L’UNION EUROPÉENNE PETITE MAIN, par François Leclerc

Billet invité.

Le bouclage du budget de l’Union européenne se présente comme un exercice de haut vol. Non seulement en raison du départ du Royaume-Uni et de la disparition de sa contribution qui l’accompagne, mais à cause des priorités qu’il va falloir financer.

Afin d’y parvenir, pas de miracle si ce n’est l’adoption d’une combinaison reposant sur la diminution des dépenses et l’accroissement des recettes ! Mais laquelle ? Question restrictions, la politique agricole commune (PAC) et les fonds de cohésion sont bien placés étant donné leur poids prédominant dans le budget. La liste des priorités qu’il va falloir financer est plus étoffée, comprenant la défense, la sécurité et les réfugiés, sans oublier la ligne budgétaire symbolique consacrée à la relance des pays de la zone euro.

Les nouvelles sources de financement sont réduites : augmentation des contributions des États-membres et instauration de la transaction sur les taxes financières, qui réapparait, ainsi qu’une autre sur les GAFA qui pourrait voir le jour. Mais les chefs d’État sont très divisés, favorables à telle solution et opposés à telle autre, campant fermement sur des positions antagoniques.

Un mot nouveau va faire couler beaucoup d’encre : les conditionnalités. Emmanuel Macron s’en est fait le héraut en déclarant « le budget européen ne doit plus servir à financer des gouvernements qui ne respectent pas les droits fondamentaux tels qu’ils figurent dans nos traités. Le budget européen ne doit pas servir à financer des politiques dont la stratégie est d’organiser du dumping fiscal ou du dumping social ».

Une fois faite la part de l’agit-prop coutumière au président français, qui n’a pas d’illusion sur le sort qui sera réservé à ses propositions de lutte contre le dumping fiscal et social, trop d’intérêts étant en jeu, que restera-t-il en lice ? La participation obligatoire des pays à l’accueil des réfugiés décidée dans le cadre européen pourrait faire l’objet d’un accès conditionnel aux fonds de cohésion, les pays de l’Est particulièrement visés s’y refusant. Mais on en est aux menaces, et cette disposition suscite de fortes réactions négatives au-delà de leur cercle.

Que des accès conditionnels aux programmes communautaires soient proposés en dit long sur la dynamique du démantèlement de l’Union européenne, quand il ne reste plus que des sanctions pour s’y opposer. Comme s’il ne pouvait à terme que subsister une union douanière au sein de laquelle le Royaume-Uni retrouverait sa place !

Cette hypothèse n’étant pas pour demain matin, et la relance de la zone euro n’étant concevable que petite main, à quoi peut-on s’attendre prochainement ?

L’évolution de la crise politique européenne touche désormais l’Allemagne et l’Italie. Les deux partis de gouvernement allemands connaissent, à des degrés plus ou moins prononcés, une érosion de leur électorat qui suscite en leur sein des réactions destinées à la freiner. Une poussée en faveur de la droitisation de la CDU s’y manifeste de plus en plus ouvertement, tandis que l’adoption d’une ligne plus à gauche est revendiquée au SPD. Allez faire une coalition dans un tel contexte !

En Italie, l’hypothèse d’une grande coalition entre Forza Italia et le Parti démocrate – qui ne serait pas plus stable – n’a d’existence que sur le papier. Et celle, en piste, de Forza Italia et de la Ligue d’extrême droite n’obtiendrait pas les 40% requis pour emporter la majorité des sièges, selon les derniers sondages accessibles. Dans ce contexte, les gouvernements qui sortiront de ces deux crises parallèles seront-ils en mesure de prendre les grandes décisions qui s’imposent au niveau européen ?

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