Haute trahison pour tous !, le 19 décembre 2018 – Retranscription

Retranscription de Haute trahison pour tous , le 19 décembre 2018. Merci à Eric Muller

Bonjour, nous sommes le mercredi 19 décembre 2018, et comme je vous l’ai dit hier, je suis en train de lire de gros documents sur ce qui s’est passé pendant la campagne électorale présidentielle aux États-Unis et par la suite, en terme d’ingérence russe. Et une partie de ces ingérences ont été faites par une organisation civile (c’est pas du militaire) qui s’appelle, en anglais on l’appelle « Internet Research Agency », ce qu’on traduirait en français par « agence de recherche sur l’internet ». Et en fait, ce sont des gens qui ont créé des faux comptes Facebook – c’est de la propagande, ce sont des efforts de propagande. Et deux grandes études ont été publiées, l’une qui a été demandée à l’université d’Oxford, en Grande-Bretagne, et l’autre à une agence de cybersécurité qui s’appelle New Knowledge, aux États-Unis. Et tout cela se recoupe un petit peu, mais enfin, bon, il y a 150 pages à lire. Je ne les ai pas encore lues, ce n’est pas de cela parler que je vais vous parler.

Ce dont je vais vous parler aujourd’hui, c’est de quelque chose qui s’est passé hier soir – hier soir pour nous, hier dans la journée aux États-Unis à Washington – et ça se passait devant une cour fédérale où un juge, un certain M. Emmet Sullivan, jugeait un général trois-étoiles, M. Mike Flynn, qui à une époque a été le conseiller en matière de défense de M. Trump à la Maison-Blanche. Il a été viré assez rapidement pour la raison que je vais vous dire : au moment où des suspicions commencent à apparaître que l’équipe de Trump aurait pu, voilà, être en collusion avec la Russie, ce général Flynn est interrogé par le FBI. On lui pose la question de savoir s’il a eu des rapports avec la Russie, il dit « Non non, pas du tout, non absolument pas, ça ne me dit rien », etc. On est à l’époque de la transition et il y a encore comme ministre de la justice, il y a encore Mme Sally Yates – à laquelle il faudrait penser dans des élections prochaine à la présidence de la république, parce que c’est vraiment une dame très impressionnante – et Mme Sally Yates entend dire que, en fait, M. Flynn a eu une très longue conversation avec l’ambassadeur de Russie à Washington. Et donc, on fait savoir ça à la Maison-Blanche : « Mme. Yates à des informations très sûres nous faisant comprendre que si on parle d’ingérence russe, de collusion éventuelle de la part de l’équipe Trump, voilà, on a quelque chose qui coince véritablement ».

Et donc, M. Trump, à son habitude dit : « Oui oui, tout ça c’est pas sérieux. Ignorons le pour le moment », etc, et il se passe plusieurs semaines avec M. Flynn toujours conseiller à la Maison-Blanche, et puis finalement, il doit donner sa démission, et peu de temps après, il est inculpé.

Et on ne savait pas trop de quoi il était inculpé vraiment. Les Républicains avaient une version à eux qui consiste à dire : « Oui, il a un peu menti aux gens du FBI, mais enfin, il ne savait pas que c’était une conversation vraiment sérieuse ! », ou « En fait, c’était un piège qu’on lui a tendu ! », « On savait qu’il avait parlé à l’ambassadeur. On lui a demandé s’il avait parlé à des Russes, il a dit non mais enfin bon, il croyait que c’était une conversation à bâtons rompus ! C’est un piège des Démocrates etc et d’ailleurs, vous allez voir, quand ce monsieur Flynn va passer devant la cour, eh bien M. Emmet Sullivan, qui est un juge irréprochable, il va dire ‘Tout ça c’est des carabistouilles, ça ne tient pas debout’, et il va dire à M. Flynn de rentrer chez lui. »

Ce qui était aussi l’opinion, d’ailleurs, de la commission Mueller, parce que la commission Mueller, à propos de M. Flynn et à propos de ce procès qui a eu lieu hier, avait dit la chose suivante : « M. Flynn est accusé de certaines choses mais il a collaboré à ce point en profondeur, il a dit tellement de choses intéressantes à nous, que nous recommandons à la cour de le libérer aussitôt ».

Donc, on a d’un côté la commission Mueller qui dit qu’« iI ne faut pas ennuyer M. Flynn davantage parce qu’il nous a déjà tellement rendu service » et d’autre part des Républicains qui disent « Tout ça c’est de la mise en scène, tout ça c’est bidon. M. Flynn, il n’a rien fait du tout, on l’a juste piégé et on le fait venir pour avoir menti à des agents du FBI alors qu’on lui avait même pas dit que c’était pas une bonne chose à faire. »

Donc hier, M. Flynn se trouve en face du juge Emmet Sullivan, et M. Emmet Sullivan commence par lui dire : « M. Flynn, est-ce que vous saviez qu’on ne peut pas mentir à des agents du FBI quand ils vous interrogent ? » Alors M. Flynn dit « Oui je sais ça parfaitement, Monsieur le juge. ». Alors, désarroi déjà du côté des Républicains – « Merde, c’est notre ligne de défense ! » – et le juge continue.  Il dit : « M. Flynn, est-ce qu’on ne peut pas dire de quelqu’un comme vous qu’il a vraiment fait un enfant dans le dos à son pays ? » Alors, ouf ! un ange passe dans l’assemblée. Et à ce moment-là, ce monsieur Sullivan se tourne vers le représentant de la commission Mueller qui est là, et lui dit : « Est-ce que ce n’est pas – tout ça – est-ce que ce n’est pas de la haute trahison ? » et le type, là, il est vraiment pris au dépourvu. Il a dit : « Oui, c’est une excellente question, mais c’est un peu délicat, euh, il faudrait vraiment qu’on y réfléchisse. On ne peut pas dire ça comme ça. » Voilà !

Donc rien ne s’est déroulé comme prévu. Au représentant de la commission Mueller qui avait dit : « Bon, on va régler cette affaire comme ça. C’est une affaire réglée ! », aux Républicains – pour qui d’ailleurs, il n’y avait jamais rien eu – ce M. Emmet Sullivan a jeté un fameux pavé dans la mare. Et il a ajouté : « Moi, je ne pense pas qu’en tant que juge, je peux vous laisser sortir comme ça avec ce que vous avez fait ! » Et la chose a continué un petit peu et finalement, c’est remis : la décision est remise.

Alors, qu’est-ce qui s’est passé ? En fait nous, le public, qu’est-ce qu’on avait vu de cette affaire Flynn jusqu’ici ? On avait vu, voilà, des accusations envers un M. Flynn dans un gros document, et ce gros document, il est presque entièrement noir, entièrement caviardé, c’est-à-dire que vous voyez des phrases, en disant M. Flynn a dit que « … », et alors vous avez trois lignes qui sont recouvertes de noir. Et puis, « le témoin X » a répondu ceci, ou alors, « l’individu numéro deux » – Vous savez que l’un des surnoms de M. Trump pour le moment, c’est « Individu N°1 », parce que dans un de ces rapports, justement, de justice, on parle de lui comme « Individu N°1 » pour ne pas devoir le mentionner. 

Alors, qu’est-ce qui s’est passé ? Il s’est passé ce que l’on a vu apparaître (ça, c’était avant-hier) on a vu que des collaborateurs de Flynn ont été inculpés pour être des agents non-déclarés de la Turquie. Ce sont des gens qui travaillaient officiellement, enfin officieusement, pour la Turquie. Il semble que M. Flynn appartienne à cette catégorie et donc, quand on a parlé de ses rapports éventuels avec l’étranger, on a parlé de la Turquie. Mais il s’est passé, hier que ce juge, qui a pu lire tous les passages – qui sont en noir pour nous et qui ne sont pas en noir pour lui – il se tourne vers le gars de la commission Mueller en disant : « Oui, mais… Est-ce qu’on peut vraiment laisser passer ça ? Est-ce que ce n’est pas de la haute trahison ? »

Alors, qu’est-ce que cela veut dire « haute trahison » ? Ben, vous avez compris, « haute trahison » cela veut dire que M. Flynn est un agent d’une puissance étrangère. Et quand on l’a arrêté, ce n’était pas parce qu’il était un agent pour la Turquie éventuellement, hein, c’était parce qu’il avait de longues conversations avec l’ambassadeur de Russie. Vous savez aussi que si on a dit à M. Flynn que, tout ça, finalement, ce n’était pas grave, parce qu’il avait tellement raconté de choses, il avait tellement vidé son sac – comme tout le monde le fait remarquer. Quand on fait venir un témoin comme ça, quand on accuse quelqu’un et qu’on le fait venir comme témoin, comme ça a été le cas de Manafort aussi, de Rick Gates  et ainsi de suite, de Michael Cohen, l’avocat de M.Trump, et quand on fait pression sur eux, ce n’est pas pour qu’il dénonce des sous-fifres, c’est pour qu’il dénonce des gens qui sont, on dit en anglais, upwards, vers le haut, vers des gens qui sont mieux placés que lui.

Alors, si on accuse maintenant M. Flynn de haute trahison, implicitement – [imitant Sullivan] : « C’est pas de la haute trahison ça ? Ou bien je me trompe vraiment ? » – et on dit qu’il a tellement bien collaboré avec la justice qu’il n’aura, en réalité, jamais d’ennuis pour avoir, quand même, fait des choses qui relèvent de la haute trahison, c’est probablement qu’il a dit des choses qui relèvent, là aussi, de la haute trahison sur des gens qui se situent plus haut que lui dans la hiérarchie. 

Hmm… est-ce qu’il y a beaucoup de gens qui se situent plus haut que lui dans la hiérarchie ? Il y a très très peu de candidats. On a fait allusion à Monsieur X qui est un certain gendre de M.Trump, il pourrait s’agir de M.Trump lui-même, vous avez bien compris, et moi je vous avais dit, et là on retombe sur cette histoire de Internet Research Agency, de cette agence qui a fait de la désinformation pour la Russie.
Quand j’ai vu ça au mois de février, quand c’est sorti, je vous ai dit « Chers amis, moi j’ai vu ça – Je ne suis pas juriste mais j’ai un père qui était juriste et qui parlait beaucoup de choses juridiques – quand moi je lis ça, je lis entre les lignes « accusation de haute trahison vis-à-vis de M.Trump » »

Bon, alors, pourquoi je dis « Haute trahison pour tous » ? Parce que, vous l’avez compris, il est question aujourd’hui de haute trahison pour M. Flynn et que, il a dû vider son sac si la justice est si contente, pour dire des choses qui portent sur quelqu’un de plus haut que lui dans la hiérarchie.

Alors, tout ça, il y aura des développements. Il y aura des gens qui, comme moi aujourd’hui, aux États-Unis, vont réfléchir à ce qui s’est passé hier et vont écrire des choses du même genre que ce que je me dis moi aujourd’hui, mais voilà : « The other shoe will drop soon » comme on dit en américain. L’autre chaussure va tomber bientôt, et je vous ai déjà parlé de cette expression : c’est le gars qui est dans un hôtel et dans la chambre au-dessus il entend quelqu’un qui rentre très tard, qui laisse tomber une chaussure, et il n’arrive pas à dormir de toute la nuit parce qu’il attend que la deuxième chaussure tombe, et il reste éveillé. Voilà.

Alors restons éveillé. Il va se passer encore des choses dans les jours, sinon dans les heures qui viennent, et on avance à grands pas dans la solution de cette affaire extrêmement ténébreuse et où nous connaissons essentiellement jusqu’ici des phrases couvertes d’une couche très épaisse de noir, mais petit à petit, on va nous expliquer ce qu’il y a dans le texte derrière, et j’ai l’impression que ça ne vas pas tarder. Allez, à bientôt.

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