La publication d’un livre lié à l’actualité immédiate est un exercice particulièrement délicat : il ne faut pas que le livre tombe des mains de la lectrice ou du lecteur se demandant : « Mais ça a été écrit quand ce machin-là ? », parce que l’autrice ou l’auteur mentionnerait une actualité manifestement dépassée. Que faire ? Réserver un nombre restreint de plages où l’on se permettra de modifier des choses jusqu’à l’envoi chez l’imprimeur. En particulier, l’introduction et la conclusion. Vous verrez aussi dans ces livres liés à l’actualité des épilogues où l’on vous explique ce qui est malheureusement faux dans tout ce que vous avez lu jusqu’ici – j’espère ne pas en être réduit à cela (si vous deviez trouver un long épilogue dans Haute trahison !, je vous conseille d’acheter plutôt le Tome 3 😉 ).
Quoi, qu’il en soit, en attendant, l’introduction de La chute de la météorite Trump. Tome 2 : « Haute trahison ! ».
Dans le premier tome de La chute de la météorite Trump, nous avons vu apparaître comme l’indiquait son titre, Un objet populiste mal identifié, qui non seulement se frayerait sans difficulté un passage dans les primaires du Parti républicain, caracolant rapidement en tête, mais, de manière plus stupéfiante encore, l’emporterait à l’élection présidentielle. Bien sûr il aurait bénéficié du système complexe des « collèges électoraux » qui, tentant d’établir un équilibre délicat entre populations et territoires aux États-Unis, favorise les zones rurales et défavorise les minorités ethniques résidant essentiellement en zone urbaine.
En termes de voix, Trump perdait l’élection présidentielle au détriment d’Hillary Clinton et, pareil à lui-même, il persisterait cependant à le nier farouchement – mais peu importe puisqu’il l’avait emporté selon les termes des règles électorales en vigueur.
Au moment où débute ici l’action, Trump est déjà président depuis seize mois, et les États-Unis découvrent peu à peu que les institutions de leur pays n’ont pas anticipé l’irruption dans le magasin de porcelaine de leur république fédérale d’un malappris pour qui la frontière entre vérité et mensonge n’existe pas, qui considère son intérêt personnel comme l’unique critère de ce qu’il entend faire, à qui la notion d’un processus collégial est parfaitement étrangère et qui du coup fait rapidement le vide autour de lui en termes de conseillers dont il conviendrait de prendre l’avis, à l’exception sans doute de Steve Bannon, suprémaciste blanc chef de sa campagne électorale avant d’être conseiller de Trump à la Maison-Blanche pendant six mois.
Les Américains ont aussi découvert à l’occasion des troubles de Charlottesville d’août 2017 que mis en situation de devoir prendre parti entre suprémacistes blancs et contre-manifestants, le président avait choisi son camp sans hésiter, au grand dam d’ailleurs des généraux de son pays, ce qui m’avait conduit à qualifier Trump de « dernier général de l’armée sudiste en déroute ». C’est ce scandale qui motiva le départ de Bannon, qui demeurerait cependant conseiller dans l’ombre.
À l’époque où s’ouvre ce deuxième tome, les États-Unis s’inquiètent toujours davantage de l’influence démesurée que les désidérata du président russe Vladimir Poutine semblent avoir pris dans la manière dont Trump dirige la nation.
Coup de théâtre récent, Michael Cohen, l’avocat d’affaires de Trump, a été arrêté et une quantité considérable de ses documents saisis. Certains de ceux-ci éclairent certainement la question que doit résoudre la commission d’investigation relative à une éventuelle collusion entre l’entourage de Trump et la Russie, présidée par le Conseil spécial, Robert Mueller, ancien directeur du FBI.
La commission Mueller avait été instaurée en réponse au renvoi par Trump de James Comey, directeur du FBI, dont le président n’avait pas cherché à cacher qu’elle était motivée par l’intérêt que celui-ci portait aux liens entre l’équipe Trump et la Russie. Devant le danger pour la nation, le N°2 du ministère de la Justice, Rod Rosenstein, avait alors créé la commission Mueller. Le ministre de la Justice lui-même, Jeff Sessions, s’était récusé dans cette affaire, étant lui-même compromis du fait de conversations qu’il avait eues avec l’ambassadeur russe, conversations dont il avait d’abord cherché à dissimuler l’existence. Rosenstein, auquel les commentateurs américains n’ont guère attaché d’importance est au contraire un personnage central chez moi, l’opposé par excellence de Roger Stone, l’homme de tous les coups tordus, lui aussi l’un des protagonistes essentiels ici, le troisième étant Christopher Steele, ex-espion britannique et rédacteur d’un fameux dossier portant son nom.
Collusion active ou passive avec la Russie de Trump et de son entourage ? Quoi qu’il en soit, avec son élection, c’est une frange de la société américaine entretenant des liens intimes, commerciaux, mafieux et politiques avec la Russie, qui se trouve désormais au pouvoir.
L’appareil d’État, les institutions, les fonctionnaires, tinrent mal le choc : ils ne résistèrent que maladroitement et faiblement aux affirmations de Trump qu’ils constituaient tous ensemble un Deep State, un État profond, méprisant les gens comme lui, les véritables États-Unis, l’Amérique profonde. C’est du moins ce qui apparaît en surface : pour ce que le public peut en connaître. Cela dit, il ne serait pas autrement surprenant si l’on apprenait un jour que la partie immergée de l’iceberg ne ressemblait en rien à celle que l’on pouvait voir.
Le plus extraordinaire sans doute dans cette affaire, quand elle se sera tôt ou tard terminée, aura été l’incapacité du dispositif démocratique américain à empêcher qu’accède au pouvoir un personnage aussi peu qualifié pour l’exercer que Donald Trump, et y exerce ensuite ses ravages quasiment sans opposition. Les contrepouvoirs auront été d’une inefficacité confondante. Rien ne se sera manifesté précisément de la nature de ce Deep State que les partisans du président n’auront cependant de cesse de continuer à dénoncer, pas même la mise en place de la Commission Mueller puisque certains membres de ce qui deviendrait l’entourage de Trump au pouvoir étaient déjà dans le collimateur de la police fédérale depuis de nombreuses années. Par contre, des supporters enthousiastes du président auront trouvé un boulevard ouvert devant eux pour orchestrer une dérive mafieuse de l’appareil d’État, facilitée par le recours par Donald Trump à un arsenal de prérogatives présidentielles devenues régaliennes en des mains aussi perverses et séditieuses que les siennes.
La publication d’un livre lié à l’actualité immédiate est un exercice particulièrement délicat : il ne faut pas que le livre tombe des mains de la lectrice ou du lecteur se demandant : « Mais ça a été écrit quand ce machin-là ? », parce que l’autrice ou l’auteur mentionnerait une actualité manifestement dépassée. Que faire ? Réserver un nombre restreint de plages où l’on se permettra de modifier des choses jusqu’à l’envoi chez l’imprimeur. En particulier, l’introduction et la conclusion. Vous verrez aussi dans ces livres liés à l’actualité des épilogues où l’on vous explique ce qui est malheureusement faux dans tout ce que vous avez lu jusqu’ici – j’espère ne pas en être réduit à cela (si vous deviez trouver un long épilogue dans Haute trahison !, je vous conseille d’acheter plutôt le Tome 3 😉 ).
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