Addendum (11 juin 2011) : Les organisateurs du festival ont fait part publiquement d’agissements malheureux : certains commentateurs du blog leur auraient envoyé des mails insultants. Si tel est le cas, c’est éminemment regrettable et je tiens à signaler que je ne suis bien évidemment pas à l’origine de ces attaques et que je les condamne fermement.
Je cite les propos des organisateurs :
Lorsque quelques jours auparavant Paul Jorion nous avait dit que s’il était attaqué « les gens de son blog sauraient le défendre », nous avions cru à de l’humour.
Ce qui prouve que les organisateurs du festival du documentaire savent reconnaitre le bon humour du mauvais, quand ils le veulent.
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Mercredi, à mon arrivée à Lasalle dans le Gard, pour le festival du documentaire, où je devais participer hier samedi à une table-ronde, l’un des organisateurs m’a pris à part pour m’expliquer qu’une équipe de clowns interviendrait, non seulement une fois la table-ronde terminée, mais aussi durant les débats. Les autres participants à mes côtés étaient Éric Hazan, fondateur et directeur des éditions La fabrique, qui publient entre autres Frédéric Lordon et « L’insurrection qui vient », et François Plassard, promoteur historique du Revenu Minimum Garanti et des monnaies alternatives.
Le thème de la table-ronde était : « Quand prendrons-nous le temps ? » et la couverture du programme du festival apporte une précision sur le temps dont il est question, puisqu’elle montre une petite fille portant un grand panier de cerises. J’ai dit à cette personne que les sujets qui seraient débattus étaient sérieux et se prêtaient mal à être tournés en dérision par les temps qui courent. Je n’avais bien entendu aucune objection à ce que les clowns commentent à leur façon nos interventions une fois que nous aurions terminé, mais je m’opposais personnellement à des interruptions pendant que nous parlions. J’ai cru lors de cette conversation que si l’on me demandait mon opinion, c’était pour qu’il en soit tenu compte. Les faits prouveraient que je m’étais trompé et la raison qui me fut alors donnée était que « ça se fait toujours comme ça », autrement dit, que la chose n’avait jamais été négociable. En réalité, on ne m’avait donc pas demandé mon avis.
Comme on pouvait le prévoir, cela s’est très mal passé. J’ai parlé le premier : j’ai évoqué à propos de « prendre le temps », les pêcheurs bretons d’autrefois qui disaient de la construction indispensable des casiers (nasses) à homards et à crabe, qu’ils la faisaient « à temps perdu », et l’un des clowns est alors monté sur le podium avec un caddy dans lequel se trouvait une horloge, montrant qu’il avait capturé le temps, comme on capture un crustacé. Pourquoi pas. Mais quand un autre est venu brutalement interrompre mon voisin au milieu de son plaidoyer en faveur du Revenu Minimum Garanti, j’ai réagi, disant que je préférais de loin entendre ce qu’il avait à dire. Quelqu’un dans la salle m’a reproché avec véhémence mon « manque d’humour ». Je lui ai expliqué que je n’avais rien contre le fait que chacun exerce son métier – clowns y compris – mais qu’un accord avait été passé entre les organisateurs et moi pour que la table-ronde et le cirque aient lieu l’un à la suite de l’autre et non simultanément.
Lorsque les débats furent terminés et que les clowns restèrent seuls en scène, je tins à aller participer personnellement à leur petit spectacle et lorsque les lumières s’éteignirent une première fois, je retrouvai la clownesse en-dehors de la salle, où nous eûmes une longue conversation amicale qui élimina – je l’espère – tout malentendu.
Une question me reste : qu’est-ce qui peut bien passer par la tête d’un organisateur de festival du documentaire qui décide qu’on améliorera la qualité d’une table-ronde en la faisant interrompre par des clowns ? Je ne connais pas la réponse, mais je connais le moyen de la découvrir : l’année prochaine j’irai, pour voir, interrompre la projection de quelques documentaires par des remarques humoristiques. Attention : pas de la dérision ! uniquement – comme cette année-ci durant la table-ronde – de l’humour, et de la meilleure qualité !
344 réponses à “LE MESSAGE, AVEC OU SANS IMAGES”
« La question politique est une question esthétique, et réciproquement : la question esthétique est une question politique. J’emploie ici le terme « esthétique » dans son sens le plus vaste. Initialement, aisthésis signifie sensation, et la question esthétique est celle du sentir et de la sensibilité en général.
Je soutiens qu’il faut poser la question esthétique à nouveaux frais, et dans sa relation à la question politique, pour inviter le monde artistique à reprendre une compréhension politique de son rôle. L’abandon de la pensée politique par le monde de l’art est une catastrophe »
« De la misère symbolique », Bernard Stiegler / Le Monde 11 Oct 2003.
– Texte de Bernard Stiegler : http://1libertaire.free.fr/BStiegler01.html
– Site » La vie Manifeste » : « La question politique est une question esthétique et inversement. »
http://laviemanifeste.com/archives/3449
PS : » Artisans de la pensée et artisans de la respiration de la pensée par le rire ne doivent pas être mis en compétition dans un espace temps confiné ou chacun dispute à l’autre ,l’attention du public comme des catcheurs sur un ring. La pensée en est morcelée et le rire n’est plus qu’une pauvre grimace. L’art des uns blesse celui des autres, ils se desservent mutuellement La pensée ne respire plus, elle cesse d’exister. Cela n’est digne ni des uns, ni des autres, ni du public »
@ Saule : Amitié.
Les collectionneurs m’ont toujours intrigué.
J’ai pu être à peu près sûr qu’ils créaient de la valeur, en une sorte très précise…
Très précisément, cette valeur bizarrement créée, elle s’est dégonflée pour moi un jour important , quand l’impossibilité foncière de piquer au porte-monnaie de proches pour assouvir le désir de collection, il s’est naturellement effondré.
Cela remonte à la pré-adolescence, parmi son entourage….
Faut revoir « Allemagne-Année Zéro »!
Faut-il comprendre les vénérables investisseurs être des sales gosses, tandis qu’aux banquiers nous en remontrons, ces derniers bien désignés étant ceux qui ne collectionnent que des sous?