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Jamais je ne me permettrais de poser la question Où s’arrête la Bretagne ? si la revue Bretons n’avait fait de moi un « Breton d’honneur ». La raison de mon titre de noblesse ? La manière dont j’ai parlé des pêcheurs de l’Ile de Houat, dont j’ai partagé la vie, et à qui j’ai consacré Les pêcheurs de Houat (1983).
Allez, une anecdote – mais une belle ! L’année dernière j’ai rendez-vous chez un dentiste autre que le mien parce qu’il n’a pas la machine à rayons X qu’il faut. Et, m’attend sur le porche de ce cabinet à Quiberon, une personne, le sourire fendu d’une oreille à l’autre qui me dit : « Monsieur Jorion ! Ce n’est pas moi que vous venez voir, c’est un collègue à moi, mais j’ai tenu à saluer l’auteur des « Pêcheurs de Houat » ! »
Bon, ça c’est des grands moments dans une vie. Tant que ça allait bien à bord, ça ne parlait que français, mais aussitôt que ça tournait mal, tous les jurons et les commandements pour tenter de sauver sa peau, c’était en vannetais ! Il y avait intérêt à comprendre le breton (question de vie ou de mort) !
Cela dit, quand je lis dans Le Monde d’aujourd’hui : A Nantes, le drapeau breton se rapproche de la mairie, je me souviens d’une conversation avec le grand folkloriste Fernand Guériff, qui nous honorait de son amitié et nous avait un jour invité chez lui, Geneviève Delbos et moi, et qui nous expliquait, assis au piano, où précisément s’arrêtait la Bretagne et où commençait le pays gallo (patois du français). Il disait, triomphant : « Écoutez ! Vous connaissez Les gars de Locminé ? Alors voilà : à Clis, on le chante comme ça ! [plom, plom, plom] Vous avez entendu ? À cinq temps : on est encore en Bretagne ! et à Saillé : comme ça : à quatre temps ! [plim, plim, plim] On n’est plus en Bretagne ! On est en France ! La preuve est là ! » **
[J’espère bouster les 116 vues jusqu’ici de cette dame sympathique].
Alors, dites-moi ? à Saillé, on est encore loin de Nantes : 80 km pour tout dire. La duchesse Anne, d’accord, et son beau château à Nantes près de la gare, mais dites-moi ce que vous en pensez. (Je ne parle même pas d’avoir une Bretagne bicéphale : Rennes abandonnant de bonne grâce son leadership à Nantes ? Nantes, se subordonnant de son plein gré à Rennes ? Ouch !).
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* Nolwenn Leroy parle breton… en breton (elle est de Saint-Renan dans le Finistère) et non comme la speakerine d’une radio que j’écoute ici dans le Morbihan et dont l’accent français à couper au couteau me fait régulièrement grincer des dents.
** 7 km entre Clis et Saillé.
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