Bonjour, nous sommes le samedi 2 octobre 2021 et aujourd’hui, je vais vous parler des assureurs et du réchauffement climatique, parce que les choses changent pour les assureurs et si je vous en parle, c’est parce qu’une grosse compagnie d’assurance a eu l’amabilité de me demander de parler – c’est quoi, dans 3 semaines – de parler à ses dirigeants de ce qui se passe, de l’avenir. On me connaît, on sait dans quelle perspective je présenterai les choses, on sait que je suis la personne qui a « Le blog le plus optimiste du monde occidental » [rires].
Deux petites choses d’ailleurs avant de commencer sur les assureurs,dans ce sens-là : de ce qui nous rend optimistes, c’est que… Voilà : j’ai pris un bain ce matin. On est samedi matin 😉 , je me suis dit : « Tiens, je vais mettre un peu de musique » et j’ouvre YouTube et YouTube ne me laisse même pas le temps de réfléchir à ce que j’ai envie d’entendre. YouTube démarre et il commence par « Heroes » de David Bowie et puis il enchaîne sur « Absolute Beginners » de David Bowie. Le troisième, c’est Leonard Cohen en public à Londres, « Dance me to the end of love ». Qu’est-ce qui vient après ? « Another one bites the dust » de Queen enfin, voilà, et puis le 5e, c’est quelque chose qui ne m’est pas familier. Ce n’est pas quelque chose que j’ai dû écouter sur YouTube, c’est quelque chose qui m’est proposé comme ça, à partir de mes goûts généraux et c’est un morceau de REM. J’aime bien REM mais voilà, ce n’est pas quelque chose que j’ai dû écouter récemment. C’est l’intelligence artificielle de YouTube, c’est-à-dire de Google si j’ai bon souvenir, qui a pris une décision à ma place. Voilà, on vit quand même dans un monde formidable.
Et à propos de monde formidable, et avant, de parler des assureurs, je vois aux nouvelles aujourd’hui un camion-citerne au Royaume-Uni, qui a connu un Brexit, au Royaume-Uni, un camion-citerne a vu se former derrière lui une queue de 20 voitures, 20 automobiles qui voulaient voir à quel endroit il allait livrer de l’essence [et en fait il ne contenait pas même du carburant]. Voilà où ils en sont, les malheureux qui ont voulu un Brexit. J’ai prévenu, hein, j’ai prévenu ! j’ai dit que ce serait la catastrophe. Ils ont la catastrophe. On ne m’a pas écouté. On ne sait même pas que je l’ai dit bien entendu [rires] mais enfin voilà, voilà le monde dans lequel nous vivons.
Alors, les assureurs. Que font les assureurs ? Les assureurs, vous le savez, devant un risque, ils vous permettent de payer une petite cotisation, une prime, une prime d’assurance et avec cette prime d’assurance, vous êtes couvert contre un certain nombre de risques. Pourquoi est-ce qu’ils arrivent à faire ça ? Eh bien parce que, dans la prime qu’ils vous demandent, il y a une marge de profit, voilà, c’est une firme, une firme qui gagne de l’argent. Elle mutualise un risque, ce qui est une bonne affaire quand même pour nous puisque, s’il fallait… voilà, si vous louez un appartement, que vous mettez le feu et qu’ils vous demandent à ce moment-là de payer le prix de l’appartement ou même de l’immeuble parce que tout a cramé, vous ne seriez pas content. Vous ne pourriez pas le faire donc il vaut mieux payer une prime d’assurance.
Comment est-ce que les assureurs eux-mêmes s’y retrouvent ? Eh bien, ils regardent combien ça coûte le genre de sinistre que vous pouvez provoquer. Ils regardent la fréquence avec laquelle ça arrive : on regarde si ça arrive souvent que les gens comme vous provoquent ce genre d’accident. On fait un calcul. On introduit [dans les considérations] la distribution, c’est-à-dire en fait la proportion de gens qui vont produire des petits incendies, ceux qui vont en produire de plus gros, etc., voilà. Vous connaissez ça, vous connaissez sûrement la notion de moyenne. Il y a un « coût moyen » d’un sinistre, etc. Et ce qui intéresse aussi une compagnie d’assurance, c’est combien lui coûtera le sinistre le plus élevé, au coût le plus élevé. C’est évident, il faut pouvoir assurer ça aussi. Alors, on multiplie tout ça par des probabilités, voilà comment on fait.
Comment est-ce qu’on détermine les probabilités que ça se passe ? Eh bien, la probabilité, vous le savez sans doute, c’est une idéalisation – vous ne le saviez peut-être pas – mais on part des fréquences, c’est-à-dire, quelle est la fréquence, sur une période, des évènements qui se sont produits et, à partir de ça, on calcule une probabilité quand on a un grand nombre d’observations. C’est ce qu’on appelle la « loi des grands nombres » qui permet d’extrapoler une fréquence observée en une probabilité, voilà. C’est ce que font les assureurs. Il y a des spécialistes qui font ce genre de choses. Ce sont des gens qu’on appelle les actuaires. Ils font du calcul actuariel en regard de comment ça se passe. On a une probabilité, par exemple, sur les dix dernières années qu’un accident va se produire.
Alors quand on nous dit maintenant, les gens du GIEC par exemple, qui nous disent : « un évènement, une catastrophe trentenaire est devenue une catastrophe décennale », c’est-à-dire qu’un évènement qu’on pouvait s’attendre à voir se produire une fois tous les 30 ans a lieu tous les 10 ans. Ou bien on nous dit, sur tel ou tel risque… par exemple, allez, je vais vous dire un truc, les précipitations, la pluie maximale qui tombe, voilà, à Pétaouchnoc chaque année, voilà : l’averse maximale. On vous dit maintenant : « Cette averse maximale, il faut considérer qu’elle sera peut-être jusqu’à 4 fois plus élevée ».
Bon, alors, l’assureur, avec ses fréquences sur de longues périodes et des probabilités, comment est-ce qu’il fait ? Comment est-ce qu’il s’adapte aux circonstances ? Il sait, dans l’immédiat, qu’il va devoir payer et il l’a vu quand il y a des inondations catastrophiques qu’on n’a jamais vues ou alors dont on a souvenir qu’en 1255 [date fictive], il y avait eu une inondation comme ça quelque part, eh bien, il faut qu’il essuie les pertes et on a vu aux Etats-Unis, en particulier avec les inondations récemment – c’est lié à l’ouragan Ida mais pas simplement en Louisiane, enfin, avec toute la trace qu’il a laissée et en particulier dans le fait qu’il a provoqué des inondations importantes à New York – vous avez peut-être vu…. voilà, on est dans le métro à New York et tout à coup, on s’aperçoit qu’il y a une très très belle cascade au fond, au bout du quai. Ce n’était jamais arrivé. Il y a des gens qui sont morts dans le New Jersey, des gens qui habitaient dans des appartements qu’on a aménagés dans ce qui sont des caves, c’est-à-dire sous le niveau du trottoir et on voit, vous avez peut-être vu cette horreur, des plongeurs, des hommes-grenouilles qui essayent de retrouver des cadavres dans un appartement qui se trouve sous le niveau de la mer et voilà.
Est-ce qu’on était assuré pour l’inondation à New York ? Non, personne n’était assuré pour l’inondation à New York, ce n’était pas prévu, on ne l’avait pas fait. Ce n’était pas considéré même comme une des grandes régions inondables aux Etats-Unis. On va voir apparaître ce genre de choses. Vous avez vu un village d’Allemagne spécialisé dans la production de vin avec des vignobles importants, on vous montre la photo avant avec des vignobles et puis on vous montre un immense trou qui a l’air d’avoir 10 mètres de profondeur à la place.
Des choses comme ça vont se passer. Alors, que font les compagnies d’assurance dans ce cas-là ? Elles essayent de renouveler leurs chiffres, de les mettre à jour, d’avoir des calculs qui soient plus à jour, qui vous donnent de véritables non pas fréquences parce que les fréquences, c’est sur des périodes, mais de véritables probabilités de ce qui peut se passer maintenant. Ça, j’avais vu de tout près, j’étais véritablement au premier rang d’orchestre de la Compagnie Countrywide, premier producteur de prêts subprimes et de titres subprimes aux Etats-Unis quand tout s’est effondré. Si vous travaillez sur des séries chronologiques comme on dit, sur les données des 10 dernières années, ça ne disait pas du tout ce qui allait se passer. Pourquoi ? Parce qu’en fait, les évènements allaient très très vite et là, comme tous les instruments qui indiquent le risque, toutes les alarmes, toutes les sirènes en fait sont calculées sur la dernière dizaine d’années, on ne voit rien arriver. Si, les individus, les êtres humains voient arriver les catastrophes mais ces n’est pas suffisant.
Que fait une compagnie d’assurance en temps normal ? Elle s’assure elle-même, elle s’assure elle-même contre le risque. Ce sont des compagnies qui s’appellent « les réassureurs » qui s’occupent de ça : ils assurent les compagnies d’assurance. Comment est-ce qu’eux font pour pouvoir étaler des risques plus importants que ceux que peuvent contenir des compagnies d’assurance ? Eh bien, ils essayent de se financer au maximum, d’avoir des réserves, d’avoir des provisions considérables. Et qu’est-ce qu’ils font avec une partie du risque en tout cas ? Ils le titrisent. Ah, nous voilà revenus aux subprimes, c’est-à-dire qu’ils vendent des obligations, ils se financent partiellement en vendant des obligations. Ce sont des obligations avec un taux élevé.
Je vois aux Etats-Unis que l’organisme parastatal comme on dirait, qui s’occupe de payer, d’étaler le risque d’inondation [NFIP = National Flood Insurance Program], en fait, il émet lui-même des obligations à 5,5 % mais ce sont des obligations à haut risque, c’est-à-dire qu’il est écrit dans le contrat que l’on ne pourra peut-être pas rembourser, on ne pourra peut-être pas rendre l’argent et, en échange, vous avez un taux élevé, voilà.
Alors, vous voyez, les compagnies d’assurance se réassurent chez des réassureurs et eux, ils essayent de diluer le risque dans la population en émettant des obligations, en disant : « Voilà, là, on vous paye pas mal en coupons – ce ne sont pas des dividendes parce que c’est des obligations mais enfin, c’est l’équivalent – on vous paye un coupon élevé mais il y a du risque pour vous ». C’est la même histoire que les subprimes avec la « veuve de Carpentras ».
On avait dit : « Voilà, on va titriser les prêts subprimes et la veuve de Carpentras va acheter ça. Eh bien, un jour, elle aura peut-être un accident mais enfin, comme elle était vieille de toute manière, etc. » Comme ça avait une garantie AAA : la notation de crédit, le rating, était très élevé, les banques ne l’ont pas vendu à la veuve de Carpentras, ils l’ont gardé pour eux et le jour où ça explose, toutes les banques ont explosé. C’était quoi ? C’était le 16 septembre 2008 si j’ai bon souvenir [correct].
Alors, qui est-ce qui achète en fait, voilà, qui est-ce qui achète en réalité ces obligations à du 5,5 % ? Aux Etats-Unis, c’est ce qu’on appelle les institutionals [institutional investors], les grosses institutions. Qu’est-ce que c’est aux Etats-Unis ? Ce sont les fonds privés des grandes universités comme Yale, Harvard, etc. qui ont beaucoup d’argent. Ce sont les fonds de pension privés, ce sont les « health insurers », les grands « providers » de santé, ces chaînes de cliniques comme Kaiser Permanente, Blue Cross, etc., les compagnies qui vous assurent à titre privé de risques de santé, ce qui remplace là-bas, ce qui fait office là-bas de l’assurance maladie en France et dans d’autres pays.
Donc, ceux qui achètent, en fin de parcours, le risque total, celui que même les réassureurs ne veulent pas en réalité couvrir, ce sont les grandes institutions comme les fonds de pension, comme les chaînes de cliniques, les grosses universités et ainsi de suite.
Imaginons que tout cela pète, est-ce que l’Etat va laisser les universités fermer parce qu’elles ont pris un risque qu’elles n’auraient pas dû ? Les fonds de pension ? On va laisser ça s’écrouler [rires], tout le système de santé privé aux Etats-Unis ? Non, en fin de parcours, tout en haut, c’est le contribuable, c’est le bail-out, voilà, on vous sauvera.
Et il y a encore plus fort aux Etats-Unis parce qu’il y a pas mal de zones inondables. On n’avait pas pensé véritablement à New York mais enfin bon, parce que ça n’arrivait pas souvent – la preuve, c’est que ça n’était jamais arrivé donc voilà, on ne l’avait pas intégré – aux Etats-Unis, tout ce qui est les inondations dans des zones absolument inondables… Prenons l’exemple, au large de Houston, il y a Galveston. Galveston, je ne sais plus combien il y a eu de morts. Il y a eu une inondation catastrophique au début du XXe siècle [le 8 septembre 1900], des milliers de morts [7.000]. Qu’est-ce qu’on a fait ? On a dit dans les années qui ont suivi : « Il ne faut jamais reconstruire à Galveston ! ». Qu’est-ce qui s’est passé ? Je ne sais pas combien il y a de centaines de milliers d’habitants aujourd’hui à Galveston [en réalité, 50.000 habitants]. Qui est-ce qui assure ça ? Eh bien, en fait, voilà, c’est l’Etat américain avec son organisation : le NFIP = National Flood Insurance Program.
Ce qui est intéressant pour cet organisme parastatal, c’est qu’il a des accords avec des compagnies d’assurance et sur quelles bases se font ces accords ? Eh bien, nul ne le sait et nul ne peut le savoir parce que, comme disait le journal l’autre jour, les non-disclosure agreements, voilà, les papiers qui sont signés en disant : « Vous ne direz jamais ce que vous savez exactement sur la manière dont on fonctionne », on considère que ces contrats, ceux qui sont les plus secrets aux Etats-Unis, c’est justement ce que l’Etat assure sur les zones inondables de son pays.
On a commencé à s’énerver quand même un peu récemment en voyant qu’il y a encore des super-riches qui vont aller construire une mansion, un manoir moderne sur une dune qui se trouve juste derrière une falaise qui est en train de s’effondrer et là, on a dit : « Bon, on va quand même faire payer le coût réel de l’assurance à des gens comme ça, qui sont absolument irresponsables ». Mais, mais, mais ! il y a des lois sur la consommation qui protègent le consommateur et qui font qu’on ne peut pas augmenter de plus de, je ne sais pas, 18 % je crois, j’ai retenu ce chiffre [correct], de plus de 18 % le montant qu’on fait payer d’une année sur l’autre. Or, il faudrait l’augmenter de [100 à 800%] pour que ça reflète véritablement le risque actuel.
Et il y a d’autres mesures réglementaires qui empêchent qu’on ne répercute véritablement le risque : ce sont les lois sur la concurrence. Parce que – et ça, c’est une surprise pour tout le monde – la plupart des gouvernements ne sont pas au courant que nous vivons dans un système capitaliste (c’est une chose qu’on cache soigneusement ou bien à laquelle on ne pense pas [rires]). Vous connaissez mes amis qui parlent de la décroissance et quand je leur dis : « Oui mais dans un système capitaliste – parce qu’il repose sur le profit – on ne peut pas le faire ! ». Quel rapport entre la décroissance et le système capitaliste ?? et oui, bon, dans ce cas-ci, bon, il y a un aspect sympathique qui n’est pas vraiment le capitalisme, de protéger le consommateur mais l’autre, dire que les lois de concurrence vous interdisent en fait de calculer véritablement le risque et si vous le calculez, de ne surtout pas en tirer des conséquences, ça, c’est quand même le capitalisme.
Et je vais terminer – je ne vais quand même pas faire trop long – j’y reviendrai parce qu’il y a encore des tas de choses à dire. Alors, les compagnies d’assurance, on nous dit : « Il faut que dans les années qui viennent, d’abord, qu’elles découragent les gens qui sont des producteurs de pollution et de risques climatiques, il faut qu’elles cessent de les encourager en leur permettant de s’assurer auprès d’elles ou à des prix bradés – c’est la première chose qu’elles doivent faire – mais elle doivent aussi intégrer absolument le changement de circonstances », voilà. Et on nous dit – un chiffre qu’on nous donne – c’est qu’elles sous-évaluent en ce moment, les compagnies d’assurance au monde, elles sous-évaluent à peu près de moitié – c’est un calcul que j’ai vu dans le Financial Times – elles sous-estiment de moitié le risque qu’elles prennent en réalité dans le nouveau climat, c’est le cas de le dire, dans le nouvel environnement de risque lié au réchauffement climatique.
Alors, vous vous dites – parce que vous ne pensez pas au système capitaliste ! – vous vous dites : « Il faudrait qu’elles fassent des provisions supplémentaires ». Et là – nouvelle de la semaine dernière – on va changer les règles générales qui s’appliquent – ça s’appelle Solvency II, « Solvabilité II » – on va permettre aux compagnies d’assurance de réduire leurs réserves. On va leur permettre des choses formidables, par exemple de diminuer le calcul de risque qu’elles font sur leur portefeuille d’actions. Pourquoi est-ce qu’on va leur permettre de faire ça ? Eh bien, parce qu’il n’y a pas de risque véritable sur les actions ! [rires]. Eh, les gars, on est dans le système capitaliste ! Si acheter des actions, ce n’était pas le truc le plus sûr du monde, on ne vous dirait pas de le faire [rires]. On va leur dire de pouvoir baisser leurs réserves.
Pourquoi est-ce qu’on va leur dire de faire ça ? Eh bien, parce que – je viens de vous le dire mais je vous le rappelle – parce qu’on est dans un système capitaliste. On a permis aux compagnies d’assurance à peu près partout dans le monde de ne pas payer de dividendes l’année dernière parce que, justement, on ne savait pas combien elles allaient débourser dans le cadre de cette pandémie alors on leur a dit de ne pas verser de dividendes pour le moment. Du coup, leurs réserves en argent liquide, en cash, a augmenté et c’est là que revient le système capitaliste parce que le fait qu’elles aient des réserves importantes en argent liquide fait d’elles des proies pour ceux qui rôdent et qui essayent d’acheter des compagnies qui ont du cash, de l’argent liquide, qui vont dire aux salariés qu’ils ne risquent rien avec eux, qui vont dire à leurs clients qu’ « On n’a pas intérêt, nous, à casser ce machin ! » et puis, le lendemain, dès qu’ils l’auront acheté, ils vont le casser pour avoir l’argent liquide. Ils vont casser la tirelire, ce n’est pas très compliqué, et ils vont mettre la clé sous la porte en disant : « Ouais, d’accord, mais on n’avait pas fait le bon calcul ! C’était pas rentable ! ».
Donc, c’est dangereux de laisser à des compagnies d’assurance des réserves trop importantes parce que ça fait d’elles des proies possibles pour les rôdeurs qui vont les acheter. Ces rôdeurs, est-ce qu’on peut les mettre en prison ? Bien entendu que non, c’est eux le cœur même du système capitaliste ! [justification : ils éliminent des anomalies dans la formation du juste prix – je vous jure que c’est vrai !]. On ne va quand même pas chercher des crosses à des gens comme ça ! [rires].
Alors, vous l’avez compris, les réserves que font les compagnies d’assurance, et les réserves que fait à peu près tout le monde, au bout d’un moment on vous dit : « Bah, c’était ridicule de faire ces réserves puisqu’on n’a jamais dû les ponctionner donc on peut les réduire ! ». Et le lendemain matin – vous l’avez deviné – c’est le jour où il aurait fallu les utiliser ! On a oublié que c’étaient des réserves ! [rires].
Ou bien on n’a jamais même tenu compte du fait que c’étaient des réserves parce que, pensez à la chose suivante : c’est un mécanisme que je vous explique souvent parce qu’il n’est pas bien compris et que peu de gens en parlent. Que font les gens qui prêtent à des emprunteurs risqués ? Ils incluent dans le taux d’intérêt qu’ils demandent, ils incluent une prime de risque, voilà. Ils s’assurent à l’intérieur même du taux. Ils demandent un peu plus parce qu’il y a un risque de non-remboursement. C’est un principe assurantiel. Alors, normalement, cette marge du crédit, ils devraient la mettre dans une cagnotte, voilà, justement pour les jours où il faudrait utiliser cet argent-là. Eh bien non ! Dans notre système comptable, ces sommes-là ne vont pas dans une cagnotte : elles apparaissent en profit, c’est-à-dire que ça va permettre de distribuer des dividendes à partir de la cagnotte qui aurait été la cagnotte qu’on aurait dû ponctionner le jour où tout ça se serait effondré. Ça, c’est un autre miracle du capitalisme !
Est-ce que personne n’a jamais remarqué ça, qu’on distribuait en profit la cagnotte qu’on aurait dû constituer ? Si, ça a été remarqué mais c’est probablement parmi les mesures qu’on envisage de prendre l’année prochaine parce qu’elle ne présente aucune urgence particulière [rires]. En fait, depuis 1850, on sait ça et personne n’a jamais proposé qu’on remédie à ça. On constitue une cagnotte et on la redistribue aussitôt en dividendes aux actionnaires, c’est-à-dire qu’on nie le fait que ce soit une cagnotte.
Qu’est-ce que ça nous dit pour l’avenir ? Je vais terminer là-dessus. Ça nous dit qu’on a un risque qu’on aura de plus en plus de mal d’abord à calculer parce qu’on ne sait pas, quand on nous dit qu’un risque trentenaire va devenir un risque décennal, est-ce qu’il n’est pas déjà un risque qui va apparaître tous les 5 ans ou même tous les ans ? On n’en sait rien. On a un système qui permet aux assureurs de s’assurer eux-mêmes, que ces réassureurs s’assurent eux-mêmes auprès du public mais ce public, en réalité, ce sont des grands institutionnels que l’Etat devra sauver nécessairement parce qu’on ne va pas laisser tomber tout le système des pensions privées, tout le système de santé privé, toutes les universités privées aux Etats-Unis : ça constitue, je dirais, véritablement le cœur du système. Et puis, on a ce paradoxe, cette contradiction en fait qu’on devrait constituer des réserves de plus en plus grosses et on ne peut pas les constituer parce qu’à l’intérieur même du système capitaliste où on est, on ne peut pas le faire. On ne peut pas le faire, et c’est même dangereux à l’intérieur de ce système-là.
Qu’est-ce que ça veut dire ? Je termine là-dessus. Ça veut dire que ce système capitaliste qui était déjà très fragilisé en 2008 est en train de se fragiliser encore davantage et que les remèdes qu’on trouve ici et là sont des remèdes qu’on connaît déjà comme la titrisation. On sait que la titrisation, ce n’est pas le bon remède. On sait qu’en arrière-plan, il y a toujours le contribuable comme le sauveur de dernier ressort.
Alors, un mot encore, le mot de la fin. Est-ce que c’est comme ça qu’on fait en Chine ? Bon, je laisse la question ouverte.
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