Veille effondrement #71 – Frugalité cubaine, par Yves Nyssen

À la lecture du billet Veille effondrement #62 – Taxes dissuasives, sur le carburant, sur la viande… et des nombreux commentaires, voici quelques réflexions :

La frugalité acceptée ou imposée pour tout un peuple, cela existe déjà à Cuba et la ‘libreta’, sorte de  ticket de rationnement symbole de l’égalitarisme est toujours en cours accordant une certaine quantité d’aliments à un prix très bas fixé par l’État.

Toutefois, sur les marchés libres, les prix ont tendance à augmenter et il y a des pénuries de viande, viande de bœuf particulièrement, tout comme les produits laitiers.

Concernant la frugalité, l’entreprise cubaine productrice d’électricité UNE (Unión Eléctrica de Cuba) pratique des tarif à l’inverse de ce qui se pratique en pays capitaliste, si l’on consomme peu (jusque 100kWh mensuel) le tarif est de 0,4€ le kWh, au-delà, il se met à augmenter fortement pour arriver à 10€ le kWh pour une consommation de 1000kWh mensuel.

A titre de comparaison, pour une population identique, la Belgique produit environ 9MWh annuels par habitant alors que Cuba n’en produit que 1,6 MWh annuel par habitant.

S’il est possible de vivre de manière aisée dans ce pays, il n’est pas possible d’y devenir riche, selon l’acceptation de ce que l’on entend par ‘riches’ dans nos pays capitalistes ; la constitution du pays s’oppose à l’accumulation de richesses (art. 30), bien que les plus pauvres au sein de cette population considèrent que posséder une voiture et deux maisons, c’est être riche…!

Concernant les voitures, la société d’État chargée de la vente de véhicules importés pratique des prix de 3 à 4 fois le prix habituel pratiqué en Europe pour les mêmes modèles, ce qui rapporté au salaire moyen de ~30€ mensuel est particulièrement dissuasif.

Quant aux transports en commun, le ticket de bus coûte l’équivalent de 0,07€.

Les maisons peuvent être maintenant vendues et achetées librement par les Cubains ou les étrangers disposant d’un permis de séjour, mais il n’est permis de posséder que son domicile et une habitation à la campagne, donc oubliez les SCI et sociétés immobilières de droit privé…

Pour un appartement ou maison correct à La Havane il faut toutefois débourser plus de 60.000€, rapporté au salaire moyen… ?

Le culturel est assez abordable pour tous : théâtre, opéra, cinéma, etc..

Les dirigeants actuels de Cuba prétendent que la (très) mauvaise situation économique actuelle avec son lot de pénuries est essentiellement due au blocus de la part des U.S.A. ; il faut toutefois nuancer et admettre que l’appât du gain – ou du moins – le désir de percevoir des salaires permettant de viser une vie meilleure, crée des problèmes. Ainsi, les rémunérations actuelles des agriculteurs ne les incitent absolument pas à se fatiguer à produire en quantités des aliments nécessaires à la population, ajoutons à cela les difficultés nées du manque de transports adéquats pour l’acheminement des denrées périssables.

Jusqu’à l’irruption du Covid-19, les rentrées de devises dues au tourisme permettaient bon an mal an de s’approvisionner sur les marchés extérieurs, cette source de devises est maintenant largement tarie ; une autre source de devises, en l’occurrence les ‘remesas’, se tarit aussi en raison des mesures prises par D.Trump et non encore annulées par J. Biden, l’on attends qu’il revienne au moins sur l’interdiction pour Cuba d’utiliser l’US $ pour ses transactions commerciales, ce qui pourrait grandement améliorer les choses.

Le gouvernement tente de relancer l’économie avec la loi MIPYMES (Micro, Pequeña y Mediana Empresa), mais les devises manquent pour les investissements.

Un autre phénomène lié à la libération de l’accès internet est maintenant perceptible – surtout pour les plus jeunes – ils rêvent devant la ‘vitrine américaine’ et sont persuadés que la liberté (telles qu’ils l’entendent) instaurée à Cuba, leur permettra d’accéder à tout ce luxe !

Donc, encore une fois, il y a conflit entre l’Espoir d’une meilleure vie qui serait être supposée donnée par le libéralisme et l’Espérance d’une vie idéale dictée par une constitution socialiste. 🙂

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10 réponses à “Veille effondrement #71 – Frugalité cubaine, par Yves Nyssen

  1. Avatar de Francois Corre
    Francois Corre

    « Décarboner vraiment, c’est rompre avec les libertés individuelles, voire avec le pacte démocratique »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/09/03/decarboner-vraiment-c-est-rompre-avec-les-libertes-individuelles-voire-avec-le-pacte-democratique_6093217_3232.html
    via Le Monde

    1. Avatar de Chabian
      Chabian

      (Je n’ai accès qu’au début d’article).
      Rompre avec le pacte démocratique ? Parce que nos gouvernements démocratiques ne savent pas prendre des décisions ? Selon les vingt lignes accessibles, le raisonnement est fallacieux. La rupture du pacte démocratique n’est pas imposée, ni l’aventure dictatoriale. Les gouvernements sont tenus par l’opinion et par leurs réseaux de pouvoir. Ils y voient confirmer leur légitimité.
      Si l’opinion ne suit plus (cfr. la France), la décision n’est plus possible ou difficilement possible.. Si les réseaux de pouvoir ne soutiennent pas le programme, il faut l’abandonner (cas des propositions de la Conférence citoyenne, abandonnées sans explication). Hollande aussi était victime d’un délitement de son soutien et de sa légitimité.
      Il faut donc une opinion qui bascule. Il faut un puissant événement pour cela (cf. Pearl Harbor, qui a renversé l’opinion étasunienne, non interventionniste auparavant, qui a permis à Roosevelt de se mettre en route dès le lendemain (tout était prêt, il attendait ce retournement). On peut penser aux attentats en Europe en 2015, mais le pouvoir en a tiré de la légitimité.
      Dans cette occurence, celui qui est au pouvoir peut se faire octroyer des « pouvoirs spéciaux » par le Parlement. Il peut éventuellement aller à la dissolution et au vote, pour obtenir une « Chambre introuvable ».
      Mais ce n’est pas vrai pour les réseaux de pouvoir (en 42 aux US, ils étaient intéressés à participer à la guerre). Les réseaux capitalistes et financiers freineront des quatre fers devant un programme climatique. Il faut donc préparer une alternative démocratique pour prendre le pouvoir (ou organiser la prise du palais d’hiver tsariste).
      Remarquez qu’on pourrait aussi bien avoir des procédures démocratiques ajoutées autour d’un décideur aux « pouvoirs spéciaux ». Des procédures participatives de type Conférence citoyenne qui apportent une légitimité supplémentaire. Et des procédures de contrôle citoyen peuvent aussi être imaginées pour la transparence démocratique. L’expression de rupture démocratique est malsaine, elle illustre le mouvement de Franco contre la république !

      1. Avatar de Arnaud
        Arnaud

        Article en entier merci à Merci Francois Corre de l’avoir signalé.
        « Décarboner vraiment, c’est rompre avec les libertés individuelles, voire avec le pacte démocratique »
        TRIBUNE
        Frédérique Laget

        Agrégée et docteure en histoire, professeure d’histoire dans un lycée

        L’historienne Frédérique Laget se demande si les gouvernements des principaux pays ont encore les moyens de limiter le dérèglement climatique.

        Ajouter aux
        Tribune. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié, lundi 9 août, un premier volet extrêmement pessimiste de son sixième rapport d’évaluation. Dans ce contexte, opposants politiques et citoyens impliqués n’ont pas manqué de rappeler au chef de l’Etat sa timidité en matière environnementale, sans oublier la décision récente du Conseil d’Etat, condamnant les pouvoirs publics à une amende de 10 millions d’euros pour ne pas avoir lutté efficacement contre la pollution atmosphérique.

        Pourquoi les gouvernements – non seulement le nôtre, mais ses homologues également – n’agissent-ils pas plus frontalement contre le dérèglement climatique, dont nous savons tous aujourd’hui le degré de dangerosité et de déstabilisation profonde qu’il entraînera dans le monde ? De nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer la soumission des gouvernants aux « lobbys », aux « industriels » et aux « puissants », ce qui n’est évidemment pas faux, mais qui reste une réponse simpliste.

        Quel que soit son bord politique, le nœud du problème pour l’Etat est triple : d’abord, il lui faudrait prendre, pour décarboner l’économie, des mesures extrêmement dures, voire liberticides ; on pourrait évoquer une « économie de guerre » ; ensuite, il ne peut agir seul dans ce domaine, il faut nécessairement une coordination à l’échelle mondiale ; enfin, il lui faut lutter contre l’atomisation croissante des sociétés, où les intérêts particuliers tendent à empiéter sur l’intérêt commun qui présiderait à de telles mesures.

        Article réservé à nos abonnés Lire aussi Rapport du GIEC : « Il faut décarboner de toute urgence et de manière très radicale nos sociétés et nos économies »
        Comment, concrètement, décarboner l’économie française, si nous restons à l’échelle de notre pays ? Bien sûr, la question pourrait ne pas se poser en ces termes, puisque ce mouvement devrait s’accompagner dans un proche avenir des entreprises de captation de CO2, que le GIEC évoquera dans le second volet de son rapport.

        Interdictions et obligations
        Envisageons toutefois la décarbonation seule. L’objectif pour la France serait d’atteindre une empreinte carbone par habitant de 3,7 tonnes de CO2e (équivalent CO2) en 2030, soit le tiers de ce qu’elle était en 2017.

        Pour ce faire, les mesures à prendre toucheraient aussi bien le bâtiment (résidentiel ou tertiaire) que les mobilités, l’agriculture, l’énergie, la consommation ou encore l’aménagement du territoire.

        Il faudrait que l’Etat prenne, pour décarboner l’économie, des mesures extrêmement dures, voire liberticides

        Elles concerneraient la vie quotidienne de chacun d’entre nous : augmentation du renouvellement des équipements de chauffage, interdiction de construction de nouvelles maisons individuelles (toute construction neuve étant réservée à l’habitat collectif), mise en place d’un couvre-feu thermique dès 2025, interdiction des voitures thermiques dans les centres urbains dès 2024 (les villes devenant dédiées au vélo et aux transports en commun), limitation généralisée des températures dans les logements et les bureaux, obligation pour toute parcelle de jardin de devenir productive, fin de l’artificialisation des sols, interdiction de tout vol hors Europe non justifié (donc de confort ou non nécessaire), division par trois du flux vidéo consommé (moins de vidéos en ligne, jeux vidéo, réseaux sociaux), limitation à 1 kg du nombre de vêtements neufs mis sur le marché par personne et par an (contre 40 kg en 2017), limitation drastique de la consommation de viande, instauration de quotas sur les produits importés (chocolat, café, thé…), et bien entendu, reconversions et créations massives de nouveaux emplois.

        Contrôle et surveillance
        Peut-on espérer être élu sur un tel programme ? Et quand bien même un gouvernement en place décidait de le lancer, quel Conseil d’Etat, quel Conseil constitutionnel le validerait ?

        A ces mesures extrêmement contraignantes s’ajoute la nécessité d’une action collective à l’échelle mondiale. Il faudrait que des mesures similaires soient prises partout – faute de quoi, l’impact d’un Etat isolé sur le climat serait quasi nul, et les sacrifices engagés par la population ne pourraient se justifier – et qu’elles soient adaptées aux contextes locaux, qui ne sont pas les mêmes aux Etats-Unis (surconsommation) qu’au Niger (transition démographique).

        Article réservé à nos abonnés Lire aussi Eloi Laurent : « Le rapport du GIEC ouvre un chemin d’espoir pour l’humanité au milieu du chaos climatique »
        Le contexte géopolitique actuel étant très instable, cet état de fait semble hautement improbable, et les différents gouvernements s’observent mutuellement dans une sorte de dilemme du prisonnier, chacun n’osant que des mesurettes afin de ne pas être le seul à risquer d’entraîner sa population dans un basculement total de mode de vie.

        Car c’est bien d’un changement de mode de vie qu’il s’agirait, et d’un changement piloté par l’Etat, assorti de contrôle et de surveillance des populations. Car, sans cela, comment s’assurer que les jardins particuliers ont bien tous un potager, et que personne n’a pu se procurer plus de vêtements ou de café qu’autorisé ?

        Atomisation croissante des sociétés
        C’est ici qu’apparaît le problème des gouvernants : décarboner vraiment, c’est rompre avec les libertés individuelles, voire avec le pacte démocratique.

        Et pourtant, c’est cet ensemble de mesures qui pourrait permettre de limiter la catastrophe annoncée. Le problème est rendu d’autant plus aigu par l’atomisation croissante des sociétés, relevée aussi bien par Jérôme Fourquet en France (L’Archipel français. Naissance d’une nation multiple et divisée, Seuil, 2019) que par le National Intelligence Council américain dans son rapport prospectif de mars 2021 : à l’échelle mondiale comme locale, les populations s’autonomisent par rapport aux Etats, se tournent vers les groupes partageant leurs idées, voire s’y enferment (les fameuses « bulles de filtre ») et s’engagent dans de nouvelles conflictualités, créant de profondes lignes de faille au sein même des États.

        Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Si nous ne changeons pas nos modes de vie, nous subirons des monstres autrement plus violents que ce coronavirus »
        Cette montée en puissance des intérêts particuliers est pleinement illustrée dans les crispations révélées par la pandémie de Covid-19.

        Nous sommes aujourd’hui au pied du mur : entre l’importance croissante, voire suprême, de la liberté individuelle, et le besoin d’Etat fort que la crise climatique va nécessairement engendrer dans un objectif de survie collective, qu’allons-nous choisir ? Je n’ai pas la réponse. Mais il est plus que jamais nécessaire de regarder la question en face.

  2. Avatar de Tomas Lotuyo
    Tomas Lotuyo

    Vous êtes plutôt bien informé sur cette réalité cubaine qui est mon quotidien depuis pas mal d’années.
    C’est un assez bon résumé de la situation actuelle mais qui exonère un peu trop la classe dirigeante dont l’incompétence et la rapacité dépassent tout ce qu’on peut imaginer. La répartition des richesses à Cuba ressemble à celle qui est au bout du chemin néo-libéral : presque tout pour une infime minorité et presque rien pour une immense majorité.
    Si les paysans ne produisent pas plus c’est parce que le choix qu’on leur impose n’en est pas un. Ils peuvent soit vendre aux prix dérisoires fixés par l’état et gagnent à peine de quoi couvrir leurs coûts de production, soit vendre « en direct » leurs productions et sont alors accusés d’enrichissement illicite. La campagne menée depuis 2 ans contre les marchands de fromage ou d’oignons « illégaux » est largement soutenue par les médias d’état.
    Résultat, un pays ou bananes, mangues, avocats, etc… poussent si facilement voit les étals de ses marchés quasiment vides.

    Ce que vous ne signalez pas non plus, c’est que depuis janvier de cette année, la majorité des produits alimentaires est de moins en moins disponible par le canal de la libreta (qui couvre à peine 8 à 10 jours d’alimentation sur le mois) mais qu’on retrouve ces produits (importés) dans des boutiques qu’on appelle MLC (pour Monnaie Librement Convertible) dans lesquelles on ne peut payer qu’avec des cartes de crédit alimentées en devises étrangères.

    Et pour aggraver encore la situation, les salaires sont uniquement payés en pesos cubains qui ne donnent pas accès à ces produits et qu’on ne peut changer dans les banques. Le cours de l’euro a ainsi été multiplié par 3 en un an, alors que les prix pratiqués dans ces boutiques sont déjà abusifs.

    « L’embargo » est invoqué en permanence pour justifier ces tarifs excessifs, alors que le besoin des dirigeants de s’enrichir semble une hypothèse bien plus probable. En 2012, Raul Castro dénonçait la corruption comme l’un des principaux dangers qui menaçait le pays, 10 ans plus tard, cette corruption est devenue universelle…

    Vous évoquez la « constitution socialiste », malheureusement, il n’y a que les textes qui sont socialistes, la petite oligarchie composée des proches des familles Castro, du sommet de la hiérarchie de l’armée et du parti, applique des méthodes qui relèvent du capitalisme le plus sauvage pour se garantir un train de vie indécent dans un pays qui tombe littéralement en ruines.

    A part ça, il y a beaucoup à apprendre à Cuba sur la façon de vivre avec des besoins et des moyens réduits. Ce que nous jetons, ils le réparent, ce que nous achetons sans y penser, ils ne peuvent qu’en rêver… la vie sociale y est moins abîmée qu’ailleurs et des réseaux informels (famille, amis, collègues, voisins…) jouent un rôle très précieux dans un environnement ou l’état n’assure plus grand chose.

    1. Avatar de Tout me hérisse
      Tout me hérisse

      @Tomas Lotuyo
      Oui, vous avez raison, il aurait fallu également évoquer le comportement de la classe dirigeante, elle qui oublie un peu trop facilement l’intérêt général et préfère accumuler au bénéfice de quelques-uns (FAR!), ajoutez à cela la gestion idiote :pourquoi investir dans la construction de coûteux hôtels si le tourisme est totalement à l’arrêt et ne reviendra jamais au pic qu’il a connu antérieurement ?
      Quant à la corruption, oui, il faut admettre qu’elle se propage, mais n’est-ce pas un processus ‘normal’ en temps de crise ou de guerre comme nous l’avons connu durant la 2e guerre mondiale ?
      Mais tout n’est pas perdu, je me souviens, il y a quelques années, avoir voulu laisser un petit ‘pourboire’ à l’employée de CIMEX qui m’avait résolu un problème de s.a.v. concernant un appareil ménager, elle m’a fait les gros yeux en m’indiquant qu’elle n’avait fait que son travail !
      Tout cela prouve bien que le rêve de Che Guévara d’arriver à créer « l’Homme nouveau » au 21e siècle, grâce à l’éducation de masse et l’abandon de la majorité des incitants matériels pour les remplacer par les incitants sociaux – hormis quelques cas – a largement échoué:les tares de l’humain sont difficilement surmontables et l’on comprends mieux ainsi la proposition de Paul Jorion concernant le ‘plan C’ : tenter de créer un être artificiel doué d’intelligence et qui aura repris le meilleur de l’humain. 🙂

  3. Avatar de Chabian
    Chabian

    « L’appat du gain crée des problèmes ». C’est sans doute exact, avec plusieurs symptômes.
    Mais les Cubains restent avec le souvenir du régime fantoche de Batista qui couvrait une colonisation étasunienne (Baccardi, Tobaccos…) très prégnante. Avec une exploitation des gens presque esclavagiste et une corruption galopante. De ce fait, ils ne veulent pas voir revenir les gens de Miami ou de Washington, les colonialistes, qui revendiquent d’ailleurs toujours leurs biens et les indemnisations.
    De ce fait, les accusations du Gouvernement contre le blocus étasunien, qui crée de graves privations, rassemblent l’opinion. Et les personnes qui développent une opposition sont rapidement accusés de recevoir un appui et un financement US, ce qui est courant puisque c’est aussi ce que l’US cherche : soutenir et corrompre toute opposition.
    Mais il est un fait avéré, c’est la corruption cubaine, et depuis longtemps. Au sein de l’Administration et au sein du Parti sans doute. Raoul Castro a consacré son mandat à lutter plus fortement contre cette corruption, on n’en connait pas le résultat. Or en période de rationnement, il y a toujours une tentation de corruption de la part du fonctionnaire (qui détourne des biens ou des bons) et de la part des citoyens (dont des entreprises, touristiques notamment). Il y a 25 ans,, il y avait des réseaux de prostitution manifestes, mais la période de privation était catastrophique à l’époque de mon voyage.
    (Cette question a été évoquée à propos du Plan A, c’est pour cela que j’en parle).
    Et il y a toujours eu une envie répandue des gens des sociétés socialistes à l’égard du « confort » visible dans les pays occidentaux. Nombre de nouveaux riches des pays de l’Est à la chute du mur se sont payés les plus belles voitures pour parader au pays. Tandis que les Hauts fonctionnaires s’appropriaient plus sérieusement les meilleurs morceaux dépecés de l’Etat…
    Voilà des éléments utiles pour anticiper notre plan A : pas de pays voisin qui reste dans le confort d’avant, une forte conviction qui faut passer à autre chose, et une discipline sociale percolant partout. Et une démonétisation totale du pouvoir passé : parler d’inertie devant le réchauffement serait trop peu.

  4. Avatar de Arnaud
    Arnaud

    Article du Monde – sur le concept de décroissance économique.

    La décroissance : d’où vient ce concept politique qui fait débat à la primaire écologiste ?
    Deux candidates à la primaire écologiste, Delphine Batho et Sandrine Rousseau, présentent la décroissance comme une solution à la crise climatique.

    Par Maxime Ferrer
    Le mot n’apparaît nulle part dans le « projet 2022 », document de quatre-vingts pages esquissant le programme d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) pour la prochaine élection présidentielle. Pourtant, deux candidates à la primaire écologiste, Delphine Batho et Sandrine Rousseau, ont évoqué la décroissance comme solution à la crise climatique. Alors que Yannick Jadot préfère prôner une « croissance verte » et qu’Eric Piolle se déclare « ni pour ni contre la croissance », ce concept politique et philosophique, davantage qu’économique, devrait alimenter les débats entre les candidats.

    Contre la croissance comme indicateur de bien-être
    C’est dans les années 1970 qu’émerge le concept de décroissance. Le terme n’est pas pris dans son sens littéral (« état de ce qui décroît », c’est-à-dire qui diminue). Il s’agit plutôt de s’opposer à la croissance économique, en tant que but à suivre ou indicateur de bien-être.

    Son origine est attribuée au rapport Meadows, publié en 1972 par le Club de Rome, un groupe de réflexion international. Intitulé The Limits to Growth (traduit en français sous le titre Halte à la croissance ?), ce document prédit l’effondrement inéluctable d’une civilisation dont la population, l’activité économique et les impacts sur l’environnement seraient en perpétuelle croissance.

    « La croissance exponentielle de la population et du capital [sera] inévitablement suivie d’un effondrement [si] nous ne supposons aucun changement au système actuel »

    Les auteurs du rapport ont créé un modèle simulant l’évolution à long terme de cinq indicateurs (population, alimentation, production industrielle, ressources naturelles non renouvelables, pollution). Ils montrent ensuite que « le comportement de base du système mondial est la croissance exponentielle de la population et du capital », qui sera inévitablement « suivi d’un effondrement » si « nous ne supposons aucun changement au système actuel, même si nous faisons l’hypothèse de nombreux progrès technologiques ». En clair, la finitude de la Terre – où les ressources naturelles, surfaces habitables ou agricoles sont limitées – empêchera à long terme de profiter d’une croissance permanente de la population, de l’économie ou de l’exploitation de ces ressources.

    Les auteurs préconisent alors, pour les pays riches, de mettre un frein à la croissance pour atteindre un équilibre global et stable. Les pays en développement, eux, devraient poursuivre leur croissance pour couvrir leurs besoins essentiels jusqu’à atteindre aussi un niveau d’équilibre.

    Le rapport Meadows a connu un certain retentissement lors de sa sortie avant de sombrer dans l’oubli avec l’avènement des crises pétrolières et la récession économique au tournant des années 1980, qui ont temporairement mis à mal les prédictions du modèle.

    Il est toutefois revenu sur le devant de la scène dans la période récente, à la faveur notamment des conclusions alarmantes sur le réchauffement climatique des rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et des recommandations de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) sur l’abandon des énergies fossiles.

    S’agit-il d’une théorie économique ?
    Si, en économie, la décroissance ne constitue pas un corpus théorique en tant que tel, plusieurs auteurs ont réfléchi aux limites de la croissance, comme l’a rappelé l’économiste Jean-Marie Harribey dans un article paru en 2007 dans les Cahiers français.

    Dès le début du XIXe siècle, l’économiste classique David Ricardo écrit que « le capitalisme est condamné à l’état stationnaire », alors que pour Thomas Robert Malthus la croissance économique à long terme est « condamnée ». Les deux auteurs déplorent le fait qu’une croissance linéaire de la production alimentaire ne puisse suivre la cadence de la croissance exponentielle de la population.

    En 1848, John Stuart Mill est le premier à se réjouir d’une telle perspective :

    « J’espère sincèrement pour la postérité qu’elle se contentera de l’état stationnaire longtemps avant d’y être forcée par la nécessité. »

    Dissocier le progrès humain de la croissance économique, empêcher le développement illimité de l’agriculture et diminuer le temps de travail

    Le penseur libéral estime qu’il faut dissocier le progrès humain de la croissance économique, empêcher le développement illimité de l’agriculture et diminuer le temps de travail dans l’industrie. L’idée de réduire le temps de travail (une des formes possibles de la décroissance) est ensuite reprise à gauche par John Maynard Keynes. En 1930, le célèbre économiste pronostique la semaine de quinze heures de travail dans Perspectives économiques pour nos petits-enfants.

    Avant même le rapport Meadows, le mathématicien et économiste d’origine roumaine Nicholas Georgescu-Roegen a été le premier à faire le lien entre l’activité économique et les limites physiques de la planète. Dans les années 1960, il élabore une théorie qui applique à l’économie les lois de la thermodynamique et montre que « l’entropie d’un système clos augmente continuellement (et irrévocablement) vers un maximum ; c’est-à-dire que l’énergie utilisable est continuellement transformée en énergie inutilisable jusqu’à ce qu’elle disparaisse complètement ». Toutefois, Roegen ne s’est jamais prononcé en faveur de la décroissance.

    La décroissance est-elle de gauche ou de droite ?
    Dans les années 1970, le philosophe norvégien Arne Naess développe la notion d’écologie profonde (deep ecology). Son projet : décroître pour réduire l’impact de l’activité humaine sur l’environnement. Ce mouvement, qui ne se revendique d’aucun parti politique, continue aujourd’hui à mobiliser des adeptes partout dans le monde.

    Politiquement, en France, c’est à gauche que le concept s’est largement répandu. Comme l’expliquait au Monde en 2018 l’économiste Serge Latouche, spécialiste de la décroissance :

    « Fondée sur une critique de la société de consommation et du libéralisme, [la décroissance] est par essence de gauche et d’inspiration socialiste, mais en y ajoutant la dimension écologique. »

    La mouvance décroissante à gauche, née à la fin des années 1990, n’est plus aujourd’hui un mouvement politique à proprement parler. Y compris parmi les écologistes, où le mot « décroissance » suscite des déclarations alambiquées. Invité de la matinale de France Inter en juillet 2021, M. Piolle, candidat à la primaire d’EELV, renvoyait « croissancistes » et « décroissancistes » dos-à-dos :

    « La croissance est devenue une religion. Je ne suis ni pour ni contre : je n’y crois pas. »

    Dans la rhétorique écologiste, le terme est donc souvent abandonné. On lui préfère souvent celui de « sobriété », qui permet de cibler des secteurs dont il faut réduire l’activité (« sobriété énergétique », « sobriété numérique »…).

    On trouve aussi la mouvance de l’écofascisme, qui se fonde sur un discours écologiste et décroissant

    Des mouvances plus conservatrices se sont aussi emparées de la décroissance. En particulier l’extrême droite et ses mouvements survivalistes portés sur l’effondrement du capitalisme. On trouve aussi la mouvance de l’écofascisme, qui se fonde sur un discours écologiste et décroissant et qui conçoit les « populations comme des groupes ethniques essentialisés se partageant des territoires qui leur seraient propres », selon Stéphane François, historien des idées au Groupe sociétés, religions, laïcités (Ecole pratique des hautes études-CNRS-université PSL).

    Sans affiliation partisane, l’ingénieur Jean-Marc Jancovici est devenu ces dernières années un des principaux porte-voix de la décroissance en France. Sa conférence « CO2 ou PIB », donnée à Sciences Po Paris en 2019, a atteint 1,7 million de vues sur Internet. Il est aussi l’un des fondateurs du Shift Project, un think tank qui espère peser dans le débat de l’élection présidentielle avec son plan de transformation de l’économie française fondé sur la sobriété et la décroissance.

    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Derrière la décroissance, de la gauche à la droite identitaire, une multitude de chapelles
    Pour un retour à l’âge de pierre ?
    C’est la principale critique adressée à la décroissance : s’opposer à la croissance revient à s’opposer au développement humain. Argument balayé par ceux qui préfèrent se nommer « objecteurs de croissance », emmenés par le politologue Paul Ariès. Dans le texte « Leur récession n’est pas notre décroissance », publié en pleine crise financière de 2008, il affirme :

    « La décroissance, ce n’est pas faire la même chose en moins, même en beaucoup moins, c’est faire tout autre chose, c’est renouer avec une utopie concrète. (…) Ce n’est donc pas en apprenant à se serrer la ceinture qu’on résoudra à la fois la crise sociale et environnementale, mais en redevenant des usagers maîtres de leurs usages. »

    Les décroissants s’opposent aux travers de la société de consommation : le gaspillage des ressources naturelles et l’impact de l’activité humaine sur l’environnement. « La décroissance n’est pas la croissance négative, expression antinomique et absurde qui voudrait dire à la lettre : “avancer en reculant” », écrivait Serge Latouche, l’un de ses principaux penseurs français, dans Le Monde diplomatique en 2003.

    Des pistes pour vivre mieux avec moins

    Parmi les pistes évoquées pour vivre mieux avec moins : limiter le transport des humains et des marchandises, lutter contre l’obsolescence des objets qui alimente la surconsommation, remettre en question l’utilité de certains secteurs d’activité, comme la publicité… Ces idées résonnent avec le « projet 2022 » des écologistes, qui propose de « remettre la publicité commerciale à sa place » en réduisant la part qui lui est consacrée dans l’espace public, de « décarboner les transports » en supprimant les avantages fiscaux sur le carburant des avions ou des camions de marchandise. Autant de mesures déjà préconisées l’an dernier par les 150 citoyens tirés au sort de la convention pour le climat, qui n’ont été reprises que partiellement par le gouvernement.

    Il est à peu près certain qu’un « programme décroissant », s’il devait être appliqué strictement, dans un seul pays, et du jour au lendemain, conduirait à une contraction du produit intérieur brut (PIB) – l’instrument de mesure de la richesse le plus répandu. Mais l’objectif assumé des décroissants, volontiers critiques à l’égard de cet indicateur, est de sortir du capitalisme et de trouver une autre voie pour assurer le progrès humain, en particulier dans les mécanismes de redistribution des richesses et de solidarité sociale.

    Comme le résume Paul Ariès, « le capitalisme est un régime d’accumulation qui fonctionne un peu à l’image d’une bicyclette (…), c’est-à-dire que, s’il cesse d’avancer, le système tombe. Le système capitaliste est, parmi tous les systèmes économiques, celui qui a le plus besoin pour fonctionner de produire et de consommer toujours plus, alors que les humains ont besoin pour vivre de savoir se limiter.

    1. Avatar de timiota
      timiota

      Maxime Ferrer a du lire Serge Audier pour une grande partie de la recension des écolo depuis le rapport Meadows, Arne Naess, et Georgescu-Roengen, Serge Latouche.

      Le niveau d’analyse est un peu planplan… ou au moins la façon de le présenter : « trouver une autre voie pour assurer le progrès humain… » oui, bon, « trouver » comme on trouve une pièce de 20 c sur le trottoir ? Pas que !

  5. Avatar de MG
    MG

    Jour du dépassement 2020 pour Cuba le 01/12 (année covid).
    Du coup ça va pas suffire.
    Est-ce que quelqu’un peut nous décrire la Corée-du-Nord pour nous faire une idée ?

  6. Avatar de CORLAY Isabelle
    CORLAY Isabelle

    Je tiens à faire un commentaire en réponse de ceux de Chablan le 3/09/21 à 20h32 et Arnaud à 21h10. Chablan écrit : il faut donc UNE OPINION QUI BASCULE (un puissant évènement pour cela) dans le sens du vent – en ex. Pearl Harbour de l’environnement et tout autre…Il dit les réseaux financiers freineront des quatre fers devant un programme climatique. Il y a longtemps, j’avais écrit: T.I.N.A (teaching initiatives nationales alternatives) en fait mondial & [conférences citoyennes]. Dans le commentaire d’Arnaud le 3/09/21 à 21h00, il est écrit : Mme F. Laget se demande si les gouvernements des principaux pays ont encore les moyens de limiter le dérèglement climatique. C’est une question essentielle face au dernier rapport du Giec du 9 août dernier. Il est vrai, il y a un vrai degré de dangerosité (à tous les niveaux de la vie) et de déstabilisation profonde qu’il entraînera dans le monde. Dans le second chapitre du texte d’Arnaud, il est écrit : envisageons toutefois la décarbonation seule. Il est un fait qu’il faut savoir prendre des objectifs au bon moment et que les mesures pour le bâtiment doivent être étudiées en profondeur et au plus vite (résidentiel, social, ou tertiaire) (eau, ciment, énergie)… Il y a des points qui sont à faire émerger.!! (limitation généralisée des températures par isolation et tout autres méthodes, limitation des voitures par d’autres moyens (emplacements lieux stratégiques, financier et productions). J’ai apprécié un article datant de 1970 (avec les effets pollution/voiture). J’ai relevé cette phrase : toute parcelle de jardin doit devenir productive en LEGUMES, fin de l’artificialisation des sols (villes), remettre du Vert en Ville, éviter les vols avions oui. Oui, il faudra aussi cesser notre SUR CON SOMMATION de vêtements (pollutions de l’eau, de terres, produits chimiques). Et à ce propos, en 2017, j’avais vu un reportage sur Arté dont un moine bouddhiste a évoqué le manque de coton/tissus. (Tout RE UTILISER (à remettre en circuits) et j’avais partagé cette idée, il y a longtemps. Oui de telles mesures s’imposent maintenant, et ce pour les futures générations ce qui permettrait de limiter la catastrophe ANNONCEE. Dans l’ANNONCE, il faudra l’ENONCE précisément. Sinon, survie collective et là cela ne sera pas Joli, ni Tendre. Revenir à l’essentiel à minima/contraire [aliénation]. Je rajouterai une chose que j’ai lu dans le livre à nous la liberté de Christophe André, Mathieu Ricard et Alexandre Jollien, il est écrit, pendant des années le Daili-lama a souhaité la création d’un Conseil International composés de Sages, de Prix Nobels de la PAIX, de scientifiques, de penseurs éminents et d’entrepreneurs sociaux. Les Nations-Unies ajoutait-il devraient jouer ce rôle, mais les représentants qui y siègent sont naturellement portés à défendre les intérêts de la population mondiale et de la planète. Ces sages pourraient donc donner des avis sur des graves questions qui se posent dans le monde en transcendant les intérêts nationaux. Personne ne fait grand cas de leurs recommandations (Desmond Tutu, Jimmy Carter, Mary Robinson). Pour finir ce commentaire, je rajouterai quelques lignes extraits de Mr Bruno Colmant qui écrit que dans les années 1970 abandon de l’étalon/or par les Usa, à deux chocs pétroliers. PS ic (en 1974, il y a eu le 1er choc pétrolier, avec un niveau d’inflation, il me semble que le pétrole a alors grimpé. J’avais eu comme commentaire à l’époque, qu’il y aurait des conflits à cause du pétrole. Et pour vendre une maison, c’était difficile, moins d’acquéreurs avec portefeuilles d’investissements). Bien que je ne sois pas économiste, je pense comme il est écrit dans l’article de Mr Colmant (d’il y a 6 jours), nous passerons de l’expansion à la contraction dans beaucoup de domaines à mon sens. Etudier les paradis fiscaux et autres, (faire un nouveau paradigme de bonheur), PIBB (pib de bonheur) c’est une question à ce niveau. Fin du commentaire. Isabelle Corlay

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