Et plus ils deviennent individuellement riches et plus le monde s’en désole et en souffre.

    Fort heureusement, chaque réussite est l’échec d’autre chose. [Jacques Prévert]

    L’homme solitaire pense seul et crée des nouvelles valeurs pour la communauté. [Albert Einstein]

    Dans tout capitaliste ou socialiste je peux voir encore un homme qui se cache.

    La seule réussite d’un seul, n’apporte pas toujours plus de joie à une société.

    Les livres du libéralisme comme du socialisme ne font du bien qu’un temps.

  44. Avatar de Mathieu
    Mathieu

    @Ton vieux copain Michel dit :
    29 juillet 2009 à 18:23

    C’est exactement le constat de Philippe Van Parijs pour transformer la liberté abstraite ou purement contractuelle des libertariens (ce qui compte c’est que la règle ait été respectée, pas là où on arrive) à la notion de liberté réelle qui demande beaucoup plus (et en particulier, l’éducation, la santé, l’intégrité physique, et, last but not least, une allocation inconditionelle, sorte de une position de repli qui permet de ne pas devoir accepter n’importe quoi comme emploi/travail/activité). Très loin des libertariens donc, mais en partant des prémisses qui y ressemblent linguistiquement beaucoup.

  45. Avatar de Aurélien
    Aurélien

    Bonjour,

    lecteur plus que commentateur des textes et des discussions de votre blogue, je me décide à apporter une petite idée, un petit point de vue sur cette question.

    Je voudrais repartir de ce qui est exemplifié dans votre texte à travers la figure d’Antigone.
    Il me semble que les Modernes, d’une certaine manière à la suite des Anciens, ont toujours pensé la société comme ne pouvant être qu’un « objet » de « gouvernement ». Une société, infiniment plastique, parce que néanmoins faite d’individus, sous les forces de « gouvernement ».

    Pourtant Antigone démontre autre chose, qui est justement le fait qu’une société génère des formes politiques et de gouvernement, sans pour autant leur abandonner son devenir non plus que l’ensemble de sa régulation. Si vous me passez l’hypostase, je crois que la plasticité d’un société est certes une réalité, mais le plus souvent très relative, et que par ailleurs considérer que ceux qui placent plus haut que les règles politiques certaines règles toutes aussi sociales, quoique moindrement publiques, ne font pas autre chose que ramener la chose publique à sa place.

    Je donnerai un exemple personnel:
    dans mes montagnes natales, je me souviens d’un « jeu », d’une question que nous nous posions souvent entre petits garçons et jeunes adolescents. Une question régulière, un test, un dilemme auquel pourtant une seule réponse correcte était attendue:
    « Si quelqu’un tue quelqu’un de ta famille, qu’est-ce que tu fais ? »
    La seule réponse correcte à nos yeux étant bien sûr: « je le tue ». Tout en sachant déjà qu’il s’agissait non seulement d’un interdit grave, mais également que la loi (en tout cas quelque chose) voulait se charger de régler le problème à notre place.

    Il n’est pas dit aujourd’hui que ce soit cette option que mes camarades et moi choisissions. Néanmoins, en y repensant, je trouve ce même genre de conflit dans la société de mes montagnes, et ses petits villages, qui plaçaient le devenir de leurs grandes familles locales bien avant et plus haut que toute considération politique plus globale, et situaient la source de la Loi tout autant dans un ensemble non-dit et non-écrit, une société, que dans la législation réelle.

    Peut-être cela apportera-t-il de l’intérêt à cette discussion, ou du moins une petite historiette…

    Merci de vos textes et discussions toujours très intéressants, clairs, et ô combien pertinents pour donner à comprendre ce qui se trame dans la transparence financière.

  46. Avatar de Bertrand
    Bertrand

    @Ton vieux copain Michel :

    « Le problème, c’est qu’en l’absence d’un Etat, on ne voit pas très bien quelle instance imposerait des limites. L’auto-régulation est un leurre. C’est frappant chez Milton Friedman, pour qui tout rapport humain est une sorte de contrat entre parties librement consentantes. »

    Alors nos vies valent plus que leurs contrats !

    Et c’est encore plus frappant chez David Friedman qui ira jusqu’à donner une légitimité « anarcho-capitaliste » à l’Islande de l’an 1000, parce que cet exemple historique donne une légitimité à une communauté régie par des contrats réels et tacites plutôt qu’un Etat organisé, tandis que la réalité était déjà une ploutocratie où régnait la loi du plus fort !

  47. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    @ Moi

    Il s’agit tout de même d’une critique du socialisme ou du communisme, car la logique de la fable repose sur le principe d’égalité que certains protagonistes vont amender et édulcorer par la suite avec des tas d’exceptions et de cas particuliers. Si l’on devait écrire une fable du même type sur le capitalisme, il faudrait partir d’autre chose, du mythe de l’auto-régulation par exemple.

  48. Avatar de antoine
    antoine

    @ Boukovski
    La légitimité ou l’acceptation sociale de la peine n’ont rien à voir avec la justice ou l’injustice d’une décision. De même la justification de la peine n’a rien à voir avec la justification de l’institution judiciaire en tant que telle. Les deux peuvent être justifiés pour des raisons différentes (disons un argument déontique pour l un et un argument conséquentialiste pour l’autre, par exemple).
    Mais on ne voit pas en quoi, à l’inverse, sachant cet état du droit, les justiciables d’une confession X ou Y ne seraient pas tenté de perdre leur confiance dans l’impartialité du système judiciaire, ce qui a autant d’implications en terme de légitimité…
    (Auriez vous osé donner la même réponse s’il s’était agi de « femmes » et non de « femmes voilées » dans l’ exemple cité ;-)? Auriez vous utilisé la « légitimité » pour signer un chèque en blanc aux pires attitudes, qui violent manifestement les règles de respect mutuel entre égaux… pour le coup là, on n’est vraiment dans le « je prend ce qui m’arrange ». Prenons l’exemple d’une infirmière ou d’une doctoresse alors…). Cette légitimité n’est pas à gagner par le magistrat mais elle lui est DUE par les justiciables et NON NÉGOCIABLE dans une démocratie. Il n’y a pas à conquérir le cœur des condamnés.

  49. Avatar de Bob
    Bob

    @ Ton vieux copain Michel

     » En l’absence d’un État, on ne voit pas très bien quelle instance imposerait des limites  »

    La conscience de chacun de sa dignité d’homme, devrait déjà imposer beaucoup de limites. Des siècles de soumission à l’autorité nous a bien formaté.
    Lorsque j’observe mon chat, je suis toujours sidéré par la relation qu’il a su établir avec moi « d’affectueuse distance » toujours digne, jamais servile le type même de contrat librement consenti.

    Mais sur le fond je suis d’accord avec vous, dans l’état actuel, l’auto régulation est un leurre.

  50. Avatar de Bob
    Bob

    Ton vieux copain Michel

    : » Il s’agit tout de même d’une critique du socialisme ou du communisme, car la logique de la fable repose sur le principe
    d’égalité que certains protagonistes vont amender et édulcorer par la suite avec des tas d’exceptions et de cas particuliers. Si l’on devait écrire une fable du même type sur le capitalisme, il faudrait partir d’autre chose, du mythe de l’auto-régulation par exemple. »

    Sauf erreur de ma part, l’égalité est aussi un principe de base de notre république et que je sache nous sommes encore sous régime capitaliste. Or tout le monde peut constater qu’en matière de fable celle de Lafontaine: » selon que vous serez puissant ou misérable…….. » s’applique encore très bien de nos jours. Nous sommes loin des idéaux de 1789 me semble t-il, c’est en cela que je trouve que ce pamphlet s’applique très bien aux deux systèmes.

  51. Avatar de Moi
    Moi

    @antoine :

    « L’Empire est une chose, la Cite une autre, l’Etat encore une autre, et le Canevas encore autre chose.
    Quel rapport avec l’état de nature? L’état de nature n’existe pas.  »

    Désolé, j’aurais dû donner une définition de ce qu’est l’état de nature. Pour moi, l’Empire, la Cite le Canevas, ou l’Etat, c’est toujours l’état de nature sous plusieurs formes. L’état de nature est la réalité, ce qui existe. La réalité c’est que tous les hommes, depuis toujours, naissent dans un groupe (au minimum une famille) car aucun homme n’est apparu spontanément (sauf Adam et Eve, mais personne n’y croit). Autrement dit, le groupe est l’état de nature et peu importe la forme qu’il prend on ne sort jamais de cet état de nature sauf, de manière éphémère, à ce qu’il y ait une guerre atomique et un seul survivant ou que tel Robinson on échoue sur une île déserte.
    Au passage, petite question vicieuse : si l’état de nature n’existe pas, pourquoi les libertariens l’utilisent-ils continuellement dans leur argumentation? (les philosophes du contrat social croyaient en l’existence de ce qu’ils appelaient « état de nature », bien qu’ils ne se référent pas tous par là à la même chose, sans quoi ils ne l’auraient bien entendu pas utilisé dans leur argumentation)

    « Mon cas concret etait dans une société ACTUELLE. Et en tant que justiciable les citoyens n’ont rien à dire sur la question (on ne choisit pas son magistrat) »

    Où voulez-vous en venir? Si votre objectif est de décrire la société actuelle, la magistrate n’a rien non plus à dire et le débat est fini. Au départ, vous parlez d’une situation qui n’est pas actuelle (une magistrate pouvant exposer ses croyances religieuses dans un cadre libertarien: « vous etes plutôt libertarien si vous pensez que les magistrates musulmanes devraient pouvoir porter le voile pendant l’audience si elles le souhaitent ») et puis ensuite lorsqu’on vous dit que dans le cadre que vous imaginez cela ne se passerait ainsi, vous rétorquez que votre cas était dans une société actuelle. Bigre. Au passage, je signale que Nozick agit continuellement de la sorte, toujours à passer de la situation actuelle à un cadre théorique selon les besoins de l’argumentation. Il s’agit là de techniques de sophistes.

    « on continue comme avant parce que “pour nous” ca ne change rien… ben voyons »

    Ce que je voulais dire c’est que dans un cadre libertarien de culture chrétienne comme dans le cadre actuel, la magistrate voilée y serait exclue. Donc que l’exclusion ou pas de la magistrate voilée ne dépend pas du cadre politique (libertarien, totalitaire, démocratique, peu importe) mais des valeurs collectives. Le jour où dans notre société, le musulman ne sera pas considéré comme l’Autre, le voile ne posera pas problème pour devenir magistrate et cela même si la forme de l’Etat ne change pas.

    « Le fait de soupçonner qu’une magistrate, parce qu’elle est voilée, serait susceptible de ne pas aller dans le sens de vos intérêts, alors qu’elle ne fait qu’appliquer la loi »

    La loi ne s’applique pas aussi aisément que cela, justement. Il y a de l’interprétation, de la subjectivité, de l’humain. Sans quoi il n’y aurait pas de magistrat, mais un programme informatique dans lequel on met les données du conflit en input, qui les passerait à la moulinette de la loi et qui sortirait la sentence directement sur l’imprimante.
    Enfin, bon, tous les avocats savent qu’il vaut mieux avoir tel ou tel juge pour telle ou telle affaire. Et qu’il n’y a pas plus égalité devant la loi selon que vous soyez pauvre ou riche, blanc ou noir, etc (je parle évidemment de la situation ACTUELLE, pas de la théorie).

    Précisons enfin que je ne parle pas de MES intérêts. Sans quoi j’aurais pour ma part tendance à choisir la magistrate voilée. 🙂

  52. Avatar de Moi
    Moi

    @ghost dog : « Y’a pas un penseur de philo politique qui a réfléchit à un système qui prendrait en compte des individus fondamentalement égoïste mais dont l’humanité enrichit par le contact à l’autre leur donnerait la volonté de développer de l’empathie ? »

    Oh, vous savez, l’empathie n’est pas dénuée d’égoïsme. Pourquoi pensez-vous que l’on écrase fébrilement l’araignée et qu’on s’apitoie sur le koala… 🙂

    Plus sérieusement, j’ai lu il y a quelque temps des recherches intéressantes sur la coopération. En résumé, la conclusion était qu’elle ne s’oppose pas à l’intéret égoïste mais le sert. C’est pourquoi nous vivons en meute. C’est juste que certains veulent profiter des avantages de la coopération (globalement positifs) sans en subir les inconvénients.

  53. Avatar de iGor milhit

    pour cette question de l’intérêt égoïste, j’ai apprécié la lecture de:
    Frédéric Lordon. – L’intérêt souverain, une manière de s’opposer à l’utilitarisme sans pour autant croire à l’illusion de l’action désintéressée.

  54. Avatar de Boukovski
    Boukovski

    @ antoine

    Dans la pratique, il ne peut y avoir de justice sans acceptation sociale de la peine (par le plus grand nombre s’entend). Sinon, ce n’est plus de la « justice » mais autre chose (en tout cas pas une démocratie) .Si vous avez des contre-exemples… La justice est une fonction sociale et non un simple mécanisme abstrait et désincarné de distribution de peines. Elle concoure à réguler la société. Sans acceptation de l’institution, pas de légitimité. Les déçus feront leur justice eux-même. Sans légitimité, pas de régulation. Sans légitimité de l’institution, pas de légitimité de la décision de justice. Une décision de justice inique sera opérante si la société dans son ensemble continue de lui reconnaître cette légitimité (ex: affaire d’Outreau).

    Une « Femme voilée » qui rend la justice est un cas de figure différent de « femme » qui rend la justice. L’exposé d’une croyance religieuse n’est pas une manifestation neutre. Une croyance religieuse donne une interprétation de la réalité, qui peut déboucher sur une manière particulière de gérer la société, qui peut ne pas plaire à toute la société. La manifestation d’un genre (masculin, féminin) n’a aucune prétention de cette sorte et sera donc certainement acceptée sans difficulté par les justiciables.

    Le problème n’existe plus si la société dans son ensemble continue de reconnaître comme légitime une institution alors même qu’elle sert de tribune à tel ou tel courant religieux. C’est donc surtout une question pratique et non philosophique: qu’est-ce qu’une société à un instant donné est prête à accepter dans ce domaine ?.

  55. Avatar de iGor milhit

    d’autre part, quand il s’agit d’une « femme voilée », avez-vous pensé à la version chrétienne?

  56. Avatar de ghost dog
    ghost dog

    @IGor

    Merci pour la réf à Lordon, j’ai lu avec bcp de plaisir ses interventions sur son blog, dans le Diplo et même son petit bouquin sur la crise ! il a un style vraiment hilarant et très dynamique ! (son intervention chez ACRIMED ne manquait pas de piquant !).

    Grâce à vous , je vais découvrir son travail philosophique.

    Bonne soirée,

  57. Avatar de iGor milhit

    @ ghost dog

    c’est un peu mon plaisir que de glisser une référence ici, un lien par-là…
    Quand Lordon philosophe, il le fait avec son Spinoza à côté de lui… comme par exemple ce livre collectif, dont on trouve l’intro sur le site du journal du MAUSS : Un devenir spinoziste des sciences sociales ?

    j’avais aussi trouvé au moyen d’un fameux logiciel de P2P un .pdf de Lordon intitulé « Revenir à Spinoza
    dans la conjoncture intellectuelle présente » dont la lecture m’avait passablement intéressé. une défense intelligente d’une vision structuraliste, en opposition à la religion de la responsabilité individuelle.
    je vous l’envoie volontiers, soit par l’intermédiaire de M. Jorion (s’il le veut bien), ou plus directement si vous me donnez une adresse à l’adresse suivante:
    igormilhit@bluewin.ch

  58. Avatar de iGor milhit

    et il y a déjà pas mal de temps quelqu’un avait donné ici le lien vers une vidéo d’une conférence de Lordon et de Orléan invités par les Ars Industrialis: Conférence de Frédéric Lordon au théâtre de La Colline le 28 mars 2009 dans le cadre des débats : Le désir en économie et économie du désir organisés par Ars Industrialis, conférence dans laquelle Lordon fait passablement référence à son côté philosophe et son intérêt (si, si 😉 ) pour Spinoza.

    voilà, c’est tout pour ce soir…

  59. Avatar de logique
    logique

    M’enfin il veut peut être dire que nos société sont actuellement aux mains de quelsques d’individus, qui se foutent de la société et qui ne pensent qu’as leur porpres individualité, sortent de narcissisme mélangé a une volonté de puissance et de pouvoir ?

  60. Avatar de Amadou Kebe
    Amadou Kebe

    Je viens de commencer la lecture de « La grande transformation » de Karl Polanyi. Sa thèse est que « l’idée d’un marché s’ajustant lui même était purement utopique » (page 22).

    Polanyi rappelle que le principe du gain comme justification de l’action et du comportement a remplacé le principe de subsistance. De plus, le gain nécessite une organisation sociale basé sur le modèle du marché qui suppose un système autorégulateur de marchés. Selon lui, le marché autorégulateur est à l’origine de la création de l’Etat libéral.
    Ainsi, Polanyi conclut que « la dislocation provoquée par un pareil dispositif doit briser les relations humaines et menacer d’anéantir l’habitat naturel de l’homme » (page 70).

    Par ailleurs, Polanyi met en lumière 3 principes qui ont servi de base solide à la société :
    – le principe de réciprocité qui exige une organisation sociale basé sur le modèle de la symétrie
    – le principe de redistribution nécessitant une organisation sociale fondé sur le modèle de la centralité
    – le principe de l’administration domestique avec une organisation sociale s’appuyant sur modèle de l’autarcie

  61. Avatar de ghost dog
    ghost dog

    Merci Igor pour la proposition de PDF, vous ai envoyé un mail à l’adresse indiquée !

  62. Avatar de Crapaud Rouge

    Antigone est le prototype de ces « faux jetons » qui font prévaloir le privé (le devoir de sépulture envers un frère) sur le public (la trahison par Polynice de la communauté), tout en acceptant de la société tout ce qu’elle lui offre.

    Alors là, mon sang n’a fait qu’un tour ! J’aime Antigone comme si elle était une soeur, (chui un affectif, pas un intello…), alors, en faire le prototype de l’égoïsme, non, ça ne colle pas. Vous croyez que ça l’ »arrangeait » de finir enterrée vivante ? Car enfin, elle est là l’histoire ! Antigone va jusqu’au sacrifice de sa vie non parce que ça l’arrange, mais parce que c’est son DEVOIR, un devoir qu’elle juge supérieur aux calculs de ce crétin de dictateur borné qu’est Créon. Mais tout le monde conclue de cette prodigieuse histoire que « le public » doit primer sur « le privé », alors même que, dans le fond de l’histoire, il n’y a pas conflit : Créon ne voulait pas d’hommage public, mais celui d’Antigone à son frère, même s’il exige d’être connu du public, reste un hommage.

    Quoiqu’il en soit, on présente Antigone comme une orgueilleuse, mais pas comme une égoïste, même si elle a tout intérêt à pouvoir remplir son devoir d’état.

  63. Avatar de iGor milhit

    @ Crapaud Rouge

    merci! 🙂

    @ ghost dog
    c’est envoyé…

  64. Avatar de Crapaud Rouge

    La perte de sociabilité caractéristique des sociétés modernes commence par le renoncement au deuil ostentatoire et aux fastes des cérémonies funéraires. Les Africains, réputés plus sociables que nous, consacrent bien plus de fric aux enterrements qu’à leur santé. Antigone n’est pas le prototype de l’égoïste, mais de l’être humain sociable.

  65. Avatar de ghost dog
    ghost dog

    @Crapaud Rouge,

    C’est bien que souligniez ce point qui m’avait aussi profondément choqué et auquel je ne savais que répondre…En y réfléchissant, il m’apparaît que loin d’incarner le privé contre le public, Antigone c’était pour moi surtout la figure de la révolte, de l’adolescence, une rebellion contre un ordre inique, injuste.

    C’est vrai qu’on peut aussi envisager sa mort comme la garantie de la paix sociale, sa mort prouve que personne n’est au-dessus des lois, après tout elle est la nièce de Créon…et son propre intérêt ne peut être supérieur à celui de la cité…

    arf…Paul a jetté un beau pavé dans la mare…

    Antigone figure de l’égoïsme libertarien…dur…

  66. Avatar de Moi
    Moi

    @iGor milhit : merci pour les liens. C’est toujours un grand plaisir d’entendre Lordon.

  67. Avatar de Jérémie
    Jérémie

    Tout ce qui me flatte en matière de liberté et de raison, et rien de ce qui me flatte peu dans les livres d’autrui.

    Ce n’est pas toujours les mêmes idéologies opportunistes et à tour de rôle qui embellissent l’histoire.

    L’histoire du monde est le jugement du monde.[Johann Friedrich von Schiller]

    Les idéologies nous divisent, nous défigurent et nous entraînent tous à conduire les premiers le monde vers l’abime.

    Qu’est-ce que l’idéologie ? Elle est surtout d’abord et avant tout les propres penchants de l’autre.

    A quoi bon vouloir faire entendre plus longtemps le même vocabulaire idéologique à un chat qui se sent déjà très bien comme cela.

    Seul celui qui ne boit ne mange pas tous les jours la même chose est à même de juger de la qualité de la nourriture. [Alessandro Morandotti]

    Un libéral ou un socialiste qui se vante trop de ses succès idéologiques devrait surtout changer d’esprit de médecine.

    Mais non, nous préférons toujours nous conduire comme tant de judas dans les livres, toujours l’autre.

    On comprend peu les gens quand on les juge sans cesse.[Marie-Claire Blais]

    Il ne faut jamais juger les gens (ou les chats) sur leurs fréquentations. Tenez, Judas, par exemple, il avait des amis irréprochables. [Paul Verlaine]

    Ne juge pas avant d’avoir entendu les deux parties.[Philonide]

    Je rêve d’un monde ou plus personne n’osera dire qu’il porte avant tout telle ou telle marque de plus sur lui.

    Qui mieux que vous sait vos besoins ? Apprendre à se connaître est le premier des soins… [Jean de La Fontaine]

    On est meilleur juge des oeuvres des autres.[Daniel Pennac]

    On juge mieux les affaires d’autrui que les siennes propres. [Térence]

    Personne n’est juge en sa propre cause.[Saint Thomas d’Aquin]

    Quand je songe qu’un homme juge un autre homme, je suis pris d’un grand frisson.[Félicité de Lamennais]

    Règle d’or : ne pas juger les hommes d’après leurs opinions, mais d’après ce que leurs opinions font d’eux.[Georg Christoph Lichtenberg]

    On juge toute sa vie puis on comprend qu’il faut s’abstenir de juger hativement. [Jean-Marie Poupart]

    Le bon juge condamne le crime sans condamner le criminel.[Sénèque]

    Les hommes appelés à en juger d’autres devraient avoir fait un stage de deux ou trois mois en prison. [Marcel Aymé]

    Les délinquants font moins de mal qu’un mauvais juge.[Francisco de Quevedo]

    Chaque fois qu’un homme meurt, c’est pour lui la fin du monde et le jugement dernier.[Marie-Claire Blais]

    Ne jugez point, afin de n’être point jugés, car on vous jugera comme vous avez jugé, et l’on se servira pour vous de la mesure dont vous mesurez les autres.[Saint Matthieu]

    Si tu veux trouver du repos ici et là haut, dis en toute occasion : qui suis-je, moi ? et ne juge personne.[Abba Poemen]

    On peut juger de la grandeur d’une nation par la façon dont les animaux ou les malheureux y sont traités. [Gandhi]

    Si tu juges les gens tu n’as pas le temps de les aimer. [Mère Teresa]

    Ne juge personne avant de te mettre à sa place. » Ce vieux proverbe rend tout jugement impossible, car nous ne jugeons quelqu’un que parce que justement nous ne pouvons nous mettre à sa place.[Emil Michel Cioran]

    Et plus je continuerais à suivre telle ou telle idéologie et moins l’homme se conduira et s’exprimera autrement.

    Laissez-moi seul juger de ce qui m’aide à vivre.[Paul Eluard]

    Plus on juge, moins on aime. [Honoré de Balzac]

  68. Avatar de Paul Jorion

    C’est pourquoi, dans l’une des figures les plus sublimes qui l’incarnent, dans l’Antigone de Sophocle, la piété est représentée avant tout comme étant la loi de la femme, le loi de la substantialité subjective sensible, de l’intériorité qui n’est pas encore parvenue à sa complète réalisation, la loi des anciens dieux, des êtres souterrains, la loi éternelle dont personne ne sait quand elle est apparue et qui est représentée en opposition avec la loi révélée à tous, la loi de l’État. Cette opposition constitue l’opposition éthique suprême et, par conséquent, l’opposition au plus haut degré tragique, celle qui s’individualise dans l’opposition entre la virilité et la féminité. »

    Hegel, Philosophie du Droit, § 166, note.

  69. Avatar de Crapaud Rouge

    @Hegel: et c’est pourquoi, les intellectuels étant le plus souvent des hommes, il n’y en a pas un seul pour comprendre Antigone…

  70. Avatar de Paul Jorion

    @ Crapaud Rouge

    Le conflit d’Antigone, c’est la matière à tragédie : pour pouvoir payer Sophocle et les acteurs il faut s’assurer que le cœur de chacun se brise, hommes et femmes confondus.

  71. Avatar de Jérémie
    Jérémie

    Quand tu lis de nouveau Karl Marx ou alors un autre livre de plus de l’école autrichienne parce que tu sentirais parfois trop écœuré devant la conduite de certaines personnes devant cette grande tragédie humaine fait bien attention à toi quand même car le monde n’a guère mieux évolué spirituellement depuis l’écriture de ses livres…

    Je sais il m’arrive parfois de ne plus être dans le sujet la vaine opposition idéologique de tous contre tous, vers quoi cela nous mène aussi plus rapidement.

  72. Avatar de Maurice
    Maurice

    Pourquoi les programmes libertarien ou ultra-libéral n’ont jamais été appliqués nulle part?
    Parce qu’ils sont inapplicables.
    Les bourgeois néo-libéraux sont réalistes. Ils veulent diminuer l’ensemble des interventions sociales des Etats et accroitre le taux de plus value et le taux de marge au nom de la mondialisation « libérale » , ce qu’ils font depuis 1980. Les classes travailleuses paient leurs méfaits aujourd’hui.

    Leurs fils à papa comme le fiston de M.Friedman veulent soi- disant supprimer aussi l’armée et la police , les appareils répressifs d’Etat. Qui peut croire ce tissu d’inepties bonnes pour préados boutonneux?

    En fait l’Etat reste pro-capitaliste et contribue à créer la crise sociale et écologique croissante. Il a épuisé sa dynamique de développement durable. Il faut créer une alternative progressiste.

  73. Avatar de coucou
    coucou

    @Paul

    « Le conflit d’Antigone, c’est la matière à tragédie : pour pouvoir payer Sophocle et les acteurs il faut s’assurer que le cœur de chacun se brise, hommes et femmes confondus. »

    Un smiley/émoticône a-t-il été omis dans la phrase ci-dessus ?

    Sophocle aurait donc eu les mêmes motivationsqud’un auteur de soap-opera…Je me disais bien que la littérature fondatrice de la civilisation occidentale était surfaite !

    D’ailleurs, le dernier roman de Marc Lévy venant de sortir, je propose d’en discuter derechef…
    🙂

  74. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    Rien voir avec le sujet du fil mais sur le front de la spéculation, les Chinois feront bientôt beaucoup plus fort que les Américains.

    Une dépêche Bloomberg révèle que sur les 600 milliards USD du plan de relance chinois censé booster la consommation intérieure via des prêts bancaires, le quart, soit 150 milliards USD ont été immédiatement réinvestis dans la bourse chinoise, ce qui explique le bond de près de 80% de la bourse de Shanghai depuis le premier janvier.

    « The Shanghai index is up 79 percent this year, the world’s second-best performer after Peru among 89 equity benchmark measures tracked by Bloomberg. Stocks surged after the government unveiled a 4 trillion yuan ($586 billion) stimulus package in November and dropped lending restrictions to cushion the economy from a record slump in exports.

    Loans worth an estimated 1.16 trillion yuan were invested in the stock market in the first five months of this year, China Business News reported June 29, citing Wei Jianing, a deputy director at the macro-economics department of the Development and Research Center under China’s State Council. « 

  75. Avatar de Moi
    Moi

    @coucou: « Sophocle aurait donc eu les mêmes motivationsqud’un auteur de soap-opera… »

    Et quelles étaient les motivations de Sophocle? Faire réfléchir les philosophes?

  76. Avatar de Vincent Porel
    Vincent Porel

    Sophocle et ses personnages … tout les dépositaires d’une certaine vérité sur l’homme puisque leurs mythes ont traversés les siècles ne parlent pas de ce qui va arriver.

    Ce qui arrive aujour’hui appartient plus que jamais à demain, nous vivons la crise de demain, je ne vois aucun économiste ou sociologue ou … sérieux capable de se projeter dans ne serait-ce que 5 ans.

    Demain n’est mentionné ni dans les livres d’histoires ni dans la tragédie, sauf éventuellement Cassandre mais elle savait de quoi demain sera fait (J’omets les condamnations à « vie » façon Sysiphe).

    Nous allons sans doute apprendre du nouveau sur l’homme, pour ceux qui auront la chance de passer la prochaine décade sans bobo, cela va être extraordinairement intéresant.

    Cette crise de la monnaie fiduciaire est une crise de confiance de l’homme en … l’homme. La monnaie n’a servi que de cache misère/révélateur. Cela n’est jamais arrivé à ma connaisssance.

    A titre personnel, je crois en ce qu’a dit Malraux (je distingue le spirituel du religieux)

  77. Avatar de Dominique B
    Dominique B

    Peut-être Sophocle pensait-il que les représentations de ses tragédies contribueraient
    à employer des esclaves à des tâches plus édifiantes, et moins pénibles qu’à l’ordinaire ?

  78. Avatar de Vincent Porel
    Vincent Porel

    PS: Je pense que le Japonais qui a parlé de la fin de l’histoire en 1992 avait raison malgré lui.
    C’est effectivement la fin d’une très longue histoire.

  79. Avatar de Dominique B
    Dominique B

    Le début d’une désintoxication psychique, la sortie d’un très long envoûtement…

  80. Avatar de Jean-Baptiste

    Vivent les opportunistes, individualistes, l’intérêt vil enfin. La seule chose qui reste aujourd’hui est l’intérêt individuel vil et mesquin et une démonstration politique que cette somme d’intérêt fera le bien de la communauté. C’est évidemment idiot mais c’est aujourd’hui la règle et nos politiques vont dans ce sens pour se faire élire puisqu’eux aussi fonctionne par intérêt privé plus que public puisque chacun par empathie accepte l’inacceptable, moi d’abord, et si cela est au détriment des autres de toute manière je fais ce que la société « veut que je fasse » c’est à dire en fonction de mon intérêt.

  81. Avatar de Jean-Baptiste

    Une mauvaise définition de la liberté est celle que l’on entend souvent « ma liberté s’arrête où commence celle des autres ». C’est évidemment idiot et ne définit certainement pas la liberté en sous entendant que la liberté est de pouvoir faire tout ce qui n’est pas interdit quand cela me passe par la tête. Mais en fait rien que cela tue la vraie liberté celle de pouvoir faire les choses simplement parcequ’ utiles. Aujourd’hui l’utile n’est le plus souvent plus possible car il est entraver par une espèce de monde où tout le monde « triche » et considère que tant qu’il ne se fait pas attraper il à fait ce qu’il devait. Dans un monde où les lois changent en fonction de ce qui arrangent les uns ou les autres voire le plus grand nombre tel que la démocratie on en arrive à des lois à la place de règles. Et la vraie liberté n’existe plus en ayant vendu une pseudo liberté pour ceux qui n’ouvriront jamais ni un dictionnaire et encore moins un livre de philosophie. La pseudo liberté est celle que l’on nous a vendu c’est à dire que tout ce que pouvez faire est tout ce que vous pouvez payer et c’est à peu près tout ce qui reste et dans notre monde où l’on maintient un système de loterie à la fortune où chacun croit qu’il a une chance. Évidemment on « fabrique » les gagnants en prenant bien des médiocres mais qui pourraient nous ressembler comme exemple pour bien montrer la valeur de cet exemple et surtout pas quelqu’un de brillant qui ferait une contre démonstration catastrophique. (on massacrera socialement les gens brillants du même coup qui pourtant pourraient être le plus à même de faire avancer ou tout au moins servir au mieux la société). Cela coute peu 1 sur mille, un sur un million etc…. Chacun trouvera normal de voter pour son gosse où celui qui pourrait lui ressembler plutôt que celui brillant. On en revient à l’intérêt vil. La liberté pour le plus grand nombre reste uniquement un ticket de tombola qui laisse un « espoir » de pouvoir faire les choses au détriments des autres. C’est l’exploité rêvant d’être exploiteur. Et ce rêve là la masse vote pour car c’est ce qu’elle croit être son intérêt pas évidemment globalement mais individuellement. Belle démocraties !

  82. Avatar de Fab
    Fab

    Paul Jorion,

    « Tout ce qui m’arrange, rien de ce qui me dérange », ça fait très sous-titre…de blog ?
    En parlant d’Antoine et de société, http://www.wat.tv/video/societe-tu-auras-pas-renaud-xws3_jlzv_.html

    et

    « le point de vue de l’individu ne peut être envisagé qu’une fois la société définie comme son cadre ». Et réciproquement ! Perso, je soutiens que c’est l’oeuf qui a pondu la poule.
    http://www.youtube.com/watch?v=60vdHK4_dCQ

    « Le principe des États modernes a cette puissance et cette profondeur extrêmes de laisser le principe de la subjectivité s’accomplir jusqu’à l’extrémité de la particularité personnelle autonome et en même temps de le ramener à l’unité substantielle et ainsi de maintenir cette unité dans ce principe lui-même » (Hegel, Philosophie du Droit, VI). »

    Me voilà rassuré, j’ai en effet toujours pensé que ce qui se concevait bien s’énonçait clairement !

    http://www.youtube.com/watch?v=PVIHlUuIYY4

  83. Avatar de Crapaud Rouge

    @Paul:

    Le conflit d’Antigone, c’est la matière à tragédie : pour pouvoir payer Sophocle et les acteurs il faut s’assurer que le cœur de chacun se brise, hommes et femmes confondus.

    Pour illustrer la citation de Hegel, j’aurais plutôt citer les crimes de Khmers rouges qui n’hésitaient pas à tuer des bébés devant leur mère, et avec une méthode qui mettait bien en évidence leur virilité et l’origine céleste de leurs dieux : en les fracassant contre un arbre, comme une chose à disloquer.

    Antigone, c’est la révolte de l’humain contre l’inhumain. Il est inhumain d’empêcher une personne de rendre les honneurs à un proche disparu. (Peut-être faut-il l’avoir vécu pour le comprendre…) Sophocle ne cherchait pas à faire pleurer dans les chaumières, mais à montrer que la dictature devrait s’arrêter devant certaines limites. De manière générale, la loi des « nouveaux dieux » devrait s’incliner devant celle des anciens.

    Notons enfin que ce conflit, loin de n’être qu’une distraction théâtrale, est toujours d’une actualité tragique : partout où des états se comportent comme Créon, des gens vont en tôle pour avoir aidé des immigrés clandestins par respect de la loi souterraine et non écrite de l’hospitalité.

  84. Avatar de Balfrehin
    Balfrehin

    « PS: Je pense que le Japonais qui a parlé de la fin de l’histoire en 1992 avait raison malgré lui.
    C’est effectivement la fin d’une très longue histoire. »

    Fukuyama ? A l’occasion d’un article sur je-ne-sais-plus-quel-site il revenait sur ce livre écrit selon lui dans l’ivresse du (néo)libéralisme triomphant, et n’en faisait guère plus l’éloge.

    Quand au (néo)libéralisme, tant qu’il y aura ce genre de psychopathe navrant dans nos universités (cf. au jury de l’agrégation) : http://lemennicier.bwm-mediasoft.com/ je doute que je puisse y trouver quelque chose de séduisant.

  85. Avatar de Mathieu
    Mathieu

    Je pense qu’on peut être tous d’accord que:
    1) l’individu n’est rien sans la société
    2) la société peut être incroyablement oppressive vis-à-vis de l’individu
    3) la société est formée de manière essentielle par les individus qui la composent (mais pas seulement, la cultutre/l’histoire n’est pas complètement réductible aux individus)
    4) chaque individu a (ou peut avoir) une influence sur ce qu’est et ce que devient la société

    Toute la difficulté est de ne laisser tomber aucune des 4 affirmations quand on analyse une situation particulière, ou quand on discute philosophie politique. Moi j’ai du mal…

  86. Avatar de Moi
    Moi

    @Vincent Porel: « Je pense que le Japonais qui a parlé de la fin de l’histoire en 1992 »

    Francis Fukuyama est américain.

  87. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    Rien à voir avec le fil mais je signale l’article du New York Times concernant la situation de l’immobilier aux Etats-Unis. L’administration Obama a proposé des tas d’incitations financières aux organismes financiers qui accepteraient de modifier les termes des contrats hypothécaires des propriétaires ayant des difficultés à payer leurs mensualités. Mais les banques et d’autres institutions spécialisées en prêts hypothécaires préfèrent ne rien faire et laisser les propriétaires mariner dans une sorte de purgatoire avant la saisie de leur bien, car il y a beaucoup plus d’argent à faire sur le dos des emprunteurs en cas de saisie retardée. Absolument sinistre.

    http://www.nytimes.com/2009/07/30/business/30services.html?hp

  88. Avatar de Paul Jorion

    @ Ton vieux copain Michel

    J’en ai parlé il y a quelques jours dans L’industrie financière et le bonheur de tous.

  89. Avatar de Mathieu
    Mathieu

    @Ton vieux copain Michel

    c’est effectivement très sinistre. Mais c’est le business model du crédit aux US: les détenteurs de carte de crédit qui paient chaque mois sont un poids pour l’organisme de crédit; seuls ceux qui sont en retard de paiement sont profitables. On est très loin d’une activité économique qui « huile » la machine, et beaucoup plus près d’un système qui pompe jusqu’au dernier dollar des plus démunis. Sinistre indeed…

  90. Avatar de Jack Evols
    Jack Evols

    Sujet de préoccupation ôh combien fondamental, en effet, dans le contexte actuel !

    Si d’un point de vue paléoanthropologique, nous admettons que l’espèce humaine se situe à la pointe la plus avancée du monde du vivant dans notre biosphère, qu’elle est le produit d’une Evolution Universelle en complexification croissante et que rien ne permet de penser sérieusement qu’elle ait acquis le pouvoir d’en stopper la progression, pas même en s’auto-exterminant, il semble inévitable de s’interroger sur les différentes formes de futurs possibles qui s’offrent à nous ou que nous aurions envie de co-inventer dans le respect fondamental de cette progression ou EVOLUTION universelle qui nous transcende et que certains sacralisent !

    Accepter cette Evolution Universelle Grandissante qui nous fait toujours plus pénétrer dans « l’immatériel » en nous libérant des apories du matérialisme le plus totalitaire en pleine déroute et qui nous fait de plus en plus prendre en charge l’infra-réalité et la supra-réalité de nos devenirs (cf. notamment les découvertes les plus récentes de la physique quantique et de la recherche sur l’organogenèse en génie génétique et épigénétique) en plus de la complexification croissante du réel avec laquelle nous avons déjà fort à faire, signifie donc abandonner nos prétentions à « chosifier le vivant » comme l’espéraient les idéologues-manipulateurs du hasard tout-puissant et de la « main invisible du marché », et signifie « adhérer » à toujours plus d’interactions et d’interconnexions émancipatrices entre nos devenirs respectifs ; en même temps, accepter cette Evolution Universelle Grandissante, signifie aussi « adhérer » contre vents et marées à toujours plus de « beautés organisatrices » et à toujours plus d’unions, d’ententes, de coopérations, d’harmonies fondamentales au sein de notre biosphère et d’harmonisations de croissance portées en commun, ce que s’obstinent désespérément à refuser les libertariens trop préoccupés qu’ils sont sans doute, de faire prospérer sous des formes de plus en plus indécentes et génocidaires leurs prospérités individualistes ou communautaristes au détriment du BIEN COMMUN.

    Pourquoi alors, ne pas envisager une sorte d’effort subtilement partagé dans les nouvelles formes de d’inter-gouvernances ou d’inter-régulations à bâtir, de l’ordre d’un 50/50 comme l’on dit de manière imagée et volontairement simplificatrice en management des situations de crises, où les pouvoir-vivre-ensemble, vouloir-vivre-ensemble et savoir-vivre-ensemble conçus portés et promus par les écocitoyens organisés en réseaux d’éco-subsistance minimale protégée (50% de l’effort venant « d’en bas ») feraient émerger des modes d’inter-régulation non intrusifs et hautement émancipateurs qui puissent protéger, porter et contribuer à promouvoir le BIEN COMMUN au dessus et à l’abri des intérêts particuliers ou communautaristes (50% de l’effort venant « d’en haut ») ?

  91. Avatar de fujisan

    @Mathieu

    Je pense qu’on peut être tous d’accord que:
    1) l’individu n’est rien sans la société
    2) la société peut être incroyablement oppressive vis-à-vis de l’individu
    3) la société est formée de manière essentielle par les individus qui la composent (mais pas seulement, la cultutre/l’histoire n’est pas complètement réductible aux individus)
    4) chaque individu a (ou peut avoir) une influence sur ce qu’est et ce que devient la société

    Jen’ai rien d’un sociologue ni d’un anthropologue, mais je trouve votre division individu/société trop simpliste. Il y a différents niveaux, différentes sphères auquelles les individus s’identifient. Où placer vous dans votre schéma: famille, amis, voisins, relations professionelles, communatuté linguistique, spirituelle/religieuse, assoc, ONG, lobby, parti politique… ?

  92. Avatar de Moi
    Moi

    @Jack Evols: « nous admettons que l’espèce humaine se situe à la pointe la plus avancée du monde du vivant dans notre biosphère, qu’elle est le produit d’une Evolution Universelle en complexification croissante »

    Vous vous avancez un peu, voire beaucoup. Est-il certain que l’évolution va dans le sens de la complexification croissante?

    Débat intéressant sur la question ici: http://forums.futura-sciences.com/debats-scientifiques/175399-tendance-a-complexification-mythe-realite.html

  93. Avatar de Mathieu
    Mathieu

    @Fujisan

    Je suis entièrement d’accord que cette division individu/société est beaucoup trop simpliste pour la plupart des analyses, mais dans le contexte de ce que je voulais dire, c’était une distinction suffisante.

    Je ne suis non plus ni anthropologue ni sociologue, mais la lecture du fil me faisait penser qu’on peut facilement tomber dans l’excès. Excès libertarien en mettant l’accent sur 2) (peut-être pas Nozick et encore), excès communautariste ou étatique en mettant l’excès sur 1) (par exemple, c’est mon avis, Paul dans son texte ci-dessus), etc…
    Chaque courant de pensée repose en général sur une intuition assez consensuelle. Il est souvent tentant (et parfois productif), intellectuellement, de mettre en exergue une et une seule de ces intuitions, mais au risque de tomber dans la caricature.

    Tenter de construire une vision idéale de la société, compatible avec ces différents intuitions, est une tâche fondamentalement longue et difficile (qui parfois mène à mettre en cause certaines intuitions que l’on abandonne alors, à la manière socratique).

  94. Avatar de TARTAR
    TARTAR

    Tout çà pour çà ?
    Alors que l’age d’or (en France) était le temps de ce qu’ » »ils appelaient « économie-mixte ».
    Non pas femmes et hommes ensemble à la plage pendant les congés-payes, mais une RETARTITION SUBTILE des responsabilités de la sphère économique privée est des devoirs régaliens de l’état.
    Il semble raisonnable que les transports et l’énergie qui profitent à tous (comme police, justice et défense) échappent au « profit » d’une minorité.
    Nul besoin de faire appel aux philosophes grecs et allemands pour règler pragmatiquement la société du XXI°.
    Pour le reste le contrat suffit, bien qu’en général chacune des parties ait derrière la tête la volonté « naturelle » d’embobiner l’autre (ou bien un tiers qui n’apparait pas au contrat?).

    Aujourd’hui en France c’est La Poste qui va subir l’inénarrable gagnant-gagnant..de la privatisation avec comme majoritaire l’état et par la suite n’importe quel service public appartenant au privé…léonin!

    Je me marre.
    Jaune!
    Comme la poste.

  95. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    En effet Paul, je l’avais lu mais oublié. Trop d’infos! Cela dit, ça pose un problème intéressant. A quoi peut bien servir un incitant financier de l’Etat si les banques peuvent se faire plus d’argent en laissant les proprétaires s’enfoncer dans leur misère? A noter aussi la bonne consicence repue des vautours qui profitent de ce système. Ce sont souvent les mêmes rapaces qui ont vendu des prêts hypothécaires à des gens insolvables qui touchent maintenant les primes en cas de saisie. Ils ont récolté deux fois. Et on prétend que le crime ne paie pas!

  96. Avatar de Lisztfr
    Lisztfr

    http://criseusa.blog.lemonde.fr/2009/07/02/une-infographie-pour-comprendre-le-recul-des-bourses

    Un blog intéressant à surveiller :

    La part des salaires dans le PIB reste considérable. Une trop forte chute des salaires sous l’action de la dégradation du marché du travail aurait pour effet d’anéantir les effets attendus des dépenses budgétaires de relance et de soutien à l’économie. L’aggravation de la situation de l’emploi est donc une menace durable, elle constitue un des nombreux obstacles sur la voie de la sortie de crise.

    (…)

    Une forte contraction de la consommation aurait donc pour effet de plomber les efforts entrepris pour sortir de la crise. L’optimisme boursiers s’articule donc à une politique de compression des coûts qui peut est à très courte vue.

    (…)

  97. Avatar de logique
    logique

    Asez d’accord avec l’approche de complexification croissante. C’est d’ailleurs, là qu’est le problème. Combien d’individu pourront continuer a survivre dans un monde et une société complexifié. Car le revert de la médaille de la compléxification risque d’ammenner beaucoup de personnes vers la confusion. C’est d’ailleurs se que les médias ont commencé a faire.

    Il faut veiller a se que la complexification puisse être modélisé. Car si la complexification de la société doit ressembler aux subprime et autres produits compliqués, il y a de forte chance qui cela débouche sur un sacré bordel. Est pas un bordel financier se coup ci, mais un bordel social.

  98. Avatar de syl
    syl

    ANTIGONE

    WIKIPEDIA

    Dans la mythologie grecque, Antigone (en grec ancien Ἀντιγόνη / Antigónê ) est la fille d’Å’dipe, roi de Thèbes, et de la reine Jocaste.
    Elle est ainsi la sœur d’Étéocle, de Polynice et d’Ismène. Créon, son oncle, est le père de son fiancé Hémon.

    Après la mort d’Å’dipe, Antigone regagne Thèbes, où elle vit avec sa sœur Ismène. Polynice est venu avec les armées d’Argos pour reprendre le trône de Thèbes à son frère Étéocle qui refusait l’alternance prévue. Les deux hommes s’entretuent lors d’un combat singulier (voir guerre des sept chefs). Créon, le roi de Thèbes et frère de Jocaste, ordonne des funérailles solennelles pour Étéocle mais interdit qu’on ensevelisse son autre neveu. Antigone s’oppose, seule, à cette décision. Elle refusa de s’y soumettre. Enterrée vivante dans le tombeau des Labdacides, Antigone met fin à ses jours par pendaison.

    Hémon, son fiancé, fils de Créon, se tue sur le cadavre d’Antigone. En apprenant la mort de son fils, Eurydice, sa mère, se suicide. Créon reste seul, anéanti par ces disparitions successives et aspirant à une mort rapide. Il se tuera quelques semaines après.

  99. Avatar de Jérémie
    Jérémie

    Certaines personnes prennent parfois tellement « plaisir » à amasser toujours plus pour se faire violence, pour le faire davantage voir aussi à la société, tant de sinistres, de cyniques qu’ils en finissent même par se demander mais pourquoi les gens ne nous suivent plus aveuglément comme auparavant, par le reprocher même davantage dans d’autres livres de plus pour enfants, rêvant aussi beaucoup de liberté et d’amusement en plus, enfin le principal c’est qu’ils puissent toujours approcher et corrompre quelques autres enfants bien nés, sortant des beaux quartiers, le début de l’histoire des grandes écoles de commerce flatteuses et très précieuses quelle grande bande d’hypocrites quand même…

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