Repensons ensemble les impensés libéraux de la religion féroce, par Pierre Sarton du Jonchay

Billet invité.

Le pouvoir est en train de changer de main justement à cause de l’internet et de l’élection présidentielle à venir. Mais c’est effectivement invisible parce que pas mesurable par nos structures mentales actuelles polarisées sur l’apparence statistique et médiatique.

La multiplicité, la diversité et la pluralité des sources d’information dans la Toile a disloqué l’unité sapientielle mondiale des élites. Il n’y a plus d’unité de jugement conclusif entre le 0,1%, le 1% et le 10%. Le gouvernement de la France qui est constitutionnellement le plus puissant du monde n’a plus aucune prise sur l’administration publique, sur les mouvements politiques ou sociaux ou sur les corps intermédiaires. La religion féroce a aboli toute conjugaison cognitive et toute unité d’action entre les individus : sur les questions géopolitiques et climatiques, le genre humain est en train de se pulvériser sur le mur des cataclysmes insolubles en cours. Au sens propre du mot, il n’y a plus en fait de religion, c’est à dire de lien actif efficace entre les individus.

Tout individu, qui a la capacité de regarder au-delà des écrans et des injonctions autocratiques comptables en droits monétaires virtuels, éprouve l’effroi de la réalité désintégrée par la disparition des concepts du « pensable ensemble » et de l’action commune. Dans ce contexte, l’élection du président français au suffrage universel est au sens étymologique une Boite de Pandore. Tout peut en sortir et il est aujourd’hui impossible de prévoir ce que la personne élue par le suffrage universel décidera sur l’interprétation qu’elle fera individuellement du motif de sa désignation. Quelle qu’elle puisse être, la manifestation d’une volonté générale sur une personne élue à la royauté républicaine libérera sur 100 jours un potentiel d’action collective qui pourra aller dans n’importe quelle direction.

Comme les mots, les discours et les images n’ont plus de sens partageable et que néanmoins les individus curieux continuent de s’informer et de s’interroger, il est en train de se former un arrière-plan cognitif derrière le voile médiatique produit sur les écrans par les pseudo leaders d’opinion. Nuit Debout est un exemple parmi des milliers d’autres d’une transformation cognitive de l’être ensemble échappant à toute réduction sapientielle par le catéchisme libéral féroce ou même par les anti-catéchismes des « gentils ». Les élections présidentielles aux États-Unis puis en France vont changer radicalement le paysage en donnant un pouvoir renouvelé à des individus déterminés de l’arrière plan cognitif indicible en formation.

La phénoménologie sensible de l’arrière plan cognitif en formation est le pseudo-système monétaire et financier actuel en défaut depuis le krach des subprimes. Le machin politico-financier mondial produit l’illusion d’un ordre et d’une stabilité par la liquidité informatique virtuelle adossée à la croissance illimitée des dettes inter-étatiques inter-bancaires non remboursables. Les dissensions sont ouvertes entre le 0,1%, le 1% et le 10% sur le qui va finalement éponger les fausses dettes. Les nouveaux présidents ne pourront pas faire autrement que de trancher dans le vif en mettant fin à la « libre circulation du capital ». Il faudra bien retenir un minimum de matière fiscale afin de conserver un pouvoir correctif voir simplement réactif sur les cataclysmes en cours.

La mesure financière du capital va être mondialement re-nationalisée par la force-même des choses. Les échanges internationaux d’actifs réels cognitifs et financiers ne perdureront que dans la mesure de leur liquidité mesurable à l’intérieur des différentes zones monétaires où ils seront produits, c’est à dire dans l’espace circonscrit où la valeur ajoutée aura été prisée et réglée dans une unité de compte localement signifiante. Pour qu’un bien matériel ou immatériel puisse circuler entre les zones monétaires, il faudra, par la force des choses, que quelqu’un fasse crédit à celui qui exporte la réalité contre importation de liquidité ou exporte la liquidité contre importation de réalité. Donc les banques seront nécessairement relocalisés qui comptabilisent la liquidité monétaire du crédit dans la mesure de la réalité reconnaissable par des solidarités effectives de capital à l’intérieur d’une même loi d’appropriation et d’appréciation.

Si les nouveaux présidents ne parvenaient pas à restaurer des frontières au capital dans les cents jours de leur élection, alors la propriété-même qui fonde la réalité du capital se désagrégera avec la dissolution des États et la révolte des catégories sociales intermédiaires abandonnées aux féodalités. Si au contraire, les nouveaux présidents réoccupent leur fonction, il ne saurons rien faire d’autre que de garantir les prix communs du capital, donc l’efficience économique réelle du capital, dans une compensation publique explicite des pertes collectives de crédit non imputables à des entrepreneurs identifiés. La fiscalisation du capital à l’intérieur des zones monétaires rétablies sera le seul moyen d’apurer les dettes virtuelles en fausse monnaie accumulées dans les actuelles banques hors sol à capital réel négatif.

Par sa proposition d’une fiscalisation mondiale du capital et sa suggestion d’une refondation politique de l’euro, Thomas Piketty est bien une des personnalités les plus crédibles pour engager le débat politique présidentiel sur le chemin de la réalité compatible avec l’humanité civilisée. Rien n’est totalement perdu pour les citoyens français, européens ou étatsuniens si des présidents peuvent être élus pour refermer les frontières du capital et restaurer le calcul des prix sur le financement de la démocratie en actes.

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  1. Et pour montrer aux Mélenchonistes que l’on ne confond pas la partie avec le tout: https://www.youtube.com/watch?v=MlE6E7pjZm4&pp=ygUNY29xdWVyZWwgZXJpYw%3D%3D Eric Coquerel sur LCI…

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