L’actualité de la crise: l’épreuve du feu, par François Leclerc

Billet invité.

L’EPREUVE DU FEU

La Grèce devrait, au cours de la semaine qui vient, lancer un emprunt de 5 milliards d’euros sur les marchés. Le taux de l’obligation grecque à 10 ans s’étant détendu vendredi, à 6,193% contre 6,246% la veille, la question est posée : quel taux va devoir être consenti à cette occasion ? Cela va être sans tarder l’épreuve du feu pour l’accord financier des 16 de la zone euro. Dans le cas ou cette annonce ne serait qu’un ballon d’essai, l’objectif poursuivi par le gouvernement grec serait le même: mettre au pied du mur ses partenaires de la zone euro.

Les rendements restant à un niveau proche, va-t-il alors être considéré par les 15 autres pays membres de la zone euro que ces conditions financières justifient (ou non) l’activation du plan de soutien financier adopté en fin de semaine, afin que la Grèce ne soit pas à nouveau dans l’obligation de faire appel aux marchés ? L’ambiguïté qui a présidé à l’accord de compromis à propos de ce plan va devoir alors être levée, avant tout du côté allemand, risquant de faire l’objet d’une bataille d’interprétation sur le sens (dans le texte anglais) de « insufficient market financing » (conditions de marchés insuffisantes)…

A vrai dire, une autre divergence d’interprétation de l’accord est immédiatement apparue, à peine était-il signé, à l’occasion de la traduction par l’anglais « governance » du français « gouvernement » figurant dans le texte de l’accord. Joliment qualifié par le président de l’Union européenne, Herman Van Rompuy, de « traduction asymétrique », cet écart sémantique est lourd de conséquences quant à la portée de ce qui a été par ailleurs qualifié, plus modestement, de « coordination économique » européenne.

Les diplomates, comme chacun sait, sont plus à cheval sur les mots que sur les principes, bien qu’ils se drapent volontiers dedans ! Les politiques, eux, savent les solliciter afin de valoriser leur rôle et revendiquer leurs victoires.

Comme il était prévisible et pour confirmer qu’il n’y a pas grand chose derrière ces mots, le sommet des chefs d’Etat a bâclé sa copie sur le sujet qui avait justifié sa convocation : la « stratégie 2020 », selon l’étiquette qui a été collée sur cinq objectifs à atteindre à cette échéance. Si trois d’entre eux ont été formellement adoptés – un niveau d’investissement en recherche et développement, un taux minimum d’emploi des 20-64 ans et une réduction des émissions de gaz à effet de serre – un accord n’a pas pu être trouvé sur les deux autres, en matière de pauvreté et d’éducation.

Avant de discuter de la pertinence et de la crédibilité des objectifs retenus, on peut se demander si la démarche péniblement engagée est à la hauteur de la crise que nous connaissons et si l’exercice n’est pas par trop formel. Se fixer des objectifs à dix ans est pour le moins présomptueux et vain alors que l’Union européenne risque de replonger dans la récession.

Ce ne sont pas les prévisions britanniques qui peuvent à cet égard inciter à l’optimisme et accréditer l’idée que les objectifs adoptés sont crédibles, pas plus que l’on été ceux de la précédente « stratégie de Lisbonne », adoptée en 2000 et dont les objectifs n’ont pas été accomplis. En pleine campagne électorale, Alistair Darling, le chancelier britannique, vient d’annoncer une croissance de 1 à 1,5% du PIB pour 2010, qui bondirait à 3 à 3,5% en 2011. Son optimisme de circonstance a été immédiatement tempéré par son propre secrétaire d’Etat au commerce, Mervyn Davies, qui a refusé d’exclure un retour temporaire à la récession et a insisté sur le fait que la croissance ne serait pas « forcément en ligne droite ». Alistair Darling reconnaissant que des « secousses » étaient inévitables.

En attendant que ces prévisions se réalisent ou non, de nombreuses voix se sont déjà élevées afin de conjurer la crainte d’une contagion de la crise grecque au sein de la zone euro. Jean-Claude Juncker, chef de file de l’eurogroup, a déclaré en sortie du sommet que « Il n’y a pas de pays qui soit dans une situation comparable à celle de la Grèce ». Il avait été précédé, dès jeudi soir, par Herman Van Rompuy, qui avait estimé que les situations de la Grèce et du Portugal n’étaient « pas comparables du tout ».

Il est clair qu’en rester là serait souhaitable, non seulement pour les pays qui pourraient faire les frais de cette contagion, mais pour les artisans d’un compromis politique qui aurait toutes les chances de voler en éclats, bien que présenté comme étant un mécanisme durable de solution de la crise de la zone euro. Il suffit, à cet égard, de faire les additions des besoins de financement des pays qui pourraient demander à en profiter pour reconnaître qu’elles ne seraient pas dans les moyens des Etats supposés accorder des aides bilatérales (et devant pour ce faire emprunter sur les marchés).

La participation du FMI, limitée à un tiers maximum dans l’état actuel des choses, devrait alors nécessairement croître en proportion. Pouvant même placer celui-ci dans une situation difficile, en dépit des ressources dont il dispose. Aboutissant à son intervention en lieu et place des organismes européens et au constat que la zone euro est dans l’incapacité de gérer la situation par elle-même. C’est d’ailleurs ce scénario qui a amené Jean-Claude Trichet à s’opposer en vain à la présence du FMI dans le dispositif, mais il a du capituler en rase campagne devant l’intransigeance allemande, après que ses propos ont fait subir à l’euro une sérieuse secousse sur les marchés.

Un autre aspect de l’accord, pour l’instant un peu négligé, ne va pas tarder à réapparaître : les Allemands ont la claire intention d’engager une renégociation des traités européens, afin de créer des mécanismes de contrainte et de sanction en vue d’obtenir le respect des termes et paramètres du Plan de stabilité. Dans cette perspective, ils ont déjà pris la peine de formuler un projet, celui d’un fonds monétaire européen. Sans attendre, ils avancent sur un autre de leurs projets, celui de la taxation des banques, entendant l’adopter pour l’Allemagne et proposant qu’il soit repris au sein de l’Union européenne. Ils tirent, cherchant à utiliser les leviers à leur portée, les leçons de la campagne avortée qu’ils ont initiée en faveur de l’interdiction des CDS « nus », et qui s’est déjà enlisée à Washington dans les méandres des discussions sur la régulation des produits dérivés.

On ne va pas non plus tarder à reparler de la possibilité d’exclure un pays de la zone euro, en dépit de ce qu’en pensent Jean-Claude Trichet ou Jean-Claude Junker, tous deux d’accord pour en juger l’éventualité « absurde »…

Il y a de ce point de vue une indéniable logique dans la position allemande, qui fait contraste avec la défense intransigeante des intérêts de la City par le gouvernement britannique et le silence radio des Français sur les sujets de la régulation financière, dès que l’on n’en reste pas aux effets de manche. Peut-être est-ce à mettre en relation avec l’état de son secteur bancaire, dont l’OCDE vient de souligner sans plus de précautions l’état alarmant, préconisant l’organisation de nouveaux « stress tests » de celui-ci. Ce qui n’exonérerait pas, si l’on suivait cette analyse, les banques françaises de turpitudes de même nature (si ce n’est de la même ampleur), qu’elles ont simplement su mieux masquer avec l’aval du gouvernement.

La décision de la BCE de prolonger l’assouplissement de ses règles quant à la qualité des titres acceptés en garantie des banques, en contrepartie de leur refinancement, a finalement été soulignée. Mais elle a été interprétée d’une manière restrictive, comme un soutien apporté aux banques et au gouvernement grec. Ce qui est effectivement le cas, sans toutefois oublier que cette mesure joue pour toutes les banques de la zone euro, les incitant non seulement à acheter des obligations grecques (puisqu’elles peuvent les donner sans crainte que leur notation soit abaissée en garantie à la BCE), mais leur permettant également de laisser en dépôt les gros paquets de titres de la dette souveraine qu’elles y ont déjà placé, alors qu’elles auraient étaient obligées de les récupérer. Les banques françaises et allemandes sont dans ce domaine en première ligne. Par ailleurs, ces mêmes banques, notamment les Landesbank allemandes (les puissantes banques dépendant des Länder), en très piteux état et qui se refusent à utiliser les facilités de défaisance (bad banks) proposées par le gouvernement, n’en ont pas été nécessairement mécontentes de pouvoir continuer de donner en garantie des fonds de tiroir.

Cette bonne manière de la BCE n’aura donc pas été entendue comme son auteur l’espérait. La semaine à venir risque sans plus tarder de mettre à rude épreuve le compromis boiteux qui a été passé. La Grèce reste un cas test exemplaire, bien plus qu’il n’avait pu l’être imaginé.

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77 réponses à “L’actualité de la crise: l’épreuve du feu, par François Leclerc”

  1. Avatar de l'albatros
    l’albatros

    En ce qui concerne la retraite, peu de personnes parlent d’un indicateur très instructif qui s’appelle l’espérance de vie en bonne santé c’est-à-dire sans incapacité majeure. D’après l’Insee cette espérance de vie en France était de 63.1 ans pour les hommes et 64.2 pour les femmes en 2007. Si on commençait a fouiller par catégories socio-professionnelles, je suis quasiment certain que pour les ouvriers (surtout ceux du bâtiment) cette espérance de vie est inférieure à 60 ans. La question est de savoir maintenant comment des commissions ont la décence de plancher sur l’augmentation de l’âge de départ à la retraite de façon uniforme à 65 ans et surtout de ne penser qu’en terme de coût…c’est tout simplement indigne.

    1. Avatar de Piotr
      Piotr

      Je n’ai pas du tout les mêmes nombres…
      Espérance de vie -) 2009 -)France
      Homme ;77,79 ans
      Femme ;84,33 ans
      Je demande un arbitrage.

    2. Avatar de Julien Alexandre
      Julien Alexandre

      Il s’agît des chiffres pour l’espérance de vie « en bonne santé » : http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=98&ref_id=CMPECF02228

    3. Avatar de Piotr
      Piotr

      Espérance de vie en bonne santé est trop subjectif…
      « une personne en bonne santé est un malade qui s’ignore » Knock Jules Romains…

    4. Avatar de jeanpaulmichel
      jeanpaulmichel

      Non seulement c’est indigne mais complètement stupide.
      Il ne faut pas confondre espérance de vie avec qualité de vie.

      Les mesures envisagées par le gouvernement consistent à tirer du citron le maximum de jus puis à le jeter lorsqu’il sera épuisé.
      Grosso-modo, les hommes et les femmes sont en relative bonne santé jusqu’à 63/65 ans puis, après, cela se corse…plus ou moins rapidement.

      D’ailleurs, il serait intéressant d’étudier l’impact de la retraite à 60 ans mise en oeuvre en 1981 sur l’espérance de vie.
      Tous les retraités que je cotoie semblent avoir subi une cure de jouvance lors de leur mise en retraite !!
      A mon avis, partir en retraite à 60 ans doit avoir une incidence positive sur l’espérance de vie.

      François Hollande a une approche similaire à celle du gouvernement puisqu’il propose de revoir tous les cinq ans les conditions de départ en retraite en fonction de l’évolution de l’espérance de vie.
      Dans le même ordre d’idées, Mme Parisot disait récemment qu’il était impossible de conserver la retraite à 60 ans alors que nous allions vivre 100 ans.
      Vivre 100 ans probablement mais pas tous dans un état de santé flamboyant.
      Si demain la médecine fait un bond en avant important et nous permet de vivre tous jusqu’à ces âges avancés, leur raisonnement conduira à nous faire travailler jusqu’à 80 ans au moins … même avec des déambulateurs.

      Quant à la compétitivité des entreprises, je ne donne pas cher de leur avenir si en Europe nous avons des seniors au travail et en Chine des trentenaires.
      Les uns sprinteront bien plus vite que les autres.
      Quant à la jeunesse de ce pays, elle devra attendre que les emplois se libérent …éventuellement.

      Bref, comme sur de nombreux autres sujets, nous allons droit dans le mur.
      Les mesures étudiées ne sont pas à la hauteur des enjeux et ne répondent pas aux défis se présentant.
      Ce sont des recettes appartenant au passé à mon humble avis.

      Mais comme l’actualité récente nous le démontre, on ne change pas une équipe qui perd et surtout pas une ligne politique définie lorsque la croissance était au rendez-vous.

    5. Avatar de Piotr
      Piotr

      Sans vouloir polémiquer;en France, »le taux d’emploi des plus de 55 ans est l’un des plus mauvais d’Europe avec 36,8%, encore trop éloigné de l’objectif de Lisbonne d’atteindre 50% en 2010″.
      Au delà de 60 ans, on tourne autour de 13%.

    6. Avatar de anne bis
      anne bis

      à propos de l’allongement de l’espérance vie, il y a un truc qui me chiffonne: les chiffres sont calculés en fonction d’un modèle statistique qui se base sur l’age des morts aujourd’hui, ou du moment de référence. Or ceux qui meurent à 80 ans aujourd’hui, ont ils eu les mêmes conditions de vie que ceux qui en ont 30 ou 40 aujourd’hui ? Ces conditions de vie, par exemple environnementales, pourquoi ne joueraient elles pas un rôle dans l’age de la mort future des jeunes d’aujourd’hui ? Est-ce qu’on intègre le fait que 30% des enfants sont trop gros ou obèses ? Ou que les cancers des jeunes sont de plus en plus nombreux ? Que le stress en entreprise a une incidence sur la santé ? La médecine ne peut pas tout compenser, surtout quand elle est devient trop chère pour une part de la population … Je crois qu’on prétend prédire des faits mais qu’en réalité on n’en sait pas grand chose. Mais je voudrais bien qu’un démographe argumente le contraire.

    7. Avatar de VB
      VB

      @Anne bis,

      Ceci dit, les gens qui meurent à 80 ans en 2010 sont nés en 1930, ils ont donc connu une crise économique que je qualifierai de sérieuse, plus une guerre mondiale, ce qui n’est pas rien non plus.
      Cependant, vous avez quand même raison sur le fond, les statistiques sur la durée de vie prédisent (donnent une information) essentiellement le passé.

      Cordialement

  2. Avatar de Julien P
    Julien P

    Pourquoi ne pas modifier les règles pour permette à la Grèce d’emprunter à la BCE plutôt qu’au « marché »? Les banques qui prêtent à des taux supérieurs à 6% à la Grèce n’empruntent-elles pas elles-même à la BCE à des taux beaucoup plus bas?

    1. Avatar de L'idiot congénital
      L’idiot congénital

      C’est bien là qu’est l’os. Pourquoi….

  3. Avatar de BA
    BA

    Réponse à Julien P :

    Tous les traités européens depuis le traité de Maastricht jusqu’à aujourd’hui interdisent à la BCE de prêter de l’argent aux Etats européens.

    Le traité de Lisbonne stipule dans son article 123 :

    Il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres, ciaprès dénommées «banques centrales nationales», d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l’Union, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres ; l’acquisition directe, auprès d’eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite.

    Fin de citation.

    C’est suicidaire ?

    Oui. C’est suicidaire.

    1. Avatar de liervol
      liervol

      Totalement suicidaire et depuis le départ, un système uniquement fait pour favoriser les riches afin qu’ils deviennent encore plus riches.

  4. Avatar de BA
    BA

    Lundi 29 mars 2010 :

    Forte tension sur les obligations grecques après une émission obligataire mitigée.

    Les obligations grecques se sont fortement tendues lundi, après l’émission obligataire lancée par Athènes qui a reçu un accueil mitigé et a entraîné des ajustements techniques sur le marché.

    A 18H00, le taux de l’obligation d’Etat grecque à 10 ans s’est tendu à 6,289 %, contre 6,193 % vendredi, nettement à contre-courant du marché.

    La Grèce a lancé lundi un nouvel emprunt obligataire de cinq milliards d’euros à sept ans, quatre jours seulement après l’adoption par l’Union européenne (UE) d’un plan d’aide à Athènes, à utiliser en dernier recours.

    Cette émission n’a pas totalement convaincu les marchés car la demande n’a atteint que 7 milliards d’euros, alors que les deux précédentes opérations avaient attiré au moins trois fois plus de demande que d’offre.

    « Le marché n’a, pour l’instant, pas très bien réagi », contrairement à la précédente émission obligataire, a commenté Cyril Beuzit, stratégiste obligataire chez BNP Paribas, rappelant que l’opération s’est faite à 310 points de base au-dessus des taux moyens en zone euro avec un taux à 6,01 %.

    « En se finançant à ces niveaux-là, les Grecs compromettent leurs chances de sortir de leur endettement. Je reste convaincu que ce sont des opportunités d’achat, mais que ces niveaux de taux ne sont pas durables », a ajouté le stratégiste.

    Romandie

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