Troisième allocution de M. Macron, président de la République française, le 13 avril 2020 – Retranscription

Retranscription de Troisième allocution de M. Macron, président de la République française, le 13 avril 2020.

Bonjour, bonsoir plutôt : le 13 avril 2020.

M. Emmanuel Macron, Président de la République française, vient de faire sa 3e allocution dans le cadre de l’épidémie, de la pandémie de Covid-19 : un coronavirus. M. Macron a fait le point de la situation.

Je vais répéter ce que j’ai dit les deux fois précédentes : il l’a fait de manière présidentielle, ce qui est toujours réconfortant pour la population quand il y a un président dans le pays, parce que ça montre qu’il y a des gens aux commandes. 

Aussitôt, il faut ajouter que quand on dit que pour le 11 mai, la prochaine date à laquelle nous prenons rendez-vous pour ce qui est du confinement – en tout cas les personnes qui sont de santé solide – quand on nous dit qu’à cette date seront prêts les tests, que les masques seront présents, on doit quand même se souvenir du fait que ce sont le genre de choses dont on aurait eu besoin tout au début !

Mais M. Macron et la France bénéficient du fait que nous avons un exemple à l’étranger – que je suis personnellement de très près – qui est un pays où un président n’est pas présidentiel, où il n’est même pas question d’avoir les masques ni d’avoir les tests en temps utile. Si :  sur le mode de la rodomontade mais en sachant que c’est déconnecté entièrement de la réalité.

Il y a quelqu’un aux commandes qui reconnait implicitement ou explicitement le fait qu’on commence à être prêts, que c’est un peu tard mais que, voilà, on était quand même dans l’ordre de l’exceptionnel – ce qui est le cas.

Ce qui est le cas : il n’est pas toujours possible – soyons réalistes – de prévoir des catastrophes, des cataclysmes à l’échelle véritable où ils vont se poser. Souvenons-nous de Mme Bachelot et du désastre d’avoir été trop précautionneux à une époque : on se fâche à ce moment-là parce qu’il y a des dépenses inutiles, etc. Du coup, on bat en retraite. Et… on n’est plus prêt du coup la prochaine fois.

Mais il faut tenir compte avant de blâmer, je dirais, de manière systématique, du fait qu’une situation exceptionnelle est exceptionnelle et qu’elle n’est donc pas de l’ordre du prévisible entièrement. Voilà.

M. Macron rassure le pays. Il parle de mesures raisonnables par rapport à ce que l’on sait maintenant. Il est réaliste quant au fait qu’on ne sait pas encore tout. Il fait allusion au fait qu’il a tenu compte, je dirais, d’une vague populiste en faveur du Dr Raoult mais sans le mentionner explicitement. On nous avait prévenus aussi qu’il ne ferait pas référence aux experts, au groupe d’experts constitué essentiellement de médecins, de virologistes, de spécialistes, parce qu’il avait fait référence à eux de manière un peu trop étroite par rapport à ce que ces gens avaient le sentiment d’avoir véritablement dit, donc il a évité cet écueil.

Il y a donc un double souci de protéger la population et aussi de protéger l’industrie, l’économie, en arrière-plan.

Il a été fait allusion au fait que des gens sont beaucoup moins protégés – une partie de la population – beaucoup moins protégés contre les aléas de ce type de situation parce que le fait même de la pauvreté ou de, comment dire ? du fait qu’on n’a pas des ressources en quantités extraordinaires, fait que vous êtes au premier rang pour payer les pots cassés de ce genre de situation.

Alors, pour terminer, un ensemble d’éléments qui me paraissent favorables et augurent bien, comme certains que nous avions entendu déjà dans les deux premières allocutions et donc il est important qu’on les entende répétés ou formulés d’une autre manière.

Vous avez dû entendre la référence à la planification, à la nécessité de revenir à la planification. Si vous êtes au courant du fait que Vincent Burnand-Galpin et moi avons écrit un livre récemment qui s’appelle « Comment sauver le genre humain », et où l’axe principal, c’est sans doute justement le retour à des mesures, à un équipement du type de la planification, vous serez rassurés.

Il a été fait allusion à l’histoire, à des considérations qui étaient déjà présentes (« l’utilité publique ») il y a 200 ans et vous aurez entendu le message codé : la référence aux « Jours heureux ». Pour ceux qui ne sont pas au courant, la référence aux « Jours heureux », c’est une mention allusive au [programme du] Conseil national de la Résistance qui est probablement, je dirais, l’ensemble des propositions qui ont été le plus dans l’histoire de la France dans le sens de la générosité, du partage, de la solidarité en 1944 et 1945. Et, comme il faut toujours le souligner, cela n’aurait pas été possible en France sans une union nationale qui excluait bien entendu les gens qui étaient proches du régime en voie de disparition de Vichy mais tous les autres, de la droite à la gauche, même à l’extrême-gauche, et avec le soutien militant, il faut bien le dire, du général de Gaulle qui est une personnalité sur laquelle j’ai une opinion, je dirais, qui dépend des périodes et qui dépend des choses qui ont été faites mais qui là, dans cette période de 1944 à 1945, est allé dans le sens de la générosité, de l’Etat-providence, de la solidarité nationale, d’un effort national.

C’est de bonne augure, cette référence aux « Jours heureux » parce que ceux qui attendaient un message dans le sens de la générosité et du partage seront rassurés d’avoir entendu cette expression.

Bien entendu, et je termine là-dessus, il ne faudra pas se contenter de paroles de bonne volonté qui sont sans doute sincères mais dont on pourra imaginer que, dans un contexte qui aurait de nouveau changé et où les groupes de pression du type de ceux qui nous disent maintenant (je pense au Medef), qui… vraiment, le Medef, son absence, je dirais, du sentiment de la honte est à ce point considérable que …  je pense à une conversation que j’ai entendue : c’était dans un restaurant à Paris, où il y avait le président du Medef qui parlait à une journaliste et ces gens étaient… comment dire, [sans vergogne].

Ils parlaient même à voix forte. On pouvait les entendre d’une table pas très loin d’eux et c’était sur ce ton d’arrogance de classe et, malheureusement, la journaliste [qui présidait à cette époque aux destinées du journal Le Monde] abondait dans son sens. D’arrogance de classe, de « malheur aux vaincus », qui fait les sociétés en voie de disparition.

Faisons semblant de ne pas avoir entendu ces déclarations récentes du Medef ! Faisons comme s’il s’agissait d’une mauvaise plaisanterie mais souvenons-nous que ces gens qui osent prononcer des paroles de cet ordre-là maintenant, que ces gens-là seront encore là quand la pandémie aura sinon disparu, sera du moins en voie de disparition. Souvenons-nous qu’ils sont là et qu’au sein même de la crise, au stade où ils en sont, ils n’hésitent pas à tenir des paroles de promesse d’austérité pour faire payer aux salariés l’argent… que ces gens-là auront perdu !

Quand j’ai commencé ma petite vidéo, je n’avais pas l’intention de parler de cela mais il y a, je dirais, un sentiment de colère qui me prend parfois et que je laisse parfois transparaître et cette déclaration du Medef est une tache, je dirais, sur l’histoire de l’humanité.

Quand Mme Thatcher déployait sa politique, il y avait une expression parmi les gens autour de moi (j’habitais en Angleterre à ce moment-là) : « A disgrace to the human race », une honte pour le reste de l’humanité. Et quand nous entendons ces paroles du Medef, il faut penser à une expression de ce type-là : « une honte pour le reste de l’humanité » que des gens, dans les circonstances qui sont les nôtres, osent tenir de tels propos.

Voilà, bonne soirée. A bientôt !

Partager :

Contact

Contactez Paul Jorion

Commentaires récents

  1. Magnifique ! La méritocratie me semble un mensonge en pratique (nos sociétés récompensent la réussite dans une « tautologie » de marché),…

Articles récents

Catégories

Archives

Tags

Allemagne Aristote BCE Bourse Brexit capitalisme ChatGPT Chine Coronavirus Covid-19 dette dette publique Donald Trump Emmanuel Macron Espagne Etats-Unis Europe extinction du genre humain FMI France Grands Modèles de Langage Grèce intelligence artificielle interdiction des paris sur les fluctuations de prix Italie Japon Joe Biden John Maynard Keynes Karl Marx LLM pandémie Portugal psychanalyse robotisation Royaume-Uni Russie réchauffement climatique Réfugiés Singularité spéculation Thomas Piketty Ukraine Vladimir Poutine zone euro « Le dernier qui s'en va éteint la lumière »

Meta