AU CAS IMPROBABLE OÙ NOUS NE SERIONS PAS ENCORE ÉDIFIÉS, par François Leclerc

Billet invité.

Un G7 vient de se terminer, au cas fort probable où il serait passé inaperçu ! Principale information qui ressort des travaux des chefs d’État et de gouvernement qui se sont réunis au Japon : la chancelière allemande ayant jugé trop fort l’emploi du mot « crise » dans le communiqué final a eu gain de cause et il a été supprimé.

L’alarmisme à propos du danger de la situation économique actuelle de Shinzo Abe, le premier ministre japonais, a été critiqué par ses pairs. Ils ont néanmoins décidé d’accorder « la priorité absolue » à la croissance mondiale « en prenant toutes les mesures de réponses appropriées en temps utile ». Avec force et sang-froid, les principaux dirigeants occidentaux de la planète ont ainsi coupé court aux craintes exprimées par leur hôte qui avait fait remarquer que « si nous nous trompons dans la réponse à apporter à ce danger, le monde risque de tomber dans une crise profonde ».

Le dirigeant japonais, soupçonné de procéder à une opération de politique intérieure ou pire d’être contaminé par la situation de son propre pays, n’a pas mâché ses mots. Comparant la conjoncture actuelle à « la situation précédant la faillite de la banque Lehman Brothers » il a pris appui sur le plongeon des prix de l’énergie et des matières premières, sur les révisions à répétition des perspectives de croissance des pays développés ainsi que sur la fuite des capitaux des pays émergents. On ne chipotera pas son diagnostic et on retiendra sa mise en garde. Ainsi que la manière dont elle a été unanimement repoussée comme n’étant pas recevable.

En désaccord sur la politique économique à adopter, les dirigeants ont tranché à leur manière. Ils ont énuméré les trois outils dont ils disposent – la politique monétaire, la dépense publique et les réformes structurelles – laissant à chacun le soin de faire son marché. Chacun pour soi et Dieu pour tous !

Shinzo Abe a été renvoyé à ses petites affaires, qui sont très préoccupantes. Enjoint par tous de placer la dette du pays, qui avoisine les 250% du PIB, sur « une trajectoire soutenable », il va au contraire devoir financer des dépenses sociales croissantes en raison du vieillissement de la population. L’indice des prix étant redevenu négatif, il prépare un énième plan de relance qui va à nouveau se chiffrer en milliards d’euros. La Banque du Japon ne pourra pas être en reste et devra prendre de nouvelles ultimes mesures, mais lesquelles ?

Du fait de ses précédentes dispositions de janvier dernier, 70% des titres de la dette japonaise sont déjà assortis d’un taux négatif. Cela pèse sur les marges des banques qui les ont achetés en quantité, ainsi que sur la banque postale qui gère l’épargne des particuliers en investissant dans celle-ci. Or, afin de financer son nouveau plan de relance, le premier ministre va devoir encore accroître ses émissions obligataires en continuant à faire appel à ces mêmes investisseurs…

Augmenter la TVA pour accroitre les recettes fiscales comme il s’y est engagé n’étant pas possible alors qu’il faut relancer la consommation, la situation japonaise devient de plus en plus inextricable. Les banques tentent de se prémunir de l’impact des taux négatifs en se protégeant sur le marché des dérivés, tandis que les entreprises japonaises multiplient les rachats d’action. La fuite en avant continue.

En visite au Japon, les dirigeants du G7 n’en ont courtoisement pas parlé.

P.S. : On ne connaitra pas leurs échanges, qualifiés de vifs par un participant qui n’a pas été identifié, à propos d’une autre crise. Celle des migrants a désormais acquis le statut de « mondiale », avec pour principale conséquence la tenue d’innombrables conférences internationales dans les temps à venir.

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