L’AVENIR DU PROGRES

Le 7 février prochain, je participerai aux Entretiens de l’Institut Diderot consacrés à L’avenir du progrès. J’aimerais connaître votre sentiment avant de composer mon exposé et je vous propose comme trame pour la discussion un texte que vous connaissez peut-être déjà parce qu’il constitue l’épilogue de mon livre La crise (Fayard 2008 : 313-328).

Les tâches et les responsabilités qui sont aujourd’hui les nôtres

Expliquer la nature en ses propres termes

On trouve sous la plume de Schelling cette pensée merveilleuse que l’Homme est le moyen que la nature s’est donnée pour prendre conscience d’elle–même. Les manifestations de cette prise de conscience ont adopté des formes diverses selon les lieux et les époques, et au sein d’une culture particulière, telle la nôtre, révèlent un processus en constante évolution. Faut-il alors reconnaître l’ensemble de ces manifestations comme également valides, la nature ayant eu autant de manières de prendre conscience d’elle-même qu’il y eut d’opinions exprimées ?

Aux débuts historiques de notre culture occidentale (la Chine est différente), un trait des représentations que l’Homme se fait de la nature et de lui–même en son sein, est que les explications produites ne parviennent pas à rester confinées dans le cadre qu’offre la nature elle–même, elles ne peuvent s’empêcher de s’en échapper constamment et invoquent un au–delà de son contexte : une mythologie d’agents inobservables et proprement « sur–naturels » La plupart des systèmes de croyance traditionnels sont de ce type, qui doivent couronner leurs chaînes explicatives par un « primus movens », un dieu introduit à un niveau arbitraire de la chaîne et censé rendre compte en dernière instance d’une famille de phénomènes liés entre eux pour des raisons essentiellement affectives.

C’est là qu’il convient de situer le critère de qualité minimum que doit présenter une conscience de la nature par elle–même : qu’elle trouve à se déployer entièrement au sein de son propre cadre, sans aucun débordement. La distinction est simple et permet d’écarter une multitude de tentatives ne présentant sur le plan conceptuel qu’un intérêt « documentaire » – même si elles jouèrent un rôle primordial dramatique dans l’histoire de la race humaine.

La pensée chinoise traditionnelle (essentiellement athée) a accompli cette tâche et, au sein de notre tradition, Aristote est le premier qui réussit cette gageure en proposant un système complet, composé d’une part d’observations empiriques de la nature, et d’autre part de « raisonnements » fondés sur celles–ci. Avec la philosophie d’abord, puis avec la « philosophie naturelle » qu’offre la science ensuite, des représentations de la nature sont produites qui ne requièrent rien d’autre comme termes d’un raisonnement, que sa décomposition en ses éléments et la description de l’interaction de ceux–ci à différents niveaux d’agrégation.

Le raisonnement, c’est évidemment pour Aristote, la faculté d’engendrer le syllogisme, c’est-à-dire, la possibilité d’associer deux concepts par le truchement d’un troisième – le moyen terme – auquel chacun d’eux est lié. La Raison s’assimile à la puissance du syllogisme d’étendre par ce moyen la « sphère d’influence conceptuelle » de chaque terme de proche en proche, de syllogisme en syllogisme, de manière potentiellement infinie. Ce pouvoir, c’est celui d’exporter une certitude acquise au–delà de son cercle immédiat. C’est dans la prise de conscience de la puissance du syllogisme par Socrate, Platon et Aristote mais aussi par leurs adversaires sophistes, Protagoras et Gorgias, que réside le miracle grec : la capacité d’expliquer la nature en ses propres termes.

Le moyen que la nature s’est offerte pour se surpasser

Notre espèce est, il faut bien le dire, mauvaise et agressive. Mal protégée dans son corps, elle n’a dû qu’à sa prédisposition à la rage de survivre aux affronts de la nature dont elle est une part mais qui aussi, l’entoure, et comme pour toute autre espèce, l’assiège. Les débuts de notre prise de conscience de la place qui est la nôtre au sein de ce monde, furent caractérisés par notre déni de cette hostilité de la nature envers nous. Les agents surnaturels que nous avons invoqués au fil des âges, dans nos religions et dans nos superstitions communes, nous permirent de construire l’image d’une nature beaucoup plus aimable à notre égard qu’elle ne l’est en réalité. En faisant intervenir dans nos explications des dieux créateurs du monde et des anges secourables, nous avons transformé les éléments qui provoquaient à juste titre notre frayeur en innocents trompe–l’oeils masquant un réel bienveillant existant au–delà des apparences. Ainsi, l’activité invisible de divers esprits signifie que la mortalité n’est qu’une illusion derrière laquelle se cache l’immortalité véritable, l’injustice mondaine cache la réalité de la justice divine, et ainsi de suite.

Ceci dit, il y eut à toutes les époques et en tous lieux, des esprits forts qui ne mirent pas tous leurs oeufs dans le même panier épistémologique et ne se contentèrent pas de consolations méta–physiques obtenues dans un univers parallèle et cherchèrent à éliminer notre inquiétude en s’attaquant de manière directe aux causes de nos frayeurs, à savoir en améliorant le monde tel qu’il nous a été offert. Et si ce monde est aujourd’hui vivable, tolérable, c’est bien parce que nous l’avons rendu tel par nos propres moyens et par eux seuls. Qu’un résultat partiel ait pu être obtenu est d’autant plus surprenant que notre hostilité à l’égard de nos congénères a toujours été extrême et que, comme l’avait déjà bien perçu l’anthropologue Johann Friedrich Blumenbach (1752–1840), nous avons été forcés, à l’instar de ce que nous avons imposé à de nombreuses espèces animales et à de nombreux végétaux, de nous domestiquer nous–mêmes à l’échelle de l’espèce tout entière.

Quelques milliers d’années plus tard, l’Homme assume aujourd’hui la place de ces agents surnaturels qu’il avait d’abord fantasmés : il s’est petit à petit, et avec une vitesse sans cesse croissante, glissé à la place où il avait d’abord situé ces esprits sans qui il s’était imaginé être incapable de vivre. Est–ce à dire qu’il est devenu par là démiurge lui–même ? Non, parce que la nature de ce dieu créateur était d’être un esprit, c’est–à–dire une fiction. Mais l’Homme est advenu lui–même à la place où il avait situé ces agents surnaturels. Or les actes secourables que ceux–ci produisaient sur le mode du miracle, il les produit aujourd’hui lui–même en guidant la nature vers la solution de ses propres problèmes. Ce faisant, il force par son industrie la nature à se dépasser. L’Homme n’est pas tellement, comme le voulait Schelling, le moyen que la nature s’est donnée pour prendre conscience d’elle–même que celui qu’elle s’est donnée pour se surpasser.

Le dessein intelligent

L’Homme permet à la nature de se surpasser de multiples manières. Il ne s’agit pas pour lui d’infléchir les lois naturelles mais de subvertir les conditions dans lesquelles elles opèrent lorsqu’elles sont laissées à elles–mêmes, en l’absence de sa propre interférence.

L’Homme a d’abord transcendé sa propre essence en échappant à l’emprise de l’attraction terrestre. Non pas comme l’oiseau qui découvre par le vol un autre continent et qui, malgré le caractère exceptionnel de cet exploit, reste fidèle à sa propre essence, mais en échappant à l’inéluctabilité de son environnement qui veut que tout corps est attiré vers le bas sur la planète où il est né. L’Homme a découvert par le calcul qu’une vitesse supérieure à 11,2 kilomètres par seconde permet de neutraliser la gravitation universelle telle qu’elle s’exerce sur la Terre ; il a ensuite construit la machine qui lui permet de réaliser cet exploit. L’Homme est désormais prêt à coloniser d’autres planètes, voire d’autres systèmes stellaires.

Un thème qui fut à la mode il y a quelques années fut celui de notre capacité nouvellement acquise à détruire un astéroïde mortel se dirigeant vers nous. Lorsque ces armes auront trouvé ainsi leur authentique destination, l’ironie apparaîtra en pleine lumière du fait que nous les avions conçues d’abord pour nos guerres intestines. C’est notre méchanceté à l’égard de nous–mêmes qui en avait constitué le motif initial. Quoi qu’il en soi, nous avons cessé désormais d’être une simple moisissure à la surface d’une planète pour être l’agent qui fait échapper celle-ci à son propre destin naturel.

De même, l’Homme a découvert par l’expérimentation que les êtres vivants sont déterminés dans leur anatomie et leur physiologie par un code inscrit au coeur de la cellule ; il a ensuite mis au point les techniques qui lui permettent de manipuler le génome et de redéfinir ce qui caractérise une espèce, assignant ainsi aux individus comme au phylum tout entier, une nouvelle destinée. Ces techniques lui ouvrent la voie vers son immortalité potentielle. L’animal, en raison de sa prudence, pourrait vivre indéfiniment, et c’est pourquoi sa mort – au contraire de celle de l’arbre – est inscrite dans son génome. L’Homme mourra toujours, bien entendu, mais comme l’arbre dont la mort n’est pas programmée : à l’instar d’une planète, sa vie est celle d’un compromis entre les influences qu’il subit et il finit par mourir accidentellement lorsque l’action d’autres corps sur lui supprime les conditions de sa perpétuation. L’Homme sera comme l’arbre qui meurt pour avoir été frappé par la foudre ou en s’effondrant sous son propre poids. Comme l’avait déjà compris Hegel, l’intelligence de la nature est de trois ordres :

  1. mécanique : le mouvement de corps indifférents les uns aux autres et qui se fracassent l’un contre l’autre s’il arrive à leur trajectoire de se croiser,
  2. chimique : les corps sont attirés ou repoussés les uns par les autres et leur combinaison débouche sur des composés aux propriétés originales,
  3. biologique : des corps organisés qui ne sont pas indifférents les uns aux autres anticipent leurs comportements mutuels. L’animal connaît lui aussi l’attirance et la répulsion, mais celle-ci n’est plus fondée comme pour la molécule sur une réactivité immédiate mais sur une anticipation de ce qui se passerait si l’attirance conduisait au contact qui pourrait s’avérer maléfique, ou au contraire si la répulsion interdisait un contact qui pourrait s’avérer bénéfique. Comme l’anticipation modifie le comportement et que cette modification est d’abord perçue puis anticipée par les autres créatures en interaction, les rapports entre animaux ne cessent de se complexifier avec le temps. Ainsi, l’escalade entre espèces qui se livrent la guerre et perfectionnent les moyens d’attaque et de défense, au fil des générations. (Hegel [1817/1830] 1987 : § 192 – § 298)

A cela, l’Homme a ajouté un quatrième niveau : le dessein intelligent, absent de la nature, et qui tire parti de l’analogie. Ce qui caractérise l’intelligence humaine, c’est sa capacité à l’analogie, son talent à reconnaître des formes semblables dans des phénomènes distincts, et ceci en dépit de la nécessité d’opérer souvent cette reconnaissance à un niveau d’abstraction très élevé. La nature, avant qu’elle ne prenne la forme de l’Homme, s’est révélée incapable de tirer parti de l’analogie : elle a dû se contenter de progresser en creusant des chenaux divergeant en différents branchements mais qui demeurent irrévocablement indépendants, privés de la capacité de se féconder mutuellement. Elle est obligée dans chaque cas de réinventer entièrement la solution du problème, de la forme la plus simple jusqu’à son expression la plus complexe, quitte à retomber alors, par la convergence, sur une solution unique et déjà découverte par ailleurs. Ainsi, l’oeil du poulpe, un mollusque céphalopode, est proche de celui des mammifères les plus évolués mais sans qu’il y ait eu emprunt d’une lignée vers l’autre : les phylogenèses qui conduisent à l’un et à l’autre ne se sont jamais rejointes. Chacune de ces évolutions résulte de ses propres contraintes, le résultat seulement d’une sélection naturelle due aux interactions des individus appartenant à l’espèce avec leur environnement et non à une dynamique interne – si ce n’est celle de l’ordre du ratage que constitue la mutation.

L’Homme, au contraire, fertilise des inventions parallèles en croisant leurs destins : il recycle les bonnes idées dans un produit qui en opère la synthèse ; ainsi, dans l’invention du saxophone à partir de la clarinette : divers inventeurs s’engagèrent dans des voies divergentes mais n’hésitèrent jamais à emprunter pour leurs perfectionnements ultérieurs des bouts de solution découverts par des rivaux ; dans la forme finale que prit l’instrument, diverses approches furent combinées, réconciliées. Si l’Homme permet à la nature de se surpasser, c’est qu’il est seul capable de ce dessein intelligent. L’Homme est aujourd’hui démiurgique, créature créatrice mais au sein–même de la nature, non dans son extériorité comme le serait au contraire un agent sur–naturel. Les apparences nous suggèrent qu’il est seul à disposer de cette capacité : d’autres créatures en disposent peut-être ailleurs ou au sein de ces univers parallèles dont nous parlent les physiciens, mais de cela nous n’en savons rien. Aussi, quand je dis l’Homme, je pense également à toutes les espèces qui auraient pu atteindre ce niveau de surpassement de la nature telle qu’elle leur était offerte.

Le dépassement de la nature par l’Homme n’a pas encore eu lieu dans la sphère économique

L’Homme est la conscience de la nature. Par la technologie et par le dessein intelligent qui le caractérisent et où il fait se rejoindre et se féconder réciproquement des lignées d’inventions indépendantes, l’Homme surpasse les lois de la nature telles qu’elles lui ont été offertes au moment où il apparaît dans l’histoire du monde. C’est par sa propre industrie qu’il a aidé la nature à se surpasser en forçant ses lois à se subvertir au sein d’un environnement localisé où il les a convoquées. La médecine a surpassé la nature livrée à elle–même quand elle pénètre au sein de la cellule et subvertit l’essence des espèces et du coup, leur destin. La rationalité engendre dans la technologie le dessein intelligent – absent de la nature dans sa créativité spontanée telle qu’en elle–même.

De ce point de vue, et parmi les institutions humaines, l’économie est une exception anachronique parce que son mécanisme, celui du système aujourd’hui quasi–hégémonique du capitalisme, existe sous la forme primitive, brute, de la nature non surpassée par l’Homme, à savoir, celle de la sélection par la concurrence absolue des espèces comme des individus et leur tri par l’élimination des plus faibles. Le prix qui établit l’étalon des rapports marchands se constitue à la frontière que détermine le rapport de forces, non pas, comme on l’imagine le plus souvent aujourd’hui, entre des quantités abstraites, mais entre les groupes concrets des acheteurs et des vendeurs, tous également situés au sein d’une hiérarchie cautionnée par un système politique. Ceci, Aristote le savait déjà. En finance, le statut d’acheteur ou de vendeur peut s’inverser rapidement pour un agent particulier sans que ceci ne remette en question la détermination sociale du prix par un rapport de forces.

Au sein de l’économie donc, l’empreinte de l’Homme n’est pas encore visible et la nature y agit sous sa forme brute et brutale : au sein de cette sphère, l’Homme n’a pas surpassé jusqu’ici la nature telle qu’il y est soumis simplement en tant qu’être naturel.

L’Homme a sans doute progressé sur le plan politique, comme en témoigne la croissance dans la taille des groupes au sein desquels il a vécu au fil des âges. Les sociétés de chasseurs–cueilleurs étaient constituées de bandes, les « hordes » des anciens auteurs, comptant une cinquantaine d’individus. Aujourd’hui les États réunissent plusieurs centaines de millions de nationaux mais dans un climat qui encourage et continue d’entretenir l’agressivité de l’homme envers l’homme, contre quoi les sociétés ont dû lutter pour arriver à constituer des ensembles de la taille qu’on leur connaît aujourd’hui.

Contrairement à ce qui s’observe pour l’organisation politique, ou avec les techniques qui permettent à l’Homme aussi bien d’échapper à sa planète, qu’à toucher du doigt l’immortalité de son corps, l’économie reste encore entièrement à domestiquer. C’est pourquoi, vouloir situer le marché au centre de la société, et prôner qu’elle s’organise à son exemple, revient en réalité à proposer que les sociétés humaines fonctionnent sur le modèle de la nature à l’exception de l’Homme, en faisant fi de ce qu’il a introduit au sein de la nature comme les moyens pour elle de se surpasser. Autrement dit, c’est retourner d’intention délibérée à l’« état de nature » où, comme l’a observé Hobbes, l’Homme est un loup pour l’Homme. C’est en réponse à Hobbes que Rousseau imagine une époque, qu’il appelle « l’âge des cabanes », âge d’un Homme naturel miraculeusement abstrait des rigueurs des lois naturelles, époque qui précède la guerre de tous contre tous parce que la source de l’agressivité y est encore absente, parce que le marché n’y est pas encore au centre des institutions, parce qu’en ces temps édéniques, nul n’a encore prononcé les paroles qui suffiront à faire d’un agneau, un loup : « Ceci est à moi ! »

Le modèle capitaliste de l’économie – contenu par des rambardes que l’État construit autour de lui – n’est donc autre que celui, darwinien, de la sélection par la concurrence, celui qui règne dans la nature livrée à elle–même. À l’instar des espèces, qui sont toutes par nature opportunistes et colonisatrices dans les limites que leur impose leur environnement, les entreprises n’ont d’autre rationalité que leur tendance à enfler indéfiniment. Des équilibres provisoires et partiels s’établissent cependant, dont le seul ressort est l’agression, comme au sein de la nature en général, tel celui du système prédateur–proie. Les tentatives d’imposer à l’économie un autre ordre que l’ordre naturel se sont limitées jusqu’ici à vouloir y transposer le modèle étatique ; ces tentatives ont été au mieux peu convaincantes et au pire désastreuses. Un nouveau modèle, non inscrit dans la nature avant l’Homme, devra cependant être découvert car, même si l’on était disposé à tolérer la manière dont il régit les individus, générant d’une part la richesse excessive et de l’autre, plus tragiquement, la misère et la mort, le sort qu’il impose à la planète tout entière est en tout cas lui intolérable, l’absence de freins qui caractérise sa dynamique ayant aujourd’hui mis en péril l’existence–même de celle-ci en tant que source de vie.

Conclusion

L’Homme est non seulement le moyen que la nature s’est donnée pour prendre conscience d’elle–même mais aussi celui qu’elle a découvert pour se surpasser grâce au dessein intelligent qui, à notre connaissance, caractérise notre espèce seule au sein de l’univers. La sphère de l’économie demeure elle encore réglée par la nature laissée à elle–même, à savoir par une sélection fondée sur le rapport de forces où le plus puissant écrase le plus faible, principe agressif dont l’emprise déteint alors sur l’ensemble des rapports humains.

De manière tendancielle, les inquiétudes touchent à leur fin, les frayeurs qui avaient conduit l’Homme à croire aux dieux ont perdu petit à petit de leur urgence et finiront par s’effacer. Bien que les injonctions de ces dieux fussent, sinon totalement absentes, tout au moins, sibyllines, nous demeurions convaincus qu’une mission nous avait été confiée par eux. Notre foi dans l’existence de celle–ci s’évanouit avec le crépuscule des dieux. Il nous est néanmoins loisible de constater quel a été le destin objectif de notre espèce jusqu’ici et de tirer de ces observations une ligne de conduite pour la suite, autrement dit, de définir quelles sont, au temps où nous vivons, les tâches qui nous attendent et les responsabilités qui sont les nôtres. Il s’avère que notre responsabilité essentielle est précisément d’assumer sans états d’âme ces tâches où le sort a voulu nous appeler [1].

Constatant quelle fut notre destinée, nous ne pouvons nous empêcher de comparer le pouvoir qui est devenu le nôtre à celui que nous avions attribué autrefois aux êtres surnaturels que nous avions imaginés. Ces dieux créateurs situés à l’origine, nous apparaissent maintenant n’avoir été rien d’autre qu’une image de nous–mêmes projetée dans l’avenir, un avenir qui ne nous apparaît plus désormais aussi lointain. Il reste cependant à éliminer de nos sociétés le règne de la nature non–domestiquée en son sein telle qu’il s’exerce encore dans la sphère économique et celles autour d’elle qu’elle parvient à contaminer. Du moyen d’y parvenir, nous ne savons presque rien. Lorsque l’Homme aura réussi dans cette tâche, il sera devenu le moyen que la nature s’est donnée de créer le Dieu qui lui fit jusqu’ici tant défaut.

Références :

G. W. F. Hegel, Précis de l’encyclopédie des sciences philosophiques, trad. J. Gibelin (1817/1830). Paris : Vrin 1987

[1] « Gémir, pleurer prier est également lâche. Fais énergiquement ta longue et lourde tâche Dans la voie où le sort a voulu t’appeler, Puis, après, comme moi, souffre et meurs sans parler. » (Alfred de Vigny, La mort du loup).

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403 réponses à “L’AVENIR DU PROGRES

  1. Avatar de pablo75
    pablo75

    Angot parlant de Rimbaud c’est comme Madoff parlant de Saint François d’Assise.

    1. Avatar de vigneron
      vigneron

      En attendant Madoff a plus fait causer d’lui dans les beaux salons et les bureaux « vue sur l’Hudson » ou sur « la Paradeplatz de Zurich » que mon bon Saint patronymique…
      Angot aussi, plus que Rimbaud, me direz-vous ?
      Peut-être mais j’crois aussi que le Madoff a fait bien plus de mal aux trous de balle dorés que tous les mon chéri qui parlaient aux oiseaux.
      A tort ? Sans doute…

      bref, je suis pas sûr qu’Angot n’apprécie pas qu’on la compare à Madoff, mais je suis quasi sûr que l’Arthur apprécierait modérément qu’on l’assimile à saint François d’assise. Malgré, ou à cause justement de vagabonds ou Ma bohème…

      « Ah ! cette vie de mon enfance, la grande route par tous les temps, sobre surnaturellement, plus désintéressé que le meilleur des mendiants, fier de n’avoir ni pays, ni amis, quelle sottise c’était. – Et je m’en aperçois seulement ! »

      (Alchimie du verbe)

      Et Vagabonds (il parle de son errance et des dernières « atroces veillées » avec Verlaine…) :

      Pitoyable frère ! Que d’atroces veillées je lui dus ! « Je ne me saisissais pas fervemment de cette entreprise. Je m’étais joué de son infirmité. Par ma faute nous retournerions en exil, en esclavage. » Il me supposait un guignon et une innocence très-bizarres, et il ajoutait des raisons inquiétantes.
      Je répondais en ricanant à ce satanique docteur, et finissais par gagner la fenêtre. Je créais, par delà la campagne traversée par des bandes de musique rare, les fantômes du futur luxe nocturne.
      Après cette distraction vaguement hygiénique, je m’étendais sur une paillasse. Et, presque chaque nuit, aussitôt endormi, le pauvre frère se levait, la bouche pourrie, les yeux arrachés, – tel qu’il se rêvait – et me tirait dans la salle en hurlant son songe de chagrin idiot.
      J’avais en effet, en toute sincérité d’esprit, pris l’engagement de le rendre à son état primitif de fils du soleil, – et nous errions, nourris du vin des cavernes et du biscuit de la route, moi pressé de trouver le lieu et la formule.

    2. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Au méchant Vigneron, qui fait si peur par ici déguisé en justicier de film de série B avec sa panoplie de mousquetaire à l’épée en plastoque mais qui, au fond, est un gentil garçon qui a seulement le vilain défaut d’adorer qu’on l’admire (énerver notre tranche-montagne préféré est un plaisir que j’ai beaucoup de mal à me refuser ;-)).

      « je suis quasi sûr que l’Arthur apprécierait modérément qu’on l’assimile à saint François d’assise ».

      Mais qu’est-ce que tu connais mal la grande poésie en général et Rimbaud en particulier ! Le jour où tu comprendras que les grands poètes et les grands mystiques boivent à la même source et font le même métier (explorer le Mystère, nous ramener de l’Au-delà des bribes de Vérité), tu auras fait un grand pas vers la Lucidité qui te manque tant dans tous les domaines qui touchent à l’Essentiel.

      Quant à ton « chéri qui parlait aux oiseaux », tu ferais mieux de voir le chef-d’oeuvre que Rossellini a fait sur lui en 1950 avec des acteurs amateurs (des vrais moines): « Francesco, giullare di Dio » (Les onze fioretti de François d’Assise) – même si, vu ton état d’esprit, il risque de te décoiffer sérieusement en te passant à vitesse supersonique au-dessus de la tête…

    3. Avatar de rodolphe B.
      rodolphe B.

      Rimbaud :Illuminations
       » SOLDES
      A vendre ce que les Juifs n’ont pas vendu, ce que noblesse ni crime n’ont goûté, ce qu’ignorent l’amour maudit et la probité infernale des masses ; ce que le temps ni la science n’ont pas à reconnaître  Les voix reconstituées ; l’éveil fraternel de toutes les énergies chorales et orchestrales et leurs applications instantanées, l’occasion, unique, de dégager nos sens  A vendre les corps sans prix, hors de toute race, de tout monde, de tout sexe, de toute descendance ! Les richesses jaillissant à chaque démarche ! Solde de diamants sans contrôle  A vendre l’anarchie pour les masses ; la satisfaction irrépressible pour les amateurs supérieurs ; la mort atroce pour les fidèles et les amants  A vendre les habitations et les migrations, sports, féeries et conforts parfaits, et le bruit, le mouvement et l’avenir qu’ils font  A vendre les applications de calcul et les sauts d’harmonie inouïs. Les trouvailles et les termes non soupçonnés, possession immédiate.

      Elan insensé et infini aux splendeurs invisibles aux délices i
      nsensibles, et ses secrets affolants pour chaque vice, et sa gaite effrayante pour la foule.

      A vendre, les corps, les voix, l immense opulence inquestionable, ce qu on ne vendra jamais. Les vendeurs ne sont pas a bout de solde.
      Les voyageurs n ont pas a rendre leur commission de sitôt. « 

    4. Avatar de vigneron
      vigneron

      @pablo

      Mais qu’est-ce que tu connais mal la grande poésie en général et Rimbaud en particulier !

      C’est c’la oui…
      Moi j’voyais plutôt la « grande » poésie (perso, j’préfère quand c’est petit ce genre de truc… mais allez, soit…) en déserteur qu’en général, mais bon p’têt un reste de franquisme… (…humour !)
      Et Rimbaud plus en singulier qu’en particulier, mais sans doute n’ai-je pas la félicité comme toi, Pablo Paris (« ment ! »), de sentir mon âme subir suffisamment les délices de la pression osmotique en éther rimbaldien…

      Tiens, de l’humour typiquement ibère pour se détendre, et atterrir en douceur…

      Un bébé naît. Il est tellement laid, tellement laid, tellement laid (dans les blagues espagnoles, on répète deux fois, m’demandez pas pourquoi, c’est comme ça, sans doute pour l’effet burlesque mais pas sûr…), que le médecin dit à la mère :
      – Lancez-le par la fenêtre, s’il vole, c’est une chauve-souris.
      (chute…)

    5. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Vigneron

      Oui, la grande. Moi ça me gène qu’on désigne avec le même mot de « poésie » celle de Li Po, Basho, Rumi, Dante, St. Jean de la Croix, Holderlin, Rimbaud, Rilke ou Blaga, par exemple, et celle de Parny, Delille, Béranger, Anna de Noailles ou Géraldy, pour ne te parler que de « poètes » français très célèbres à leur époque.

      « perso, j’préfère quand c’est petit ce genre de truc »

      Ok… Mais dans ce cas-là ne discutes pas de poésie (ou alors seulement de celle du vin).

      Quant à Rimbaud, si tu ne sais pas qu’il était fou d’ésotérisme (alchimie, kabale, occultisme), si tu trouves que ses « mystique », « voyant », « vision » et autres « alchimie » ne sont dans son oeuvre que par pur hasard, et si tu as compris ses « Illuminations » sans en avoir la clé ésotérique, qu’est-ce que tu veux que je te dise? Que tu relises au moins sa « Lettre du voyant » pour te rendre compte qu’il n’est pas de « ton côté »?

      Et si tu veux « sentir ton âme subir suffisamment les délices de la pression osmotique en éther rimbaldien », un conseil: traduis-le, comme je l’ai fait – ce qui est d’ailleurs la meilleure façon qu’existe de lire de la poésie.

      Pour finir, une histoire zen à méditer (autrement plus intéressante que la tienne soi-disant ibérique) :

      Un jeune moine parcourt des centaines de kilomètres à pied pour aller voir un grand maître zen qui habite dans un monastère isolé dans la montagne. Quand il arrive, on le fait attendre encore plusieurs semaines avant que le maître le reçoive. Un soir, enfin devant lui, il lui dit:
      – Maître, je viens de très loin pour vous poser une question.
      – Laquelle?
      – Je voudrais savoir quelle est l’essence du bouddhisme.
      Le maître, après un long silence, lui répond:
      – Tu as mangé ton riz?
      – Oui
      – Alors, va laver ton bol…

    6. Avatar de vigneron
      vigneron

      @pablito saint germain des prés (j’préfère en petit, Paris, c’est trop grand…)

      Grande Poésie, Grande Littérature, Grande Musique, Grande Pensée, Grande Peinture, Grands Initiés, Grande Kultur, Grandes Portes, Grandes Serrures, Grandes Clefs ésotériques, Grands Porte-clefs, Grande Lourdeur, Grande Chaine au cou, la Vie en MAJUSCULES…

      Désolé mon Grand pablito, j’ai un une sainte horreur de l’encombrement et voyage léger, sans porte-clefs, toujours et à jamais. Ne Vous déplaise.

      ps : Plus je te lis et moins j’aime Goya et plus j’aime Goya… c’est ballot…

      ps bis : ma (p’tite) maman était donc un (petit) grand maître zen. Té ! M’disais ben aussi…

    7. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Vigneron

      Mais qu’est-ce qui t’arrive? Tu as l’air KO debout. Ce que tu écris dernièrement est indigne de toi.

      Écoute-moi: fais une pause, reprend ton souffle, recharge ton pistolet à eau et surtout va voir ton ophtalmo pour éviter de te tromper de cible ou de tirer à côté (il y a déjà suffisamment de gens à côté de la plaque par ici pour que tu t’y mettes aussi).

  2. Avatar de daniel
    daniel

    La question semble finalement devoir être
    en rapport avec la finance. Et si ce n’est pas le cas
    L’institut Diderot est un bon moyen de diffuser
    des idées pratiques…

    Ne méprisons pas les idées simples et directes.
    Ne nous encombrons pas de considérations adventices.
    N’oublions pas qu’il ne s’agit pas d’un devoir scolaire.
    Un assaut d’ érudition est en apparence inutile, mais en apparence
    seulement: les destinataires sont des intellectuels -je le suppose-
    et non des praticiens. Il faudra donc essayer de les séduire.
    Etant issus du système scolaire français, quelques citations de penseurs
    anciens devraient faire l’affaire, mais on devrait aussi les contrebalancer
    par des citations issues du peuple – populaires donc.
    Le commerce de proximité en est une source inépuisable, sans oublier
    le coiffeur ou la coiffeuse. Songeons que ces gens-là,
    placés à l’interface entre les banques et le peuple,
    sont à la fois expérimentés et observateurs.

    Maintenant il s’agit de mettre en forme des idées simples:

    La finance actuelle est mortelle. Les exemples issus de 20 ans d’observations abondent. Etre dans le soixantaine donne l’avantage de pouvoir comparer. Et les comparaisons sont sans appel.
    Son influence sur les politiques ne témoigne pas d’une mystérieuse
    force, mais est le symbole d’une décrépitude ou d’une médiocrité
    des politiques. L’incontestable corruption -au sens juridique du terme-
    a pour origine une forme de corruption intellectuelle et morale.
    La Justice, réarmée, passera.
    La finance doit rentrer dans l’ intérêt commun tel qu’il était
    compris en 1945. Il avait fallut une guerre , une défaite initiale
    et des souffrances sans nombre pour le comprendre.
    La finance doit être subordonnée et servante
    de l’activité économique fondée sur le réel.
    Son euthanasie légale est une nécessité politique- à 80 %-
    Il faut donc la prévoir: nous ne pouvons pas
    promouvoir l’ idée de mettre à la rue des gens
    auto-évalués et sur-payés sans précaution et sans
    transition. L’exemple des révolutions, 1789 en particulier, montrent que la bourgeoisie est capable d’une violence extrême.

    Ces actions, étalées sur 5 ans environ,
    ne sont qu’un point de départ pour une revue
    de politique générale en matières sociales et écologiques.
    Nous n’avons qu’une Terre et elle s’épuise.
    Le partage d’ampleur mondial est inévitable.

  3. Avatar de Charles A.
    Charles A.

    Sur Wikipedia

    L’Institut Diderot se donne pour objectif :

    1.de rapprocher dans une démarche prospective commune les deux mondes de la recherche – sciences de la nature et sciences de l’homme – du monde économique,
    2.de contribuer à libérer la réflexion sur la société des partis pris idéologiques qui pèsent encore sur elle,

    Ca sent mauvais, déjà …
    Pauvre Diderot!
    Salir sa mémoire dans une entreprise de parti pris pour le monde économique…

    1. Avatar de Pierre-Yves D.
      Pierre-Yves D.

      Charles,

      Eh bien justement on compte sur Paul pour inverser la tendance : démontrer au monde économique que s’il continue de se considérer comme une sphère autonome juste bonne à être réaménagée en son sein et vers laquelle tout doit converger, il se trompe lourdement. C’est d’ailleurs tout le propos de ce billet, L’avenir du progrès que de remettre l’économie à sa place, dans une perspective tout à la fois historique et sociale.

      L’économie constitue un secteur spécifique indéniable dans la société en tant qu’elle touche à la production et la reproduction des conditions matérielles d’existence. En ce sens il y aura toujours de l’économie. Mais l’économie n’a jamais existé comme monde. Pour qu’il y ait un monde il faut des humains ; une société. L’économie constituée en monde est une invention récente à l’échelle de l’histoire de l’humanité.

    2. Avatar de Pierre-Yves D.
      Pierre-Yves D.

      La fin de mon second paragraphe n’est pas très explicite.
      Je précise donc que lorsque je dis que l’économie comme monde n’a jamais existé je signifie simplement que l’économie n’a jamais existé comme monde dont l’autonomie serait telle qu’elle ne devrait rien aux transformations sociales qui font son environnement. En toute rigueur l’économie n’a pas d’environnement, elle est partie prenante d’un milieu social.

      Le discours économique dominant comme l’a souvent remarqué Paul fait abstraction des acteurs sociaux pour ne conserver que des notions abstraites, des variables, dont l’ajustement obéirait à des lois sur le modèle des sciences de la nature. L’économie prétend depuis l’invention du capitalisme exister comme un monde autonome avec ses acteurs spécifiques immuables : salariés, producteurs, investisseurs. Ceci est une mystification, car ces acteurs spécifiques n’ont pu émergé qu’à la faveur d’un processus historique.

    3. Avatar de Paul Jorion

      Sur Wikipedia

      L’Institut Diderot est un institut français. C’est un fonds de dotation pour le développement de l’économie sociale régi par la loi n°2008-776 du 4 août 2008, a été créé en mars 2009 par Covéa, société de groupe d’assurance mutuelle qui réunit notamment la Mutuelle d’assurance des artisans de France (MAAF), les MMA (Mutuelles du Mans) et la GMF (Garantie mutuelle des fonctionnaires).

    4. Avatar de Ando
      Ando

      En effet, le nommer Institut Marx & Lénine eut été plus courageux.

    5. Avatar de Moi
      Moi

      @Pierre-Yves: ce n’est pas ainsi que j’avais compris le texte de Paul en première lecture. Je l’ai donc relu et effectivement on peut peut-être y voir que « l’état de nature » économique est une fiction qu’essaye d’imposer une certaine idéologie. Le passage est tout de même ambigu:

      « De ce point de vue, et parmi les institutions humaines, l’économie est une exception anachronique parce que son mécanisme, celui du système aujourd’hui quasi–hégémonique du capitalisme, existe sous la forme primitive, brute, de la nature non surpassée par l’Homme, à savoir, celle de la sélection par la concurrence absolue des espèces comme des individus et leur tri par l’élimination des plus faibles. Le prix qui établit l’étalon des rapports marchands se constitue à la frontière que détermine le rapport de forces, non pas, comme on l’imagine le plus souvent aujourd’hui, entre des quantités abstraites, mais entre les groupes concrets des acheteurs et des vendeurs, tous également situés au sein d’une hiérarchie cautionnée par un système politique. Ceci, Aristote le savait déjà. En finance, le statut d’acheteur ou de vendeur peut s’inverser rapidement pour un agent particulier sans que ceci ne remette en question la détermination sociale du prix par un rapport de forces. »

      Que le capitalisme essaye d’imposer une certaine économie supposée naturelle (dans le sens où « l’état de nature » de Hobbes est supposé naturel) mais qu’il n’y ait là rien de naturel, nous sommes vous et moi d’accord. C’est la démonstration de Polanyi et on pourrait peut-être aussi dire que les dernières avancées scientifiques remettent progressivement en cause la supposée naturalité de « la sélection par la concurrence absolue des espèces comme des individus et leur tri par l’élimination des plus faibles » (on commence à percevoir que la coopération compte au moins autant dans l’évolution des espèces).
      Donc, si l’économie capitaliste n’est pas naturelle (comme les autres avant le capitalisme), comment passe-t-on ensuite à une domestication de l’économie? Soit l’économie capitaliste est vraiment naturelle et on peut envisager une domestication. Soit l’économie capitaliste n’est pas naturelle et il ne s’agit pas d’imposer une domestication mais de changer de domestication.
      Et puis, comment passe-t-on du fait que la formation des prix est politique (la leçon d’Aristote) à l’économie du rapport de forces est naturelle et doit être domestiquée? Ce que je vois, c’est tout comme Aristote des rapports de forces politiques, donc rien de naturel (A moins que l’on considère la politique comme naturelle? Dans ce cas, qu’est-ce qui n’est pas naturel?). Ce qui fait la particularité du capitalisme, c’est un certain rapport de forces, pas que cela fonctionne autrement qu’avant son apparition. A moins que Paul ne pense pouvoir dépasser le problème politique? Comment?
      Pierre-Yves, je suis preneur de vos éclaircissements.

    6. Avatar de kercoz
      kercoz

      @ »MOI » (comte , deux mots):
      /////« De ce point de vue, et parmi les institutions humaines, l’économie est une exception anachronique parce que son mécanisme, celui du système aujourd’hui quasi–hégémonique du capitalisme, existe sous la forme primitive, brute, de la nature non surpassée par l’Homme, à savoir, celle de la sélection par la concurrence absolue des espèces comme des individus et leur tri par l’élimination des plus faibles. /////
      Cette affirmation est fausse (et vraie).
      VRAIE , parce que dans les groupes archaiques restreints, la « nature » de l’homme est aussi égoiste que dans nos groupes hypertrophiés.
      FAUSSE, parce que ds un groupe restreint , la « connaissance et reconnaissance » de l’autre maintient l’ affect comme intrant majeur ds les interelations (y compris économiques)
      FAUSSE parce l’aspect « négatif » du caractère de l’individu est freiné , contraint , limité par la proximité et meme inversé par les rites . Ce process limitatif n’est pas possible lorsque les individus ne se connaissent pas .
      FAUSSE parce que « la concurence absolue des espece » est une contrevérité : Les especes coopèrent; la totalité des interelations des chaines trophiques sont symbiotiques (exellente emission sur FR CULT sur la symbiose en ce moment ). Meme les prédateurs qui visent les memes proies se sont accordés depuis longtemps sur des territoires ou des process differents.
      Fausse parce que l »‘élimination des plus faibles  » (agressivité intra-spécifique) provoque rarement une élimination , mais plutot un eloignement ou une scissiparité des groupes.(les plus faibles ce sont les prédateurs qyui s’en chargent)

      Le problème est uniquement STRUCTUREL. Les caractères négatifs de l’humain ne deviennent pervers que lors du passage aux groupes importants (pour des raisons de gain de productivité). Il reste contraints et meme vertueux parce que structurant (hierarchisation) ds le groupe originel , le groupe restreint .

    7. Avatar de sylla
      sylla

      « La position de Diderot à l’égard de la religion évolue dans le temps, en particulier dans sa jeunesse. Ses parents le vouaient à une carrière ecclésiastique et il reçut la tonsure de l’évêque de Langres. Arrivé à Paris, son parcours académique se fait dans des institutions d’obédience catholique, comme la Sorbonne. C’est au gré de ses lectures que sa foi va s’étioler et Diderot semble évoluer de la foi vers le théisme, le déisme et enfin souscrire aux idées matérialistes. C’est cette évolution que l’on constate des Pensées philosophiques à la Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient. Plus tard, ces positions sont confirmées dans le Supplément au voyage de Bougainville qui évoque la religion naturelle et un dialogue très représentatif, l’Entretien d’un philosophe avec la maréchale de ***. À l’instar des Lumières, Diderot rejette plus les excès de la religion que la religion elle-même. Toute sa vie, il fut en conflit avec son frère sur ces questions. »
      un matérialiste déiste et conscient de l’être… les symboles sur le $ devraient lui faire plaisir…
      inverser la tendance me paraît utopique avec Aristote, Pierre-Yves.
      çà aura peut être le mérite d’être plus clair.

    8. Avatar de Charles A.
      Charles A.

      @ Pierre-Yves

      Tout à fait d’accord. L’expression « monde économique » n’est pas neutre.
      Elle vise à vendre leur « monde économique » comme si c’était un ordre naturel,
      comme le « monde animal », ou le « monde végétal ».
      Tous les discours de rapprochement de la recherche, de la science, de l’éducation,
      de la politique, et j’en passe, du « monde économique »,
      consiste à mettre les activités humaines au service de l’accumulation du capital.

  4. Avatar de sylla
    sylla

    mr Jorion, sur cet « Absolu » ou cette cause première…
    ou sur ce « je est un autre ».
    sur l’analogie…

    Les Logocrates George Steiner p14.15. :

    « Le point de vue « logocratique » est beaucoup plus rare et, presque par définition ésotérique.Il radicalise le postulat de la source divine, du mystère de l’incipit dans le langage de l’homme. Il part de l’affirmation suivant laquelle le logos précède l’homme, que  » l’usage  » qu’il fait de ses pouvoirs numineux est toujours, dans une certaine mesure, une usurpation. Dans cette optique,

    l’homme n’est pas le maître de la parole, mais son serviteur.Il n’est pas le propriétaire de « la maison du langage », mais un hôte mal à l’aise, voire un intrus.

    Les formes d’expressions les plus densément chargées, celle de la poésie, de la métaphysique et de la religion, résulteraient non pas du gouvernement du langage, mais d’une servitude privilégiée, de la capacité rare qu’a le rhapsode, le penseur ou le visionnaire d’ »entendre ce que dit le langage ».

    Ce modèle « logocratique est ancien. Il semble qu’il ait été au centre de ce faisceau d’attitudes connu sous le nom d’orphisme ; mais c’est à notre époque qu’il a été formulé avec le plus d’intransigeance. Ce n’est pas « l’homme qui parle le langage » mais « le langage qui parle l’homme » ou, dans sa formulation la plus lapidaire : « la langue parle« .

    La pierre de touche de la position logocratique, notamment dans ses habits modernes, est le recours canonique à deux textes. Le premier est le Cratyle. Le logocrate souscrit soit intuitivement soit en vertu d’une réflexion aux mots et aux sens. Les mots ne sont pas les jetons arbitraires de Saussure. Ils désignent et donc définissent la quiddité des êtres. Le second est l’énigmatique fragment sur le logos auquel Diels a assigné le numéro un de son édition des fragments d’Héraclite.

    De ce gnômôn ont été proposées presque autant de traductions qu’il existe d’absolutistes du langage. Il semble parler de l’octroi du logos à l’homme, de la présence et du présent (presentness) dans le logos de « tout ce qui est là », mais aussi de l’incapacité dans laquelle se trouve l’ordre commun de l’humanité d’appréhender le logos dans sa plénitude de l’être. Seul l’homme rare est ouvert à cette appréhension. Il est éveillé. Les autres laissent le don du logos leur échapper comme dans un sommeil.
    Ce que Parménide dit de l’ »être » et de l’ »unicité » de l’être avec et dans le dire et le sens du sens. »
    p28 29 :  » Parce ce qu’elle est « pure », la « logocratie » heideggerienne va plus loin encore. L’ »humanisme », au sens cartésien ou libéral, fausse de tout au tout la place authentique de l’homme dans la totalité de l’être. Il n’est pas au centre de cette totalité. Il n’est pas l’initiateur ni le possesseur du langage et du sens. C’est quand le « langage se parle à travers lui » que l’homme est au plus près de l’être véritable. Ce « contre humanisme », ou, à certains moments de sa vie et de sa pensée, cet « in humanisme », fait de Heidegger un autoritaire au sens le plus profond.
    (…)

    Dans cette note, je me suis efforcé d’indiquer certaines concordances nécessaires entre l’idée que le langage a une origine transcendante et recèle l’évidence plus ou moins manifeste du logos et la politique de l’autorité. Il se peut que l’argument ait des implications plus larges. Auquel cas, il pourrait n’être qu’une note en bas de page à la conclusion de William Hazlitt : « 

    le langage de la poésie rencontre naturellement le langage du pouvoir

    « .
    Bruxelles 1982 »
    (*note : p12 : « certaines écoles de linguistique « scientifique » commencent « trois secondes » après le big bang. procéder ainsi, c’est, dans les faits comme dans la logique, admettre une source de causalité « transcendante ».)

    je n’ai tapé que deux pages. à mon sens Steiner fustige le monisme transcendantale plus que le transcendantal lui même : sinon d’où parlerait il? (tjrs à mon avis) : d’un dualisme humaniste : prétendre accéder à la monade transcendantal (ce que font les sciences), c’est du shamanisme, alors qu’on peut disserter sur l’esprit ou la matière. mettre une égalité ou en nier un, c’est prétendre accéder à la monade transcendantal. je crois me souvenir qu’Aristote justement, bien qu’il favorise l’expérience, ne tranche pas, et laisse l’être à sa place… je vais relire un peu sa métaphysique 😉

    bien à vous

  5. Avatar de Crapaud Rouge

    A propos de « cette pensée merveilleuse que l’Homme est le moyen que la nature s’est donnée pour prendre conscience d’elle–même » : ce n’est pas merveilleux mais grandiose. La preuve, (une de plus), que la modestie ne fait pas recette et que l’homme se prend pour un sur-homme : « la nature » étant aussi bien l’univers lui-même, il en découle que l’homme serait la conscience de l’univers. Or, il se trouve qu’il y aurait, dans notre seule galaxie, au moins 40 milliards de planètes à peu près de la taille de la Terre, et il se trouve qu’il y a des milliards de galaxies dans l’univers, ce qui fait des milliards de milliards de terres en tout. Il y a donc de fortes chances pour que, à l’échelle de l’univers, la conscience soit un phénomène naturel aussi banal que répandu, et que l’espèce humaine ne soit dotée que d’une conscience totalement riquiqui et ridicule par rapport à d’autres.

    Deuxième point : et si la nature avait assigné à l’espèce humaine un autre destin que celui, trop flatteur à mon goût, d’en être la conscience, comme le saurions-nous ? Et si nous le savions, (ou l’imaginions), l’accepterions-nous avec la même docilité que les abeilles assument leur rôle d’insecte pollinisateur ? (Mais sans en avoir conscience.) Sachant que l’homme civilisé dispose en lui d’une répugnance viscérale pour « l’état de nature », il y a fort à parier que, quelque soit le rôle ou le destin que la nature lui ait réservé, il le refuserait. En conséquence de quoi, l’on voit mal comment et pourquoi l’homme accepte si promptement d’être « la conscience de la nature » : ne serait-ce pas un rôle inventé et taillé sur mesure par sa pseudo-conscience pour flatter son amour-propre, comme d’aucuns se flattent en croyant qu’un dieu infiniment bon les attend en son paradis ?

    1. Avatar de Jck
      Jck

      vous n’avez pas lu jusqu’au bout cher crapaud
      « Aussi, quand je dis l’Homme, je pense également à toutes les espèces qui auraient pu atteindre ce niveau de surpassement de la nature telle qu’elle leur était offerte. »

      Je pense que la conscience est un phénomène thermodynamique, une étape de l’organisation de la matière, une étape possible (pour ne pas dire necessaire) après que l’univers se soit suffisament refroidi.
      Cela dit, je reste intrigué par le paradoxe de Fermi, si la conscience est banale dans l’univers, pourquoi rien ni personne n’a éssayé de nous contacter? pourquoi n’entendons nous rien qu’un glacial silence cosmique avec nos grandes oreilles radar?

    2. Avatar de Crapaud Rouge

      @Jck : « je pense également à toutes les espèces… » : ça, ce n’est que l’alibi. Bien que Paul s’efforce d’éviter l’écueil de l’anthropocentrisme, (voir ci-dessus ce dont on l’accuse…), son raisonnement est anthropocentrique. Si vous voyez en l’homme une espèce « comme les autres », (avec seulement un cerveau plus puissant), alors ses rapports à la nature ne peuvent être qu’analogues aux rapports des autres espèces avec la même nature. De sorte que le distinguo que Paul s’efforce d’établir pour la finance et l’économie ne peut pas tenir : individus et sociétés sont 100% dans leur état « naturel », et tout ce que nous faisons est « naturel », y compris les bombes atomiques. Ca peut paraître idiot comme conclusion, mais c’est aussi excitant à considérer que le fantasme « merveilleux » de Schelling, car cela nous invite à repenser ce que l’on appelle « la nature ». (Indépendamment de ce que l’on désigne par ailleurs sous le terme de « civilisation », voilà qui nous changerait.)

    3. Avatar de vigneron
      vigneron

      @Crapaud

      J’ai entendu parler de pire que l’anthropocentrisme, Crapaud.
      Soi-disant qu’c’est une horreur. On appelle ça : l’anourocentrisme… Parait que le cri de ralliement de cette terrible secte serait « Quoi ! Quoi ! » ( Koa Koa en phonétique). Des échos de cette affaire sur les nénuphars, ou sous les nymphéas ?

    4. Avatar de jck
      jck

      Pour la conscience, on peut aussi envisager un point de rupture, une singularité, comme il y a souvent en thermodynamique, l’eau devient liquide à 273.16° Kelvin. Elle ne devient pas liquide au fur et à mesure, entre 0 et 273°, ce n’est pas un processus continu, elles est solide à 273.15° et liquide à 273.16°.
      Quand vous dites que notre conscience est peut-être rikiki par raport à celle des ET, vous sous-entendez que c’est un processus continu, or rien n’indique que ce n’est pas un processus discret: on l’est ou on ne l’est pas.

      Enfin, vous confondez l’ anthropocentrisme, qui est un erreur, et le principe anthropique en science qui est profond. Ce principe est encore aujourd’hui au coeur des débats scientifiques et epistémologiques. http://en.wikipedia.org/wiki/Anthropic_principle

    5. Avatar de Crapaud Rouge

      @jck : vraiment pas d’accord. Ce billet est anthropocentrique parce qu’il choisit certaines caractéristiques attribuées à la nature pour justifier des conclusions qui ne peuvent concerner que l’espèce humaine. Ensuite, que j’imagine des espèces extra-terrestres plus intelligentes que nous ne présuppose aucun « processus continu », mais présuppose, je le concède, une échelle de comparaison. Enfin, je ne suis pas trop d’accord avec le principe anthropique, (que je ne confonds pas du tout avec l’anthropocentrisme), parce qu’il se fonde sur des connaissances très, très fragmentaires de la physique. (« fragmentaires » parce que la science n’arrête pas de changer d’opinion – cf. la Terre, exceptionnelle hier, à laquelle on découvre 40 milliards de cousines rien que dans notre galaxie.)

    6. Avatar de jck
      jck

       » Si vous voyez en l’homme une espèce comme les autres  »
      Je vois d’un coté l’homme et peut être des ETs intelligents, et de l’autre coté, tout le reste de la matière.
      Car pour moi tout est matière, et organisation de celle-ci (information). On ne peut pas faire moins anthropocentrique!
      Dès lors que la matière atteint un niveau d’organisation telle qu’elle peut agir sur elle-même consciemment, on a là un point de singularité, une ligne de démarcation. Donc je souscris assez à la phrase de Schelling.

      Le principe anthropique nous donne des information sur le type de théories qu’il faut essayer d’inventer, par exemple, il faut que les théories permettent les multivers. Il est donc en amont du théorique, plus métaphysique que physique.

  6. Avatar de astarte
    astarte

    Monsieur Jorion

    Pour mon humble personne et quelques-uns des miens, le progrès a un avenir. Il loge dans un passé récent.
    Il a pour nom l’uranium dit appauvri qui a plu sur l’Irak lors de la Formidable Coalition Internationale en 1991 avec la multiplication des cancers et des malformations infantiles qui s’en est suivie.
    Il a pour substance également en dehors de la parenthèse qui a été une forme de génocide blanc, l’embargo qui a tué près d’un demi-million d’enfants, cette occupation qui a tué 1,5 millions d’Irakiens par bombardements directs et par un sociocide j’allais dire négligemment organisé. Pour aboutit à une fragmentation ethnique d’un peuple jusque là cohésif et autonomiser des régions à fort potentiel pétrolier.
    Ce jour, ce 28 décembre plus de 18 morts du fait de cette occupation, comme hier (50) et comme l’avant-veille. Le pape a parlé des chrétiens irakiens qui subissent un martyr immérité, mais depuis des décennies nous subissons des agressions dont la presse occidentale nous impute la responsabilité, car nous ne sommes vus que comme des T’erroristes.

    Notre avenir est là, clos ici, et votre progrès en est l’auteur.
    Je sais bien, au regard de l’humanité dans son ensemble, puisque les vitesses d’acquisition du ‘bien-être’ (dont il faudra soustraire l’obésité, le prozac, les accidentés de la route) global mises en rapport avec la ‘conscientisation’ de l’univers-monde, nos petites misères et notre disparition ne pèse pas lourd.
    Qu’importe Summer, l’écriture vous est acquise!

    Je sais aussi que des millions en Europe avaient dit leur refus de cette guerre entièrement économique et illégitime selon les standarts de l’homme Blanc Européen. Leur silence aujourd’hui pendant que nous sommes liquidés ne nous est même plus douloureux.
    C’est votre progrès mais je puis vous assurer que quelle que soit la manière dont il est appréhendé, il n’a pas d’avenir.
    Il a inclus, vous aimez bien les inclusions, j’ai bien lu votre vérité, la mort de cette civilisation dévastatrice. D’autres diront la mort de tout vivant. (?)
    Nous pour notre part, nous prions l’Un, ce qui peut sembler à certains une tautologie, et qui est pour nous une vérité à explorer et approfondir, qu’il nous préserve dans notre unicité.

    remerciements pour le contrôleur qui entr’ouvrira le check point pour ce petit filet d’une économique assaisonnée de cent ans d’or noir et apprêtée avec un masque de tribalisme primitif bien de chez nous.

    1. Avatar de Marlowe
      Marlowe

      Très belle réponse qui mériterait des commentaires attentionnés.

      marlowe@orange.fr

    2. Avatar de Charles A.
      Charles A.

      Témoignage qui confirme à quel point, comme l’écrivait Paul, le déchainement des intérêts particulier fait de l »économie une jungle barbare.
      J’ai aussi pensé à ce texte tout aussi approprié sur les « valeurs chrétiennes »…
      http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article19609

  7. Avatar de bourby
    bourby

    @ Paul Jorion

    Je partage tout à fait l’analyse présentée dans votre texte, que ce soit à propos du rôle particulier joué par l’espèce humaine, ou pour la nécessité de définir des règles du jeu économique.
    Il est frappant que l’humanité s’entende pour réguler les armes employées lors des guerres (interdiction des armes chimiques ou biologiques, etc…), mais qu’en matière économique, elle ne cesse de déréguler !

    Je partage également votre interrogation sur le « comment faire » pour enclencher le progrès dans cette régulation économique.
    Mes réflexions me ramènent toujours vers Voltaire : son génial et énigmatique « cultivons notre jardin » me semble proposer un programme complet :
    – pour le citoyen, qui est placé face à sa responsabilité personnelle, familiale, professionnelle et environnementale
    – pour le législateur (national ou international), qui veillera à ce que les règles permettent à chacun (individu, entreprise, état, …) puisse cultiver son jardin sans nuire à celui d’autrui.

    Appliquer ce principe « constitutionnel » à l’économie entrainerait évidemment l’interdiction des paris sur les fluctuations de prix (dont les « bénéfices » sont fatalement pris sur l’économie réelle, sans contrepartie). Je pense que cela permettrait également de déclarer illégaux les « hedge funds » . Autre avantage : la constitutionnalité de toute nouvelle pratique ou organisation financière pourrait être vérifiée à tout instant, ce qui éviterait les dérives délirantes du système financier (qui tente de se faire une virginité en s’auto-proclamant  »industrie financière », quelle blague !).

  8. Avatar de pablo75
    pablo75

    « En permettant l’homme, la nature a commis beaucoup plus qu’une erreur de calcul : un attentat contre elle-même. »
    (Cioran)

  9. Avatar de erb
    erb

    Salut à tous.
    L’espèce humaine est fantastique, et après le cosmos, elle est à mon sens ce qui représente le plus d’intérêt à mes yeux.
    Notre métamorphose d’animal en humain c’est produite d’une façon à ce point fulgurante, qu’il nous est impossible de faire autrement que reconnaître notre totale ignorance des plans de mère Nature sans paraître prétentieux. Je ne parle même pas de ceux qui s’ emploient à nous expliquer l’univers et son créateur…
    Nous n’avons pas même fait le tour de notre cerveau et sommes déjà susceptibles d’énoncer par qui, par quoi, comment et quand le grand théâtre de nos vies fut édifié !
    Le primate toujours satisfait de son seul arbre après 70 millions d’années d »évolution, est pourtant censé être celui qui nous ressemble le plus !?!
    En seulement 500 mille ans ( 139 fois moins ! ), le codage de notre génome nous conduit sur la lune, équipés d’une technologie que nous ne prêtions qu’aux Dieux voici à peine 200 ans et que certains peuples n’ont même pas encore eu le temps d’éprouver au regard de la vitesse avec laquelle se sont accomplis les changements.
    L’écriture n’existe que depuis 8000 ans et cette science n’est accessible de nos jours que par la moitié d’entre nous… Notre histoire est toute dans cette mémoire finalement vierge puisque sur les 492 mille ans qui ont précédés, seules quelques scènes de chasses dessinées dans des grottes orientées selon les étoiles, nous sont parvenues en nous laissant le loisir d’écrire la suite.
    Les actes de guerres et les principes religieux ont été les dogmes les plus transcris car ils permettaient la soumission des peuples par les érudits. Ce n’est à peine que depuis 2 petits millénaires, qu’un nombre limité d’ Hommes correspondent entre eux de façon raisonnable et intelligente. Cela ne signifie pas encore: sans peur. Mais pour la première fois, la moitié de l’humanité communique et donc s’amadoue grâce au NET ( prothèse d’apprentissage pour notre future télépathie ) .
    Mais, plus inouïe encore, l’exigence morale que nous impose notre état. Verrons-nous jamais un carnivore ambitionner de devenir végétarien pour élever son âme ?
    Eccles, après une vie consacré à l’étude de notre cerveau, a constaté que les régions qui concernent la peur et la violence régressent au profit de celles concernant la tendresse et la communication et, bien que de son œuvre se soit à mon sens le seul point pertinent, il n’en demeure pas moins un fondement idéal pour envisager notre devenir avec optimisme. La moyenne de durée de vie d’une espèce su terre est de 18 millions d’années . La moyenne ! Et nous avons l’air d’être parmi les espèces les plus adaptées aux changements. 36 fois plus de temps que nous n’en avons utilisé nous laisse une marge de progression prometteuse. Surtout que nous venons tout juste d’apprendre à lire…
    Rien de ce qui nous est connu n’a en effet évolué avec autant de rapidité, et nos désordres actuels ne sont qu’une étape qui nous offre d’apprivoiser mieux encore les peurs primaires qui ont servies au vivant durant 500 millions d’années pour pérenniser ( dont nous avons du mal à renoncer vu qu’elles peuvent nous resservir lors des grands cataclysmes qui émailleront encore notre histoire ).
    Pendant tout ce temps il a été malvenue de livrer ses intentions ou de dépareiller du groupe sous peine de se faire dévorer où de ne plus être assez discret pour chasser et se nourrir. Difficile en 500 mille ans seulement de se défaire de ces réflexes et de se sentir grandi plutôt que désarmé en avouant son amour ! L’amour devient l’outil cardinal de l’apaisement, et comme des apprentis nous le subissons plus que n’en bénéficions, mais ca change vite !
    XX ième siècle , nos armes nouvelles et nos intentions belliqueuses engendrent ( entre guerres, révolutions, camps russes et chinois compris ) environ 130 000 millions de morts ! Nous sommes des barbares en progrès qui se sont calmés car entre le XVI ième et XVII ième siècle, avec la bénédiction de l’église, à l’épée, la hache et la grippe, « quelques » européens ont rayé du globe 180 millions d’indiens d’Amérique du sud et du nord, sans que cela ne nous inspire le plus humble mausolée !
    Le vertige qui s’empare de nous à l’observation des étoiles, la brièveté assurée de nos existences, ajoutés à notre ignorance, instillent dans nos cœurs une angoisse bien naturelle !
    Le confort matériel que certains humains sont parvenus à acquérir au cours du dernier siècle, était à ce point inespéré pour les 100 milliards environ qui nous ont précédé, qu’il ne faut pas attendre ; qu’ILS aient à cœur de le diluer dans la masse par bonté.
    Durant des centaines de milliers d’années aucun roi n’a pu prétendre à autant de confort que n’en possède l’européen moyen de l’ouest d’aujourd’hui. La plupart des puissants ont vendu corps et âmes pour l’obtenir, ( j’entends par là le simple fait d’accepter de s’enrichir outrancièrement dans un monde où des enfants sont mangés par les mouches et perdre ainsi tout respect de soi ) et comprendre que nous ne pouvons accéder aux bienfaits de l’existence qu’en aidant assez les autres à avoir ce qu’ils désirent, est une pensée séduisante à laquelle nos actes ne sont pas encore en mesure de coller. Car dans un monde souffreteux, le plus nanti est toujours borgne et ne peux pleinement jouir des trésors de la vie. Son malheur est qu’il est le premier à en être instruit, et au lieu de l’outiller pour mieux se construire, la plupart du temps il se lance à corps perdu dans la tâche qui consiste à veiller que les autres soient et restent aveugles…
    Le vrai luxe pour l’Homme est d’apaiser son angoisse. Cet apaisement s’obtient de manière différente en fonction du degré de peur de l’individu. Plus les peurs sont grandes, plus la nécessite de contrôler est importante et les moyens d’y parvenir peuvent être sans limite comme peut l’être leur peur. Généralement, se sont des états pathologiques difficiles à maîtriser en 80 ans, au regard des dogmes qui nous servent de socles encore actuellement.
    La réécriture de nos finalités s’accélère, et chaque génération nous livre un nouveau modèle de notre code génétique dont il convient d’ observer attentivement l’évolution car il est porteur des germes de la grandeur.
    Notre épopée débute et jamais nous n’avons possédé d’autant d’outils pour nous découvrir et nous entraider.
    C’est la première tâche qui nous incombe et elle ne se limite pas à écraser du pieds la chenille par urticante, car sa transformation en splendide papillon va être un émerveillement !
    C’est la vision qui me permet au mieux d’accepter de jouer le jeu et de m’accrocher à la vie de toutes mes forces malgré les tourments qu’elle induit. Si mon constat de l’espèce dont je fais partie se limitait à me voir en parasite, ça fait longtemps que je serais allé faire un tour ailleurs,
    curieux…
    Nous nous sommes recherchés, entretués, aujourd’hui nous nous ignorons, demain nous nous entendrons puis nous nous écouterons nous comprendrons et nous aimerons, car c’est un monde en paix pour nos enfants et nos semblables qui est le véritable rêve de TOUS !
    Jusqu’au XVIIII ième siècle, 3 enfants sur 4 mourraient avant 1 an ! Nous avons donc amélioré les soins… si bien que…
    Il y a 2 siècle, nous parvenions à être 1 milliard d’humains sur terre après 500 mille ans d’évolution.
    200 ans plus tard nous approchons les 7 milliards. Personne ne sait gérer cette démographie et la pagaille qui en découle réveille notre animalité et notre instinct qui nous dit que si ça continue ainsi,
    nous allons manquer de « tout ». Certes la terre peut subvenir à 30 milliards d’individus vivant comme les paysans du Bengladesh et de la place il y en a puisque à 4 par M² l’humanité entre dans un rectangle de 100×170 km de coté. A 30 milliards nous pouvons encore tenir mais en faisant 3 ou 4 enfants par couple, l’équation va devenir complexe sans une autre planète ou une réduction importante de nos tailles ! Nous ne pourrons nous payer le luxe de passer au travers d’un contrôle des naissances qui j’espère ne sera pas infecté d’eugénisme mais plutôt imprégné du bon sens commun. Il ne s’agit pas de tuer mais plutôt d’étaler nos naissances dans le temps pour nous laisser le temps de préparer un monde accueillant pour les futures générations afin qu’elles profitent des bienfaits de la vie plutôt que ne la souffrent. Ça nous laisserait le temps de mettre au diapason nos actes et nos nobles pensées, et d’harmoniser la joie de vivre.
    Les enfants des puissants ne se contenteront plus d’un bonheur congru, amputé de ce qu’ils peuvent éprouver de mieux : un amour légitime empreint du respect du vivant .

    A tous, bon toujours.

  10. Avatar de Michel MARTIN

    Un texte de Catherine Larrère et plusieurs références biblio essentielles touchant à l’avenir du progrès en lien avec l’écologie ( Georges Canguilhem; Philippe Descola; Michel Serres; Bruno Latour et quelques autres):
    http://www.implications-philosophiques.org/philosophie-politique/la-question-de-l%E2%80%99ecologie-la-querelle-des-naturalismes/

  11. Avatar de Ando
    Ando

    Ca bourdonne beaucoup sur ce blog. « Le bourdon » de Rimsky-Korsakov.

    http://www.youtube.com/watch?v=L7w8sPtXG9k&feature=related

  12. Avatar de Pierre Guillard
    Pierre Guillard

    Cette page de M. Jorion est assez belle pour que je m’essaie à la réfuter avec un peu d’effort. Je reviendrai ici ce demain jeudi.

  13. Avatar de erb
    erb

    Gagner énormément d’argent est louable et ne devrait pas être remis en question. L’argent est censé être l’aune qui mesure le service rendu à la communauté.
    En revanche, nous devrions orienter nos efforts pour s’assurer du fait que l’argent acquis doit servir à bon escient en s’instruisant du fait que le plus grand plaisir reste celui de l’aide que nous pouvons contribuer à apporter aux Hommes. Qu’aucune action n’augmente notre stature personnelle dés lors qu’elle découle de l’abus d’autrui.
    Capitalisme, socialisme et autres politiques ont toutes des qualités et des défauts qui peuvent nous aider à tirer de nouveaux plans, mais sans y intégrer la notion d’une entraide salvatrice, nous retardons encore l’évolution de notre humanité.

    1. Avatar de Marlowe
      Marlowe

      L’argent ? vous voulez parler du langage du diable !

  14. Avatar de pablo75
    pablo75

    @ P. Jorion

    La première impression qu’on a en lisant votre texte c’est qu’il date. Il aurait pu être écrit il y a 100-150 ans. C’est un texte qui sent le XIXe siècle à pleins poumons. Un texte avec une idée étonnement primitive, simpliste, rudimentaire, de la spiritualité – qui rappelle celles, tout aussi binaires et naïves, de Marx, Nietzsche ou Freud.

    « En faisant intervenir dans nos explications des dieux créateurs du monde et des anges secourables… »

    « les frayeurs qui avaient conduit l’Homme à croire aux dieux ont perdu petit à petit de leur urgence et finiront par s’effacer ».

    « nous ne pouvons nous empêcher de comparer le pouvoir qui est devenu le nôtre à celui que nous avions attribué autrefois aux êtres surnaturels que nous avions imaginés ».

    « La plupart des systèmes de croyance traditionnels […] doivent couronner leurs chaînes explicatives par un « primus movens », un dieu introduit à un niveau arbitraire de la chaîne et censé rendre compte en dernière instance d’une famille de phénomènes liés entre eux pour des raisons essentiellement affectives. »

    Comment pouvez-vous réduire la spiritualité du Vedanta, des religions grecques et chinoises, du judaïsme, du bouddhisme, du christianisme, du shintoïsme, du soufisme (sans parler de tous les ésotérismes) à ce genre de phrases? Comment pouvez-vous faire abstraction des idées et des expériences intimes dans ce domaine de Platon, Pythagore, Aristote, Plotin, Denys l’Aréopagite, Rumi, Eckhart, Dante, Michel Ange, Cervantes, St. Jean de la Croix, Shakespeare, Pascal, Rembrandt, Bach, Newton, Goethe, Mozart, Novalis, Holderlin, Beethoven, Baudelaire, Bruckner, Dostoievski, Yeats, Tolstoi, Pessoa, Wittgenstein ou Jung, entre des milliers d’autres grands esprits ou grands créateurs de toutes les époques et toutes les civilisations?

    On sent que vos connaissances dans le domaine de la spiritualité et des religions sont de deuxième ou troisième main. D’où une erreur de taille dans votre texte: « La pensée chinoise traditionnelle (essentiellement athée) »… Avez-vous lu vraiment Lao Zi, Zhuang Zi, Lie Zi, Mozi, Confucius, Huineng, sans oublier le Yi-king et ses principaux commentateurs? Même si les Chinois ne croient pas en un dieu avec une longue barbe et un triangle sur la tête qui a tout crée d’un coup de baguette magique, toute leur pensée reconnaît des forces spirituelles supérieures à l’homme qui le dépassent et un Au-delà qui ne fait aucun doute (entre beaucoup d’autres « croyances » fondamentales). Et cela pour une raison très simple: les Chinois sont pragmatiques et donc ils ne nient pas leurs propres expériences dans ce domaine.

    « La solution de l’énigme de la vie dans l’espace et le temps se trouve hors de l’espace et du temps. »
    (Wittgenstein)

    (J’écris ceci en écoutant sur France Musique une 9e de Bruckner dirigée par R.Norrington en juillet dernier à Stuttgart, symphonie dédiée à… Dieu. Le jour où un athée sera capable d’écrire une cathédrale sonore aussi prodigieuse, le jour où il y aura un Bach athée, la foi des athées en leurs propres croyances me paraîtra sans doute moins illogique).

    Étrange synchronicité: cherchant une version sur Youtube, je découvre celle donnée par Myung-Whun Chung salle Pleyel en décembre 2009… où je me vois – assis au 2e rang derrière l’orchestre !

    http://www.youtube.com/watch?v=A_4V4HlSrCw&feature=related

    Une autre version du début de la symphonie qui n’était pas non plus sur Youtube il y a peu de temps (d’un autre niveau que la précédente – voir le fabuleux premier tutti vers 2′ -, dirigée par le très grand chef brucknerien E.Jochum) :

    http://www.youtube.com/watch?v=9fUgwHPso3E

    1. Avatar de vigneron
      vigneron

      Beethoven

      Beethoven ? Il me semblait pourtant qu’il était celui qui avait souverainement accordé au bon dieu des congés éternels, mais bon…

      Pablo, tu confirmes – presque élégamment – la pensée des américains dont une étude de l’université du Minnesota, parue en 2006, faisait apparaître que pour une majorité d’entre ceux-ci les athées sont la « communauté » qui inspire la plus grande méfiance, devant les musulmans ou les homosexuels…

      Et tu connais sûrement l’histoire de Rafael Schächter, compositeur, chef d’orchestre et pianiste tchécoslovaque d’origine juive et athée qui fit donner 15 fois le requiem de Verdi en formant 200 choristes dans le camp de Terezin, antichambre d’Auschwitz, histoire dont Josef Bor (lui même interné à Terezin à la suite de l’attentat contre Heydrich)) fit un beau bouquin, le Requiem de Terezin :

      Après de longues réflexions, il avait préféré le Requiem de Verdi à toute autre œuvre. Cette musique italienne, composée sur un texte latin, inspirée par des prières catholiques, serait interprétée par des chanteurs juifs, des musiciens de toutes les nationalités, venant de Bohême, d’Autriche, d’Allemagne, de Hollande et du Danemark, certains même de Pologne et de Hongrie ; l’exécution de ce Requiem dans un ghetto serait dirigée par un chef d’orchestre athée : l’idée lui sembla magnifique.

      Comme le vieux mendiant du camp (probablement Kurt Otto Singer, l’ancien intendant de l’opéra Kroll de Berlin) fait remarquer à Raphaël Schächter :

      Comment voulez-vous donc qu’un juif comprenne le Requiem, quand bien même il souhaiterait imaginer le royaume de Satan, alors qu’il n’a jamais eu peur de l’enfer et n’a jamais pu y croire. » Ce à quoi Schächter répond en lui-même : « Un juif qui se débat entre les griffes des nazis connaît déjà ici-bas le royaume des ombres dans toute son horreur.

    2. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Vigneron

      Et?

    3. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Vigneron

      « Beethoven ? Il me semblait pourtant qu’il était celui qui avait souverainement accordé au bon dieu des congés éternels »

      Il faudrait quand même que tu arrêtes avec ta manie de parler avant de t’informer (sur Beethoven, lis le pavé de 850 pages de Jean et Brigitte Massin chez Fayard):

      « Tout ce que créa Dieu était pur et sans tache. Aveuglé par la passion, j’ai sombré dans le mal ».
      (Beethoven. Carnets)

      « Après avoir longuement expié et m’être purifié je suis revenu à la source originelle, pure, noble, à la Divinité et à mon art ».
      (Id)

      « Ici-bas, le fait seul est évident, le pourquoi sera révélé au jour suprême de la Résurrection ».
      (Id)

      À part ça:

      « Au printemps de 1818 lui vient l’idée d’une grande œuvre religieuse qu’il envisage d’abord comme une messe d’intronisation pour l’archiduc Rodolphe, qui doit être élevé au rang d’archevêque d’Olmütz quelques mois plus tard. Mais la colossale « Missa Solemnis en ré majeur » réclame au musicien quatre années de travail opiniâtre (1818-1822) et la messe n’est remise à son dédicataire qu’en 1823. Beethoven étudie longuement les messes de Bach et Le Messie de Haendel durant la composition de la Missa Solemnis qu’il déclarera à plusieurs reprises être « sa meilleure œuvre, son plus grand ouvrage. » (Wikipedia)

      Oui, tu as bien lu: la Missa Solemnis, les messes de Bach, le Messie de Haendel… De l’athéisme pur et dur.

    4. Avatar de Piotr
      Piotr

      En aparté…
      Même si je partage probablement une partie de vos goûts musicaux …
      Votre clivage musique profane musique sacrée m’apparait moins évident que vous le suggérez.
      La sacralité peut se fabriquer.
      http://alainbonte.over-blog.com/article-12712542.html peut se fabriquer

    5. Avatar de vigneron
      vigneron

      @pablito

      Et ?? Nada, rien, nihil.

    6. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Piotr

      Oui, on peut fabriquer de la musique sacrée en étant athée. Mais de la grande musique? Vous en connaissez des cas? Moi pas. Le plus grand compositeur vivant de musique sacrée est aujourd’hui Arvo Part, un mystique…

    7. Avatar de Charles A.
      Charles A.

      Un texte avec une idée étonnement primitive, simpliste, rudimentaire, de la spiritualité – qui rappelle celles, tout aussi binaires et naïves, de Marx, Nietzsche ou Freud.

      Comment se permettre de juger de la spiritualité de Paul ou la mienne ?
      Il faudrait beaucoup, beaucoup d’intimité, qui n’existe pas, manifestement.
      Pourquoi ce sectarisme?
      Pourquoi avoir besoin de jouer au décompte de qui en a le plus en inventaire:
      hommes célèbres croyants d’un côté et hommes célèbres incroyants de l’autre…
      A ce jeu ridicule, c’est évidemment Pablo qui perdrait au fil des siècles passés.
      Mais soyons bon prince, et laissons le jouer tout seul…

      Pourquoi amputer l’être humain en ne lui reconnaissant pas le droit à la poésie
      et à la spiritualité au delà de la croyance en un grand architecte?

      Chez moi, la spiritualité et la jouissance poétique a commencé avec la fin de la croyance religieuse…
      Je n’y peux rien.
      Je ne suis pas croyant et n’ai pas plus besoin de nier l’existence de Dieu que celle des anges, des sirènes, des fantômes, et petits hommes verts…
      « La religion est le soupir de la créature opprimée, l’âme d’un monde sans coeur, comme elle est l’esprit des conditions sociales d’où l’esprit est exclu. Elle est l’opium du peuple. »
      (Karl Marx / 1818-1883 / avec Engels, Critique de « La philosophie du droit » de Hegel, 1844)

      Petit commentaire de texte:
      « À un enfant qui meurt, et aux parents de cet enfant, ferez-vous, si la religion les console, l’éloge de l’athéisme ? Qu’on ne se méprenne pas : cela, à mon sens, ne prouve rien contre l’athéisme et beaucoup contre la religion. « L’âme d’un monde sans âme, disait Marx, l’esprit d’un monde sans esprit… » C’est la misère qui fait la religion, et c’est pourquoi celle-ci est misérable. Qui interdirait l’opium au mourant ? Et que sommes-nous d’autres, hors l’oubli ou le divertissement, que des mourants ? »
      (André Comte-Sponville / né en 1952 / Une éducation philosophique / 1989)

    8. Avatar de Rosebud1871
      Rosebud1871

      @ Pablo
      « Parole de mystique ou de religieux ? »
      À cette question à laquelle je renvoyais il y a une quinzaine le statut de votre parole, j’ai finalement, à vous lire depuis, trouvé une réponse : parole de religieux qui s’ignore, qui n’atteint pas au mystique mais en reste fasciné. Un mystique intervient avec discrétion pas à discrétion : cf. votre pente à proposer votre « savoir » sur le défaut supposé de l’autre. Voir la blague du Rabbin : « j’ai les réponses, vous avez des questions ? ». Comme il y a des partageux sur ce blog, je partage mon opinion. Charles A. trouvera que c’est encore se permettre de juger de vous caser ainsi. Il aura raison.

    9. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Charles A.

      Déjà il faudrait d’abord que vous appreniez à lire, c’est-à-dire à comprendre un texte, ce que visiblement vous avez du mal à faire. Démonstration.

      « Comment se permettre de juger de la spiritualité de Paul ou la mienne? »

      De la vôtre?? Mais qui a parlé de vous? Mais vous croyez vraiment que ça intéresse quelqu’un sur ce blog votre spiritualité? Et c’est quoi cette façon d’entrer par infraction dans le champ de la caméra sans qu’on vous ait sonné, de sauter comme les gosses avec les bras ouverts derrière la personne à qui on parle pour montrer qu’on existe?

      Quant à la spiritualité de P.J., qui la juge? Je juge son jugement sur la spiritualité de l’être humain, en donnant 4 exemples de son texte. Mais avez-vous compris son texte? Vu comment avez-vous lu le mien j’en doute fort.

      « Pourquoi ce sectarisme? »
      Là on a la confirmation que vous comprenez à l’envers ce que vous lisez, puisque si sectarisme il y a (ce dont je ne suis pas sûr) il est plus dans le camp de ceux qui parlent « d’anges secourables », « d’êtres surnaturels que nous avions imaginés » ou des dieux introduits « à un niveau arbitraire de la chaîne » que dans celui qui dit aux athées militants de regarder l’histoire des religions, de lire les mystiques ou de penser aux exemples des grands personnages.

      « Pourquoi avoir besoin de jouer au décompte de qui en a le plus en inventaire: hommes célèbres croyants d’un côté et hommes célèbres incroyants de l’autre. »

      Voilà encore une preuve que vous n’avez rien compris à ce que j’ai écrit. Mais qui fait l’inventaire? Je dis que si des grands esprits n’ont pas été des athées c’est que les croyances spirituelles méritent plus que quelques arguments simplistes contre elles. Où est le décompte – surtout celui « d’hommes célèbres incroyants »?

      « Pourquoi amputer l’être humain en ne lui reconnaissant pas le droit à la poésie et à la spiritualité au delà de la croyance en un grand architecte? »

      Mais vous avez un grave problème de logique, vous (et encore je suis gentil). Parce qu’on dit que tous les grands poètes ont été croyants on nie « le droit à la poésie » des athées? Mais c’est quoi ce délire?

      « Mais soyons bon prince, et laissons le jouer tout seul. »
      Mais où est le jeu là-dedans? Non seulement vous ne savez pas lire mais en plus vous avez des visions étranges en lisant. Je ne veux pas vous inquiéter, mais je vous assure que voir des doubles décomptes et des jeux qui n’existent pas ce n’est pas très normal.

      « Chez moi, la spiritualité et la jouissance poétique a commencé [sic] avec la fin de la croyance religieuse. »

      Passons déjà sur la distinction entre religion et spiritualité, puisqu’on ne sait pas très bien de quoi vous parlez en écrivant « croyance religieuse », mais imaginons que vous voulez parler de foi en l’Au-delà tout simplement. Donc, si vous nous parlez de votre cas j’imagine que c’est par générosité, pour nous indiquer la marche à suivre. Si je comprends bien, il faut que tous les croyants arrêtent de croire sur le champ pour pouvoir « jouir poétiquement ». C’est vraiment gentil à vous de nous donner un tuyau de ce calibre. Vous en auriez d’autres du même genre pour qu’on puisse « jouir prosaïquement »?

      Mais ce n’est pas fini. Parce que si on suit jusqu’au bout votre logique de 3e ou 4e type selon laquelle il faut arrêter de croire pour jouir de la poésie, cela veut dire que Rumi, Dante, St. Jean de la Croix, Shakespeare, Novalis, Holderlin, Baudelaire, Yeats ou Pessoa étaient des poètes frigides, puisque croyants. C’est ça, ou votre façon de raisonner est trop subtile pour mon pauvre petit cerveau de croyant en quelque chose de supérieur à l’être humain?

      Pour finir, dans votre générosité infinie, vous nous donnez une citation de Marx que personne n’a jamais lue (« La religion […] est l’opium du peuple ») et qui montre bien l’idée extraordinairement complexe que ce grand économiste se faisait de la spiritualité humaine depuis 4 000-5 000 ans. Et comme elle est tellement difficile à comprendre, étant donné surtout son caractère inédit, vous nous offrez un « petit commentaire de texte » de l’autre grand génie vivant de la philosophie française (le premier étant, bien sûr, BHL), ce penseur révolutionnaire sorti de l’ENS de la rue d’Ulm et membre du Comité consultatif national d’éthique, ce Victor Cousin de la trivialité la plus niaise, idole des bourgeoises de province tourmentées par les questions d’adolescent attardé qu’il se pose sans cesse (« Comment vivre?, Comment être heureux ?, La vie a-t-elle un sens?, Comment trouver la sagesse sans se soumettre aux religions?, Comment être libre?, La vertu est-elle encore possible?, Jusqu’où va la tolérance? » et surtout Comment avoir des substantiels droits d’auteur en écrivant des réponses triviales à des questions du Bac philo), ce commentateur des commentateurs des philosophes qui n’a jamais eu une seule idée à lui tout seul, qui est Comte-Sponville: « C’est la misère qui fait la religion, et c’est pourquoi celle-ci est misérable ».

      Merci, Charles.

      Et pardonnez-moi si j’abuse de votre gentillesse en vous demandant pour finir une petite faveur: oubliez-moi sur ce blog, ne lisez pas mes commentaires et surtout n’y répondez pas. Je vous assure que c’est vraiment pas la peine.

      @ Rosebud1871

      « Un mystique intervient avec discrétion pas à discrétion ».

      Mais qui s’est pris pour un mystique? Depuis quand les mystiques se promènent sur des blogs en répondant aux objections des gens qui ne savent pas lire, comme Charles A. ou vous? Vous ne savez pas faire la différence entre un lecteur des mystiques et un mystique? Ou vous, quand vous les lisez, vous lévitez et vous croyez que tout le monde fait pareil?

      La vieille technique de l’Inquisition (modernisé par les stalinistes) qui consiste à répondre à des choses que l’autre n’a jamais dites ou même à des choses exactement contraires à celles qu’il a dites, ne marche pas avec moi. Si vous lisez ce qu’il y a dans votre tête au lieu de lire ce qu’il y a sur l’écran, ou si vous comprenez de travers, ce n’est pas de ma faute: achetez-vous un écran meilleur, changez des lunettes ou rincez-vous les neurones de temps en temps.

    10. Avatar de Charles A.
      Charles A.

      Pablo disait du texte de Paul Jorion qu’il contenait « une idée étonnement primitive, simpliste, rudimentaire, de la spiritualité – qui rappelle celles, tout aussi binaires et naïves, de Marx, Nietzsche ou Freud. »
      J’ai demandé comment l’ont pouvait juger ainsi de la spiritualité de Paul ou de tout autre, la mienne par exemple, qui se fonde sur autre chose.
      Merci pour la bile polémique sans importance, c’est une réponse…

    11. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Charles A.

      « J’ai demandé comment l’ont pouvait juger ainsi de la spiritualité de Paul ou de tout autre, la mienne par exemple, qui se fonde sur autre chose. »

      Mais non, vous avez demandé: « Comment se permettre de juger de la spiritualité de Paul ou la mienne ? »

      Vous avez un vrai problème de lecture, vous. Ou alors de traduction mentale, puisque pour vous « de Paul ou la mienne » signifie « de Paul ou de tout autre, la mienne par exemple, qui se fonde sur autre chose ».

      Si à chaque fois que vous écrivez 5 mots il faut en lire 16, dont 11 invisibles, on est mal barrés ici avec vos messages…

      P.S. Si on « déploie » votre phrase « Merci pour la bile polémique », on trouve quoi à lire?

    12. Avatar de Charles A.
      Charles A.

      J’avais oublié un trait du message de Pablo (St Paul vu le ton de père fouettard…)
      Après avoir jugé les idées de Paul Jorion de simpliste, voilà ce qu’il rajoute:
      si sectarisme il y a (ce dont je ne suis pas sûr) il est plus dans le camp de ceux qui parlent « d’anges secourables », « d’êtres surnaturels que nous avions imaginés » ou des dieux introduits « à un niveau arbitraire de la chaîne ».
      Interdit de plaisanter sur les anges…
      Puis une bordée d’attaques personnelles, provocations toute aussi impuissantes que les arguments, mai qui ont le mérite d’informer sur leur auteur.
      Heureusement que nos ancêtres ont descendus de leurs trônes le Roi de droit divin et ses ecclésiastiques…

    13. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Charles A.

      Vous avez toujours de problèmes de lecture, vous. Dans la phrase « si sectarisme il y a (ce dont je ne suis pas sûr) » vous lisez « interdit de plaisanter ». Pour vous le doute « (ce dont je ne suis pas sûr) » équivaut à la certitude qui interdit.

      Vous avez une logique très étonnante (en plus d’un sens de l’humour ravageur: « message de Pablo (St Paul vu le ton…).. Non seulement vos phrases veulent dire beaucoup plus de choses que ce qu’elles disent (voir ma réponse antérieure) mais en plus vous traduisez, par je ne sais pas quelle magie, les doutes écrits en certitudes lues.

      À propos de ton: vous trouvez le mien « de père fouettard », moi je trouve le vôtre légèrement stalinien (PCF années 50-60). Je me trompe si s’imagine que vous aimiez bien « le petit père des peuples » au moins dans votre jeunesse?

    14. Avatar de Charles A.
      Charles A.

      Parce que Paul ne fait pas de génuflexion devant les superstitions religieuses,
      pire relate les progrès de l’esprit humain face aux croyances religieuses,
      Pablo l’accuse d’avoir ‘une idée étonnement primitive, simpliste, rudimentaire, de la spiritualité ! »

      Notre inquisiteur se permet même de ranger Paul dans le camp du sectarisme
      pour ses allusions à la sainte doctrine sur les anges.

      Et voilà qu’en défendant le texte de Paul Jorion, on se fait insulter, y compris de stalinien.
      Comme d’habitude, l’insulte informe sur son auteur…
      Décidément, je préfère la spiritualité de Paul,
      et celle que je partage avec tous les esprits ouverts et non prosélytes.

    15. Avatar de Rosebud1871
      Rosebud1871

      @Pablo 30 décembre 2010 à 01:18

      « répondre à des choses que l’autre n’a jamais dites ou même à des choses exactement contraires à celles qu’il a dites »

      Ah bon vous avez des garanties, sur ce que l’autre dit et bien entendu sur ce que vous dites…Quelle compagnie vous assure ?
      Ça doit être dans le cadre de votre franchise que sincère votre interrogation à Charles A :

      Si on « déploie » votre phrase « Merci pour la bile polémique », on trouve quoi à lire?

      Je vous offre une lecture à défaut d’une assurance tous risques :

      Merci pour l’habile Paul et Mike

      Des classiques du blog.

    16. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Charles A.

      Toujours les mêmes problèmes de lecture, qui deviennent graves:

      J’écris: « si sectarisme il y a (ce dont je ne suis pas sûr) ».
      Vous traduisez: « Notre inquisiteur se permet même de ranger Paul dans le camp du sectarisme ».

      J’écris: « Je me trompe si j’imagine que vous aimiez bien « le petit père des peuples » au moins dans votre jeunesse? » (donc, il s’agit d’une question à laquelle il suffit de répondre « non » si ce n’est pas le cas).
      Vous traduisez: « Et voilà qu’en défendant le texte de Paul Jorion, on se fait insulter, y compris de stalinien. »

      À part ça, ne vous inquiétez pas, vos efforts pour aller au Paradis seront récompensés, vous l’aurez bien mérité (Luc 23:42-43).

      Pour le reste, vous commencez à me fatiguer sérieusement avec vos problèmes de lecture, de logique, d’égocentrisme (« se permettre de juger de la spiritualité de Paul ou la mienne ») et maintenant de paranoïa (« on se fait insulter »). Hier, après avoir parlé de votre idole Comte-Sponville, je vous avais demandé de m’oublier, de ne pas lire mes commentaires, de m’éviter ici. Je vous le redemande, Charles.

      Merci d’avance.

      (Ou alors répondez comme Rosebud1871 de façon totalement incompréhensible et avec un humour bien à lui qui ne donne aucune envie de lui répondre, et comme ça vous m’éviterez de perdre encore du temps à vous faire remarquer pour la 5e fois que vous avez des gros problèmes de lecture).

  15. Avatar de BasicRabbit
    BasicRabbit

    « Lorsque l’Homme aura réussi dans cette tâche, il sera devenu le moyen que la nature s’est donnée de créer le Dieu qui lui fit jusqu’ici tant défaut. »
    Premier selon l’être, dernier selon la génération (Aristote, Métaphysique).

    1. Avatar de Piotr
      Piotr

      Je suppose qu’il faut prendre ce dernier renversement ,comme une conclusion humoristique.
      Dieu n’existe pas ,inventons le.
      Une sorte de retour à la case départ.

    2. Avatar de Michel MARTIN

      Là où il y a des hommes, il y a des dieux, des ancêtres, des esprits, des sorcières et des démons. D’un bout à l’autre de la terre, du bocage normand à la brousse africaine, des hauteurs de l’Himalaya aux confins du Pacifique, on retrouve le même cortège bigarré de croyances et de pratiques dont la finalité et la cause restent somme toute obscures. Car, au fond, s’il y a partout de la religion, sait-on pourquoi il en est ainsi?

      Tiré du 4ème de couverture de « Et l’homme créa les dieux  » de Pascal Boyer.

    3. Avatar de vigneron
      vigneron

      Dieu comme marchepied. (Attention les déistes, j’ai pas dit paillasson ! Je vous laisse grande échelle, si vous y tenez…)

    4. Avatar de Ando
      Ando

      « Et l’empreinte de son chant est restée sans paroles ».

      L’ Ange

      Dans les cieux aux heures de minuit, un ange planait
      Et il chantait un chant doux.
      Et la lune, et les étoiles, et les nuages en foule
      écoutaient la chanson divine.

      Il chantait les extases des esprits immortels
      À l’ombre des jardins du paradis…
      Il chantait le Grand Dieu ; et sa louange
      N’était pas feinte.

      Dans son étreinte il portait une âme jeune
      Au monde de tristesse et de pleurs,
      Et l’empreinte de son chant est restée sans paroles
      Dans l’âme jeune ! mais vivante.

      Longtemps dans ce monde elle languit.
      En proie au désir merveilleux.
      Et les chansons ennuyeuses de la terre
      Ne purent remplacer les sons célestes.

      Mikhail LERMONTOV (1831)

    5. Avatar de interobjectif
      interobjectif

      Par le nom de Dieu j’entends une substance infinie, éternelle, immuable, indépendante, toute connaissante, toute-puissante, et par laquelle moi-même et toutes les autres choses qui sont (…) ont été créées et produites. Or ces avantages sont si grands et si éminents, que plus attentivement je les considère, et moins je me persuade que l’idée que j’en ai puisse tirer son origine de moi seul. Et par conséquent, il faut nécessairement conclure de tout ce que j’ai dit auparavant, que Dieu existe.
      Car encore que l’idée de la substance soit en moi de cela même que je suis une substance, je n’aurais pas néanmoins l’idée d’une substance infinie, moi qui suis un être fini, si elle n’avait été mise en moi par quelque substance qui fût véritablement infinie.
      (René DescartesMéditation métaphysique, troisième)

    6. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Ando

      Je donne toute l’oeuvre de Husserl, Heidegger, Sartre et autres Levinas pour ce seul vers de Lermontov (poète mort à 26 ans): « et l’empreinte de son chant est restée sans paroles ».

      Comme en espagnol je donne toute l’histoire de la philosophie ibérique plus celle de sa théologie pour un seul vers, peut-être le plus beau de la littérature espagnole (hendécasyllabe au son parfait – accent en 6e syllabe – et au sens inépuisable) écrit par J.E.Cirlot (1916-1973), poète féru de mystique et d’ésotérisme: « sólo lo que es eterno está en la vida » (seul ce qui est éternel se trouve dans la vie).

  16. Avatar de BasicRabbit
    BasicRabbit

    « L’Homme a découvert par l’expérimentation que les êtres vivants sont déterminés dans leur anatomie et leur physiologie par un code inscrit au coeur de la cellule. »

    C’est sans aucun doute la pensée dominante. Mais pas universelle.

    « Le rôle du génome apparait finalement comme un dépôt « culturel » des modes de fabrication des substances nécessaires à la morphogénèse. Il n’est peut-être guère plus nécessaire à l’embryogénèse que ne l’est la consultation des livres de cuisine aux réalisations gastronomiques d’un grand chef (ou en tout cas guère plus que l’ensemble de ses fournisseurs…). » René Thom.

    1. Avatar de pablo75
      pablo75

      À ce propos, un documentaire à voir: « The Living Matrix – The Science of Healing » (2009)

  17. Avatar de Piotr
    Piotr

    Lisant ,M.Jorion j’ai pensé un certain temps qu’il était agnostique d’essence chrétienne.Non seulement il est athée,mais son athéisme est quasi-militant.Là je suis un peu étonné.De même que je n’ai pas compris son aversion pour les joggeuses à queue de cheval…
    Il faudrait vérifier si par hasard ce genre d’aversion n’est pas le plus souvent couplé à l’athéisme.
    Personnellement je n’ai pas ce genre de problème et il se trouve que je suis agnostique.
    On avance.

    1. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ Piotr

      LOL !

      Moi aussi j’ai cru que P.J. était agnostique et ouvert à la spiritualité. Mais il est peut-être trop philosophe pour ça, il croit trop aux mots, aux concepts, aux idées…

    2. Avatar de Filantrop
      Filantrop

      Pas du tout, c’est la raison qu’il vénère. Peut-être en Verlan?

    3. Avatar de Piotr
      Piotr

      En même temps, il a foi en la psychanalyse et doit savoir par exemple, que l’amour a des raisons que la raison ignore.

    4. Avatar de vigneron
      vigneron

      l’amour a des raisons que la raison ignore.

      Oooh pour certains c’est vit penser, vit dit, vit fait.… Y s’font une raison quoi.

  18. Avatar de Rosebud1871
    Rosebud1871

    Expliquer la nature en ses propres termes

    Parce que le terme de « nature » et celui d’ « Homme » au genre neutre, sont très présents dans le billet, j’étais amusé de lire quelques commentaires tels :
    Michel Martin : la première fois de l’histoire que les femmes ne vont peut-être plus subir la domination masculine
    Juan Nessy : Ma référence pour mesurer le « progrès » est plutôt la relation homme/femme , aussi extraordinaire que la relation homme /nature .
    Lisztfr : je ne vois pas d’autre solution que de confier le sort politique de l’espèce aux femmes

    etc…

    Je viens de lire la préface à « Surveiller et jouir » de Gayle Rubin et ça m’a rappelé quelques commentaires…l’intérêt de cette longue préface est double : survoler une partie de 30 ans de travaux made in USA produits par des universitaires et de trans-percer les cloisons des spécialités…

    « NOTRE AMIE GAYLE RUBIN… » Préface de David M. Halperin et Rostom Mesli

    [ Gayle Rubin est une légende vivante des études sur la sexualité et de la queer theory. « Le Marché aux femmes », qu’elle écrivit lorsqu’elle était étudiante de premier cycle à l’Université du Michigan et qu’elle publia en 1975 lorsqu’elle y était doctorante, eut vite fait de devenir l’article d’anthropologie sociale le plus cité ; on considère qu’il a fondé les champs de la théorie féministe et des études de genre, et qu’il est à la base de tous les travaux ultérieurs sur la construction sociale du genre. En fait, Rubin semble avoir été la première anthropologue féministe à employer le mot de « gender » dans un texte imprimé. À « Penser le sexe », autre article qu’elle écrivit dix ans plus tard, on attribue la fondation des études sur la sexualité, des études gaies et lesbiennes, et de la queer theory. Les universités d’Amérique du Nord ont été le théâtre, ces dernières années, de plusieurs colloques destinés à célébrer les vingt-cinquièmes et trentièmes anniversaires de ces deux textes.

    Par la suite, Rubin publia une série d’articles – dont beaucoup paraissent ici pour la première fois en traduction française – qui l’ont confirmée dans son statut de représentante la plus éminente de ce qu’elle a elle-même appelée « une théorie radicale de la politique de la sexualité ». Au cœur de cette théorie, l’idée que voici : ce qui, dans nos sociétés, passe pour la morale sexuelle dissimule l’opération sous-jacente d’un système illégitime de stratification sexuelle que l’on accepte sans l’interroger ; cette morale sexuelle recouvre une façon d’organiser la vie sexuelle en fonction d’une hiérarchie de privilèges et de prestige qui veut que certaines formes de comportement sexuel (hétérosexuel, monogame, dans le cadre du mariage, libre, gratuit, ayant lieu dans l’espace domestique, intra-générationnel, vanilla , génital, à deux, procréatif, sans sex toys, et sans usage de pornographie), soient approuvées et promues comme allant de soi, tandis que les autres, aussi bien que les personnes qui les pratiquent, sont considérées comme problématiques, mauvaises, inacceptables, et sont non seulement critiquées, mais aussi persécutées, pénalisées, et vouées à l’élimination au nom de l’hygiène morale et sociale.

    Il n’y a, pourrait-on penser, pas grand-chose de radical dans cette perspective. Ce serait oublier qu’elle fut produite dans un temps où de nombreuses formes de comportement sexuel restaient pénalisées. D’ailleurs, jusqu’en 2003, année où la Cour Suprême des États-Unis déclara de telles lois contraires à la Constitution, l’État du Michigan a continué d’interdire tout rapport sexuel anal, oral, ou manuel entre deux personnes, quel que soit leur sexe, et considérait de tels actes comme des crimes passibles d’amendes et de peines qui pouvaient aller jusqu’à quinze années de prison ; et ces lois étaient parfois appliquées. La clarté et la rigueur de ses conférences comme de ses écrits ont fait de Rubin le principal porte-drapeau, dans le monde intellectuel, de la libération sexuelle « radicale » aux États-Unis.

    Au cours des trois dernières décennies, Rubin s’est aussi consacrée à l’écriture d’une histoire, monumentale et minutieuse, de l’émergence et de la formation, aux États-Unis, d’une subculture sexuelle spécifique qui n’avait jamais été étudiée par un anthropologue de métier – à savoir les communautés gaies dites « cuir ». Ce travail est passé par la description et l’analyse des identités sociales (et pas seulement des pratiques sexuelles) produites par les homosexuels sadomasochistes. La tâche était de grande ampleur. En effet, au moment où Rubin commença son travail sur le sujet, les documents dont elle avait besoin pour étayer sa recherche n’existaient pas : elle dut constituer les archives mêmes sur lesquelles fonder son étude. Il lui fallut repérer, assembler, et dans une large mesure créer les sources les plus élémentaires nécessaires à son projet – ce qu’elle fit par la conduite d’innombrables interviews, la pratique de l’observation participante, et la mise au jour de matériaux supplémentaires, jusques là dispersés dans diverses archives et documents.

    Cette tâche n’était pas seulement ardue : elle était aussi dangereuse. Non pas du tout parce que les communautés parmi lesquelles Rubin travaillait lui étaient hostiles, mais parce que le contexte politique plus large dans lequel elle a œuvré – la société étatsunienne en général, aussi bien que le mouvement féministe en particulier – s’opposaient parfois violemment à son approche, laquelle envisageait les différences de pratiques sexuelles d’un individu à l’autre comme de bénignes variations du comportement humain. Le sadomasochisme en général, et le sadomasochisme gai en particulier, étaient souvent vus comme des perversions, des formes d’agression, des exemples de fascisme érotique, des abominations morales, des atteintes à la dignité de la personne, des menaces contre le bien-être des femmes et des enfants, des facteurs de diffusion du SIDA, et des dangers pour l’humanité en général, aussi bien que pour la société américaine en particulier. Nombreuses étaient les militantes féministes qui considéraient Rubin comme l’ennemi – comme la représentante la plus importante, la plus puissante, et par conséquent la plus menaçante, d’une perspective qu’elles tenaient pour anti-féministe. Certaines estimaient que Rubin promouvait la violence contre les femmes. Pendant une bonne dizaine d’années au moins, depuis le début des années 1980 jusqu’au milieu des années 1990, chaque déplacement de Rubin fut guetté et dénoncé par de nombreuses féministes qui tentaient de l’empêcher de s’exprimer publiquement, boycottaient les organisations qui l’invitaient, essayaient de la faire exclure des groupes de recherche auxquels elle appartenait et, souvent, usaient de la menace personnelle ; pour finir, elles réalisèrent des alliances stratégiques avec le Parti Républicain et l’extrême-droite pour s’opposer à l’éthique sexuelle défendue par Rubin.

    La polémique n’a pourtant jamais vraiment cessé: dans The Professors, livre qu’il a publié en 2006, le journaliste et militant de droite David Horowitz compte Rubin parmi les « 101 universitaires les plus dangereux aux États-Unis ».

    Dans son article pionnier de 1975 sur « Le Marché aux femmes » – il ouvre le présent recueil – Rubin proposait une théorie pour expliquer la subordination sociale des femmes aux hommes, dans « les variations infinies et la monotone similitude qu’elle revêt à travers les cultures et à travers l’histoire ». Elle situait les causes de l’oppression des femmes dans le système de parenté et dans la division genrée du travail, ainsi que dans les formations fantasmatiques et érotiques collectives qui soutiennent, reflètent, et reproduisent cette structuration des relations sociales. S’appuyant sur les travaux de Claude Lévi-Strauss et les utilisant dans une perspective féministe (ce qui n’était pas une mince affaire), Rubin remarquait que « les structures élémentaires de la parenté » produisent des asymétries de genre dans la mesure où elles imposent la circulation des femmes entre les hommes à travers l’institution du mariage – une institution dont la fonction consiste, dans de nombreuses sociétés, à lier des familles, des foyers, et des unités de parenté par le moyen des femmes données et reçues en mariage. Cette institution est plus connue sous le nom de tabou de l’inceste : Rubin (à la suite de Lévi-Strauss), a interprété le tabou de l’inceste, non comme une prohibition spécifiquement sexuelle, mais plutôt comme l’expression d’un impératif social plus fondamental : l’exogamie. C’est cette dernière qui interdit la consommation sexuelle des femmes à l’intérieur de la famille, et qui, à la place, exige que les femmes soient échangées – comme des mots et comme de l’argent – entre hommes de différents foyers ou différents groupes de parenté. (Le tabou de l’inceste aurait pu, en théorie, donner lieu à l’échange des hommes, au lieu de l’échange des femmes, mais ce n’est pas ce qui s’est produit – ce qui n’est qu’une autre façon de dire que c’est la domination masculine, non la domination féminine, qui est la règle dans les sociétés humaines). En bref, le tabou de l’inceste, les structures de parenté qui lui correspondent, et le marché aux femmes mariables qui en résulte, donnent aux hommes des droits sur les femmes, que les femmes n’ont ni sur les hommes, ni sur elles-mêmes (le droit, par exemple, de disposer de quelqu’un dans le mariage). Les hommes, dans ce système, sont des agents culturels – dans la mesure où ils échangent les femmes – tandis que les femmes sont des véhicules culturels, la marchandise qu’on échange. Ce système culturel asymétrique, cette division genrée entre les échangeurs et les échangées, a notamment pour effet un important degré de subordination des femmes aux hommes dans l’ordre social.

    Le modèle théorique de Rubin, dont le raffinement et l’audace vont bien au-delà de ce qu’on peut en rendre ici, a l’avantage d’expliquer l’inégalité de genre dans des termes féministes. C’est-à-dire que Rubin traite l’inégalité de genre comme une forme de stratification sociale – ce qui permet de l’analyser en termes d’oppression politique. Cela peut sembler une idée toute simple, mais elle était révolutionnaire à l’époque – et elle conserve aujourd’hui encore une grande portée. Rubin, en effet, place l’origine de la domination masculine, non dans une nature présentée comme fixe ou inaltérable, ou dans une essence de la féminité ou de la masculinité, mais dans des modalités d’organisation sociale et dans des pratiques institutionnelles. Cette façon de concevoir le genre comme une catégorie sociale est, aujourd’hui encore, loin d’être universellement admise. Ainsi le modèle de Rubin reste-t-il politiquement progressiste dans la mesure où il défie les idéologies modernes qui présentent le genre comme une hiérarchie naturelle plutôt que comme une injustice sociale – idéologies qui sont elles-mêmes liées à des pratiques institutionnelles d’oppression de genre et qui fonctionnent également comme des éléments du dispositif d’oppression de genre, dans la mesure où elles font passer la domination masculine pour une donnée naturelle, indépassable, et non idéologique – qui, par conséquent, ne peut pas faire l’objet d’une critique politique.

    Mais le modèle de Rubin est politiquement efficace en un autre sens : en constituant effectivement le genre en construction socio-culturelle, il vient légitimer le féminisme – conçu désormais comme champ de recherche interdisciplinaire dont l’objet principal est de mener l’analyse et la critique intellectuelles de la construction socio-culturelle du genre. Pour le dire autrement, le modèle de Rubin constitue un objet que le féminisme est fondé à revendiquer comme son domaine de recherche propre. Et plus encore, en formulant l’idée d’un « système sexe-genre », et en proposant que l’on envisage ce système comme tout aussi fondamental à l’organisation des sociétés humaines que le « système politique » ou le « système économique », Rubin a inventé les nouvelles études sur le genre et la sexualité, en même temps qu’elle en a délimité l’objet. C’est en ce sens que l’on a souvent dit que Rubin avait fourni un fondement théorique à la théorie féministe, aux études sur le genre et sur la sexualité. Il serait probablement plus exact de dire que Rubin a inventé le champ, plus large et aux contours moins aisés à délimiter, qui sous-tend nombre de ces disciplines : à savoir l’économie politique du sexe.

    Une autre réussite du « Marché aux femmes » a consisté à donner, d’un phénomène universel, une analyse constructionniste sociale. L’article, en effet, examina une structure sociale – la domination masculine, la subordination des femmes – observée dans la plupart des sociétés humaines, sinon toutes, et fournit une façon de la comprendre qui ne l’essentialisait pas, qui ne l’attribuait pas à la nature, qui refusait de la considérer comme un destin humain sur lequel on n’aurait aucune prise, ou comme une « nécessité de la culture », pour la seule raison que la vie humaine aurait toujours, ou presque toujours, reposé sur cette structure. Autrement dit, comme les psychologues évolutionnistes, Rubin interprétait la vie sociale contemporaine comme le produit d’une configuration du sexe et du genre qui, « dans un obscur passé humain », « organisait la société », mais qui a depuis perdu nombre de ces fonctions. À la différence des psychologues évolutionnistes, cependant, Rubin ne pensait pas que les relations qui lient les femmes et les hommes de nos jours soient la conséquence inéluctable d’une subjectivité figée, ancrée dans une domination masculine de souche préhistorique. Si l’inégalité de genre, quelque généralisée qu’elle soit, était le résultat d’arrangements sociaux archaïques de moins en moins justifiés, elle pouvait faire l’objet de contestation sociale. À la fin de son article, Rubin appelait en effet à une « révolution de la parenté ». La révolution n’eut pas lieu, mais même les plus petits pas faits dans cette direction ont eu des conséquences importantes, donnant en ce sens raison à Rubin lorsqu’elle entrevoyait les larges effets sociaux qu’auraient des changements dans les structures de la famille et de la parenté.

    Rubin ne se satisfit pas longtemps des formulations contenues dans son article, vite devenu un classique. Elle y revint dix ans plus tard, dans « Penser le sexe », où elle introduisit une deuxième innovation capitale. Dans ce nouvel article, elle se proposait de contester l’idée que « le féminisme est ou doit être le lieu privilégié d’élaboration d’une théorie de la sexualité ». « Le féminisme, y écrit-elle, est la théorie de l’oppression de genre », et s’il est vrai que « le féminisme sera toujours une source de réflexion passionnante sur le sexe », Rubin considérait qu’il n’avait, ni ne devait avoir le monopole de la question. Au contraire, « bien que le sexe et le genre soient reliés, ils ne sont pas la même chose, et ils forment le fondement de deux aires différentes d’interaction sociale ».

    Rubin présentait cette idée comme une critique directe de ce que, dix ans plus tôt, dans « Le Marché aux femmes », elle avait baptisé le « système sexe-genre » : « Par opposition à ma perspective dans “Le Marché aux femmes”, je soutiens aujourd’hui qu’il est essentiel de séparer analytiquement le genre et la sexualité pour mieux refléter leur existence sociale séparée ». La sexualité, selon Rubin, était liée au genre, mais elle n’était pas « un produit dérivé du genre ». Il fallait en faire l’étude et la critique de façon autonome. Cette position conduisit au développement et à la consolidation des études gaies et lesbiennes, et c’est l’analyse politique que fit Rubin de la mise en œuvre des normes sexuelles qui, plus tard, servit de fondement à la queer theory. La préface du Lesbian and Gay Studies Reader, le premier manuel universitaire dans ce champ, publié en 1993 – et qui était justement ouvert par « Penser le sexe » – témoigne clairement de l’importance du travail de Rubin : « Ce que les études gaies et lesbiennes font dans le domaine du sexe et de la sexualité correspond à peu près, écrivent les directeurs du volume, à ce que les études féministes font dans le domaine du genre. » « Les études gaies et lesbiennes cherchent à poser la centralité analytique du sexe et de la sexualité à l’intérieur de différents champs de recherche ». Ces formules ne sont quasiment rien d’autre que des paraphrases de Rubin. On ne saurait mieux reconnaître son impact sur la façon dont les études gaies et lesbiennes formulèrent leur objet.

    Rubin est toutefois la première à nier avoir fondé quoi que ce soit. L’importance de ses travaux n’a d’égal que la modestie personnelle et intellectuelle avec laquelle elle en parle. Elle a d’ailleurs récemment appelé à adopter un « éthos de l’humilité » pour tempérer les prétentions démesurées de certains chercheurs féministes ou queers qui s’imaginent parfois être sur le point de changer la face du monde avec deux ou trois théories dont, souvent, l’originalité et la portée sont bien plus modestes qu’ils ne voudraient le croire. Rubin n’a eu de cesse, au cours des dernières années, de resituer son travail dans les courants intellectuels et politiques de son temps ; elle a constamment rappelé les nombreuses personnes, les nombreuses idées, et les événements qui ont contribué à former sa pensée. Elle cherche ainsi à rappeler qu’il n’y a de pensée et de politique progressistes que collectives – ce qu’à trop insister sur le rôle de quelques « grandes femmes », l’on risque de perdre de vue ; elle cherche aussi à sauver de l’oubli d’obscurs mouvements qui ne sont peut-être plus très chics, mais qui ont encore quelque chose à nous apprendre. Rubin, bien sûr, n’a pas tout à fait tort quand elle dit qu’elle n’était pas aussi originale qu’on l’a parfois prétendu, notamment parce qu’on avait oublié les traditions intellectuelles et politiques qui ont formé sa pensée. Il n’en reste pas moins vrai que les articles rassemblés dans ce volume donnent une idée très claire du rôle crucial qu’elle a joué, à titre personnel, par ses travaux et ses contributions conceptuelles et théoriques, dans la formation du paysage intellectuel qui est aujourd’hui le nôtre.

    Dans ses travaux ultérieurs, Rubin s’empara du sadomasochisme consensuel, qu’elle défendit contre les attaques venues de la droite aussi bien que de la gauche. Elle critiqua les travaux des féministes anti-porno et fut, par voie de conséquence, associée à la gauche pro-sexe du mouvement – même si Rubin est la première à rejeter toute tentative de réduire les luttes politiques des dernières décennies à un affrontement qui opposerait des féministes « pro-sexe » et « anti-sexe ». À y regarder de plus près, il est quelque peu impropre de qualifier de « pro-sexe » la position de Rubin : celle-ci, en effet, n’a jamais nié l’existence, dans la sphère du sexe, de mécanismes de domination sociale – et de domination des femmes notamment. Rubin contestait, en revanche, l’idée que le sexe soit par nature anti-féministe, et plus encore l’idée que c’est du sexe ou de la pornographie que (comme certaines intellectuelles l’écrivirent) découle l’oppression des femmes. En ce sens, Rubin a pu dire, parfois, qu’elle n’était pas tant « pro-sexe » que « anti-anti-sexe ».

    Pour comprendre les travaux de Rubin sur la subculture sadomasochiste gaie, il importe d’avoir à l’esprit le contexte historique dans lequel elle a entrepris cette partie de son travail. En 1978, elle quitta le Michigan pour s’installer à San Francisco afin d’y mener ses recherches sur les homosexuels sadomasochistes. À peine trois ans plus tard, la communauté qu’elle étudiait commença à être ravagée, comme toutes les communautés homosexuelles urbaines, par ce qui allait bientôt s’appeler le SIDA. Dans le cas de San Francisco, comme le montre l’« Élégie pour la Vallée des rois », un autre facteur venait achever de mettre en péril l’existence même de la communauté cuir : en même temps que celle-ci enterrait ses morts, elle voyait ses institutions disparaître les unes après les autres, victimes des politiques de renouvellement urbain menées par la municipalité sous la pression de grands intérêts financiers. Ces politiques, qui lorgnaient directement sur le quartier cuir et qui vinrent ajouter leurs effets à la dévastation semée par le SIDA, mettaient en péril l’existence même de la communauté cuir locale. En effet, si l’on pouvait espérer que l’épidémie de SIDA s’arrête un jour, il y avait tout lieu de penser en revanche que ces changements opérés par le renouvellement urbain seraient irréversibles. Ce contexte explique le ton élégiaque si particulier des articles de Rubin sur le cuir. Mais il explique peut-être aussi, en partie du moins, le changement sensible qui s’opère dans le travail de Rubin dans les années 1990.

    À partir de 1991 et de son article sur « Les Catacombes » en particulier, Rubin sembla s’éloigner de l’anthropologie générale qui avait caractérisé ses premiers travaux, pour se consacrer de plus en plus à l’ethnographie d’espaces plus circonscrits et à l’étude de subcultures sexuelles : elle écrivit désormais sur tel bar, tel club, tel petit segment de rue, tel quartier. Ce changement présente une dimension sentimentale évidente. On aurait tort, cependant, de l’y réduire, ou de ne pas en saisir les implications politiques aussi bien qu’épistémologiques. Sur le plan politique, il s’agissait d’abord d’affirmer publiquement ce que beaucoup auraient aimé ne pas voir : la disparition de la communauté cuir n’était pas un événement trivial ou négligeable ; ce n’était pas non plus un heureux retour à l’ordre que les excès supposés des années 1970 avaient rendu inévitable. Pour Rubin, au contraire, la disparition de la communauté cuir était d’abord le signe d’une réorganisation néolibérale du capitalisme et de ses structures urbaines ; et c’était aussi, bien sûr, une tragédie personnelle et politique majeure pour de nombreuses personnes. Dans ce contexte, il importait au plus haut point de conserver la mémoire de la communauté. En même temps qu’elle fut témoin de la disparition de son « terrain », Rubin prit une conscience aiguë du fait qu’il n’existait quasiment aucune institution chargée d’en recueillir l’histoire et d’en conserver les traces. Les articles (et l’appartement…) de Rubin devinrent ainsi les archives mêmes dont était privée la communauté cuir.

    Mais ce tournant recouvre aussi des enjeux épistémologiques très importants. Il s’agit d’abord de lutter contre la marginalisation des sciences sociales au sein des études gaies et lesbiennes : c’est là l’enjeu d’« Étudier les subcultures sexuelles ». Alors qu’en France, c’est d’abord dans les départements de sciences humaines que se sont développés les travaux sur le genre et la sexualité, tandis que les départements de lettres ou de philosophie se montraient plus conservateurs, c’est l’exact inverse qui s’est produit aux États-Unis. À partir de 1985 en particulier, avec le développement de la queer theory, c’est principalement dans les Humanities que les travaux gais et lesbiens se sont produits – notamment parce que c’était de là qu’étaient venus les premiers grands travaux théoriques, et c’était donc vers ces départements que les étudiants avaient intérêt à se diriger. Rubin ne méconnaît certes pas l’importance de la philosophie ou de la critique littéraire. Elle affirme en revanche que ces disciplines réalisent quelque chose de très différent de ce que font les sciences sociales et que les unes ne sauraient remplacer les autres.

    Il y a là plus qu’une querelle de disciplines. Au-delà de la marginalisation des sciences sociales, et de façon plus fondamentale, Rubin cherche à lutter contre le désintérêt croissant manifesté, au nom du prestige de la Théorie, à l’égard du matériau social lui-même. En conséquence, une large part de son travail va désormais consister à mettre ce matériau au premier plan, tandis que les cadres théoriques dans lesquelles Rubin inscrit son travail se font plus implicites. Il importe de toujours se laisser guider par une observation aussi exacte et critique que possible des faits empiriques, car cette observation, et elle seule, peut fournir à l’élaboration théorique le substrat solide qui en garantit la pertinence. N’en concluons pas que l’armature théorique devient plus lâche : dans les articles les plus récents de Rubin, la puissance théorique de ses premiers travaux a tout sauf disparu. Et il n’est guère difficile de déceler, derrière la simplicité apparente du propos, la rigueur et l’inventivité du cadre théorique.

    Le travail qui occupe Rubin aujourd’hui, qui consiste à retracer l’histoire des communautés cuir homosexuelles masculines de San Francisco, se situe à la confluence de plusieurs champs et thèmes : l’urbanisme et la géographie urbaine, l’économie politique, les théories de l’espace, la désindustrialisation et les sociétés post-industrielles, l’anthropologie des groupes contestataires, la sexologie et l’histoire de la psychologie sexuelle, la post-modernité, la sociologie de la déviance, l’archéologie urbaine et l’ethnographie. Les articles ici rassemblés reflètent la façon qu’a Rubin de toucher à chacun de ces domaines, et témoignent de la variété des implications thématiques et méthodologiques de son projet.

    La publication de ce volume est un événement heureux. Le travail de Rubin n’a pas été totalement ignoré en France, mais il y est resté méconnu. Et pourtant, Rubin elle-même n’est pas sans lien avec la culture française. En 1976, elle écrivit une introduction pour la traduction américaine du roman de Renée Vivien, Une femme m’apparut. Au début des années 1970, c’est-à-dire à une époque où Jacques Lacan restait encore assez peu connu aux États-Unis, elle assista à une séance de son séminaire ; elle fut aussi la première théoricienne du genre et de la sexualité à accorder au travail de Lacan une place prépondérante. Quand Michel Foucault se rendit à San Francisco à la fin des années 1970, il prit contact avec Gayle Rubin qui s’était présentée à lui quelques années plus tôt à la Bibliothèque Nationale. Dans sa découverte de la vie homosexuelle san franciscaine, et de la subculture sadomasochiste, Foucault bénéficia grandement de la connaissance qu’avait Rubin de la ville. Foucault reconnut d’ailleurs sa dette à la fois personnelle et épistémologique dans une interview où il évoque « notre amie Gayle Rubin » . La parution du présent recueil va enfin permettre aux lecteurs français de relire les réflexions que livre Foucault, dans les interviews de ses dernières années, sur la politique et sur l’éthique du sadomasochisme homosexuel masculin , à la lumière des écrits si marquants de Rubin sur le même sujet et à la même époque – et de goûter quelque chose de la saveur électrique de ces années enivrantes qui produisirent les pensées les plus audacieuses de notre temps sur le sexe, l’éthique et la politique, élaborées par des individus qui faisaient collectivement l’expérience physique et intellectuelle des limites des possibilités humaines. ]

    1. Avatar de francois2

      bonjour Rosebud.

      merci pour votre message. Il me parait tout à fait digne d’intéret.

      Toute reflexion est digne d’intéret, toute théorie bonne ou mauvaise se doit d’être comprise.
      Cependant comme tout model, il convient ensuite de le mettre sur terre et d’observer les résultats à court et long terme.

      je crois que la lecture de Nietzsche peut être utile à comprendre ce qu’est le flux vital et l’energie . En effet toute la philosophie très christique de ce penseur, à mon avis très profond et fort peu naîf, correspond à la critique de la chair à l’instard de celle de la raison par Kant.

      Regardons le passé et le futur d’un groupe homosexuel et vérifions si ce groupe possède un être propre ou si ce groupe ne fait que lutter contre un groupe dont il dépend. Cela rejoint le questionnement de la sur nature et du sur homme.

      Au plaisir de vous lire attentivement et lentement.

      Ps:Attention à bien différencier les niveaux de normalité.

  19. Avatar de Charles A.
    Charles A.

    il a foi en la psychanalyse

    Pour la grâce de Dieu, pas la foi…
    La psychalyse n’est pas pour lui un récit religieux de plus…

  20. Avatar de pablo75
    pablo75

    @ Piotr

    Foi en la psychanalyse mais pas en celle de Jung, lequel n’avait aucune foi en celle de Freud.

    Au fond tout est une histoire de foi: on croit qu’il y a quelque chose qui nous dépasse (parce qu’on le sent au plus profond de soi-même ou parce qu’on a fait certaines expériences qui tendent à le prouver) ou on se croit à soi-même en pensant qu’il n’y a rien.

    La grande différence entre ces deux fois c’est que la Beauté est du côté de la première.

    Hilarion Alfeyev: St Matthew Passion. No 1
    http://www.youtube.com/watch?v=bsUbmCoMP1Y

    1. Avatar de tilton
      tilton

      Hélas NON.
      Freud (oncle de Berney le créateur de la propagande civile appelée aujourd’hui « marketing ») a tout fait pour évincer Jung.
      A la lecture de l’un et de l’autre on prend vite conscience de la « facilité » de l’un aux « subtilités » profondes de l’autre.
      L’un est plus vendeur tout simplement.

    2. Avatar de pablo75
      pablo75

      @ tilton

      Chuuuut… !

    3. Avatar de vigneron
      vigneron

      L’un est plus vendeur tout simplement.

      En 33 et jusqu’en 40, Jung était très vendeur et bien en cour chez ses voisins germaniques, parait-il…
      Point de vue – d’un freudien, me direz-vous ? certes, néanmoins pertinent – de Dominique Bourdin (La Psychanalyse, de Freud à aujourd’hui) en 2007 sur « le bon père Jung » :

      Renonçant aussi bien à l’importance de la sexualité infantile qu’au rôle organisateur de la crise œdipienne dans l’histoire singulière de chaque individu, Jung est sorti de la psychanalyse – même s’il continue à utiliser ce terme, désormais compris comme analyse de contenus psychiques généralement inconscients (…). Peut être est-ce un prophète du « retour du religieux », indépendamment des Églises traditionnelles, et en précurseur du courant spirituel du New Age, selon lequel nous entrons désormais dans « l’ère du Verseau », que nous pourrions le décrire le plus adéquatement. Ce faisant, il a délibérément quitté le terrain des sciences humaines et de la pensée rationnelle

  21. Avatar de Antoine
    Antoine

    Au préalable, le progrès est à mes yeux la poussière qui aveugle ceux de mes congénères.

    Quant à Dieu, si celui-ci se réduit à une chimère, à rien ou à un fétu de paille, qui pour autant, aide l’homme à être (soi-disant) Maître de la nature en la dépassant (de combien de mètres?), tout ceci est bien paradoxal… Ce qui est préoccupant pour un rationnaliste. A moins que manger la queue du serpent, quand on est homme, ça rend plus intelligent?

    Enfin le syllogisme. En aucun cas pour moi le syllogisme est source de savoir. C’est seulement un raisonnement qui permet à la Loi d’avoir Force. Si l’on prend le théorème de Pythagore, le syllogisme permettra à l’architecte de prendre les mesures nécessaires pour obtenir un angle droit.
    Pythagore a tiré sa Loi de l’expérience. Il se trouve en effet que son théroème (les carrés de la longueur des côtés de l’angle droit du triangle rectangle…) est tiré de la découverte des égyptiens qu’un triangle dont les côés sont l’un de trois unités, l’autre de quatre, permet d’obtenir un angle droit. Par abstraction, Pythagore en a tiré le théorème.
    Mais l’abstraction ne découle pas nécessairement de l’expérience: les égalités remaquables en mathématiques, (a+b)² par exemple, proviennent de nul part autour de nous…
    Le syllogisme est un raisonnement qui n’est bon que si la Loi à laquelle il s’applique est Juste.

    Quant à l’intuition, même si ça relève de la conscience, ça n’est pas raisonnement.

    PS: Très beau texte de GIONO cité ci-dessus par FUJISAN, et un enchantement de lire Jacques LAROCHE ainsi que PABLO 75. DISSONNANCE, SYLLA, MOI, sont également des sources à revigorer la flamme, en tout cas la mienne.

  22. Avatar de Fab
    Fab

    « le moyen que la nature s’est donnée de créer le Dieu qui lui fit jusqu’ici tant défaut », c’est le Surhumain. Encore heureux !

    « Il reste cependant à éliminer de nos sociétés le règne de la nature non–domestiquée en son sein telle qu’il s’exerce encore dans la sphère économique et celles autour d’elle qu’elle parvient à contaminer. » : oui. L’économie est la manière dont nous nous sommes organisés en société. « Les frayeurs qui avaient conduit l’Homme à croire aux dieux » sont les mêmes qu’il a voulu fuir en entrant en société. Ces peurs se retrouvent logiquement dans l’économie.

    « L’Homme est la conscience de la nature » : il n’en a pas conscience.

    Cette lutte vaut quand même mieux que d’autres !

    1. Avatar de pablo75
      pablo75

      «Les frayeurs qui avaient conduit l’Homme à croire aux dieux » sont les mêmes qu’il a voulu fuir en entrant en société. »

      Et pourtant la société existe… 😉

      Autrement dit: ce n’est pas parce que l’homme découvre l’Au-delà à cause ou grâce à ses frayeurs que l’Au-delà n’existe pas. Avec cet mauvais argument on peut aussi « descendre » la philosophie.

      C’est quand les gens se cassent la g… dans la vie qu’ils découvrent l’Essentiel. C’est pour ça d’ailleurs que souvent « les rues glissent »…

      Le seul problème métaphysique digne de ce nom: le Mal (ou « les frayeurs »).

      « Au fond, deux notions antinomiques nous agitent plus que tout: la vie et la mort, le bien et le mal. Tout s’ordonne autour d’elles, toute la philosophie accessible à l’homme. Pourquoi est-ce ainsi? Sans doute parce que ces deux notions contiennent l’essentiel de notre existence. Le sens et le secret du principe de notre mouvement. (…) L’existence humaine exige un constant effort moral dans l’accomplissement du bien, pour que chaque vie se réalise et contribue en même temps à l’évolution de l’humanité tout entière.
      La notion du bien et du mal (et le conflit entre eux) est aussi nécessaire à la vie éternelle que la différence de potentiels à l’apparition de l’électricité, ou que la différence de pressions atmosphériques à la naissance du vent. C’est pourquoi la lutte du bien et du mal subsistera tant que l’homme vivra sur cette terre. L’homme doit naviguer et aller s’amarrer à l’autre rive d’un océan. L’eau marine, c’est le mal; la barque et les avirons, le bien. Rame de toutes tes forces et tu arriveras à bon port! Lâche les avirons et tu sombreras!  »
      (A.Tarkovski. Journal 1970-1986)

    2. Avatar de Fab
      Fab

      pablo75,

      Et la croyance aussi… 🙂

      Relisez le fond.

  23. Avatar de Papimam
    Papimam

    J’ai lu et relu votre billet qui a beaucoup interrogé et occupé quelque peu les réflexions d’un novice comme moi en philosophie.
    Le texte m’a semblé quelque peu complexe mais j’y perçois cependant du pratico-pratique et surtout des aspects majeurs qui engagent l’avenir de notre modeste humanité.
    Ma première réaction fut : qu’en pensent Hubert Reeves et ses pairs, qu’en pensent nos biologistes comme « le bourlingueur de la science » Didier Raoult (voir article du Monde du 19/11 et son interview dans la tête au carré).
    Je vous livre les derniers articles qui m’ont interpellé et qui sont plus ou moins en rapport avec ce sujet.

    Le Monde diplomatique de décembre 2010 « Qui expertisera les scientifiques ? »
    Les sachants seuls, les différentes associations & ONG, un bon équilibre des 2 ?
    Opposer aux experts d’autres savoirs, faire participer les citoyens, refuser les pressions des lobbies industriels.
    « Une expertise au service des citoyens nécessite, en amont comme en aval, une vigilance soutenue vis-à-vis des groupes d’intérêt ». Ne pas être juge et parti.
    Ma conclusion par rapport à mes expériences terrain en matière de sécurité dans le domaine informatique : on est dans une problématique classique d’analyse des risques et où le pragmatisme doit étouffer les idéologies.
    http://www.monde-diplomatique.fr/2010/12/TESTART/19928

    Et aussi dans le Monde diplo « Anti-Lumières de tous les pays…. »
    Lumière ou obscurantisme ? Dieu résoudra tout !!!
    Loin des théoriciens néo-conservateurs que l’on retrouve dans la droite US, israélienne, chez les islamistes, totalement opposés aux Lumières et pour qui la Révolution française est un phénomène diabolique !
    « Les hommes ont besoin du sacré et besoin d’obéir »
    Conclusion de l’article :
    « Malgré l’expérience désastreuse du XX° siècle, l’affrontement entre les 2 traditions politiques se poursuit »
    « La défense de l’universalisme et du rationalisme reste aujourd’hui une tâche urgente et complexe, à la mesure de ses enjeux : maintenir ce qui fonde une nation composée de citoyens autonomes »

    http://www.monde-diplomatique.fr/2010/12/STERNHELL/19952

    Pour terminer, une annonce récente d’un progrès en cours et qui devrait révolutionner nos rapports avec la médecine à travers le domaine de la bio-informatique.
    Article du Monde du 28/12  » Génome en poche »
    Nous disposerons donc de notre génome sur notre smartphone après avoir tout simplement craché non pas dans la soupe mais dans un sachet et dont le contenu sera disséqué pour bientôt une centaine d’euros.
    Epoustouflant, une innovation française qui sera mise au point aux USA car rejeté en France pour cause de bio-éthique.
    « La médecine est sur le point de basculer dans un nouveau monde, affirme M. Merel, celui du diagnostic moléculaire in vitro et in silico. »
    On n’arrête pas le progrès.

    Mes quelques pistes pour un avenir plus clément :
    Respect des droits de l’homme, éducation non dogmatique pour tous, Culture, avancer ensemble, moins d’inégalités, respect de la nature, partage des ressources et des innovations, ……
    Compassion, altruisme, générosité, respect, tolérance, modestie, …….
    Le minimum vital pour chacun au moins, pas d’individualisme effréné, fin du néo-libéralisme sauvage et du capitalisme débridé et stérile
    Sus aux prédateurs et parasites de tous ordres.
    ==> s’inspirer de la civilisation grecque, du Nouveau Testament, du Siècle des Lumières et pas des usurpateurs rétrogrades. Avancer ensemble et non régresser.
    Ou alors revenir à l’age des huttes, zut ?

  24. Avatar de Crapaud Rouge

    Monsieur Jorion, vous devriez jeter un œil sur cet article de Pour la science, « Persuader de son savoir sans le transmettre », qui dit en substance :

    Trouver une démonstration consiste alors à écrire une suite de formules telle que chacune est un axiome ou le résultat de l’application d’une des règles de manipulation. Vérifier une démonstration consiste à passer en revue la suite de formules en s’assurant que les règles du jeu formel ont bien été respectées. Trouver une démonstration est difficile, car les règles du système formel créent une explosion combinatoire de possibilités. Vérifier une démonstration est facile, car il s’agit d’un travail mécanique de contrôle qu’on peut, en principe, confier aux crapauds.

    S’il est facile de vérifier, il est donc facile de contredire un texte, surtout s’il est aussi bien construit que votre billet. (Il a dû vous coûter pas mal de temps, non ? C’est en tout cas l’impression qu’il m’a laissé.) Donc, pour ne plus être contredit par les crapauds qui traînent sur votre blog, évitez de vous exprimer avec trop de clarté, et optez sans hésitation pour le célèbre « côté obscur ». 🙂

    1. Avatar de Paul Jorion

      Beaucoup de temps ? mais dans du multitâche : sous la douche essentiellement.

  25. Avatar de Vincent
    Vincent

    Alors faudrait voir à frotter un peu plus fort derrière les oreilles patron ! ….

  26. Avatar de gauchitude
    gauchitude

    J’ai aimé ce texte que je ne connaissais pas. Je viens de le lire une seconde fois. Je suis d’accord avec votre démonstration quant aux effets subversifs et créatifs de l’Homme sur la nature. Mais tout cet exposé ne semble être que le fondement par lequel vous voulez prouver en conclusion que l’économie capitaliste est un anachronisme néfaste.

    Or, bien qu’affectivement enclin à partager votre point de vue, il a réveillé en moi cette question dérangeante : la compétition n’est-elle qu’une prédation destructrice ? la compétition n’est-elle pas aussi le ressort d’une émulation créatrice qui a décuplé la vitesse à laquelle l’Homme a subvertit la nature… en bien et en mal ?

    Au delà de cette question qui n’est pas moindre à mes yeux, il y a je pense un autre écueil à votre raisonnement au sens où il est très ethnocentrique. Je ne suis pas suffisamment instruit en ces matières, mais je m’interroge sur la possible existence de sociétés humaines dont l’histoire contredirait pour partie vos thèses ? En tout cas, merci pour tout, et pour ce moment d’introspection.

  27. Avatar de hafidi jacqueline

    Donc l’homme serait cet élément cosmique enfin capable de s’affranchir du « déni de l’hostilité de la nature envers lui », de balayer d’un revers de pensée sa propre moisissure à la surface de la planète pour devenir l’agent qui fait échapper cette même planète à son propre destin naturel, enfin dépassé, enfin surpassé

    Surpassé vers quel avenir? Il me vient parfois des nostalgie, des regrets de ne pouvoir rejoindre cette héroïne de Cosmicomics d’Italo Calvino qui décide de son retour dans l’océan primitif vers les poissons nos ancêtres.

    Mais bon, je suis là, avec mes provisions bien au frais dans le réfrigérateur, ma machine à laver, mon automobile, et l’accès Internet qui me propulse immédiatement aux antipodes.

    Cet ultra-capitalisme insinueux et foudroyant, cette économie non encore domestiquée que nous alimentons de nos désirs souvent fourvoyés, sont-ils de la même nature que l’arbre ou le chat qui dort sa vie sur le canapé ?.

    « Au sein de l’économie donc l’empreinte de l’homme n’est pas encore visible et la nature y agit sous sa forme brute et brutale. L’économie reste encore à domestiquer » C’est là où je bronche. Je n’arrive pas à situer cette économie ravageuse dans le cours naturel de l’histoire, sinon par la constatation d’une perversion innée du développement humain.

    Je frémis, je préfère croire et balbutier ici, aux côtés des éminents spécialistes dont je m’efforce de grignoter ou d’avaler les écrits, que la domestication devrait plutôt s’appliquer à l’homme enfin mis en mesure de balayer pour de bon ses propres élucubrations sources de dévastation de la nature primordiale et qui sait d’anéantissement..
    .

  28. Avatar de JPCC
    JPCC

    Bonjour,
    L’expression « domestiquer l’économie » me fait penser aux quelques grandes mutations qu’a connues l’activité humaine au cours des âges, et me conduit à proposer à votre critique la vison suivante :

    – Le néolithique a inventé la domestication de la faune et de la flore, avec pour résultat, comme le montre Jared Diamond dans Guns, Germs and Steel, que l’homme a vécu moins bien : plus malade (du fait de la cohabitation avec le bétail et de l’appauvrissement de la diversité de son alimentation), plus agressif (du fait de l’accumulation de biens), au final avec moins de temps libre. La seule conséquence (ou est-ce une cause) « positive » a été l’accroissement de la population, par accroissement du nombre
    d’enfants par femme (par une moindre euthanasie des bébés?)

    – L’accroissement de la taille des groupes humains semble d’ailleurs chez Diamond la variable clé d’une sélection naturelle s’exerçant au niveau des groupes humains: les groupes les plus nombreux accumulent de plus en plus d’inventions qui accroissent leur efficacité par rapport aux autres groupes.

    – Les Grecs ont développé l’usage de la monnaie, qui avait été inventée par les phéniciens. Dans le même temps, leur centre d’intérêt est passé de la politique (la gestion des conflits dans la cité) à des préoccupations plus individuelles, plus intéressées : de l’accumulation de biens concrets et hétérogènes, on est passé, grâce à la monnaie, à l’accumulation d’une valeur virtuelle homgène.

    – Selon Aldo Schiavone (L’histoire brisée), ni les Grecs ni les Romains n’avaient dégagé la notion d’économie, dans la mesure où l’économie productive, qui reposait largement sur l’esclavage, était quasiment refoulée dans une sorte d’inconscient collectif, dans le cadre d’un mépris du travail « servile ».

    – L’Empire Romain s’est effondré sous sa taille : limite du principe de l’avantage sélectif au groupe le plus nombreux ? Toujours est-il que ce fut un effondrement cataclysmique. Aux villes prospères et à l’espace organisée de l’Empire Romain succédèrent des villes fantômes et un espace chaotique.

    – A la sortie de la période obscure du Moyen Age européen, dans lequel le servage avait remplacé l’esclavage, avec la Révolution industrielle apparaissent concomitamment (sans que nous en ayons je crois d’explication de type causal) 1)une attitude plus positive vis-à-vis du travail productif, 2) la transition de l’esclavage/servage au marché du travail, 3)la prise de conscience de l’économie comme une activité humaine en soi, autonome;

    – Avec la Grande Transformation de Polyiani, l’économie devient l’activité dominante, la marchandisation envahit progressivement l’ensemble des activités humaines .

    – Depuis les origines, l’homme multiplie les inventions, organise sa perception du réel, invente des artefacts de plus en plus abstraits (dont le langage, l’écriture, la monnaie, sont sans doute les plus beaux exemples), et des moyens de déplacement et de communication de plus en plus rapides (le cheval, l’imprimerie, internet …) et de domestication de l’énergie (du feu aux centrales nucléaires, qui demandent une organisation du contrôle de plus en plus sophistiquée et donc d’un certain point de vue de plus en plus vulnérable).

    – L’une des conséquences de cet accroissement de la vitesse est l’accélération de l’histoire, et la progression du court-termisme.

    – Les inventions sont bien sûr le fruit de la créativité humaine, mais leur succès, c’est à dire leur utilisation, correspond rarement à l’intention de l’inventeur. Diamond montre par exemple comment l’invention de la roue a révolutionné les civilisations où existait le cheval, mais est restée sans effet là où celui-ci n’existait pas. L’élevage selon certains anthropologues aurait été inventé pour fournir non pas de l’alimentation, mais des victimes pour les sacrifices.

    En synthèse, le progrès apparaît plutôt comme un processus aléatoire, à l’image de l’apprenti sorcier, la sélection résultant non pas de l’intention humaine mais de l’environnement. Ce n’est que par des rationalisations a posteriori qu’il est satisfaisant pour l’esprit de parler de « domestication ».

    La crise financière et la montée du court-termisme ne sont-ils pas de bons exemples de cette course d’apprentis-sorciers : il n’ y a ni complot organisé ni maîtrise des évènements, mais une course dans laquelle certains tirent quelques marrons du feu.
    Si ‘on reprend l’exemple de Diamond, notre qualité de vie n’a, peut-être bien, pas cessé de se dégrader. Les seuls « progrès » concrets, c’est la taille du village planétaire actuel, supérieure à celle des tribus, des chefferies, des royaumes, des empires, et la vitesse. L’individualisme est sans doute la contrepartie de l’anonymat croissant des groupes humains résultant de leur taille.

    Le progrès dans tout cela apparaît plutôt comme notre capacité d’adaptation à un milieu dont la logique nous échappe, et dont la complexité croissante cumule la taille du groupe humain, notre accumulation d’inventions dans tous les domaines (matériel et organisationnel), les nouvelles contraintes qui se font jour, voire si l’on en croit Julian Jaynes, l’interconnexion croissante de notre cerveau.

    A partir d’une telle vision…il vaut sans doute mieux imaginer Sisyphe heureux (et régulateur) que le contraire ?

  29. Avatar de michel lambotte

    Vous dites:

    Elle est obligée dans chaque cas de réinventer entièrement la solution du problème, de la forme la plus simple jusqu’à son expression la plus complexe, quitte à retomber alors, par la convergence, sur une solution unique et déjà découverte par ailleurs. Ainsi, l’oeil du poulpe, un mollusque céphalopode, est proche de celui des mammifères les plus évolués mais sans qu’il y ait eu emprunt d’une lignée vers l’autre : les phylogenèses qui conduisent à l’un et à l’autre ne se sont jamais rejointes. Chacune de ces évolutions résulte de ses propres contraintes, le résultat seulement d’une sélection naturelle due aux interactions des individus appartenant à l’espèce avec leur environnement et non à une dynamique interne – si ce n’est celle de l’ordre du ratage que constitue la mutation.

    Et oui et que faites vous de :ceci
    Nous ne connaissons rien de la nature sinon le fait que nous en sommes dépendant et que tôt ou tard si nous n’y prenons garde, elle va se rebeller et bonjour les dégats.
    Si le méthane s’y met pour le réchauffement climatique, au revoir l’humanité.
    Quand je dis « rien », c’est bien entendu en rapport avec que veut bien nous divulger le système qui nous supplante, à nous d’explorer d’autres voies si nous en avons la volonté.
    Vous dites également ceci

    L’Homme a d’abord transcendé sa propre essence en échappant à l’emprise de l’attraction terrestre. Non pas comme l’oiseau qui découvre par le vol un autre continent et qui, malgré le caractère exceptionnel de cet exploit, reste fidèle à sa propre essence, mais en échappant à l’inéluctabilité de son environnement qui veut que tout corps est attiré vers le bas sur la planète où il est né. L’Homme a découvert par le calcul qu’une vitesse supérieure à 11,2 kilomètres par seconde permet de neutraliser la gravitation universelle telle qu’elle s’exerce sur la Terre ; il a ensuite construit la machine qui lui permet de réaliser cet exploit. L’Homme est désormais prêt à coloniser d’autres planètes, voire d’autres systèmes stellaires.

    Et oui, mais comment est-on y arrivé?
    Avec de l’énergie que la nature a mis des millions d’années à mettre de côté ( Bonne année Jducac)
    Sans l’ère industrielle et sa croissance exponentielle d’énergie ce n’est pas possible.

    1. Avatar de jducac
      jducac

      @ michel lambotte dit : 4 janvier 2011 à 23:10

      Merci à vous Michel Lambotte, merci aussi à Crapaud Rouge qui a posté hier et a fait ressortir ce grand billet de Paul Jorion que j’avais laissé passer. Bonne année à tous.

      C’est vrai que l’énergie m’apparait jouer un grand rôle. Elle me préoccupe au point de me faire souvent parler d’elle et ainsi, vous amène à penser à mon pseudo quand vous l’évoquez. Bien évidemment il n’y a pas qu’elle qui compte mais sans elle pas de vie et sans vie que reste-t-il ?

      Les religions que PJ aborde dans son billet, ont résolu le problème en imaginant une vie après la mort, sous une autre forme, essentiellement spirituelle ou sous forme d’une réincarnation.

      Le site vers lequel vous nous renvoyez montre que certains travaillent sur des pistes du même ordre. Ils visent à montrer qu’il n’est pas impossible qu’il existe quelque chose là où il nous est matériellement impossible de le prouver. Cela rejoint un peu les mystères de la médecine homéopathique et de l’effet placébo. Cela fonctionnerait même chez les animaux pourtant maintenus dans l’ignorance des traitements qu’on leur fait subir en incorporant des doses homéopathiques de médicaments dans leur alimentation.
      L’hypnose parfois utilisée pour éviter la douleur lors de certaines interventions chirurgicales est un peu à ranger dans la même catégorie.

      Quand on voit s’épuiser nos stocks d’énergie non renouvelable et de métaux, on peut se demander ce que l’humanité va bien pouvoir faire pour poursuivre son aventure si elle n’arrive pas à développer une nouvelle forme d’énergie abondante.

      La solution consistant à s’éloigner du matérialisme est-elle viable ?

      Une population de 7 milliards d’individus, qui s’est gavée jusqu’à l’écoeurement de matériel, tout en s’éloignant du spirituel, pourra-t-elle se faire à l’idée de changer d’un seul coup de mode d’évolution ? (Répondez Fab)

      L’homme a beaucoup travaillé hors de lui-même depuis quelques millénaires. Il a beaucoup modifié son environnement pour changer ses conditions de vie. Mais ne s’est-il pas trompé de voie pour assurer son avenir ?
      N’aurait-il pas dû travailler davantage sur lui-même et sur ce qu’il croit le distinguer des animaux. N’aurait-il pas dû travailler plus sur ses facultés à dépasser les limites en prenant mieux en considération le spirituel et les croyances ?

      Il semblerait que dans ces domaines il n’y a pas de limite à l’expansion, donc pas de limite pour progresser. Ce qui pourrait donner ainsi un avenir au progrès.

      Comment expliquer l’évolution physique des êtres vivants sans imaginer qu’il existait en eux-mêmes une volonté innée de s’adapter aux conditions d’évolution de leur environnement, une croyance en la possibilité de changer en soi pour survivre ?

      Les ailes qui se sont formées sur les membres antérieurs des êtres qui sont devenus des chauves-souris sont nées de quelle imagination ? Sont-elles le fait d’une intense volonté de l’animal lui-même, de sa croyance en la possibilité de changer pour survivre ? Ou bien résultent-t-elle d’une volonté, d’un souhait, d’un pouvoir extérieur ?

      Il semble que l’état actuel de nos connaissances ne permet pas de répondre. http://desencyclopedie.wikia.com/wiki/Chauve-souris

    2. Avatar de juan nessy
      juan nessy

      @Jducac :

      l’ironie de l’histoire veut que ces braves chauve-souris , après s’être donné tant de mal pour croître et embellir , sont en train d’être exterminées par les parcs d’éoliennes que notre race développe pour obtenir cette précieuse énergie !

      Péché bénin ou péché mortel ?

  30. Avatar de Laurent S
    Laurent S

    Pour moi le marché, même le plus primitif est déjà un dépassement de la nature. Quels sont les animaux qui se spécialisent dans une activité, échangeant le produit de celle-ci contre d’autres par le troc ou la monnaie, tissant des liens de dépendances vitaux car aucun ne produirait à lui tout seul tout ce qu’il a besoin pour vivre ? Les fourmis et les abeilles sont certes spécialisées mais il n’y a aucun marché dans leur essaims ni entre essaims. Et dans les immenses colonies d’oiseaux on ne s’échange aucun service : chacun doit aller chercher sa nourriture et défendre seul ses œufs contre les reptiles. Et malheur aux faibles, ils mourront seuls parmi la foule. Si les marchés actuels engendrent la misère, ce n’est pas parce qu’ils sont dans un état de nature mais par choix politique, fait consciemment par les riches et vendus comme naturels et indépassables aux pauvres. Les marchés actuels sont aussi primitifs, archaïques, que la justice lorsque celle-ci punissait par châtiments au lieu d’emprisonner et d’œuvrer à la réinsertion. Mais il a certainement déjà existé dans l’Histoire des sociétés avec des marchés où il n’y avait pas de pauvres, comme en Amérique avant 1492 ou en Afrique où le mot de pauvre n’existe pas dans leur vocabulaire.

    Deuxième point, l’homme n’est pas foncièrement mauvais, il est même fondamentalement sociable, comment vivre ne serait-ce qu’en hordes sinon. Vivre en hordes implique que la sélection naturelle a éliminé les moins sociables, sinon nos ancêtres auraient vécus solitaires comme des tigres. Or tous les primates sont bien des animaux sociaux. Seulement l’hormone de la sociabilité (entre autres effets), la sérotonine, engendre dans certains cas l’agressivité, par exemple envers les autres clans. Il serait donc plus juste de dire que le groupe d’hommes est un loup pour le groupe d’hommes, ou bien que la classe sociale est un loup pour la classe sociale. Et puis la capacité d’adaptation de la sélection naturelle a été prise de cours par la croissance exponentielle de nos communautés car on est passé en quelques dizaines de siècles de petits hameaux à des mégalopoles alors que le renouvellement des générations de l’espèce humaine est certainement le plus long de la nature. Et de plus l’homme peut en partie se soustraire à la sélection naturelle grâce à la technologie. Et si l’on regarde les statistiques criminelles entre le Moyen-Age et aujourd’hui, on perçoit bien une tendance à la baisse : 1000 crimes par an en France seulement pour 60 millions d’habitants. Mais il est vrai que nos jours l’abondance d’énergie a permis un relâchement des tensions sur les ressources disponibles.

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